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Azel Guen : Décryptage de l'Actu Autrement - Page 16

  • Pas de ça chez nous, ou la chasse aux pauvres

     

    11 juillet 2015 | Par poppie

     

    On sait à quel point les étrangers sont indésirables chez nous, pas pour tout le monde heureusement, il en est qui voient encore en eux des êtres humains en souffrance et aimeraient leur apporter un peu de réconfort. Mais un très mauvais climat fait de celui qui se retrouve en difficulté le "profiteur" qui viendrait piquer les biens des "bons Français", risquant en sus de venir égorger les fils et les compagnes de nos compatriotes. 

    Ceux qui ont une peur presque panique d'avoir à partager, ne sont pas nécessairement ceux qui ont peu de choses, on comprendrait mieux leur inquiétude, la rumeur se chargeant complaisamment de laisser croire que "tout leur est réservé". Les plus fermés à la générosité n'ont pas forcément des fins de mois difficiles, bien au contraire.

     Que le luxe le plus ostentatoire s'étale avec une complaisance obscène au moment où la misère rattrape jusqu'à un certain nombre de travailleurs, cela devrait montrer clairement que la richesse existe bel et bien et ne s'est pas évaporée à cause de cette sinistre "crise" dont on nous rebat les oreilles. Elle existe et est gardée jalousement par ceux-là même qui exigent des sacrifices des gens modestes. Elle existe mais n'est jamais redistribuée à ceux qui la produisent.

    Et les étrangers qui tentent leur chance en essayant de venir s'abriter chez nous? Quels magnifiques boucs émissaires, pour détourner le regard de nos concitoyens! Qu'ils veuillent souvent échapper à la guerre qui ravage leurs contrées, des guerres dont nous savons tous qu'elles font rentrer des devises dans notre pays et sauvent notre PIB (ce n'est pas vraiment glorieux!), ils ne seront pas tolérés pour autant sur "notre" sol. Qu'ils meurent sur place ou en cours de voyage, mais qu'ils ne viennent pas "nous envahir", on n'a pas besoin d'eux en ce moment, ça c'était bon pour autrefois.

    C'est le fonds de commerce d'un parti politique, dont on se défiait il y a quelques années, les Français ont même défilé pour lui faire échec. C'était du temps où le monde avait gardé un peu de mémoire. Il ne fait plus peur aujourd'hui, ses électeurs affichent clairement l'appartenance au groupe ou au moins leur sympathie. C'est une aubaine pour qui n'a pas les narines trop délicates de savoir contre qui se défouler et qui rejoindre pour chasser "les intrus".

    Qu'aux différents niveaux de l'autorité et jusqu'en haut de la pyramide, on ne condamne que très mollement le rejet des malheureux, et le discours de haine des meneurs, c'est une attitude qui révulse certains d'entre nous.

    Les détracteurs de la solidarité humaine ont une formule toute trouvée "Si vous les voulez, prenez-les chez vous". Eh bien non! Non seulement c'est l'état qui devrait tenir ce rôle -nos impôts sont toujours prélevés- mais ce qui est gravissime, c'est le retour du "délit de solidarité".

    Laissez crever les pauvres gens, la loi vous l'ordonne! 

    (pas de façon officielle, évidemment, bien au contraire, mais dans les faits, vous y serez encouragés)

     

     C'est un communiqué du GISTI que je voudrais relayer ici.

     

     La vaisselle et la solidarité ne font pas bon ménage

     

     La police aux frontières (PAF) traque obstinément ceux qui viennent en aide aux migrants. À Perpignan, cette sinistre besogne a été couronnée par des poursuites pénales engagées par le Procureur de la République à l’encontre d’un dangereux activiste des droits de l’homme.

    Des policiers zélés avaient identifié une cible de choix en la personne de Denis L. : il hébergeait à son domicile une famille arménienne (deux enfants de 3 et 6 ans et leurs parents), sous le coup d’une obligation de quitter le territoire et dans l’attente des résultats d’un ultime recours, non suspensif, contre le rejet de leur demande d’asile.

    Employant les grands moyens pour le confondre, ils lui ont infligé 36 heures de garde à vue et un long interrogatoire, à la suite de quoi le procureur l’a convoqué devant le tribunal correctionnel : il doit y comparaître le 15 juillet pour aide au séjour irrégulier, délit passible de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 30 000 euros.

    Pourtant l’article L 622-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers exclut toute poursuite lorsque l’hébergement d’un étranger en situation irrégulière « n’a donné lieu à aucune contrepartie et qu’il était destiné à assurer des conditions de vie dignes et décentes ». Autrement dit lorsque l’hébergeant agit par solidarité, comme Denis L. l’a fait à la demande du collectif des sans papiers de Perpignan, qui cherchait à reloger plusieurs familles de demandeurs d’asile en détresse.

    Qu’importe : cette exception n’a désarmé ni les policiers ni le procureur de la République. Pour trouver une contrepartie à l’hébergement qu’ils voulaient à tout prix incriminer, ils sont allés chercher au fond de l’évier et du bac à linge sale de Denis L. ! Le procès-verbal de convocation devant le tribunal lui reproche en effet d’avoir demandé à ceux qu’il accueillait « de participer aux tâches ménagères (cuisine, ménage, etc.) ».

    Un ferme avertissement est ainsi donné à tous ceux qui manifesteraient de dangereux penchants pour une solidarité qui reste encore et toujours suspecte aux autorités policières et judiciaires : si vous accueillez un étranger chez vous, n’allez quand même pas jusqu’à partager quoi que ce soit avec lui, surtout pas la vaisselle ou le ménage ! Et s’il vous parle, faites attention, l’agrément de sa conversation serait une contrepartie évidente au toit que vous lui prêtez. En somme, vous devez faire comme s’il n’était pas là. C’est toujours comme ça avec les étrangers : c’est mieux s’ils ne sont pas là…

    La prétendue dépénalisation du délit de solidarité proclamée en 2012 n’est que faux-semblant : il passe encore la porte des palais de justice. Une fois de plus, une fois de trop !

    10 juillet 2015


    Organisations signataires :

    • Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF)
    • Collectif Ivryen de vigilance contre le racisme (CIVCR)
    • Collectif Si les femmes comptaient
    • Ensemble !
    • Fédération des associations de solidarité avec tous-te-s les immigré-e-s (FASTI)
    • Groupe d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s (Gisti)
    • Itinérance Cherbourg
    • La Cimade
    • Ligue des droits de l’Homme (LDH)
    • Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP)
    • Parti communiste français (PCF)
    • Parti communiste des ouvriers de France PCOF
    • Parti de gauche (PG)
    • Réseau éducation sans frontière (RESF)
    • RESF 51
    • Réseau chrétien immigré (RCI)
    • Syndicat des avocats de France (SAF)
    • Syndicat de la magistrature
    • Union Syndicale Solidaires



    Envoi par le Groupe d'information et de soutien des immigré·e·s
    www.gisti.org
    Sur le Web :
    www.gisti.org/spip.php?article5000

     

     

    Le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s) milite pour l’égal accès aux droits et à la citoyenneté sans considération de nationalité et pour la liberté de circulation.

    L’association se veut un trait d’union entre les spécialistes du droit et les militant⋅e⋅s : la présence en son sein de nombreux juristes, praticien⋅ne⋅s ou universitaires, place le Gisti dans la position revendiquée de l’« expert militant », alliant de façon étroite l’analyse juridique et le travail de terrain, l’usage du droit comme arme ou levier et la participation au débat public.

    L’activité du Gisti se décline autour de plusieurs pôles : conseil juridique, formationpublications, actions en justice, à quoi s’ajoute le travail au sein de collectifs ou réseaux interassociatifs.

  • Sous les décombres, la plage

     
    Patrick Apel-Muller
    Mercredi, 12 Août, 2015
    L'Humanité

     

    L'éditorial de Patrick Apel-Muller. "Anne Hidalgo hypothèque « les valeurs de tolérance et d’échange » dont elle se réclame aujourd’hui dans une tribune du Monde"

    Une énorme explosion, un ballon délaissé et quatre enfants massacrés sur le sable. C’était il y a un an, le 16 juillet 2014, à Gaza. Ce crime de l’armée israélienne, enterré par la commission d’enquête mise en place par Benyamin Netanyahou, n’aura pas jeudi de place sur les bords de la Seine. Là réside l’erreur – plus ! la faute – de la mairie de la capitale. La vocation de Paris était de plaider la paix, d’unir les deux villes de cette région en flammes avec lesquelles elle entretient des relations, Tel-Aviv l’Israélienne et Ramallah la Palestinienne, dans un rendez-vous de dialogue, dans un pari culturel. En choisissant la seule capitale d’une puissance qui opprime un autre peuple, qui dresse un mur de la honte, spolie terres et maisons, en s’obstinant dans cette manifestation, Anne Hidalgo hypothèque « les valeurs de tolérance et d’échange » dont elle se réclame aujourd’hui dans une tribune du Monde.

    Des extrémistes y trouveront matière à propagande pour un État religieux qui accaparerait Jérusalem pour en faire sa capitale et poursuivre le chemin de sang ou de cendres de la colonisation. D’autres y chercheront le biais pour polluer l’exigence d’un État palestinien des remugles de leur antisémitisme. Une faute donc.

    Elle n’est pas la première. Laissons de côté Nicolas Sarkozy et ses déclarations d’amour au sinistre premier ministre israélien. Mais François Hollande, en proclamant sa compréhension pour le pilonnage de Gaza il y a un an, puis en faisant interdire les manifestations de solidarité avec les populations martyrisées, avait terni l’image de la France, le sens de son action depuis des décennies. Tel-Aviv est sans doute une ville joyeuse et noctambule. Jéricho, Bethléem et Jénine n’ont pas cette chance. Pas encore… Mais c’est ce vers quoi tous les efforts devraient tendre. Pour que les décombres n’encombrent plus les plages, quand bien même seraient-elles éphémères sur les bords de la Seine.

     
  • Myopie médiatique contre longue mémoire

     

     

    Toute information publiée dans les médias ne devrait-elle pas être accompagnée d’une notice explicative recensant les contre-indications et effets toxiques ?

    Par Guy Sorman.

    chien à lunettes credits alison elisabeth X (licence creative commons)

     

    Submergés par la marée incessante de l’actualité médiatisée, nous savons simultanément tout sur rien et rien sur tout : l’information remplace la connaissance. Bombardés par les médias traditionnels et nouveaux, il nous échappe que tout événement s’inscrit dans une histoire longue : une compréhension véritable de cette hyper-actualisation exigerait une connaissance du passé et des écoles de pensée qui l’éclairent. Apportons quelques illustrations à notre thèse.

    Considérez la dette grecque. La réduire à un affrontement entre les partisans de « l’austérité » et une « libération » du peuple grec ne permet pas de comprendre combien cette dette s’inscrit dans un cycle qui remonte à l’Indépendance de la Grèce moderne au début du XIXe siècle, puis au traitement de faveur dont elle a bénéficié, en 1919, après la Première guerre mondiale. Depuis que la Grèce a été ressuscitée dans les lieux où naquit la civilisation hellénistique, deux mille cinq cents ans plus tôt, les Grecs modernes ont bénéficié d’une indulgence exceptionnelle : les poètes comme les dirigeants européens ont projeté sur cette tribu ottomane toute leur nostalgie de l’Hellénisme. Cette tribu était « grecque » non pas parce qu’elle descendait des Hellènes, mais parce que de religion orthodoxe – byzantine donc plutôt que Hellène – dans un océan musulman. Ces néo-Grecs, reconnus par les Européens pour ce qu’ils n’étaient pas, ne se crurent jamais contraints de gérer leurs affaires de manière sobre : l’Europe payerait pour l’éternité, une pension alimentaire à la mère supposée de la civilisation occidentale et de la démocratie. L’entrée dans la zone Euro a encouragé les néo-Grecs à s’endetter plus encore, arc-boutés sur leur histoire longue réinventée, une caution définitive contre leurs créditeurs. Une institution à elle seule pourrait libérer la Grèce de sa dette : l’Eglise orthodoxe qui possède un tiers du territoire et ne paye aucun impôt. Mais nul, pas même un gouvernement gauchiste, n’ose incriminer cette Église, parce qu’elle fut et reste l’incarnation de la Grèce contemporaine à la manière dont l’Église catholique en Pologne n’a jamais cessé d’incarner la nation. À la lumière de cette histoire longue, la question est donc moins « La Grèce est-elle en Europe ? » que « L’Église orthodoxe est-elle en Europe ? ». N’appartient-elle pas plutôt à l’Orient ainsi qu’on le constate dans une autre zone de conflit : l’Ukraine ?

    L’Ukraine de l’Ouest, qui fut polonaise, reste catholique et pro-occidentale, tandis que l’Est ukrainien orthodoxe est pro-russe, en un  temps où, de nouveau, le nationalisme russe se confond avec l’Église orthodoxe ressuscitée. Vladimir Poutine semble mieux connaître cette Histoire que les Européens.

    Passons à la Libye, autre exemple : on ne comprend rien aux combats présents si l’on ne se rappelle pas que la Libye contemporaine fut l’assemblage de deux nations distinctes, le Cyrénaïque et le Tripolitaine, par le colonisateur italien. Lorsque les Français et les Britanniques décidèrent d’intervenir en Libye, cette intervention n’aurait eu de sens que pour restaurer les deux nations antérieures, pas pour replâtrer la Libye coloniale.

    La même myopie historique éclaire les conflits en Syrie, Irak et Kurdistan : on ne peut les interpréter que par référence au Traité de Sèvres qui, en 1920, répartit, entre les colonisateurs français et britanniques, des territoires anciennement ottomans. Les Ottomans respectaient la diversité tribale et religieuse : chacun dans l’Empire dépendait des autorités de la religion à laquelle il appartenait. Après le dépeçage, les colonisateurs et leurs successeurs ont imposé des États centraux à des peuples qui, jamais, ne se reconnurent en eux. Les diplomates Sykes et Picot, qui tracèrent en 1917 la ligne droite qui aujourd’hui encore sépare la Syrie et l’Irak, ignoraient tout de ces cultures locales et ne connaissaient pas la différence entre un Chiite et un Sunnite. En 2003, le Général David Petraeus qui, à la demande de George W. Bush, s’empara de Bassorah n’en savait pas plus : n’étaient-ils pas tous Irakiens ?

    Tout le continent africain est pareillement affecté par cette négation du passé : des États trop nombreux y consomment l’essentiel des richesses locales pour perpétuer des frontières coloniales absurdes qui ont balkanisé les cultures. N’allons pas chercher plus loin les causes de la pauvreté en Afrique : le nationalisme y a remplacé et asphyxié le développement.

    Cette ignorance de l’histoire longue génère la plupart des désordres contemporains : une ignorance qui conduit à la guerre, aux migrations de masse, à la pauvreté collective, mais profite aux intérêts acquis. Prospèrent les chefs d’État dont l’État ne coïncide avec aucune nation, les Seigneurs de la guerre, les contrebandiers et – plus modestement – les bureaucrates internationaux chargés de perpétuer cet ordre artificiel. Le Fonds monétaire international, autre exemple de la mémoire courte, emploie dix mille fonctionnaires pour remplir une mission qui n’existe plus. Créé en 1945 pour pallier les déséquilibres des balances des paiements qui avaient semé le désordre économique dans les années 1930, le FMI continue alors que ces déséquilibres ont disparu : saint est l’oubli des origines.

    Par lui-même, aucun événement d’actualité ne fait sens : toute information publiée dans les médias ne devrait-elle pas – dans un monde évidemment théorique – être accompagnée d’une notice explicative, à la manière dont les médicaments sont assortis d’une notice recensant les contre-indications et effets toxiques ? Bien des informations sont toxiques parce que l’opinion publique les engloutit en toute bonne foi et parce que les dirigeants ne sont pas nécessairement, ou ne souhaitent pas être, mieux informés que l’opinion qui les porte.

  • DÉNONCER LE SEXISME ORDINAIRE

    observatoire du 30/10/2014 par Robin Andraca

    DÉNONCER LE SEXISME ORDINAIRE ET ÊTRE ACCUSÉ DE RACISME

    Une vidéo virale américaine crée la polémique

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    Après Bruxelles, New York. Une jeune Américaine se filme en train de marcher dans les rues de Manhattan, pour montrer le harcèlement de rue dont elle est victime quotidiennement. Une jeune étudiante flamande avait eu la même démarche, en 2012, en se filmant dans un quartier populaire de Bruxelles. Alors que ces vidéos souhaitaient attirer l'attention sur le sexisme ordinaire, elles sont toutes les deux taxées de racisme. 

    Une polémique peut parfois en cacher une autre. Equipée de deux micros et d'une caméra (planquée dans un sac à dos quelques mètres devant), cette jeune femme souhaitait alerter l'opinion publique sur le harcèlement dont elle est victime quotidiennement. Et ça semble plutôt bien parti : postée sur Youtube par le collectif international Hollaback, qui lutte depuis des années contre le harcèlement de rue, la vidéo a déjà été vue plus de 15 millions de fois.

    Sauf que. Sur Youtube, la jeune femme a été menacée de viol par plusieurs utilisateurs et la vidéo a été critiquée dans les médias. Slate et Salon se sont par exemple tous les deux penchés sur le phénomène et arrivent à la même conclusion : ce n'est pas seulement l'histoire d'une jeune femme harcelée verbalement par des hommes dans les rues de New York. C'est aussi (et surtout ?) la journée d'une jeune femme blanche harcelée par des hommes qui sont pour la plupart noirs ou latinos. Difficile, en effet, au vu de la vidéo, de leur donner tort.

    FÉMINISTE OU RACISTE ?

    Et ce n'est certainement pas la justification de Rob Bliss, directeur de l'agence marketing partenaire de cette opération, sur le réseau social Reddit, qui éteindra la polémique. "Nous avons eu une bonne quantité de Blancs, mais pour plusieurs raisons, beaucoup de ce qu'ils ont dit l'était en passant, ou hors-caméra. Du coup, leurs scènes étaient beaucoup plus courtes, mais leur nombre était à peu près le même", argue Bliss avant de développer : "Il y a parfois une sirène qui coupe la scène ou quelqu'un qui passe devant la caméra, on a donc dû travailler avec ce qu'on avait. Les villes sont bruyantes et remplies de gens qui passent devant la caméra, vous savez ?". Réponse de Hanna Rosin, qui tient un blog féministe sur Slate : "C'est peut-être vrai mais si au final il faut supprimer tous les passages avec des personnes blanches, autant faire une autre prise". 

    Ce n'est d'ailleurs pas la première fois, Rosin le rappelle également, que l'agence de marketing est soupçonnée de racisme. Dans une vidéo destinée à promouvoir la ville de Grand Rapids, l'agence avait été vivement critiquée par un blogueur localpour avoir transformé une ville pauvre du Michigan, dont 20% de la population est noire, en un gigantesque spot de pub, où presque tous les acteurs sont blancs et semblent tout droit sortis des plus belles parades de Disney World (le lipdub de plus de 9 minutes, est visible ici pour les plus curieux).

    Autre forme de critique : le très populaire site humoristique Funny or Die a aussi détourné le message de la vidéo, en mettant un scène un homme blanc qui marche silencieusement dans les rues de New York.

    La vidéo féministe a (déjà) sa parodie

    LE PRÉCÉDENT BELGE

    En 2012, le film d'une étudiante flamande, qui prétendait aussi dénoncer le sexisme ordinaire, avait déjà suscité la critique en Belgique (et en France, où la vidéo avait été largement reprise par la plupart des médias). La raison ? Annessens, le quartier où a été tournée la vidéo, est principalement habité par la communauté maghrébine de Bruxelles. Interrogée à l'époque sur la chaîne de télévision flamande VRT, Sofie Peeters ne s'en cachait pas : "C'était l'une de mes grandes craintes, comment traiter cette thématique sans tourner un film raciste. Je ne le dis pas volontiers, mais il s'agit de personnes d'origine étrangère dans 95% des cas. Il y a une méconnaissance de nos cultures respectives. Les musulmans ont un comportement assez insistant par rapport à la sexualité : porter une jupe pour une femme, c'est déjà risqué". Taoufil Amzile, responsable de l'association belge des professionnels musulmans, avait réagi à ces propos, estimant que "ce type de comportement dépend de beaucoup trop de facteurs pour simplement le réduire à une question d'origine. Je ne pense pas qu'il existe de déterminisme à ce niveau-là".

    ET EN FRANCE ?

    "Envoyé Spécial" s'était penché, en mars 2013, sur ce sujet. La journaliste Virginie Vilar, équipée à son tour d'une caméra cachée et d'un micro, s'était rendue sur les Champs-Elysées à Paris et à Mantes-la-Jolie pour filmer les harceleurs de rue.

    Interrogée en fin d'émission sur le profil de ces harceleurs, la journaliste estimait qu'ils étaient "surtout jeunes et majoritairement d'origine étrangère". Tout en s'interrogeant à demi-mots : "Ces jeunes parlent-ils de sexualité à la maison ? Quelle image ont-ils de la femme ? Est ce que c'est un mot tabou, la sexualité ? En tout cas, moi ce que j'ai ressenti, c'est qu'il y avait beaucoup de frustration, comme si pour eux, le fait d'aborder une inconnue dans la rue n'était pas si facile, et s'ils le faisaient toujours de manière maladroite, voire agressive".

    L'occasion de relire notre papier : "Un film belge attire l'attention sur le harcèlement de rue".

     
  • BONS PLANS CONSOM'ACTION

     

     

    image: http://www.consoglobe.com/wp-content/uploads/2015/04/marques-amazon-dash-france-00-ban.jpg

    Amazon Dash : le cauchemar commercial bientôt en Europe ?

    Amazon Dash : le cauchemar commercial bientôt en Europe ?

     

    Sur votre lave vaisselle, un bouton de la marque de votre détergent préféré. Sur votre lave linge, un autre pour votre savon habituel. Idem pour votre paquet de couches, de papier toilette ou d’eau minérale. Magique : en pressant ce bouton, une commande automatique est envoyée par les airs, et Amazon vous livre les produits, sans que vous n’ayez rien eu d’autre à faire. Rêve du consommateur pressé ? Ou cauchemar du consumérisme sans limite ? C’est en tout cas le nouveau service que déploie actuellement la célèbre firme logistique sur Internet, pour l’instant aux États-Unis.

    « Amazon Dash » – consommer n’a jamais été aussi simple

    Amazon a conçu une véritable révolution commerciale. Les boutons Amazon Dash sont aujourd’hui disponibles d’après le site pour 271 produits. Apposez-le où vous souhaitez grâce à son adhésif repositionnable, et, via votre application sur smartphone, vous pouvez le configurer pour que chaque pression passe commande du produit que vous souhaitez. Chaque commande passée par le bouton est inscrite sur votre téléphone, où vous devez la confirmer dans la demi-heure.

    Précaution bienvenue : même si vous pressez plusieurs fois le bouton, celui-ci ne peut effectuer une nouvelle commande tant que la précédente n’a pas été approuvée et livrée. Votre nourrisson précoce ou votre chat prodige ne pourront donc pas commander frénétiquement – respectivement… – leurs bonbons ou leur litière préférés.

    image: http://www.consoglobe.com/wp-content/uploads/2015/04/marques-amazon-dash-principe.png

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    Une fois la première commande validée, vous pouvez choisir d’automatiser le fait que la pression équivaut à la commande automatisée.

     

    Donc, avec Dash – un trait, en français, comme dans courir d’un trait, mais aussi « foncez », voire « précipitez-vous » -, comme le met en avant Amazon, l’idée c’est de « simplement presser et ne jamais être à court ». Amazon promet de livrer les produits favoris de la maison, pour que « vous puissiez sauter le trajet de dernière minute au magasin. » Pressez le bouton et vous êtes livré dans les deux jours, indique la porte-parole de la société, Kinley Pearsall.

    Slogan existentiel proposé « ne laissez pas le fait d’être à court vous gâcher la journée »

    On imagine les armées de drones livrant sur votre pas de porte en urgence votre marque absolument indispensable de mousse à raser ou, comme dans la vidéo ci-dessous (en anglais) de capsule café, sans laquelle « votre journée serait gâchée »… Ouf, merci Amazon Dash !

     VIDEO – Amazon lance le bouton Dash

    Ce n’est pas une blague

    Le fait que l’annonce ait été faite aux États-Unis la veille du 1er avril aurait pu laisser penser à une blague. Non, l’offre est tout à fait sérieuse, même si elle est actuellement réservée aux « membres premium » d’Amazon, et sur invitation, et aux seuls habitants des États-Unis.

    Toutefois, la soif commerciale d’Amazon, qui se positionne comme fournisseur sur Internet d’une gamme de produits de plus en plus large, est bien connue. A n’en pas douter, ce premier test estannonciateur d’une stratégie de déploiement ambitieuse, tablant sur l’ubiquité des smartphones et des accès wifi (dont les boutons Dash ont besoin).

    Le shopping sous son plus mauvais jour

    La vidéo d’Amazon paraît presque être une anti-publicité pour son service. Même sans comprendre les paroles, si l’anglais n’est pas votre fort, ce qu’on y voit met en scène le consumérisme moderne sous son pire jour : une consommation de produits standardisés en masse, à un rythme frénétique, et selon un cycle semble-t-il infini, et qu’il ne faudrait surtout pas ralentir. A l’opposé direct de la consommation de produits locaux, aux emballages réduits, consommés et appréciés en quantité adéquate.

    image: http://www.consoglobe.com/wp-content/uploads/2015/04/marques-amazon-dash.jpg

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    Exemple de marques concernées par Amazon Dash aux Etats-Unis : de grandes marques de consommation courante, ce qui tend à limiter le consommateur à ces marques.

     

    Et on n’a pas tout vu. Amazon travaillerait d’après le Wall Street Journal avec des fabricants pour développer des machines – lave-linge, machine à expresso, distributeur de nourriture pour animal domestique, etc. – qui anticiperaient vos besoins en produits pertinents et les commanderaient pour vous avant même d’en venir à bout. Kinley Pearsall, la porte-parole, indique ainsi au journal que « le véritable but à long terme c’est que vous n’ayez jamais à vous préoccuper de presser ce bouton ».

    Tel Mickey dans cette scène de Fantasia où les balais se multiplient à l’infini et versent toujours plus d’eau dans le château que Mickey devait nettoyer, serons-nous aussi un jour noyés sous les hordes de coursiers, drones et autres camions de livraison d’Amazon nous livrant des montagnes de bouteilles de liquide vaisselle ou de rouleau d’essuie-tout ?


    En savoir plus sur http://www.consoglobe.com/amazon-dash-cg#IwXf3jZvMKqi00De.99