Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pas de ça chez nous, ou la chasse aux pauvres

 

11 juillet 2015 | Par poppie

 

On sait à quel point les étrangers sont indésirables chez nous, pas pour tout le monde heureusement, il en est qui voient encore en eux des êtres humains en souffrance et aimeraient leur apporter un peu de réconfort. Mais un très mauvais climat fait de celui qui se retrouve en difficulté le "profiteur" qui viendrait piquer les biens des "bons Français", risquant en sus de venir égorger les fils et les compagnes de nos compatriotes. 

Ceux qui ont une peur presque panique d'avoir à partager, ne sont pas nécessairement ceux qui ont peu de choses, on comprendrait mieux leur inquiétude, la rumeur se chargeant complaisamment de laisser croire que "tout leur est réservé". Les plus fermés à la générosité n'ont pas forcément des fins de mois difficiles, bien au contraire.

 Que le luxe le plus ostentatoire s'étale avec une complaisance obscène au moment où la misère rattrape jusqu'à un certain nombre de travailleurs, cela devrait montrer clairement que la richesse existe bel et bien et ne s'est pas évaporée à cause de cette sinistre "crise" dont on nous rebat les oreilles. Elle existe et est gardée jalousement par ceux-là même qui exigent des sacrifices des gens modestes. Elle existe mais n'est jamais redistribuée à ceux qui la produisent.

Et les étrangers qui tentent leur chance en essayant de venir s'abriter chez nous? Quels magnifiques boucs émissaires, pour détourner le regard de nos concitoyens! Qu'ils veuillent souvent échapper à la guerre qui ravage leurs contrées, des guerres dont nous savons tous qu'elles font rentrer des devises dans notre pays et sauvent notre PIB (ce n'est pas vraiment glorieux!), ils ne seront pas tolérés pour autant sur "notre" sol. Qu'ils meurent sur place ou en cours de voyage, mais qu'ils ne viennent pas "nous envahir", on n'a pas besoin d'eux en ce moment, ça c'était bon pour autrefois.

C'est le fonds de commerce d'un parti politique, dont on se défiait il y a quelques années, les Français ont même défilé pour lui faire échec. C'était du temps où le monde avait gardé un peu de mémoire. Il ne fait plus peur aujourd'hui, ses électeurs affichent clairement l'appartenance au groupe ou au moins leur sympathie. C'est une aubaine pour qui n'a pas les narines trop délicates de savoir contre qui se défouler et qui rejoindre pour chasser "les intrus".

Qu'aux différents niveaux de l'autorité et jusqu'en haut de la pyramide, on ne condamne que très mollement le rejet des malheureux, et le discours de haine des meneurs, c'est une attitude qui révulse certains d'entre nous.

Les détracteurs de la solidarité humaine ont une formule toute trouvée "Si vous les voulez, prenez-les chez vous". Eh bien non! Non seulement c'est l'état qui devrait tenir ce rôle -nos impôts sont toujours prélevés- mais ce qui est gravissime, c'est le retour du "délit de solidarité".

Laissez crever les pauvres gens, la loi vous l'ordonne! 

(pas de façon officielle, évidemment, bien au contraire, mais dans les faits, vous y serez encouragés)

 

 C'est un communiqué du GISTI que je voudrais relayer ici.

 

 La vaisselle et la solidarité ne font pas bon ménage

 

 La police aux frontières (PAF) traque obstinément ceux qui viennent en aide aux migrants. À Perpignan, cette sinistre besogne a été couronnée par des poursuites pénales engagées par le Procureur de la République à l’encontre d’un dangereux activiste des droits de l’homme.

Des policiers zélés avaient identifié une cible de choix en la personne de Denis L. : il hébergeait à son domicile une famille arménienne (deux enfants de 3 et 6 ans et leurs parents), sous le coup d’une obligation de quitter le territoire et dans l’attente des résultats d’un ultime recours, non suspensif, contre le rejet de leur demande d’asile.

Employant les grands moyens pour le confondre, ils lui ont infligé 36 heures de garde à vue et un long interrogatoire, à la suite de quoi le procureur l’a convoqué devant le tribunal correctionnel : il doit y comparaître le 15 juillet pour aide au séjour irrégulier, délit passible de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 30 000 euros.

Pourtant l’article L 622-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers exclut toute poursuite lorsque l’hébergement d’un étranger en situation irrégulière « n’a donné lieu à aucune contrepartie et qu’il était destiné à assurer des conditions de vie dignes et décentes ». Autrement dit lorsque l’hébergeant agit par solidarité, comme Denis L. l’a fait à la demande du collectif des sans papiers de Perpignan, qui cherchait à reloger plusieurs familles de demandeurs d’asile en détresse.

Qu’importe : cette exception n’a désarmé ni les policiers ni le procureur de la République. Pour trouver une contrepartie à l’hébergement qu’ils voulaient à tout prix incriminer, ils sont allés chercher au fond de l’évier et du bac à linge sale de Denis L. ! Le procès-verbal de convocation devant le tribunal lui reproche en effet d’avoir demandé à ceux qu’il accueillait « de participer aux tâches ménagères (cuisine, ménage, etc.) ».

Un ferme avertissement est ainsi donné à tous ceux qui manifesteraient de dangereux penchants pour une solidarité qui reste encore et toujours suspecte aux autorités policières et judiciaires : si vous accueillez un étranger chez vous, n’allez quand même pas jusqu’à partager quoi que ce soit avec lui, surtout pas la vaisselle ou le ménage ! Et s’il vous parle, faites attention, l’agrément de sa conversation serait une contrepartie évidente au toit que vous lui prêtez. En somme, vous devez faire comme s’il n’était pas là. C’est toujours comme ça avec les étrangers : c’est mieux s’ils ne sont pas là…

La prétendue dépénalisation du délit de solidarité proclamée en 2012 n’est que faux-semblant : il passe encore la porte des palais de justice. Une fois de plus, une fois de trop !

10 juillet 2015


Organisations signataires :

  • Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF)
  • Collectif Ivryen de vigilance contre le racisme (CIVCR)
  • Collectif Si les femmes comptaient
  • Ensemble !
  • Fédération des associations de solidarité avec tous-te-s les immigré-e-s (FASTI)
  • Groupe d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s (Gisti)
  • Itinérance Cherbourg
  • La Cimade
  • Ligue des droits de l’Homme (LDH)
  • Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP)
  • Parti communiste français (PCF)
  • Parti communiste des ouvriers de France PCOF
  • Parti de gauche (PG)
  • Réseau éducation sans frontière (RESF)
  • RESF 51
  • Réseau chrétien immigré (RCI)
  • Syndicat des avocats de France (SAF)
  • Syndicat de la magistrature
  • Union Syndicale Solidaires



Envoi par le Groupe d'information et de soutien des immigré·e·s
www.gisti.org
Sur le Web :
www.gisti.org/spip.php?article5000

 

 

Le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s) milite pour l’égal accès aux droits et à la citoyenneté sans considération de nationalité et pour la liberté de circulation.

L’association se veut un trait d’union entre les spécialistes du droit et les militant⋅e⋅s : la présence en son sein de nombreux juristes, praticien⋅ne⋅s ou universitaires, place le Gisti dans la position revendiquée de l’« expert militant », alliant de façon étroite l’analyse juridique et le travail de terrain, l’usage du droit comme arme ou levier et la participation au débat public.

L’activité du Gisti se décline autour de plusieurs pôles : conseil juridique, formationpublications, actions en justice, à quoi s’ajoute le travail au sein de collectifs ou réseaux interassociatifs.

Les commentaires sont fermés.