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  • 100 IDÉES À IMPORTER


    20/07/2013 à 11h47

    Déposer des chèques depuis son smartphone (et 9 idées à importer)

    Pascal Riché | Cofondateur Rue89

    Suite de notre inventaire des bonnes idées, bonnes pratiques, bonnes réformes repérées à l’étranger par nos riverains, avec les idées 61 à 70.

    Merci de nourrir cette rubrique en nous envoyant de courts textes décrivant des trucs que vous souhaiteriez importer en France (quelques paragraphes et, si nécessaire, une photo libre de droits ou une vidéo). Merci de préciser « 100ID » dans l’objet du message.

    61

    Déposer des chèques en envoyant une photo de son smartphone

     

    Sandrine, dans le Michigan (Etats-Unis), est très satisfaite de sa nouvelle application pour iPhone : elle permet de déposer et d’encaisser des chèques sans avoir à aller à la banque. Vous prenez le chèque en photo depuis cette application, et vous l’enregistrez....

    « Je pense que ce système marche très bien ici car les chèques sont encore très utilisés. La plupart des employés sont payés par chèque par exemple. »

    ENCAISSER UN CHÈQUE DEPUIS SON SMARTPHONE
    62

    Des vélos publics qui se retirent comme des chariots de supermarché

    Copenhague (Danemark)

     


    Les vélos publics de Copenhague (Alkarex/Wikimedia Commons/CC)

    A Copenhague, au Danemark, existent des vélos publics qui fonctionnent exactement comme des chariots de supermarchés. Une pièce de 20 couronnes (à peu près notre pièce de 2 euros) faisant office de jeton permet de les débloquer, et l’on peut s’en servir aussi longtemps qu’on le souhaite, gratuitement.

    Quand on a fini, on le ramène a une borne, on le rebranche, et on récupère les 20 couronnes.

    Seule contrainte : ne pas sortir d’une zone délimitée, correspondant au centre-ville de Copenhague. Si l’on est surpris en possession d’un vélo en dehors de la zone, on peut être poursuivi et sanctionné pour vol.

    Pour Visconte, qui nous a signalé cette « bonne idée », ce système est « bien plus pratique et économique que nos Vélib ».

    63

    Des taxis collectifs de nuit bon marché

    Belgique

     


    Le signe d’un arrêt Collecto (Stib)

    Elena apprécie Collecto, un service mis en place par la Stib, le réseau de transports publics bruxellois.

    De 23 heures à 6 heures du matin, vous pouvez réserver un taxi qui vous prend à un point de rendez-vous fixe (généralement un arrêt de tram, bus ou métro : il y en a 200) et vous dépose chez vous.

    La réservation doit obligatoirement se faire une demi-heure avant le départ.

    Conclusion d’Elena :

    « Cela coûte 5 euros par personne pour les abonnés Stib (il suffit de présenter sa carte) et 6 euros pour les autres, et il n’y a même pas besoin de s’inscrire. C’est pratique, pas cher et ça permet de rentrer en toute sécurité après une nuit un peu arrosée ou lorsque les transports de nuit deviennent très rares. »

    64

    La nuit, autoriser la descente du bus entre deux stations

    Toronto (Canada)

     

    Entre 22 heures et 6 heures du matin, à Toronto, les femmes peuvent demander au chauffeur du bus de les déposer entre deux arrêts, rapporte Raphaël. Cette pratique, qui ne gêne personne, leur permet d’éviter de marcher trop longtemps seules, la nuit, pour rejoindre leur domicile.

    65

    Créer une nouvelle banque coopérative (et non-spéculative)

    Belgique

     


    Sur la homepage de Newb (capture d’écran)

    Enzo trouve que les Français feraient bien de s’inspirer de la banque belge New B.

    Face aux déboires de la finance, plus de 40 000 citoyens belges se sont regroupés en coopérative pour créer cette nouvelle banque, « éthique, transparente, tournée exclusivement vers l’économie réelle » (et nationale), et « s’interdisant, par ses statuts, toute forme de spéculation ».

    Une banque dans laquelle chaque coopérateur dispose d’une et une seule voix, indépendamment du nombre de parts dont il dispose.

    66

    La nuit, mettre à l’orange clignotant les feux tricolores

    Washington (Etats-Unis), Dresde (Allemagne)

     

    Dans bien des villes américaines, la nuit, dans les quartiers résidentiels les plus calmes, tous les feux passent tous à l’orange clignotant, parfois au rouge clignotant. Les voitures sont invitées à traverser les carrefours prudemment (orange clignotant) ou à marquer l’arrêt (rouge clignotant). Cela représente un gain de temps précieux dans une ville vide.

    Parfois, le schéma est plus sophistiqué : les feux clignotent en orange sur les grandes avenues, mais clignotent en rouge sur les petites rues qui les croisent.

    A Dresde en Saxe, on retrouve la même idée, comme le rapporte Louizon :

    « La nuit et le dimanche, nombre de feux tricolores sont éteints ou bien réglés sur l’orange et beaucoup de lampadaires sont éteints dans les quartiers de la ville où la circulation est quasi inexistante à ces heures. Par exemple sur le campus universitaire (desservi par deux grosses voies de circulation où des feux sont nécessaires en semaine pour que les étudiants puissent traverser les quatre voies très fréquentées), ou dans les petites rues, ou dans les quartiers résidentiels.

    Les conducteurs circulent plus librement, ne s’arrêtent pas pour des piétons absents, la pollution lumineuse est réduite et on ne regrette aucun feu, car il suffit d’appliquer le code de la route à la place (priorité à droite, etc.).

    C’est très drôle de voir ces voies désertes avec les feux éteints, j’imagine que quelqu’un sorti du coma se trouvant là pourrait penser être dans une ville abandonnée ! »

    67

    Des comptes de campagne transparents

    Etats-Unis

     

    Dans les rapports entre argent et politique, tout n’est pas rose aux Etats-Unis. Mais au moins, l’effort de transparence est important, comme en témoigne Alexandre, à Austin.

    Tous les comptes de campagne sont rendus publics sur Internet au niveau fédéral et au niveau des Etats, jusqu’au paiement des places de parking. Les donations sont également publiques : vous pouvez savoir si tel ou tel Américain a donné de l’argent à tel ou tel candidat à la dernière présidentielle. J’ai tapéBuffett pour voir.


    Les dons de Warren Buffett

    Le Colorado propose même en ligne un outil (obligatoire) permettant de faire campagne dans l’Etat (du gouverneur au chef du district scolaire...) pour contrôler les dons et les dépenses.

    68

    Des points d’eau à côté de tous les terrains de sport

    Etats-Unis

     

    Idée proposée par Lucas, qui vit dans l’Ohio :

    « Je pratique le basket-ball. Aux Etats-Unis, sur tous les terrains de basket en plein air, il y a toujours un point d’eau à moins de 10 m du terrain. Résultat, on ne s’arrête pas de jouer parce qu’on a soif. »

    69

    Une carte de métro qui s’ajuste à vos besoins

    Londres (Grande-Bretagne)

     

    Plusieurs riveraines et riverains nous ont vanté l’Oyster card, vendue dans les transports en commun de Londres. Car c’est une carte intelligente, qui comprend vos besoins et vous laisse une grande liberté. On la recharge, et elle s’ajuste d’elle-même, selon ce qu’on a réellement consommé, au forfait le plus intéressant :

    • soit au trajet ;
    • soit à la journée ;
    • soit à la semaine.

    On charge sa carte de transport avec la somme de son choix. On la « bipe » à chaque trajet, à l’entrée et à la sortie du métro. Puis, à la fin de la journée ou de la semaine, le système se charge de choisir le forfait le plus économique pour le voyageur.

    Si le solde sur la carte est insuffisant, il passe en négatif : on paiera la différence au prochain rechargement. Pas besoin de s’engager un mois ou un an : la liberté est complète.

    Ce système permet de ne pas avoir à acheter des tickets en permanence. On passe aussi vite aux portes automatiques que les personnes qui ont un abonnement.

    Merci Charlotte, Julie, Florian...

    70

    Des distributeurs de lumières de vélo

    Pays-Bas

     

    Lizzie :

    « Aux Pays-Bas, le vélo étant davantage un style de vie qu’un simple moyen de transport, on trouve un peu partout dans la ville des distributeurs de lumières pour vélo.

    Pour 2 ou 3 euros, on obtient un kit de deux lumières (une pour l’arrière et une pour l’avant) facilement amovibles. Un bon moyen pour inciter les cyclistes à rouler avec des lumières pour plus de sécurité... et leur éviter une amende. »

  • Le cunnilingus ciment du couple ?

    Le cunnilingus ciment du couple ? Ne faisons pas de ce plaisir sexuel une stratégie

    Modifié le 10-07-2013 à 15h38

    9 réactions | 64221 lu

    Temps de lecture Temps de lecture : 4 minutes

    Avatar de David Courbet

    Par 
    Chroniqueur Sexo
     

    LE PLUS. Messieurs, vous êtes prévenus, le cunnilingus rendrait votre partenaire fidèle. C'est la conclusion à laquelle sont arrivés des chercheurs souhaitant à l'origine démontrer que cette pratique sexuelle avait des avantages en termes de rétention du sperme (et donc de reproduction). Pour David Courbet, transformer le cunni en tactique pour éviter de porter les cornes, c'est revenir au Moyen Âge.

    Édité par Daphnée Leportois  Auteur parrainé par Aude Baron

    J'aime le cunnilingus (Steve Rhodes/FLICKR/CC).

    Peut-on aimer le cunnilingus (et le proclamer martialement) sans en faire une stratégie conjugale ? (Steve Rhodes/FLICKR/CC).

     

    "Vous voulez un enfant ? Mettez-vous au cunnilingus !" Tel était en gros l’objet d’une récente étudepubliée dans la revue, a priori sérieuse, américaine en ligne "Evolutionary Psychology". L’intitulé exact fait de suite moins sexy : "Atteindre l’orgasme grâce à un cunnilingus, permet-il de mieux retenir le sperme ?"

     

    Sauf qu’après avoir interrogé 243 cobayes par questionnaire (pas d’ateliers pratiques, le sérieux en aurait pris un coup), ce fut la débandade. Après avoir obtenu son orgasme, madame ne semble pas mieux retenir les petites bêtes de monsieur en vue de créer un marmot.

     

    Afin d’éviter l’échec total, ils ont tout de même découvert un aspect exclusif de la relation sexuelle. En fait trois, mais tous découlent les uns des autres :

     

    1. L’orgasme féminin permettrait d’augmenter la satisfaction de vie de couple (ouah, ça commence bien !) ;

     

    2. Encouragerait à d’autres relations sexuelles (dingue) ;

     

    3. Et enfin atténuerait les risques de devenir cocu. Et là on dit chapeau !

     

    Ces génies ont donc conclu que la sexualité permettait une meilleure harmonie du couple. Et qui plus est, en sus (oui, elle est facile) de la pipe, le cunni serait aussi un ciment du couple !

     

    Merci messieurs : un petit pas pour l’homme, un grand pour la recherche. L’aspect positif à en retirer serait peut-être le fait qu’enfin on s’intéresse à l’orgasme féminin et non plus à la toute puissance masculine.

     

    Une sexualité stratégique ?


    On connaissait déjà plus ou moins différents moyens sexuels pour permettre d’accoucher, comme stimuler les tétons ou garder une sexualité durant sa grossesse permettant de stimuler et préparer l’utérus au travail, comme nous le rappelle cet extrait de la série "Friends" où il est conseillé à un couple séparé d’avoir des rapports sexuels pour que bébé arrive. Ou d’aider les petits spermatozoïdes à atteindre leur but en restant en position du poirier. Bonjour les cervicales…

     

    Sauf que la sexualité doit-elle toujours être reliée à la procréation ou à un aspect pratique ? Faire partie d’un schéma stratégique ?

     

    Procéder à des études comme celle menée par ces chercheurs américains revient à essayer de légitimer le sexe et d’en faire un produit. Dans une société où tout se vend, tout s’achète, tout se consomme, le sexe fait bande à part. Le plaisir, c’est sympa, mais ça ne rapporte pas de fric en soi (sauf dans quelques cas). En plus d’être une vision purement comptable et capitaliste de la sexualité, son arrière-pensée manque cruellement de modernité.

     

    Une vision moyenâgeuse

     

    N’ayant qu’un but procréatif, le sexe doit être vanille et rester dans un schéma classique hétérosexuel tout bien tout propre. L’homosexualité ? Une terrible déviance qui ne mène qu’à la zoophilie, à la polygamie incestueuse et bien sûr à la pédophilie, cela va de soi.

     

    Cela rappelle quelque peu le Moyen Âge. Toute sexualité subversive, orientation sexuelle ou position "contre-nature" durant cette période était condamnée par l’Église et débouchait à une véritable chasse aux sorcières. Se terminant bien souvent par le bûcher. Plus tard, les travaux du docteur Samuel Auguste Tissot vont démontrer les dangers de l’onanisme. Et, comme par hasard, la masturbation était manifestement plus grave chez la femme que chez l’homme. Selon ce brave homme, celle-ci courait le risque de devenir indécente et furieuse et nécessitait parfois un internement.

     

    Le "fléau" de l’onanisme


    Au XIXe, d’autres études vont rappeler aux femmes qui ne l’avaient pas encore remarqué la société patriarcale dans laquelle elles vivent. En atteste l’exemple de la nymphomanie, considérée par les médecins comme une maladie organique. Sous prétexte qu’une femme puisse désirer une activité sexuelle plus intense que la normale (reste à savoir en quoi consiste la norme), la société masculine, touchée dans sa virilité, considèrera cet état de fait comme une menace éventuelle à l’ordre moral et public. Qui se voit accusée de nymphomanie va au-devant de sévères sanctions : enfermement pour folie, mise au ban de la société, clitoridectomie ou autres actes mutilants.

     

    Afin de lutter contre le "fléau" que représente l’onanisme, l’excision du clitoris a notamment été préconisée par certains médecins, à l’instar du gynécologue-obstétricien anglais Isaac Baker Brown (fervent défenseur de la clitoridectomie dans les années 1850), jusqu’au XXe siècle. Mais également dans le but de traiter le lesbianisme, considéré par beaucoup comme une maladie psychique.

     

    Ces temps sombres ne sont pas entièrement révolus, certaines femmes en faisant encore les frais sous couvert de respect des traditions. Quant au terme nymphomanie, il s’est vu substituer par le terme hypersexualité, politiquement plus correct et moins stigmatisant à l’égard des femmes.  

     

    Le sexe oral comme véritable amour


    Alors avant de s’intéresser à savoir si le sperme ferait maigrir ou non (peut-être était-ce le seul argument qu’a trouvé ce chercheur pour recevoir une gâterie…) ou de pouvoir se vider les testicules en bonne conscience pour sauver sa prostate, pourquoi ne pas simplement mettre le plaisir en avant ? Pour soi comme pour son/sa/ses partenaire(s).

     

    Le plaisir n’est-il pas toujours plus grand quand il est partagé ? Et tout aussi intense et naturel, voire moins anxiogène, s’il est dénué de toute arrière pensée procréative ? Les préliminaires ou le sexe oral tout simple sont au contraire les véritables marques de l’amour et du désir qu’ont les partenaires l’un pour l’autre.

     

    En passant outre l’odeur et le goût, qui peuvent en freiner plus d’un, la fellation associée en retour au cunnilingus, en se livrant totalement à son partenaire, procure des moments de complicité et de partage parfois bien plus intenses que les rapports sexuels plus formatés. Et jusqu’à preuve du contraire, personne n’en est tombée enceinte !

  • Ciné : prostitution, fric, religion...

     Un « Grigris » contre les tabous

    Olivier De Bruyn | Journaliste

    A film by Rue89

    N’Djamena, de nos jours. Un jeune garçon, surnommé Grigris, est connu dans son quartier grâce à ses talents de danseur, d’autant plus étonnants qu’une de ses jambes est paralysée. Confronté à la maladie de son oncle, le jeune homme, 25 ans, doit impérativement trouver de l’argent pour aider sa famille.

    Malgré son handicap, il intègre une bande de trafiquants d’essence et entame une aventure périlleuse. Son seul soutien : Mimi, une fille de son âge qui, pour survivre, s’adonne à la prostitution dans les boîtes de nuit.

    BANDE-ANNONCE DE « GRIGRIS »

    Entre fable sociale et film de genre, « Grigris », présenté en mai en compétition au Festival de Cannes, témoigne d’une certaine réalité de l’Afrique d’aujourd’hui. Une sorte d’exception, tant le cinéma africain est devenu quasi invisible sur nos écrans.


    L’acteur Souleymane Deme au premier plan ; derrière lui à gauche, le réalisateur Mahamat-Saleh Haroun ; l’actrice Anaïs Monory à droite, au Festival de Cannes, le 22 mai 2013 (Lionel Cironneau/AP/SIPA)

     

    Derrière la caméra : Mahamat-Saleh Haroun, un metteur en scène qui, depuis trois décennies, vit entre Paris et le Tchad, et signe des films puissants sur son pays natal. Après « Un homme qui crie » en 2010 (prix du jury au Festival de Cannes), « Grigris » confirme l’importance du cinéaste, l’un des seuls à nous donner régulièrement des nouvelles de son continent. Interview.

    Rue89  : Comment est né « Grigris » ?

    Mahamat Saleh-Haroun : Je voulais raconter une histoire autour des jeunes trafiquants d’essence, très nombreux au Tchad. Ils vont chercher l’essence au Cameroun, puis l’acheminent en toute illégalité, de nuit, en traversant à la nage le fleuve qui sépare les deux pays. Une activité à haut risque, c’est le moins que l’on puisse dire. Mais ces jeunes sont si marginalisés et exclus qu’ils n’ont pas d’autre choix que la délinquance.

    Dans mes films précédents, j’avais surtout mis en scène des personnages martyrisés par le sort, tétanisés. Dans « Grigris », je m’intéresse au mouvement, à l’action, d’où le côté film de genre.

    Avez-vous enquêté avant d’écrire votre scénario ?

    Absolument. Et je n’avais pas besoin d’aller chercher très loin. Certains de ces jeunes vivent dans mon quartier et je les côtoyais tous les jours sans savoir ce qu’ils trafiquaient. Certains ont refusé de me parler, d’autres ont accepté de me montrer comment fonctionnait leur filière, jusqu’à faire de la figuration dans le film.

    Vos deux personnages principaux – Grigris, le danseur, et Mimi, la prostituée – sont-ils également inspirés par la réalité de N’Djamena ?

    Oui. Je connais des filles comme Mimi. Certaines vivent également dans mon quartier. Souvent, elles ont des enfants et leur désir de respectabilité implique qu’elles aient une double identité et une double apparence. Le jour, elles affichent une image respectable et, la nuit, se griment et se transforment pour gagner de quoi survivre. En fait, je m’inspire toujours de mon quartier, du quotidien, de ce que je connais le mieux, pour donner une représentation plus générale de mon pays et de l’Afrique.

    La combine et la prise de risques semblent les seuls moyens de s’en sortir pour vos personnages.

    L’illégalité et la fuite constituent en effet leurs seuls horizons. Cette jeunesse en déshérence, si nombreuse, est la grande oubliée du continent africain. Elle n’a pas d’autres choix que de prendre la mer pour s’exiler, au risque de mourir, ou de se débrouiller avec les moyens du bord, qui sont très faibles. Les perspectives d’avenir, pour cette génération, sont quasi inexistantes. Le cinéma se doit de rendre compte de cette réalité.

    Le cinéma africain est lui-même mal en point.

    Hélas, oui. En premier lieu, à cause d’une absence de volonté politique pour le soutenir. Car les moyens financiers existent, il suffit de voir ceux dont dispose le foot dans certains pays : Côte-d’Ivoire, Sénégal, Kenya, Cameroun... Le péché originel du cinéma, si j’ose dire, c’est qu’il porte en lui-même un regard potentiellement critique. Or, les pouvoirs en place ne tiennent pas à financer des images potentiellement critiques.

    Et au Tchad ?

    Par une forme de fierté nationale, le prix du jury que j’ai obtenu à Cannes en 2010 a fait un peu évoluer les choses. Une salle de cinéma existe désormais à N’Djamena. Il y a également plusieurs projets en cours : une école de cinéma, un fonds pour aider les jeunes artistes locaux. De telles actions concrètes permettront de progresser, pas à pas.

    « Grigris » va sortir dans cette salle ?

    Oui, le 10 juillet, comme en France. Jusqu’alors, mes films étaient invisibles dans mon pays et le public tchadien ne pouvait pas découvrir des films qui parlaient de lui. J’ai d’ailleurs tenu à ce que « Grigris » soit montré une fois dans cette salle, avant même sa présentation à Cannes.

    Votre film bouscule des tabous, la prostitution, mais aussi la religion. Dans une scène, Grigris jure et ment sur le Coran…

    Contrairement à ce que prétend la religion, la pauvreté n’a aucune vertu. Mes personnages sont poussés à enfreindre les lois et la morale car le contexte social et économique leur interdit toute autre solution. La seule question qui vaille pour eux, c’est celle de la survie. Pour les gens de peu, la religion n’apporte aucune réponse aux difficultés concrètes.

    « Grigris » est-il un film féministe ?

    Oui, absolument. Sur le continent africain, tous les pouvoirs, sont entre les mains des hommes. Ce sont eux, entre autres, qui ont fomenté les guerres… Pendant ce temps, les femmes enfantent et, en silence, font tenir debout l’ensemble de la société. Si les femmes devenaient solidaires, comme dans le film, alors une promesse de quelque chose serait possible en Afrique.

    Comment avez-vous produit « Grigris » ?

    Grâce à des fonds de différentes origines et nationalités : France 3 cinéma, Canal +, l’avance sur recettes, une contribution de l’union européenne. Pour la première fois, le Tchad est également intervenu dans la production d’un film. Le budget s’élève à 2 millions d’euros. Un chiffre modeste par rapport à la moyenne française, mais important pour l’Afrique. On pourrait d’ailleurs produire ce genre de films pour encore moins cher.

    De quelle façon ?

    En formant des chefs opérateurs, des ingénieurs du son, des monteurs… Si l’Afrique formait ses propres techniciens, nous n’aurions pas besoin de recourir à des étrangers et les coûts baisseraient mécaniquement. C’est pourquoi la perspective de cette école de cinéma au Tchad est porteuse d’espoir. Pour l’heure, nous sommes dans la même situation que dans les années 60 : sans Européens, pas de films en Afrique !

    Avez-vous un nouveau projet ?

    Oui, je suis en écriture d’un scénario. Ce film sera situé en France, loin de mon quartier du Tchad où je sais pourtant que je reviendrai un jour. Cela fait trois décennies que je vis en partie en France et j’ai des choses à raconter et à filmer sur ce pays qui fait désormais partie intégrante de ma mémoire et de ma personnalité.

  • PATRIMOINE GÉNÉTIQUE


    03/07/2013 à 18h55

    Ce que transmet une femme à un embryon qui n’est pas le sien

    Elsa Fayner | Journaliste Rue89


    Paillettes de sperme au Cecos de l’hôpital Cochin à Paris en 2010 (Audrey Cerdan/Rue89)

    On se pose la question pour les mères porteuses. Pour ces couples de lesbiennes, de plus en plus nombreux, où l’une fournit les ovocytes, et l’autre porte l’embryon. Mais cette question vertigineuse concerne bien plus de femmes, toutes celles, infertiles, qui ont recours à des dons d’ovocytes.

    Le comité consultatif national d’éthique a reporté à début 2014 le débat sur la PMA, la procréation médicalement assistée. Ça nous laisse le temps de répondre à cette question : quand une femme porte un embryon qui n’est pas le sien, que lui transmet-elle ? Elle sera mère, juridiquement, puisqu’en France, « c’est l’accouchement qui fait la mère », mais aussi l’adoption.

    Certes, celle qui donne vie à un enfant fabriqué avec les gamètes d’une autre ne transmet pas son patrimoine génétique. Mais durant ces mois, il se passe des échanges et des interactions qui seront déterminants.

    Anticorps, nutriments, tabac, médicaments

    Que la mère porte un embryon issu de ses ovules ou pas, pour l’embryon en question, durant la grossesse, cela ne fait pas de différence, constate Laurent Salomon, gynécologue obstétricien à l’hôpital Necker. Le placenta – un acteur clé dans notre sujet – fonctionne de la même manière.

    Concrètement, au niveau de ce placenta, les racines fœtales trempent dans le sang maternel. Les échanges y sont « très intenses ». Des substances peuvent passer : à travers les membranes pour les plus petites, par un « transporteur » naturel pour les autres, ou par les cellules de la barrière, voire au travers de la barrière si celle-ci est abîmée. Enfin, certaines substances entrent directement par le vagin et le col de l’utérus.

    Du côté des substances sympathiques qui peuvent passer, on recense :

    • les nutriments (sucres, etc.) qui apportent de l’énergie ;
    • l’oxygène ;
    • la plupart des anticorps, qui vont persister pendant plusieurs semaines après la naissance, le temps que l’enfant développe les siens pour se défendre en cas de maladie.

    Du côté des substances qui peuvent être nocives, on compte :

    • les toxiques, en particulier les drogues, l’alcool, le tabac ;
    • les substances infectieuses : certains virus, bactéries, parasites ;
    • certains produits utilisés pour les examens médicaux ;
    • certains médicaments (ce qui peut avoir un impact positif, d’ailleurs : pour soigner un fœtus malade, il est possible de donner un médicament à la mère... qui lui fera suivre).

    Bref, c’est un peu l’auberge espagnole. Ce qui fait dire à Laurent Salomon que la grossesse « est une greffe qui fonctionne parfaitement ». Le corps de la mère accepte des éléments étrangers (les antigènes du père, comme les ovocytes d’une autre femme). Il est « immunotolérant ». Ce qui est rare. « Et on ne sait toujours pas exactement comment l’expliquer. »

    Voix, langue, plaisirs et peurs

    La psychanalyste Geneviève Delaisi de Parseval écoute toutes les semaines des femmes qui ont reçu un don d’ovocytes :

    « Beaucoup disent : “Je sais bien qu’il n’aura pas les yeux de ma grand-mère”, mais elles sont persuadées qu’elles transmettent plus qu’on ne le croyait jusqu’à récemment pendant leur grossesse. Elles ont l’impression d’avoir dit une bêtise quand elles expriment ce ressenti. En réalité, même dans les colloques médicaux, la grossesse n’est plus considérée comme un simple portage. »

    Et l’auteure de « Familles à tout prix » (Seuil, 2008) de raconter une patiente musicienne qui a reçu un don d’ovocytes et joué du piano durant les neuf mois, dans l’espoir d’avoir une fille musicienne. Une lubie inutile ?

    Pas totalement, explique Laurent Salomon :

    « Le fœtus modèle et développe son cerveau, qui est le support de la plupart de ses réponses comportementales, avec l’environnement qu’il a durant la grossesse. »

    Il peut s’agir des voix, des sons, des langues qu’il entend dans le ventre. D’ailleurs, poursuit le médecin, dès sa naissance, l’enfant répond de manière différente à la langue entendue durant la grossesse. Il développe également une certaine sensibilité aux sons – agréables ou désagréables – qu’a entendus la femme qui l’a porté.

    Cela va même plus loin. Le fœtus sent si ces sons, odeurs, ou autres, déclenchent du plaisir – ou de la peur – chez la femme qui le porte (en fonction des endorphines qu’elle produit). Résultat : « Le fœtus se sentira lui-même bien – ou mal – dans ces mêmes situations. » Il fabriquera les mêmes associations, au moins durant un certain temps.

    Mais peut-on aller plus loin ? Au-delà du temps de la grossesse, le fœtus hérite-t-il d’un peu du patrimoine de la femme qui le porte ?

    Les gènes ne passent pas par le ventre

    Génétiquement, la mère porteuse « ne transmet rien, sauf scoop à venir », répond Stanislas Lyonnet, professeur de génétique à l’université Paris-Descartes :

    « Le patrimoine génétique de l’embryon est déterminé à la conception. Quand l’embryon s’implante dans l’utérus, il a tout ce qu’on peut imaginer de patrimoine génétique. Le contact avec l’utérus maternel n’a pas d’influence. »

    Pendant la grossesse, le génome connaît certes des transformations, mais celles-ci ne viennent pas des échanges « materno-fœtaux », comme on dit. Lors des divisions cellulaires, les erreurs de recopiage sont « archibanales », tout simplement.

    L’environnement n’a donc pas d’influence sur les gènes de l’embryon. En revanche, il peut en avoir sur la manière dont ceux-ci « s’expriment ».

    Pour se faire comprendre, Stanislas Lyonnet propose une comparaison : le génome est comme un clavier, toujours le même, mais il peut servir à jouer différentes partitions. En fonction de ce que mange la mère porteuse, de ce qu’elle boit, voire de ce qu’elle vit :

    « Le génome de l’enfant porté par la mère va être soumis à une situation nutritionnelle – en particulier, l’afflux d’acides aminés et de sucres – qui va faire s’exprimer certains gènes et en verrouiller d’autres. »

    Après la naissance, exposé à une nutrition différente, l’enfant va exprimer d’autres gènes en réponse, par exemple, à des apports caloriques plus riches en acides gras.

    Cette régulation génétique se déroule sans aucun changement de la séquence de l’ADN, mais avec des modifications « épigénétiques », réversibles, souvent temporaires.

    Des caractéristiques transmises sans l’ADN

    Jusqu’à récemment, les généticiens en restaient là. C’était même le dogme : il existe une frontière totalement étanche entre le patrimoine génétique et l’environnement maternel.

    Le dogme est pourtant en train de se fissurer, poursuit Stanislas Lyonnet. Une étude a notamment été menée aux Pays-Bas sur les descendants de femmes qui avaient subi des famines à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les résultats se sont révélés étonnants :

    • les filles de ces femmes ont connu des retards de développement fœtal – en taille et en poids –, ce qui correspond à ce que nous savions : leurs gènes se sont exprimés de cette manière en réaction à l’environnement ;
    • mais – et c’est là la découverte – leurs propres enfants ont subi eux aussi un retard de développement fœtal plus important que la moyenne.

    Comme si la modification de l’expression des gènes pouvait se transmettre, remarque Stanislas Lyonnet. « Sans s’inscrire dans le génome » : il existerait des caractères qui ne seraient pas « héritables par l’ADN » mais seraient transmissibles quand même. Lesquels ? Comment ? Les recherches ne font que commencer.

  • Médicaments vendus en ligne

    Médicaments vendus en ligne : les réponses à vos questions

    Sophie Caillat | Journaliste Rue89


    Une très très grosse pilule sur un clavier (Mark/Flickr/CC)

    Parce que beaucoup de fantasmes circulent au sujet de la vente de médicaments en ligne, on a décidé d’ouvrir cet espace afin de répondre aux questions que vous vous posez.

    D’abord, on lit partout « les médicaments s’achètent désormais sur Internet »alors que c’était déjà le cas depuis janvier... Ce 12 juillet correspond simplement à l’entrée en vigueur des « bonnes pratiques » applicables aux sites de vente en ligne.

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    Quels médicaments sont concernés ?

     

    On entend partout qu’il s’agit de « 4 000 médicaments ». En réalité ce sont tous les médicaments « délivrables » sans prescription médicale.

    Pour savoir lesquels sont concernés, vous pouvez par exemple utiliser le moteur de recherche des éditions Vidal, la référence des médecins. Si les antibiotiques sont naturellement exclus, les antirhumes sont les premiers concernés.

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    Qui vend en ligne ?

     

    Les e-pharmacies doivent être le prolongement d’officines tenues par des pharmaciens diplômés et autorisées par l’agence régionale de santé du territoire concerné.

    Le site doit obligatoirement contenir des informations permettant d’établir un lien avec l’officine à laquelle il est rattaché.

    A ce jour, seules 35 pharmacies sur 23 000 en France pratiquent la vente de médicaments en ligne. La liste est disponible sur le site de l’ordre des pharmaciens.

    L’Ordre indique que « les sites français autorisés de commerce en ligne de médicaments comportent a minima les informations suivantes :

    • la raison sociale de l’officine ;
    • les noms, prénoms et numéro RPPS du ou des pharmaciens responsables du site ;
    • l’adresse de l’officine, l’adresse électronique ;
    • le numéro de téléphone et de télécopie ;
    • le numéro de licence de la pharmacie ;
    • la dénomination sociale et les coordonnées de l’hébergeur du site internet ;
    • le nom et l’adresse de l’agence régionale de santé territorialement compétente. »
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    Bientôt, on pourra les acheter chez McDo ?

     

    Derrière la question provocatrice de Ruskoff qui nous demande si bientôt on pourra acheter ses médicaments chez McDo, KFC ou Starbucks, on comprend qu’il s’interroge sur la vente en libre service en grande surface.

    Afin de faire baisser les prix, l’Autorité de la concurrence était favorable à la vente de certains médicaments en grandes surfaces. Mais la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a coupé court à cette hypothèse, « pas envisagée par le gouvernement ».

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    Comment se passe la livraison ?

     

    Emilie Brouze, de Rue89, nous demande si on reçoit les médicaments chez nous car s’il faut aller les chercher, quelle utilité ?

    La livraison est bien prévue, les médicaments devront obligatoirement arriver au domicile afin de garantir la traçabilité.

    Sur les 35 sites de vente en ligne, certaines pharmacies n’ont pas encore mis en place la livraison ; d’autres proposent une livraison rapide et garantie par Colissimo et offrent même les frais de port à partir de 49 euros.

    L’arrêté prévoit qu’aucune quantité minimale de commande ne peut être imposée et que des quantités maximales sont recommandées afin de prévenir la surconsommation de médicaments.

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    Quel contrôle sur la provenance ?

     

    Sur Twitter, @Izenah56 nous demande si ces sites de vente seront contrôlés par un organisme permettant de garantir la provenance des médicaments.

    Le pharmacien, selon l’arrêté paru au Journal officiel doit assurer personnellement la délivrance, il vérifie que le médicament qu’il délivre est bien celui commandé. En cela, rien ne change par rapport à la situation actuelle.

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    A quand un service de livraison pour personnes seules ?

     

    La question posée par Racaillelarouge rejoint celle de Chapolin : « Quelle idée de commander des médicaments en ligne alors qu’il suffit d’aller à la pharmacie du coin pour les avoir bien plus rapidement ? »

    Quand on est en ville, en effet, on voit mal à quoi sert la commande en ligne. Quand on est loin d’une pharmacie, la vente en ligne facilite la vie. Mais quand on est isolé chez soi parce qu’on est malade, qu’en est-il ? Il existe en effet un service de livraison prévu par la loi, mais cela concerne les médicaments sur prescription.

    En autorisant la vente en ligne de médicaments, l’intention du gouvernement n’est pas de rendre les pharmacies plus accessibles mais de faire baisser les prix en augmentant la concurrence.

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    Et les médicaments pour animaux ?

     

    La nouvelle autorisation du commerce électronique de médicaments concerne uniquement les produits à usage humain.

    Mais la question posée par Akita est très pertinente car des médicaments vétérinaires sont déjà vendus en ligne. Y compris certains qui devraient être soumis à prescription, tels que le Mégépil, un contraceptif pour chatte,disponible sur Internet alors qu’il faudrait une ordonnance.