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Palestine

  • Palestine:Violences aux checkpoints : le sang de l'occupation

     

     

    Vijay Prashad, 5 janvier 2016

    La jeunesse palestinienne en particulier est fatiguée des promesses rompues et elle ne voit pas la moindre lumière au bout du tunnel ». Ban Ki-moon tient "l’entreprise coloniale" » pour responsable de la tension dans la région.


    La violence quotidienne au passage de Qalandiya, près de Ramallah -

    Le 17 décembre dernier, Nasir roulait de Naplouse vers Ramallah. Il pleuvait légèrement comme il approchait du checkpoint militaire de Huwwara. Devant lui roulait une autre voiture, à vitesse prudente. A 50 mètres devant cette voiture se trouvait un véhicule militaire israélien. La prudence est à l’ordre du jour à proximité de l’armée israélienne. Pas question de provoquer sa colère. Nasir a laissé une certaine distance entre les voitures. Celles-ci roulaient lentement.

    Le long de la route, dans l’herbe du bas-côté, un jeune garçon marchait dans la même direction que les voitures. Nasir remarqua que le garçon semblait marcher dans l’herbe pour éviter les flaques sur le trottoir. Le véhicule militaire a freiné. Les soldats avaient dû lancer un ordre. Le garçon a levé les mains en l’air. Nasir n’a pas entendu l’ordre mais il a vu le garçon obéir. La voiture devant lui a commencé à dépasser le véhicule militaire. Nasir a suivi. Il a vu le garçon les mains levées. La minute d’après, Nasir a vu dans son rétroviseur que le garçon était au sol. Tout cela s’est passé en une fraction de seconde. Le garçon était debout, les mains en l’air, et la minute suivante il gisait au sol, mort .

    Nasir a arrêté sa voiture, à l’instar du conducteur qui le précédait. Les deux hommes ont échangé leurs informations. Tous deux venaient d’assister à une exécution. Il n’ont pas eu l’occasion d’approcher les soldats israéliens, qui avaient déjà bouclé le périmètre.

    Peu de temps après, les médias officiels israéliens annonçaient que leurs soldats avaient tué Abdullah Hussein Nasasra, 15 ans, du village de Beit Furik. L’armée israélienne a dit que le garçon avait « chargé les forces armé d’un couteau ».

    Nasir dit ne pas avoir vu de couteau. Pas plus qu’il n’a vu Nasasra charger les soldats. Ils avaient leurs fusil pointés sur lui. Pourquoi aurait-il voulu les attaquer avec un couteau ?

    Au cours des dernières semaines, les soldats israéliens et les forces de sécurité ont fait usage de la force létale contre un certain nombre d’enfants, qu’ils ont accusés d’attaques au couteau. Les dirigeants politiques israéliens ont donné carte blanche à leurs soldats pour tuer toute personne en qui ils voyaient une menace. Le Ministre de la Sécurité intérieure, Gilad Arden, a dit : « Tout terroriste devrait savoir qu’il ne survivra pas à l’attaque qu’il est sur le point de commettre ». Yair Lapid, ancien ministre des Finances dans le gouvernement israélien, en a rajouté : « Vous devez tuer quiconque sort un couteau ou un tournevis ». Puisque l’armée israélienne est à la fois juge, bourreau et enquêtrice pour ces incidents, elle n’a plus à assumer la moindre responsabilité.

    Quand Kamal Badran Qabalan a conduit son ambulance sur les lieux, les Israéliens l’ont empêché d’avoir accès au corps. Il n’y aura pas d’enquête indépendante sur cette mort. La nauséabonde propagande israélienne – terroriste, couteau – a déjà couvert les faits. Nasir dit qu’il est prêt à témoigner contre les soldats israéliens. Mais comment faire ? Il n’y aura pas de procès. L’affaire sera close en douce. Nasir est un homme distingué. Son regard est bon et honnête. Sa voix est pleine de défi quand il me raconte l’histoire - « Je les ai vus tuer un garçon » me dit-il. Mais que peut faire Nasir ? Son langage non verbal traduit bien l’occupation. Il exprime l’inanité de la provocation.

    Aucune lumière au bout du tunnel

    La veille du jour où les soldats israéliens ont tué Nasasra, Samah Abdul-Mo’men (18 ans) roulait avec son père vers le même checkpoint. Les soldats israéliens ont ouvert le feu tout près de leur voiture, la blessant grièvement – elle est morte à l’hôpital le même jour. Pourquoi des soldats israéliens ont-ils ouvert le feu contre des voitures de civils ?


    L’humiliation brutale, subie dès l’enfance par les Palestiniens, au poste de contrôle de Qalandiya (arabagenda.blogspot)

    Ils prétendent avoir été attaqués par Alaa’ Khalil al-Hashshash (16 ans), du camp de réfugiés de Balata à Naplouse. Il aurait tenté de poignarder des soldats israéliens, qui ont répliqué. Al-Hashshash a-t-il réellement commis « une attaque au couteau » ? Si oui, pourquoi les soldats israéliens ont-ils tiré sur toutes le voitures à proximité, tuant Abdul-Mo’men ? Les Israéliens ne répondront sérieusement à aucune de ces questions. Elles sont perçues comme perturbantes.

    Le soir du vendredi 18 décembre, la route entre Ramallah et Jérusalem – 10 km seulement – est encombrée. Le checkpoint de Qalandia est virtuellement fermé. Nous décidons d’aller y faire un tour – 40 k de détour autour du « mur de séparation » illégal.

    Plus tard nous apprenons que deux jeunes gens ont tenté de foncer avec leurs voitures dans des véhicules militaires. C’est ce qu’on appelle des « attentats à la voiture-bélier »Les hommes ont inutilement conduit leur voitures vers le checkpoints lourdement armés. Les soldats israéliens ont aisément abattu Muhammed Abd al-Rahman Ayyad (21 ans). L’autre, un homme de 30 ans, est sorti de sa voiture en trébuchant et a été abattu par les militaires. Aucun ne posait une menace réelle pour le checkpoint. Leurs corps, plombés par la frustration – ne pouvaient rivaliser contre l’armée israélienne.

    Pourquoi ces hommes ont-ils tenté de foncer dans les checkpoints et pourquoi des enfants se servent-ils de couteaux pour attaquer les colons ? Plus précisément, pourquoi, alors que leurs attaques sont un échec et qu’il perdent la vie dans l’opération ? Les Israéliens ont tué plus de 130 Palestiniens depuis octobre. La plupart des tués étaient des mineurs.

    Certains de ces enfants ont effectivement attaqué des colons dans leur rues. Mais pas tous. Nasasra n’avait pas de couteau à la main, pas plus que Abdul-Mo’men. D’autres, si. Pourquoi ces quelques autres ont-ils attaqué des colons israéliens au couteau ?

    L’UNICEF note que c’est « l’existence et l’expansion des colonies israéliennes, y compris à Jérusalem Est, illégales en droit international, [qui] sont le moteur premier de menaces protectrices à l’encontre d’enfants ». Les enfants palestiniens sont exposés à la violence très tôt dans leur vie, ils y sont contraints par la perte de leurs terres et de leurs cultures familiales.

    Des existences vécues encagées par l’occupation produisent – c’est le Secrétaire général de l’ONU Ben Ki-moon qui le dit - « peur, humiliation, frustration et méfiance, alimentées par les blessures de décennies de conflit sanglant, et qui mettront beaucoup de temps à guérir. La jeunesse palestinienne en particulier est fatiguée des promesses rompues et elle ne voit pas la moindre lumière au bout du tunnel ». Le Sécrétaire général tient « l’entreprise coloniale » pour responsable de la tension dans la région.

    La frustration est l’ordre du jour. Je rencontre des jeunes gens d’un camp près de Ramallah. Ils ne voient aucune issue à leur colère. Chaque jour ils voient leur famille et leurs amis humiliés par l’occupant. Cette situation les accule au désespoir - « nous devons faire quelque chose », dit un jeune homme. Son regard est las. Il a l’air plus âgé qu’un adolescent. Il a perdu ses amis par la violence israélienne. « Nous marchions vers Qalandiya l’an dernier, dit-il. Ils nous ont tiré dessus. Mon ami est mort ». La violence coloniale est un poids sur son esprit. Autour de lui de jeunes enfants sont éliminés par les soldats israéliens. Son corps est contracté par l’anxiété et la peur.

     

  • Informer sur le Proche-Orient

    Informer sur le Proche-Orient : « La tentation est de se rabattre sur ce qui apparaît comme un "juste milieu" »

    lundi 19 octobre 2015

    Nous remettons à la « une », trois ans après sa première publication, une interview de Benjamin Barthe, journaliste au Monde, consacrée au traitement médiatique du conflit opposant Israël aux Palestiniens. Les événements de ces derniers jours, et leur couverture par les « grands médias », confirment en effet malheureusement la plupart des constats opérés dans cette interview (Acrimed, 19 octobre 2015).

    Avant de devenir journaliste au Monde (desk Proche-Orient), Benjamin Barthe a été pigiste à Ramallah durant neuf ans, de 2002 à 2011. Il a reçu le prix Albert Londres en 2008 pour ses reportages sur Gaza. Il est l’auteur de Ramallah Dream, voyage au cœur du mirage palestinien [1]. En octobre 2010, il participait à un « Jeudi d’Acrimed » dont la vidéo est visible ici-même. Pour le n° 3 de Médiacritique(s) (avril 2012), il nous a accordé l’entretien reproduit ci-dessous.



    Dans quelles conditions travaille-t-on lorsque l’on est journaliste dans les territoires palestiniens ?

    Le terrain est assez singulier. Il n’est pas accessible à tous les journalistes, il y a une forme de filtrage effectué par les autorités israéliennes, avec notamment la nécessaire obtention d’une carte de presse. Si l’on travaille pour une publication installée, renommée, cela s’obtient sans trop de problèmes. Dans le cas contraire, on ne l’obtient pas toujours. Or, par exemple, il est impossible de se rendre à Gaza sans carte de presse. Un second filtrage est effectué par Israël : c’est la censure militaire. Les journalistes à qui une carte est attribuée doivent s’engager à respecter la censure et à ne pas porter atteinte à la sécurité de l’État d’Israël. Enfin, la fragmentation géographique des territoires palestiniens est, de facto, un filtrage. Toutes les zones ne sont pas toujours accessibles. C’est ainsi que, lors des bombardements israéliens sur Gaza, à l’hiver 2008-2009, l’accès était fermé aux journalistes.

    Le territoire palestinien est exigu, ce qui crée en réalité des conditions favorables au travail de journaliste. On peut se rendre dans un lieu donné, mener son enquête, rentrer le soir même et rédiger son article. Par ailleurs, cela permet de faire des micro-enquêtes, des micro-reportages, de s’intéresser de manière précise au quotidien des Palestiniens. Parfois j’ai eu l’impression de faire des articles de type presse quotidienne régionale, à ceci près que le moindre de ces micro-reportages met toujours en jeu des questions politiques. Si l’on a envie de bien faire son travail, on peut donc proposer aux lecteurs des sujets originaux, variés, qui peuvent rendre palpable l’expérience quotidienne des Palestiniens et expliquer, beaucoup mieux que bien des sujets sur les épisodes diplomatiques tellement répétitifs et stériles, les enjeux de la situation.



    Comment manier les différentes sources sans être victime de la propagande ?

    On est confronté à une surabondance de sources, en réalité. Il y a bien sûr la presse, notamment la presse israélienne, avec des journalistes qui font très bien leur travail, par exemple au quotidien Haaretz. Il y a aussi une abondance d’interlocuteurs, notamment du côté palestinien, avec une réelle disponibilité. Ils veulent parler de leur situation, la faire connaître. Ils estiment que c’est dans leur intérêt de parler aux médias. Par exemple, il est relativement facile de parler, à Gaza, à un ministre du Hamas. Il y a aussi les sources venues de la société civile, avec les nombreuses ONG, tant du côté palestinien que du côté israélien, ou des différentes agences de l’ONU, très présentes sur le territoire. Ces ONG et ces agences produisent en permanence des rapports, des enquêtes, qui représentent une matière première considérable.

    L’important, c’est la gestion de ces sources. Le fait qu’il y ait surabondance peut en effet s’avérer être un piège. Premièrement, ces sources ne sont pas toutes désintéressées, elles peuvent avoir un agenda politique, il faut donc en être conscient et les utiliser à bon escient. Mais il y a un autre danger : on constate une tendance, dans la communauté des journalistes, à considérer que les sources israéliennes et les sources palestiniennes sont par définition partisanes. La tentation est donc de se rabattre sur ce qui apparaît comme un « juste milieu » : les sources venues de la communauté internationale, notamment les rapports de l’ONU, de la Banque mondiale, du FMI, etc. Ce n’est pas mauvais en soi, certains de ces rapports sont très fournis, très documentés, mais il y a tout de même des précautions à prendre. En effet, ces sources internationales restent prisonnières d’une certaine vision du conflit : la plupart d’entre elles sont arrivées dans la région après les accords d’Oslo et leur lecture du conflit est imprégnée de la logique et de la philosophie d’Oslo.

    Un exemple : la Banque mondiale a sorti récemment un rapport sur la corruption dans l’Autorité palestinienne. Les conclusions du rapport étaient en forme d’encouragement à la nouvelle administration palestinienne et au Premier ministre, Salam Fayyad, pour son travail de transparence, de modernisation des infrastructures et des institutions palestiniennes. Ce qui est assez choquant ici, c’est que la Banque mondiale est partie prenante de ce travail de réforme, elle verse de l’argent, elle participe aux programmes de développement qui sont mis en place dans les territoires palestiniens, etc. Que la Banque mondiale s’érige donc en arbitre des élégances palestiniennes, qu’elle distribue les bons et les mauvais points sur la corruption, est assez déplacé, puisque ce sont des politiques dans lesquelles elle est pleinement investie qu’elle prétend juger.

    J’ai rencontré la personne qui a enquêté et fait ce rapport, et il s’avère qu’elle a démissionné. En effet, son rapport a été en partie réécrit. C’est la philosophie même de son rapport qui a été remaniée, puisqu’elle y expliquait qu’en réalité c’était la structure même d’Oslo qui expliquait la corruption : un régime censé gérer une situation d’occupation pour le compte d’un occupant, en l’aidant par exemple à y faire la police, est par nature, par essence, générateur de corruption, qu’elle soit morale, politique ou économique. Or la Banque Mondiale n’a pas voulu que cette question soit abordée, y compris par sa principale enquêtrice : cela en dit long sur la situation, de plus en plus bancale, de plus en plus problématique, dans laquelle se trouvent ces organismes internationaux. Ils demeurent prisonniers d’un paradigme qui date de plus de vingt ans, et qui a largement failli. Il faut donc manier ces sources avec prudence.



    Certains insistent particulièrement sur le poids des mots, et notamment sur la portée symbolique de certains termes : mur/barrière, colonies/implantations, etc. Qu’en penses-tu ?

    Le débat au sujet de la clôture construite par Israël (faut-il parler d’un mur ? D’une barrière ? D’une clôture ?) est pour moi assez vain. Par endroit il s’agit effectivement d’une clôture électronique, avec des barbelés, à d’autres endroits il s’agit bien d’un mur... Donc le débat sur le nom m’intéresse assez peu. Pour moi, ce qui est essentiel, c’est de montrer les processus à l’œuvre derrière les mots, de montrer les réalités.

    On peut tout à fait dire qu’Israël construit un mur, mais si l’on oublie de préciser que ce mur est construit dans les territoires palestiniens et non pas entre Israël et la Cisjordanie, on passe à côté de la réalité de ce mur. Si on oublie de préciser, à propos des portes qui ont été aménagées par Israël dans le mur en expliquant qu’il ne s’agissait donc pas d’une annexion car les agriculteurs dont les champs se situent de l’autre côté du mur pourraient le franchir, qu’en réalité ces portes demeurent, la plupart du temps, fermées, ou que les soldats censés les ouvrir arrivent régulièrement en retard, de nouveau on rate la réalité.

    Il y a bien des mots qui sont piégés, mais pas nécessairement ceux auxquels on pense. Ainsi en va-t-il de Gilad Shalit, que presque tout le monde a présenté comme un « otage » qui avait été « kidnappé ». J’ai pour ma part toujours fait attention, dans mes écrits, à le qualifier de « prisonnier ». En effet, pour moi il ne fait aucun doute qu’il s’agissait bien d’un prisonnier de guerre, au même titre qu’un grand nombre de détenus palestiniens dans les prisons israéliennes. Et Gilad Shalit n’avait pas été « kidnappé », mais bien capturé par les Palestiniens.

    Autre exemple, et autre catégorie de mots piégée : c’est toute la nomenclature qui a été mise en place avec le processus d’Oslo. On parle de « processus de paix », de « président palestinien », de « gouvernement palestinien », etc. Le terme de « président » ne figurait pas, au départ, dans les accords d’Oslo. C’est la vanité de Yasser Arafat, et l’intelligence politique de Shimon Pérès, notamment, qui a vite compris l’intérêt qu’il avait à utiliser lui aussi ce terme. L’idée qu’il y avait un « président palestinien » entretenait l’idée qu’il se passait quelque chose d’historique : les Palestiniens avaient désormais un « président », ils n’étaient donc pas loin d’avoir un État... Or il est intéressant de questionner ce vocabulaire, cette sémantique : quels sont exactement les pouvoirs de ce « président » ? En réalité, il n’a pas beaucoup plus de pouvoir et d’attributions qu’un préfet (sécurité, aménagement du territoire), si ce n’est le fait qu’il peut se déplacer à l’étranger en prenant un avion prêté pour l’occasion par un pays arabe. Ses « pouvoirs » ne s’exercent en outre que sur une partie de la Cisjordanie, 40 % si l’on est optimiste, 18 % si l’on est plus réaliste et que l’on ne prend en compte que ce que l’on nomme les « zones autonomes » palestiniennes. Voilà qui donne une idée un peu plus précise de ce qu’est le « président » palestinien.

    Il en va de même avec le « processus de paix ». Ce terme entretient l’idée que même si parfois il y a des incidents, des moments un peu compliqués, globalement il y a un processus, une dynamique. Or force est de constater que, s’il y a peut-être eu au départ une dynamique, le « processus de paix » est très rapidement devenu un processus de chantage, un bras de fer totalement déséquilibré entre le géant israélien et le lilliputien palestinien, duquel Israël n’avait rien à craindre. C’est ainsi qu’avec sa mainmise sécuritaire Israël a pu continuer à acculer les Palestiniens, à construire les colonies, etc. Je pense donc que c’est bien du devoir des journalistes d’interroger ces termes, ces mots, et de leur redonner leur véritable sens.

    Je voudrais finir en ajoutant que ce qui est valable pour les mots est également valable dans un autre domaine : les cartes. Il existe en effet une production cartographique « classique » qui structure l’imaginaire, y compris l’imaginaire médiatique. On serait face à une région que l’on peut diviser en deux : à l’ouest, Israël, et à l’est, la Cisjordanie. Cela entretient l’idée que l’on va vers la création de deux États, qu’il suffirait d’opérer un découpage le long de la « ligne verte » qui séparerait Israël de la Cisjordanie. Or la réalité est bien différente : il y a, partout d’est en ouest, l’État d’Israël, avec en son sein quelques enclaves palestiniennes. Et lorsque l’on déplace le curseur géographique, comme lorsque l’on interroge le vocabulaire, on questionne vraiment les schémas classiques et les paradigmes sur la base desquels est trop souvent construite l’information.

     
  • Apartheid version 3G

    La politique israélienne est dictée par les colons, qui exigent d’aller plus loin dans l’annexion.

     

    Gwendal Evenou

    Aller en Palestine, c’est un peu comme essayer de tenir sur un fil de funambule : à tout moment on peut tomber dans le vide, un vide du droit et de la diplomatie internationale.

    Lors du début de la construction du « Mur de la honte » au Proche-Orient il y a une douzaine d’années, les militants des Droits de l’Homme s’indignèrent de son tracé, qui rognait très largement sur le territoire officiel de la Cisjordanie. De ce mur, aujourd’hui, plus personne ne veut : ni les pacifistes du monde entier, bien sûr, mais pas davantage les plus radicaux des Israéliens, en l’occurrence les juifs ultra-orthodoxes, qui voient dans cette « barrière de sécurité » un obstacle à leur soif de conquête, devant aboutir à l’avènement du Messie, après l’annexion totale de ce que eux appellent la Judée-Samarie.

    Mais sans doute est-ce également un stimulus pour les nouveaux colons, à qui l’on propose donc de venir s’installer sur des terres palestiniennes, privant souvent les communautés rurales palestiniennes de leur terre, et donc de leur gagne-pain. Qui voudrait donc s’installer ainsi en terre hostile, en voisinage direct avec leurs ennemis de soixante ans, à part les plus convaincus de la cause ultra-orthodoxe ? Si les gouvernements israéliens successifs ont encouragé ce processus de colonisation, en subventionnant largement les familles pour l’acquisition ou la location des habitations et par l’incitation fiscale – toute famille s’installant dans une colonie est exonérée d’impôt pendant dix ans -, ils ont sans doute été dépassés par la puissance que représente aujourd’hui cette communauté des colons. Les dernières élections l’ont montré : la politique israélienne est aujourd’hui en grande partie dictée par ces colons, qui exigent d’aller toujours plus loin dans l’annexion de ce qui reste de la Palestine.

    Ainsi donc vivent les Palestiniens, dans une insécurité permanente, avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête : celle de voir une grue débarquer un beau matin sur leurs terres, et de comprendre qu’ils n’en sont plus propriétaires. Ramallah, siège de l’Autorité Palestinienne, « capitale » de la Cisjordanie dans l’attente que Jérusalem la remplace, est une ville embouteillée, du lever du soleil à la nuit tombante. Des files interminables de voitures obstruent le centre-ville, à tel point qu’il est largement conseillé d’utiliser ses deux jambes, quand celles-ci n’ont pas été emportées par une attaque « préventive » de l’armée israélienne [1].

    Car à Ramallah, il est impossible de construire un périphérique : les colons ont décidé d’encercler littéralement une ville condamnée à ne pas s’étendre comme sa démographie devrait le laisser supposer.

    « On a cru qu’il était Arabe »

    En conséquence, cette colonisation empêche tout développement endogène d’un pays qui n’a plus, de fait, de continuité territoriale. Les Palestiniens sont dépendants d’Israël pour tout ce qui touche à la vie quotidienne, et la société israélienne le leur rend bien : il leur est interdit de travailler en Israël.

    Aussi décrit-on souvent la situation des Palestiniens comme celle de « citoyens de seconde zone ». L’expression est sans doute bien faible. Ils sont entassés dans un territoire qui s’amenuise progressivement, comme des Indiens dans leur réserve. Un panneau rouge est d’ailleurs là pour avertir que l’accès à ces « réserves » n’est pas autorisé aux Israéliens. Comprenez : aux Israéliens qui souhaiteraient aller à la rencontre de l’autre, pour comprendre, échanger et partager. Pour les autres - les colons - c’est une autre histoire : à la nuit tombée, ils raffolent de faire le coup de poing dans les zones palestiniennes, parfois escortés par la police israélienne, qui sait protéger sa population quand le besoin s’en fait sentir.

    En territoire israélien, le droit local ne s’applique plus aux Palestiniens. Ainsi, en réaction aux attaques à l’arme blanche, des lynchages publics se sont répétés. A Ber Sheva, une foule d’Israéliens a ainsi battu à mort un réfugié érythréen, avant de se rendre compte qu’il était « des leurs ». « On a cru qu’il était Arabe » se sont justifiés les agresseurs, sous-entendant ainsi que l’argument était suffisant pour les dédouaner de leur acte. Dans l’imaginaire israélien, les Arabes sont donc plus proches du chien qui a la rage que du « citoyen de seconde zone ».

    Aujourd’hui, les frontières de 1948 ou de 1967 sont donc devenues une vaste blague, quasiment une utopie perdue. Les territoires palestiniens en Cisjordanie ressemblent à un archipel, avec des ilots de « réserve indienne » sans lien entre eux. Tout autour, l’Etat Israélien est partout. Et avance. Jusqu’où ? Aujourd’hui, quand on se balade dans les campagnes de Cisjordanie, difficile de savoir si on est en territoire légitime ou colonisé. En fait, il n’y a que l’Apartheid numérique qui nous renseigne : la 3G étant réservée exclusivement aux Israéliens, il vous suffit de récupérer un smartphone pour détecter les zones où « ça capte ». Et quand ça capte, ça colonise...

    Les Palestiniens, usés par ces discriminations et ces provocations incessantes, et incrédules quant à une issue politique du conflit, sont un certain nombre à baisser les bras. Ils cherchent alors par tous les moyens à accéder à la citoyenneté israélienne, condition pour obtenir les aides sociales et accéder aux universités israéliennes. Jusqu’à simuler de fausses agressions pour... se faire prisonnier. Les prisons israéliennes accueillent ainsi de plus en plus de nouveaux étudiants arabes, qui choisissent, ultime paradoxe, le cachot pour espérer un avenir meilleur.

    Ceux qui optent encore pour la lutte le font bien souvent par désespoir et par dépit, comme l’ont montré les événements des dernières semaines, qui traduisent leur colère par des règlements de compte, tel un signe de vengeance impersonnel, souvent dirigé vers des inconnus innocents. La confiance envers les appareils politiques s’est estompée depuis la disparition de Yasser Arafat dans un Etat qui n’a pas renouvelé ses élites -et n’a pas pu le faire- depuis dix longues années.

    Deux peuples se font donc face, pendant que les partis politiques et les gouvernements apparaissent totalement dépassés. Vingt ans après la mort d’Yitzhak Rabin, il ne reste absolument rien de ce qui était alors perçu comme un premier pas dans le bon sens de l’Histoire. Depuis, les deux peuples luttent à reculons, se rapprochant inexorablement de l’abîme.

    Gwendal Evenou

    [1« Ils sont partis en courant loin de la maison, cherchant refuge pour se protéger des drones de la mort(...) Un drone les avait suivis, livrant des missiles les uns après les autres. (…) Le père de Wael, 27 ans, raconte qu’il s’est réveillé après que deux missiles les ont visés. Il a essayé de se tenir debout mais n’a pas réussi, il a regardé son corps et n’a pas retrouvé sa jambe droite ». Extrait des 7èmes concours de plaidoiries pour les droits de l’homme de Palestine, 18 octobre 2015 – plaidoirie à propos d’une famille de Gaza.

  • INTERVENTIONS DU RAID...

    enquête du 16/06/2015 par Vincent Coquaz

    INTERVENTIONS DU RAID AU DOMICILE DE MILITANTS PRO-PALESTINIENS

    Des agressions attribuées à Ulcan (qui "nie formellement")

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    Mots-clés : ChelliPierre StambulRaidUJFPUlcan

    Quatre personnalités "pro-palestiniennes" ou "anti-sionistes" ont été visées en quelques mois par une pratique appelée le "swatting" : les forces de l’ordre sont envoyées chez la victime par de faux appels téléphoniques. Pour Pierre Stambul, président de l’Union Juive Française pour la Paix, visé le 9 juin, le hacker franco-israélien Ulcan serait derrière ces attaques à distance. Ce dernier nie toute implication (mais est félicité pour l'agression par ses partisans sur Facebook).

    "Il était 3h50 du matin lorsque les policiers du RAID sont rentrés de force chez la voisine et ont pointé un pistolet sur elle en criant «on cherche M. Stambul». [...] J’ai immédiatement été plaqué au sol, tutoyé, insulté, menotté avec des menottes qui vous blessent les poignets et se resserrent dès que l’on bouge.raconte à Politis Pierre Stambul, co-président de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP), organisation juive pro-palestinienne et anti-sioniste. La cause de cette intervention particulièrement musclée du Raid, dans la nuit du 8 au 9 juin ? Un appel à la police d’une personne qui s’est faite passer pour Stambul et qui assurait avoir tué sa femme. Une pratique appelée "swatting" (de l'anglais SWAT, nom des forces d'élite américaines) dont le but était ici d’empêcher une réunion publique que Stambul devait animer le lendemain, pour le compte de l’UJFP et l’association BDS France (qui défend le boycott d’Israël), sur le thème : "Antisemitisme/antisionisme : à qui profite l’amalgame ?" (réunion à laquelle il a finalement pu participer).

    Pierre Stambul a décrit la scène et montré les dégâts causés par le Raid à France 3

    Contacté par @si, Stambul assure avoir été blessé lors de cette "visite" des forces d’élite de la Police nationale : "Je sors de chez le médecin. J’ai un énorme hématome au pied qui m’empêche quasiment de marcher". Menotté par les forces de l’ordre, qui pouvaient pourtant constater que sa femme était toujours en vie, il a par ailleurs passé sept heures en garde à vue, suspecté d'être à l’origine des fausses déclarations.

    Il rapproche son agression de celles subies par d’autres personnalités proches de sa mouvance, dont l’autre co-président de l’UJFP, Jean-Guy Greilsamer, chez qui la police est venue le 2 mars, ou une membre de l’UJFP, Pessi Borell, trois jours plus tard. Le lendemain du swatting de Stambul, c’était enfin au domicile parisien de l’ancien député et ex-président de l’association France-Palestine Solidarité Jean-Claude Lefort que la police frappait (mais ce dernier n’était alors pas chez lui).

    UN CANULAR "TRÈS BIEN MONTÉ"

    Tous attribuent plus ou moins directement la responsabilité au hacker franco-israélien ultra-sioniste Grégory Chelli, alias Ulcan, sans pouvoir le prouver pour le moment. "Ulcan ne gagnera pas, on part à Toulouse dans un petit moment", lançait ainsi, à chaud, Stambul. "J’ai alors pensé à un individu ultra-sioniste et très agressif qui depuis Israël a utilisé le même mode opératoire", estimait de son côté Greilsamer peu de temps après son agression.

    Mais Pierre Stambul va plus loin en évoquant une complicité des autorités israéliennes, dans le contexte d’une "hystérie israélienne autour du boycott". Pour arriver à cette conclusion, il s’appuie sur la technique employée par la personne à l’origine de l’attaque. Selon le préfet de Marseille, Laurent Nuñez, la police a procédé à un contre-appel, c’est-à-dire qu’ils ont rappelé le téléphone de Stambul pour s’assurer que le premier appel venait bien de lui. Or, c’est de nouveau la personne à l’origine de la fausse alerte qui a répondu. Une technique plus complexe que le simple fait d’appeler en camouflant son numéro avec celui d’une autre ligne ("spoofing"), et qui prouverait selon Stambul les moyens importants à la disposition d’Ulcan.

    Politis

    Le préfet y voit plutôt la marque de pirates doués. En rappelant, les policiers "sont retombés sur le même individu - une manipulation possible pour des personnes sachant manier certaines techniques de piratage -, qui leur a cette fois-ci dit que sa femme était morte [et qu'il attendait la police] avec un fusil. C'est ce contre-appel qui a déclenché l'opération du Raid", détaille ainsi le préfet, cité par Le Figaro.

    Cette technique du contre-appel, insuffisante dans le cas de Stambul, avait été imposée aux commissariats par le ministère de l’Intérieur suite à une précédente vague d’appels du même type en juillet 2014, qui visaient spécifiquement le journaliste de Rue89 Benoit Corre (sur notre plateau ici), dont le père est mort d’une crise cardiaque quelques jours après l’irruption des forces de l’ordre chez lui, mais aussi le fondateur de Rue89, Pierre Haski. Pour Laurent Nuñez, cité par Mediapart, Stambul a donc été victime d’un "canular très bien monté" par un "hacker" pour l'instant encore non identifié. Concernant l’implication d’Ulcan, Nuñez a admis que l’incident correspond à ce dont est capable Chelli, "autant sur le mode opératoire que sur les cibles".

    "ULCAN NIE FORMELLEMENT TOUT LIEN AVEC CETTE AFFAIRE"

    Pourtant, Ulcan lui-même a nié "formellement tout lien avec cette affaire", au site JSS News, proche de la droite israélienne. Il accuse même Stambul d'avoir prévenu lui-même la police pour faire sa promotion. Également évoqué comme suspect lors de "canulars" contre deux animateurs de l’émission Touche pas à mon poste (D8) et celui d’un Youtubeur jeu vidéo, Ulcan avait déjà indiqué ne pas en être le responsable. Il n’écartait toutefois pas que ces agressions émanent d’utilisateurs de son tchat "Viol vocal", estimant n’être pas responsable de ce qui s’y passait : "Je ne suis pas l'auteur des swattings de TPMP, ni de celui de BIBIX. Je ne suis pas non plus responsable des 6000 membres de vvocal.com, tout comme Bill Gates n'est pas responsable de tous les appels passés via Skype."

    Cependant, les "fans" d’Ulcan sur Facebook sont tous persuadés que Chelli est bien derrière le "swatting" de Pierre Stambul et rivalisent d’insultes contre le président de l’UJFP. Des félicitations auxquelles Ulcan ne répond à aucun moment pour nier son implication.


    > Cliquez sur l'image pour zoomer <

    Surtout, ce n’est pas la première fois qu’Ulcan nie être à l’origine d’attaques… même s’il revendiquait dans un premier temps les avoir commises. Ainsi, après plusieurs semaines où il narguait ouvertement les équipes de Rue89 et revendiquait le harcèlement, il avait finalement nié être à l'origine du hacking du site et avait minimisé la gravité des attaques contre les journalistes (@si vous en parlait ici). Un rétropédalage qui pourrait être lié aux nombreuses procédures en cours qui le visent toujours en France.

    Un évènement en particulier pourrait également expliquer son changement de comportement : selon Mediapart, "fin octobre 2014, le hacker a été arrêté et placé en garde à vue, puis relâché après 48 heures d'interrogatoire par les policiers d'Ashdod (Israël), où il réside. L’ambassade d’Israël en France venait de publier un communiquéassurant aux autorités françaises leur volonté de coopérer dans le traitement judiciaire de cette affaire, même si les deux pays ne disposent d'aucune convention d'extradition." Un élément déjà donné par France Info en octobre dernier.

    Problème : Le Point a depuis démenti cette information. "Contrairement à ce qui a pu être relayé il y a quelques mois, Ulcan n'a fait l'objet d'aucune mesure de garde à vue en Israël où il est réfugié", écrit ainsi l'hebdo. Surtout, contacté par @si, le journaliste de France Info à l’origine de l’information confesse que "s’il avait bien pu recoupé l’information à l’époque", il n’est plus forcément "certain" de ce qu’il avançait. "J’avais eu des informations par la suite sur le fait qu’il avait été arrêté, mais pour des motifs totalement différents des affaires françaises. Mais c’était invérifiable et je n’ai jamais eu le fin mot de cette histoire, donc je suis passé à autre chose."


    En plus des canulars téléphoniques, Ulcan a aussi revendiqué l’attaque de plusieurs sites, dont France Info, France Inter, Mediapart mais aussi @rrêt sur Images. L'occasion de revoir notre émission sur l'affaire Ulcan : "Benoit, ils ont dit que tu étais décédé !"

    MAJ 17 juin 2015 : Ajout du démenti du Point et de la réaction de journaliste de France Info sur une possible arrestation de Chelli à Ashdod.

     
  • Le nouveau cabinet ministériel israélien

    Le nouveau cabinet ministériel israélien : un aréopage de racistes et d’extrémistes !

    Les nouveaux ministres israéliens ont pris leurs fonctions dimanche passé et ce, après que le 34ème gouvernement du pays ait été assermenté tard dans la journée du jeudi. Il s’agit d’un gouvernement composé d’extrémistes qui soutiennent la colonisation et les crimes de guerre tout en exprimant ouvertement la propagande raciste et l’incitation à la haine contre les Palestiniens.

    Qui sont les membres du gouvernement Netanyahu et quelles sont leurs postions ?

    Benjamin Netanyahu, Premier Ministre, Ministre des Affaires Etrangères :

    « Jérusalem est indivisible et nous ne ferons jamais de concessions. Nous ne nous retirerons jamais de notre terre. »

    Naftali Bennett, Ministre de l’Education, de Jérusalem et des Affaires de la Diaspora :

    « Il n’y aura pas d’état Palestinien au sein de la petite terre d’Israël. »

    Moshe Ya’alon, Ministre de la Défense :

    « Les caractéristiques de la menace palestinienne sont comme celles du cancer. »

    Yuval Steinitz, Ministre de l’Infrastructure Nationale, de l’Energie et de l’Eau :

    « Nous n’accepterons pas la division de Jérusalem ni l’abandon de la Vallée du Jourdain. »

    Ayelet Shaked, Ministre de la Justice :

    « Lorsque votre mari le pilote est aux commandes de son avion, souhaiteriez-vous qu’il bombarde violemment les Arabes ? (Rires) « Oui. »

    Silvan Shalom, Ministre de l’Intérieur :

    « Nous sommes tous contre l’établissement d’un état Palestinien, cela ne fait aucun doute. »

    Moshe Kahlon, Ministre des Finances :

    « Nous devons annexer tous les territoires le jour même. » (Ce fut sa réponse lorsqu’on lui a demandé son avis sur ce que ferait Israël si les Palestiniens déclaraient unilatéralement leur indépendance).

    Uri Ariel, Ministre de l’Agriculture et du Développement Rural :

    « Je pense que dans cinq ans, il y aura 550 000 voire 600 000 Juifs en Judée- Samarie [la Cisjordanie], plutôt que les 400 000 actuels. »

    Zeev Elkin, Ministre de l’Immigration et de l’Absorption, et des Affaires Stratégiques :

    « Il n’y a pas de place pour un état Palestinien, ni sur les frontières temporaires ni dans n’importe quelle autre configuration. »

    Ofir Akunis, Ministre sans portefeuille :

    « Je m’oppose fermement à l’établissement d’un état Palestinien là où notre nation est née. »

    Danny Danon, Ministre de la Science, de la Technologie et de l’Espace :

    « Nous renforcerons les colonies en Judée-Samarie [la Cisjordanie]. »

    Yisrael Katz, Ministre des Transports, de la sécurité Routière et des Renseignements :

    « L’idée de l’établissement d’un état Palestinien est inacceptable et je m’y oppose en raison, principalement, de nos droits sur cette terre. »

    Gila Gamliel, Ministre de l’Egalité des Sexes, des Minorités et des Séniors :

    « Je refuse qu’on utilise le mot « occupation »…La Bande de Gaza peut se rattacher à l’Égypte et la Jordanie peut annexer quelques Palestiniens. Ils ont le choix entre plusieurs pays. »

    Benny Begin, Ministre sans portefeuille :

    « Si la solution à deux états est l’unique solution, alors il n’y a pas de solution. »

    Haim Katz, Ministre du Bien-Etre et des Services Sociaux :

    « La conclusion est on ne peut plus Claire : non à l’établissement d’un état Palestinien car ce sera un état terroriste à la périphérie de Tel Aviv. »

    Yariv Levin, Ministre du Tourisme et de la Sécurité Publique :

    « Une loi Israélienne claire prouvera que nous sommes un état Juif. »

    Miri Regev, Ministre de la Culture et des Sports, Ministre du Renseignement :

    « La Terre d’Israël appartient au peuple Juif, et pas seulement aux Juifs qui vivent sur cette terre. »

    Eli Ben-Dahan, vice-ministre de la Défense :

    « Les Palestiniens sont des animaux, pas des êtres humains. »

    À la lumière de toutes ces déclarations, les alliés d’Israël, notamment l’Union Européenne, continueront-ils d’agir comme si de rien n’était ?

    Pour rappel, lorsque l’extrême droite autrichienne représentée par le Parti de la Liberté était arrivé second lors des élections de 1999, les états membres de l’Union Européenne avaient imposé des sanctions diplomatiques qui ont été levées en septembre 2000. Actuellement, plus de 30 pays soumis à plusieurs types de sanctions ou de « mesures restrictives » sont inscrits sur la liste de l’Union Européenne.

    Récemment, d’anciens politiciens et diplomates Européens ont exhorté une réévaluation urgente de la politique européenne, en insistant sur le fait de tenir Israël pour responsable de la colonisation de la terre Palestinienne. En Avril, 16 ministres européens des Affaires étrangères ont appelé à une introduction généralisée à travers toute l’Union Européenne de directives concernant l’étiquetage correct et exact des produits en provenance des colonies israéliennes, ainsi que des « mesures plus sévères » supplémentaires. En janvier, 63 membres du Parlement européen ont exprimé leur soutien à la suspension de l’Accord d’Association entre l’UE et Israël.

    Les Palestiniens et plusieurs groupes de la société civile en Europe ont, pendant un certain temps, appelé à l’application de ces mesures et bien d’autres similaires. Aujourd’hui, la question qui se pose est la suivante : avec un gouvernement Israélien qui rejette effrontément les normes internationales et les droits des Palestiniens, va-t-on enfin assister à une prise de décision et d’action radicale et significative de la part de Bruxelles pour en finir avec sa complicité avec l’apartheid Israélien ?