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Azel Guen : Décryptage de l'Actu Autrement - Page 99

  • La (R)Evolution Des Colibris

    Les 5 actions pour localiser l'économie 

    Achèter local, bio et responsable, changer de banque, créer une monnaie locale, faire une rando, organiser une carrot mob... Découvrez cinq actions pour, à votre échelle, localiser l'économie !

    Samedi 30 mars, les colibris se donnent rendez-vous partout en France pour une Rando festive et engagée dans les rues de leur ville !

    Près de chez vous, découvrez les acteurs de la vie locale, référencés par Colibris et Le Marché Citoyen.

    Producteurs bio, AMAP, écoles alternatives, éco-construction... Retrouvez sur cette carte ceux qui contribuent à une économie locale vivante !

    Changer de banque pour un établissement plus responsable, ou investir son argent dans des projets qui ont du sens, voici quelques pistes pour ne plus contribuer au casino financier.

    Une carrot mob, c’est l’inverse d’un boycott. C’est une méthode d’activisme qui accroît le pouvoir du consommateur en récompensant les commerces les plus socialement et écologiquement responsable.

    Vous avez peut-être déjà vu un client échanger avec un commerçant de drôles de billets. Il s'agissait certainement d'une monnaie locale, c'est-à-dire d'une monnaie non soutenue par un gouvernement national et destinée à être échangée dans une zone restreinte. Elles prennent de nombreuses formes, aussi bien matérielles que virtuelles.

     
  • Et… bon appétit bien sûr !

    viande

     

    Après le bœuf au cheval et le retour des farines animales dans l’alimentation des poissons d’élevage, voici qu’à partir d’aujourd’hui entre en vigueur l’autorisation européenne de l’acide lactique pour nettoyer les carcasses de bovins ! Dorénavant, l’Europe permet en effet l’utilisation d’acide lactique pour décontaminer les carcasses. Une opération destinée à réduire la contamination par certaines bactéries dangereuses, telles que la salmonelle. Et qui, nous dit-on, n’est pas censée se substituer aux pratiques d’hygiène en vigueur en matière d’abattage et de transformation de la viande, OUF ! Contrairement aux pratiques en vigueur outre-Atlantique où l’on « karcherise », pardon, désinfecte la viande en fin de process, en Europe c’est en principe la règle du niveau maximal de sécurité sanitaire à toutes les étapes qui prévaut en matière d’abattage et de transformation des viandes. Le risque avec une telle autorisation est donc que les pratiques se relâchent, puisque désormais la décontamination radicale à l’acide lactique est permise ! Bref, voilà une recette qui ne met pas vraiment l’eau à la bouche…

    Déjà 8 commentaires, publiez le vôtre !

    1. Le 26 février 2013 à 8:23, par Eau de Javel

      Donc, si je comprends bien, il est autorisé mais on ne change rien dans les pratiques qui elles n’utilisaient pas le produit maintenant autorisé… donc, il aurait pu être autoriser l’eau de Javel, chlorexidine… et dire que que la pratique ne changera pas… mais nous prendrait-on pour des imbéciles ?quelle dose nous sera mise dans nos assiettes… j’ai déjà retiré le poisson pour cause de trop de cochonneries… cela sera probablement bientôt le tour de la viande… dont les règles de conservation et de cuisson me semblaient satisfaisantes jusqu’à lors… devrons nous élever nos poules et nos lapins ?.. si c’est ça le progrès !!! et dire que nous sommes le Pays où la tradition culinaire est une estampille…

    2. Le 26 février 2013 à 9:55, par bob69

      et comme il devient de plus en plus problématique de se faire soigner , il ne nous restera plus qu’ à crever seul dans un coin comme un nuisible rat d’ égout . bon , j’ai déja divisé ma conso de viandes par deux je vais surement encore la diminuer ! de toutes façons , cela ne me fait plus envie ! que tous les européens fassent de même et la crise viendra aussi toucher les  » gros  » !

    3. Le 26 février 2013 à 22:14, par Chantal

      J’étais au courant de l’information, lisant Fabrice Nicolino (Planète sans visa), mais je ne savais pas que cette horreur était mise en route.
      Je doute même de mon boucher maintenant.
      TERRIBLE !!

    4. Le 27 février 2013 à 13:05, par Dane

      Tout ce qui va être pratiqué a été annoncé sur certains sites depuis pas mal de temps. J’ai donc devancé cette triste perspective en devenant à 85% végétarienne (je consomme de la viande blanche que 2 fois par semaine).

      Croyez moi, je suis gourmande et je me régale avec les petits plats sans viande que je découvre et prépare. De plus je fais des économies! Oui, d’accord, il faut accepter d’éplucher et de couper des légumes mais je me sens tellement mieux dans mon corps et dans ma tête.
      Enfin, en agissant ainsi je contribuerai le moins possible à la souffrance des animaux que j’aime.

    5. Le 2 mars 2013 à 22:46, par BONATOUT Henri

      Ma femme ne veut pas que j’élève des poules et des lapins, pourtant à Marolles j’ai de la place et je sais le faire. J’aidais mes parents dans cet élevage en 1945. Je saurais au moins ce que je mange… mais elle ne veut pas.Dommage!!
      Elle me dit que les déchets alimentaires de la maison ou les produits d’alimentation commerciaux que je leur donnerais sont déjà pleins de résidus de pesticides ou de métaux lourds. A quel « sain » se vouer?

    6. Le 4 mars 2013 à 12:31, par Eau de Javel

      Madame Bonatout est fataliste même si au fond, il y a du vrai… entre toutes les pollutions air terre eau… à quel « sain » confions nous notre santé…mais si personne ne bouge, une chose certaine… cela empirera, alors, je préfère m’autoriser à penser que si chacun élève sa poule ou son lapin, son mouton,sa chèvre ou sa vache… que les industriels de la mal bouffe auront tout intérêt à se convertir en fournisseurs et/ou producteurs aux qualités le plus proche de l’irréprochable. Mais pour toutes les Madames Bonatout, il y a bien un petit éleveur près de chez elles qui nourrit sa basse cour avec le grain qu’il produit en grande partie… et qui pratique ou la culture bio ou la culture raisonnée… ceux-ci ont probablement une carte à jouer et je leur souhaite réussite et prospérité.

    7. Le 4 mars 2013 à 14:55, par Chantal

      @ BONATOUT Henri,

      Faut pas toujours écouter les femmes, et c’est une femme qui vous le dit. :) Il y a de la vérité dans ce que dit votre épouse, mais êtes vous certain qu’elle n’a pas un peu peur que vous lui déléguiez le travail ? Elle peut aussi ne pas apprécier de vous voir saigner un animal, et ne pas savoir le nettoyer. Les départs en WE ou en vacances sont à prendre en considération aussi.
      Acheter quelques légumes de bases bio, ce sont surtout les produits « exotiques » qui sont les plus chers et vos petits lapins seront bien nourris.Idem pour les poules.
      A vous de jouer, les cartes sont entre vos mains.

    8. Le 4 mars 2013 à 15:00, par Chantal

      @ Eau de Javel,

      Je voudrais bien avoir une poule et des lapins, mais je ne crois pas que le syndic de la copropriété apprécierait. Je l’ai vu lorsque j’ai fait pousser mes tomates dans mon petit bout de pelouse……Dieu qu’elles étaient belles.Monsieur le syndic a préféré la pelouse de mes voisins, avec des arbustes en plastique dans des pots, et des fleurs en plastique sur la table.
      Heureusement, moi j’ai les abeilles, pas eux. :)

  • 25 ans après Tchernobyl

     

    centralenucleaire

     

    C’était il y a 25 ans, déjà. Au lendemain de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, le Professeur Pellerin, à l’époque directeur du Service central de protection contre les rayonnements ionisants, assurait aux Français que tous les aliments étaient comestibles sans restriction, faisant fi des taux maximaux recommandés par la Commission européenne. Le nuage, ironisait-on alors, se serait arrêté à nos frontières. Le bon sens aussi ! Dès 1987, l’UFC-Que Choisir passait la France au compteur Geiger, et révélait que des champignons alsaciens, ou encore des fromages de chèvre ardéchois, dépassaient allègrement les valeurs limites recommandées !

    Aujourd’hui, pendant que le drame de Fukushima replonge le Japon dans les heures les plus sombres de son histoire, par un étrange clin d’œil le Pr Pellerin est placé face à ses responsabilités devant la Chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris. La communication lénifiante des responsables de l’époque a-t-elle, oui ou non, eu des conséquences sanitaires en raison de la consommation de produits irradiés ? Des millions de consommateurs, rassurés à tort, réclament justice ! Malgré l’intervention de l’UFC-Que Choisir à la barre de la Cour, qui a insisté sur la nécessité de poursuivre l’enquête, le Parquet demande le non-lieu.La Cour se prononcera le 7 septembre…

    Ces événements appellent un vrai débat sur le nucléaire, impliquant experts et économistes, mais aussi tous les Français. Les risques, les avantages, les coûts et les conséquences pour les générations futures doivent être pesés et comparés aux énergies renouvelables. Hasard du calendrier, au même moment les Français encaissent une autre explosion, celle des prix de l’énergie. Essence, gaz, électricité… une véritable conspiration, fatale au porte-monnaie des ménages !C’est pourquoi j’appelle le gouvernement à organiser des Assises de l’Energie, pour garantir l’accès de tous à des énergies sûres, respectueuses de l’environnement, et au juste prix. L’occasion aussi de dissiper le brouillard qui règne autour de la question du nucléaire.

    Déjà 2 commentaires, publiez le vôtre !

    1. Le 10 mai 2011 à 11:42, par francissarthe

      Des assises de l’energie pourquoi pas , il en ressortira des propositions interessantes mais les appliquer c’est autre chose , entre l’oubli et le détournement d’idées nos responsables gouvernementaux sont passés maîtres en la matière et ce n’est pas nouveaux . La cause est connue les lobby sont trop influents (puissance économique ).
      côté positif si l’on associe la population cela peut entrainer des réflexions et des débats .Il ne faut pas confier la reflexion aux seules compétents auto- proclamés ou à ceux sélectionnés par les politiques .

    2. Le 13 juin 2011 à 13:51, par bruno catiau

      à Alain Bazot bonjour,

      au delà du « billet d’humeur » je trouve la position de l’UFC lénifiante.
      Le nucléaire « pas cher »(dixit un entretien dans les jours qui ont suivi la catastrophe de Kukushima le 11/03/2011 ,…)alors que la cour des comptes épinglent tous les ans la filière nucléaire en raison de la NON PRISE EN COMPTE du démantèlement des vieux réacteurs et la gestion des déchets dont les coûts sont estimés respectivement à 65 MILLIARDS € et 58 MILLIARDS € !!!
      Qui va payer si ce n’est un consommateur AVEUGLE et bercé par un monde politique à la merci d’un lobby puissant ?
      J’aurai souhaité plus d’objectivité
      un eco citoyen engagé à l’UFC QUE CHOISIR Lille

  • Quand la France laisse entrer

    Quand la France laisse entrer les produits des colonies et poursuit ceux qui s’y opposent 

    jeudi 18 mars 2010, par Alain Gresh

    La Cour de justice de l’Union européenne vient d’adopter une importante résolution dont témoigne un communiqué de presse du 25 février, « Des produits originaires de Cisjordanie ne peuvent bénéficier du régime douanier préférentiel de l’accord CE-Israël  ».

    « La Cour statue que les produits originaires de Cisjordanie ne relèvent pas du champ d’application territorial de l’accord CE-Israël et ne sauraient donc bénéficier du régime préférentiel instauré par celui-ci [1]. Il s’ensuit que les autorités douanières allemandes pouvaient refuser d’accorder le traitement préférentiel prévu par cet accord aux marchandises concernées au motif que celles-ci étaient originaires de Cisjordanie. »

    « La Cour rejette également l’hypothèse selon laquelle le bénéfice du régime préférentiel devrait être, en tout état de cause, octroyé aux producteurs israéliens installés en territoires occupés soit en vertu de l’accord CE-Israël soit sur la base de l’accord CE-OLP. La Cour relève que des marchandises certifiées par les autorités israéliennes comme étant originaires d’Israël peuvent bénéficier d’un traitement préférentiel uniquement en vertu de l’accord CE-Israël, pourvu qu’elles aient été fabriquées en Israël. »

    Pourtant, malgré cette résolution, qui confirme bien d’autres déclarations, le gouvernement français se garde bien de toute action contre ces importations illégales qui contribuent à l’extension des colonies que, par ailleurs, verbalement, il condamne.

    En revanche, il a décidé de poursuivre ceux qui, exaspérés par la paralysie de la communauté internationale, se battent pour que ces produits n’entrent pas en France et pour que les entreprises françaises désinvestissent – faisant par exemple campagne contre Veolia et Alstom qui construisent un tramway à Jérusalem.

    Depuis plusieurs semaines déjà, le gouvernement français a développé une campagne calomnieuse contre ceux qui s’élèvent contre l’entrée des produits des colonies, prétendant qu’ils veulent boycotter les produits casher ! Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la justice, a, quant à elle, effectué un virage à 180 degrés sur cette question (lire Dominique Vidal, « Boycott : la contre-offensive d’Israël et de ses amis  », La valise diplomatique, 22 février 2010).

    Avec le zèle des nouveaux convertis, elle a entériné le 12 février une « dépêche » de la direction des affaires criminelles et des grâces aux procureurs généraux près les cours d’appel. Ce texte confidentiel, que l’on trouvera ci-dessous (PDF), confirme d’abord ce que nous écrivions dans Le Monde diplomatique au mois de juin 2009, à savoir que « l’indépendance de la justice n’est plus un dogme  ».

    M. Jean-Marie Huet, directeur des affaires criminelles et des grâces, écrit :

    « Depuis le mois de mars 2009, plusieurs procédures faisant suite à des appels au boycott de produits israéliens (...ont été portées à la connaissance de la direction des affaires criminelles et des grâces. (...) Il apparaît impératif d’assurer de la part du ministère public une réponse cohérente et ferme à ces agissements. A cette fin et dans la perspective éventuelle d’un regroupement des procédures (...j’ai l’honneur de vous prier de bien vouloir porter à la connaissance de la direction des affaires criminelles et des grâces tous les faits de cette nature dont les parquets de votre ressort ont été saisis. »

    Et, au cas où les procureurs n’auraient pas compris leur devoir :

    « Si certaines procédures ont déjà fait l’objet de classements sans suite, vous prendrez soin d’exposer de manière détaillée les faits et de préciser les éléments d’analyse ayant conduit à cette décision. »

    Ce que l’on attend avec intérêt, c’est la dépêche du ministère demandant aux procureurs de poursuivre les magasins qui vendent des produits israéliens entrés illégalement dans le pays, car sans mention du fait qu’ils ont été fabriqués dans des territoires que la France continue de considérer comme occupés.

    Dépêche de la direction des affaires criminelles et des grâces
  • Eternel retour des bandes de jeunes

     Le décès d’un adolescent lors d’un affrontement entre jeunes dans la région parisienne, en mars 2011, a de nouveau projeté les bandes à la «une» de l’actualité. Mais, au-delà des discours alarmistes des experts et des martiales déclarations des ministres de l’intérieur, que sait-on de ces formes de sociabilité des milieux populaires et de leurs évolutions?

    par Gérard Mauger, mai 2011

    A l’occasion de tel ou tel fait divers, de la publication des dernières statistiques policières ou de l’annonce d’un nouveau projet de loi sécuritaire, le monde des bandes resurgit régulièrement dans les débats politiques et médiatiques. Aux figures des apaches de la Belle Epoque, des blousons noirs de la fin des années 1950, des loubards des années 1970 a succédé le spectre des «jeunes des cités».

    L’une des interprétations du phénomène relie immigration et délinquance. Martelée par le chroniqueur Eric Zemmour, elle a trouvé un relais récent dans le monde académique. Refusant, lui aussi, de «se laisser intimider par la pensée unique» et en quête d’une théorie originale de la délinquance, le sociologue Hugues Lagrange a cru bon de mettre en avant les «origines culturelles (1)». Mais, si l’exhibition d’une «nouvelle variable» peut, la conjoncture politique aidant, être au principe d’un «scoop sociologique», l’étude au coup par coup de variables isolées conduit à une impasse scientifique. En l’occurrence, s’il est vrai que les enfants d’immigrés sont surreprésentés en prison et, vraisemblablement, dans la population délinquante, c’est notamment parce qu’ils le sont aussi dans la population en échec scolaire et, de ce fait, dans celle des jeunes sans diplôme en quête d’un emploi et jugés inemployables (2) — tant à cause de leur absence de ressources scolaires que des discriminations qui les frappent. Quant à l’influence propre de «facteurs ethniques ou culturels» (domination masculine, polygamie, etc.), encore faudrait-il, après les avoir identifiés, montrer qu’ils ont un effet criminogène : les réserves sont permises...

    Mais comment rendre compte du monde des bandes? De la fin des années 1950 à celle des années 1970, il pouvait être décrit comme l’univers de sociabilité dans lequel les adolescents des classes populaires jouissaient des licences accordées à la jeunesse et faisaient l’apprentissage collectif des valeurs de virilité associées à l’usage de la force physique comme force de travail. La «culture de rue» apparaissait ainsi comme un préalable à la «culture d’atelier». Mais, au milieu des années 1970, le processus de consolidation de la condition salariale de l’après-guerre fait place à une insécurité sociale croissante et à la déstabilisation des modes de vie des classes populaires : désindustrialisation, chômage, précarisation et dégradation de l’emploi ouvrier, tertiarisation des emplois sans qualification, renforcement de la ségrégation sociale - spatiale, généralisation de l’enseignement scolaire, déclin de l’encadrement politique et consolidation de l’encadrement étatique. Au renforcement des politiques sécuritaires (3) fait écho l’institutionnalisation de la figure du stagiaire perpétuel; à l’effondrement du taux d’emploi des jeunes, l’apparition et le développement d’une économie «souterraine» dans certaines banlieues populaires.

    Affaiblissement du contrôle parental 

    Ces transformations ont affecté le monde des bandes. Leurs ressortissants se recrutent désormais pour l’essentiel dans des familles populaires plus ou moins désaffiliées de la société salariale et souvent d’origine immigrée. Ces dernières ne disposent ni des informations nécessaires sur le fonctionnement du système scolaire, ni des savoirs et savoir-faire culturels légitimes (à commencer par la langue). Leurs conditions d’existence sont une source permanente d’inquiétude et de tensions. La précarité les contraint à vivre en fonction des impératifs et des accidents biographiques : licenciements, accidents de travail, invalidités, décès, conflits conjugaux, problèmes judiciaires, etc. Confrontées à l’impossibilité matérielle d’exercer le contrôle et à l’incapacité culturelle d’assurer le suivi (en particulier scolaire) d’enfants «qui leur échappent» (dans tous les sens du terme), soumises aux injonctions contradictoires de travailleurs sociaux qui les invitent à moins de sévérité et plus de rigueur, ces familles se voient reprocher une attitude jugée démissionnaire. L’affaiblissement du contrôle familial renforce ainsi la socialisation par le groupe de pairs.

    La ségrégation sociale étant aussi spatiale, les enfants des fractions les plus démunies des classes populaires fréquentent les établissements où les taux de réussite au brevet et au baccalauréat sont particulièrement faibles et les taux de redoublement élevés. Les difficultés d’apprentissage des fondamentaux conduisent à l’hypoactivité scolaire et progressivement au retrait du jeu. Plus l’écart se creuse par rapport aux exigences de l’enseignement, plus la présence en classe apparaît inutilement humiliante, plus la probabilité de perturber l’activité pédagogique ou de fuir l’école s’accroît. La recherche de la protection du quartier et de la reconnaissance au sein du groupe de pairs renforce la porosité de la frontière entre les activités des bandes et l’espace scolaire.

    Les emplois précaires accessibles aux jeunes sans diplôme ou titulaires de diplômes dévalués sont souvent des emplois de services (commerce ou bureaux) ou des emplois ouvriers dispersés dans des univers beaucoup plus proches des prestataires de services que des ateliers de production. L’écart s’est creusé entre, d’un côté, la culture de rue et ses valeurs de virilité et, de l’autre, les dispositions requises dans le secteur tertiaire (coursiers, employés de maison, agents de nettoyage, travailleurs de la restauration, etc.) ou même dans l’usine moderne (disponibilité, initiative, flexibilité, etc.). «Le rêve macho-prolétarien de faire ses huit heures plus les heures supplémentaires tout au long de leur vie d’adulte dans un atelier syndiqué à un poste difficile [a] été remplacé par le cauchemar d’un travail de bureau subalterne, mal payé et très féminisé (4)», écrit l’anthropologue Philippe Bourgois.

    Au sein du monde des bandes, on peut désormais distinguer deux pôles. Le premier — celui des jeunes encore scolarisés — reste sous-tendu par la logique agonistique (5) des blousons noirs ou des loubards, valorisant le courage, l’esprit rebelle et un virilisme agressif. L’enjeu est la conquête, la défense et l’amélioration d’une position «en vue», individuelle et collective (celle du quartier), dans la hiérarchie des réputations locales. La tchatche, les vannes cherchent à tourner l’autre en dérision en sachant jusqu’où ne pas aller trop loin. Mais les réputations s’acquièrent surtout dans les bagarres au sein du groupe, avec les bandes des cités voisines ou encore avec la police. Ces «faits d’armes», les pointes de vitesse et les vols de véhicules constituent l’essentiel des pratiques délinquantes caractéristiques de ce pôle, sur fond de conduites banales susceptibles d’engendrer nuisances sonores, obstructions du passage dans les espaces collectifs ou dégradations du mobilier urbain.

    Faire un «truc de ouf »

    Le second pôle — celui des «grands» — se démarque du premier par l’investissement dans l’économie «souterraine» (l’épithète insistant sur son caractère occulte), «parallèle» (le flou du qualificatif suggérant l’existence d’un continuum avec l’économie formelle), «illégale» (l’adjectif emprunté au répertoire juridique en souligne le caractère délinquant), voire «des cités» (la notion évoquant la thématique de la survie). L’affiliation au monde des bandes a pour corollaire la dénégation de la relégation : le «bizness» permet l’appropriation des attributs de l’excellence juvénile qui permettent de sauver la face. La croyance en la possibilité de «monter sa propre affaire» — l’esprit du capitalisme souterrain... — s’avère d’ailleurs étonnamment partagée. L’échec des tentatives d’insertion professionnelle par des voies légales, les dispositions à l’égard du travail non qualifié, les tensions entre nécessité économique et contraintes symboliques, l’impératif de la «débrouille», la convergence entre une définition dominante de la réussite sociale et les trajectoires ascensionnelles des revendeurs de stupéfiants, le travail de légitimation morale du «bizness» peuvent faire alors de l’engagement dans l’économie illégale le choix le moins humiliant et le plus rassurant (6).

    Le «bizness» et, plus spécifiquement, le «deal» impliquent une plus grande porosité du monde des bandes par rapport au milieu de la délinquance professionnelle. Conformément à l’hypothèse des premiers sociologues de l’école de Chicago, l’existence d’un «pôle délinquant» dans le quartier en fait une aire de recrutement et de transmission des savoir-faire délinquants, ouvrant un espace d’«opportunités déviantes». La surenchère caractéristique de la logique agonistique peut rendre compte de la fuite en avant dans la hiérarchie indigène des délits (du vol à l’étalage au braquage). Faire un «truc de ouf» (de fou) est un gage de réputation et de prestige. Par ailleurs, la prison, en favorisant le développement de relations dans le monde de la délinquance professionnelle et la transmission des savoir-faire correspondants, reste un lieu privilégié de conversion du monde des bandes au «milieu».

    Quelles conséquences peut-on tirer de ce genre d’analyse? Le monde des bandes apparaît comme un effet des structures sociales. C’est pourquoi, instrument de compréhension de soi-même et des autres, la sociologie se voit régulièrement taxée d’«angélisme» par tous ceux qui, drapés dans la défense des victimes (semblant, d’ailleurs, ignorer que les premières victimes des bandes sont les jeunes des bandes eux-mêmes), entretiennent la «panique morale» et se font les hérauts de la «guerre contre le crime». D’où la fortune des théories de l’action rationnelle appliquées à la délinquance qui légitiment la philosophie pénale inspirée de la doctrine du libre-arbitre, le retour de la théorie du criminel-né (7), sinon des «explications» plus ou moins ouvertement racistes.

    A l’inverse, reprenant à son compte une longue tradition anarchiste et prise dans une surenchère de radicalité, une fraction de la gauche intellectuelle croit déceler dans le monde des bandes cette «fleur du prolétariat» que Mikhaïl Bakounine décrivait comme «cette grande masse, ces millions de non-civilisés, de déshérités, de misérables et d’analphabètes (...), cette grande canaille populaire qui, étant à peu près vierge de toute civilisation bourgeoise, porte en son sein, dans ses passions, dans ses instincts, dans ses aspirations, dans toutes les nécessités et les misères de sa position collective, tous les germes du socialisme de l’avenir et qui seule est assez puissante aujourd’hui pour inaugurer et pour faire triompher la révolution sociale (8)». C’est le même mirage qu’on retrouve chez ceux qui voient dans les «feux de joie» des émeutes de novembre 2005 «le baptême d’une décennie pleine de promesses» et s’émerveillent de «tout ce qu’il y a de purement politique dans cette négation absolue de la politique» (9).

    Ignorant ces enthousiasmes rhétoriques, les luttes politiques, médiatiques, scientifiques qui ont pour objet la définition de la représentation légitime de la délinquance juvénile et de ses causes ont un double enjeu. L’indignation morale régulièrement réactivée à l’égard du monde des bandes est utilisée à des fins partisanes pour capter les voix d’une partie de l’électorat du Front national. Mais elle permet surtout de renforcer le contrôle policier sur un sous-prolétariat qui ne cesse de s’étendre et d’exacerber les divisions au sein des univers populaires. A la traditionnelle vision du monde «nous»-«eux», elle substitue un nouveau clivage entre établis et marginaux. Les premiers appartiennent à des classes moyennes précarisées et à des classes populaires bloquées dans leur espoir d’ascension, alors que les autres sont des ouvriers et employés «précarisés» et des «sans». Comment alors reconstituer et unifier un mouvement populaire capable d’inclure ses marginaux? Comment réduire la fracture entre les deux groupes, alors que les porte-parole politiques et médiatiques des classes dominantes s’en prennent alternativement à des établis «privilégiés» et à des marginaux «diabolisés» et/ou «assistés»?

    Gérard Mauger

    Directeur de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Il a publié récemment La Sociologie de la délinquance juvénile, La Découverte, coll. «Repères», Paris, 2009.