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Azel Guen : Décryptage de l'Actu Autrement - Page 86

  • L’esclavage n’est pas que l’affaire des Noirs

    TRIBUNE
    10/05/2013 à 08h17

    Jean-Claude Tchicaya | ex-maire adjoint


    TRIBUNE

    En ce 10 mai, nous voulons rendre un hommage appuyé et une reconnaissance vibrante et républicaine aux femmes et hommes réduits en esclavage, célèbres, anonymes ou mis dans l’anonymat, qui ont participé à leur propre libération et à celle de la France et de la République.

    La loi du 10 mai 2001 reconnaît la traite négrière et l’esclavage comme crime contre l’humanité.

    Donc cela nous appelle à une reconnaissance politique du combat de ces héros de notre démocratie tous les 10 mai, reconnaître en ces femmes et hommes, esclaves ou non, tous leurs alliés actifs, célèbres ou non, blancs ou non, leur combat pour la liberté, pour la justice, pour la démocratie, pour l’égalité, pour le droit de vivre autrement que sous la férule et sous le joug des maîtres et des lois abjectes.

    Durant plusieurs siècles, la souffrance, l’injustice à son paroxysme étaient les compagnes obligées de ces êtres humains.


    Plan d’un navire de la traite négrière, musée d’histoire de Nantes (SALOM-GOMIS SEBASTIEN/SIPA)

    Durant ces longs siècles, les esclaves ont éprouvé toutes les stratégies possibles, peu ou prou, pour résister, combattre, lutter contre l’avilissement, les coups de fouet, les humiliations, l’exploitation économique et physique, les nombreux viols, de la traversée en galères aux plantations, l’exigence du reniement d’eux-mêmes, de leur nom, de leur identité, de leur religion, de leurs cultures.

    Leur couleur était associée politiquement et juridiquement à l’inégalité des dites « races », organisée par un code noir, le code juridique le plus terrifiant qu’ait engendrée notre République, écrit par Colbert à la demande de Louis XIV.

    Ce code noir a rencontré beaucoup d’assentiment mais il a aussi, par ces articles, innommables d’inhumanité, aux effets concrets directs sur la vie des esclaves, déclenché des oppositions et non des moindres, des révoltes, des solidarités mais malheureusement, c’est bien l’assentiment qui a rassemblé la majorité de nos concitoyens.

    Et pour ceux et celles qui veulent se cacher derrière le petit doigt de l’époque ou du contexte, nous ne devons pas oublier que chaque minute, chaque jour, chaque année, chaque décennie, chaque siècle, réduits en esclavage ou non, des gens s’y sont opposés au péril de leurs vies.

    Ombres et de lumières

    Oui, notre histoire est faite d’ombres et de lumières.

    Pour certaines de ces lumières apprises à l’école, qui ne sont pas sans positions contradictoires, ambivalentes voire coupables et qui ont même organisé et convoqué le regard des uns et des autres pour installer dans l’esprit des gens, le racisme et le relativisme culturel, le complexe d’infériorité et de supériorité et passaient de l’esprit à la loi, souvent de manière simultanée.

    Oui, notre Histoire est faite de moments glorieux et de moments ignominieux.

    Le dire est se référer aux faits. Il n’y a pas de coupables héréditaires ni de victimes héréditaires mais il y a un héritage que l’on doit tous s’approprier.

    Nous réitérons notre hommage et reconnaissance quelle que soit notre couleur, catégorie sociale, religion ou non, du combat pour la liberté de toutes ces femmes et hommes.

    Pas de concurrence de mémoires

    Ce n’est pas l’histoire des Noirs contre celle des Blancs ou seulement une histoire de Noirs, comme cela est malheureusement trop souvent perçu.

    Il s’agit bien de l’histoire de France, de l’Europe, du monde car il y a quatre siècles, ce trafic à bouleversé le monde sur le plan humain, politique, géographique, juridique, philosophique, scientifique et dans bien d’autres domaines.

    Et dans notre monde, le continent le plus meurtri fut l’Afrique et ceci n’est pas sans conséquences actuellement.

    Ce texte n’est ni victimaire, ni doloriste, ni en concurrence de mémoires car mettre des mémoires en concurrence serait d’une incroyable indécence. Il y a un devoir d’Histoire, de justice, de vérité afin d’en traquer les avatars, les effets et les conséquences dans notre société, sans anachronismes.

  • Quand frappent les drones

    Analyse. En janvier dernier, le Rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’Homme et le contre-terrorisme a annoncé l’ouverture d’une enquête sur l’utilisation de drones au regard du droit international. Au Yémen, ces avions sans pilote, utilisés depuis 2002 par les États-Unis pour éliminer de présumés combattants de la nébuleuse Al-Qaïda, suscitent la controverse.

    « Toutes les mesures prises au nom de la lutte antiterroriste ou d’autres défis sécuritaires au Yémen doivent avoir à cœur la protection des droits humains », selon Malcolm Smart, ancien directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Or, il semble que cette nécessaire vigilance au respect des droits fondamentaux ne soit pas suffisamment prise en compte par la politique américaine au Yémen. Le principal aspect de cette politique concerne la lutte antiterroriste contre la nébuleuse Al-Qaïda. Depuis la fusion des branches saoudiennes et yéménites en 2009, les États-Unis ont en effet placé le Yémen en tête de leurs priorités, allant jusqu’à décrire le pays comme la principale menace contre les intérêts américains dans le monde.

    Cette politique poursuivie par Barack Obama se fonde essentiellement sur l’utilisation des drones, des avions militaires sans pilote qui font partie de l’arsenal des robots militaires de plus en plus employés dans les zones de conflit.

    135149_Hermes_450_UAV_used_for_reconnais Drone Hermes 450 © Robin Ballantyne / Omega Research Foundation, sourced through Mispo.org

    La première frappe d’un drone au Yémen, en 2002, fut suivie d’un partenariat étroit entre l’administration américaine et le régime du président Saleh, pour lequel cette coopération signifiait d’importants gains financiers.

    Depuis le début du mandat d’Obama à la Maison Blanche, les frappes de drones ont augmenté de façon très significative en nombre et se sont étendues à plusieurs parties du territoire. Ces frappes sont dirigées à la fois par la CIA et le Pentagone, de façon indépendante, sans aucune transparence quant au processus, aux critères de décision, au mode d’établissement des « kill-list ». Tandis que les drones offrent des avantages indéniables pour les Américains, tels que l’absence de troupes au sol, une plus grande précision comparée aux frappes aériennes traditionnelles, et un effet psychologique sur les groupes armés, leur utilisation pose également de nombreuses questions d’ordre éthique, humanitaire et légal.

    Civils ou combattants

    « Selon le droit international, il y a une présomption de statut de civil et non de combattant. Il faut donc que celui qui intervient militairement prouve que vous participez directement aux hostilités, expliquait en mars dernier Stuart Casey Maslen, directeur de recherches à l’Académie de droit international humanitaire et de droits humains à Genève*, Pourtant, la politique des États-Unis en la matière semble plutôt fondée sur la présomption de militant s’agissant des cibles potentielles. Ils ont donc inversé la charge de la preuve et parlent de Signature Strikes, des assassinats fondés sur de seuls “indices concordants” ». Auparavant, toutes les frappes visaient en effet un individu clairement identifié et dont les activités avaient été prouvées par le renseignement. Désormais, une personne « au comportement suspect » est susceptible d’être visée, même en l’absence de toute autre information sur son identité ou ses activités. De plus, tout individu masculin tué lors une frappe sera compté comme un membre de groupe armé et non comme civil, sauf s’il est prouvé qu’il était innocent de façon posthume. Cette nouvelle politique de Signature strikes, à laquelle s’ajoute la qualité incertaine du renseignement au sol, accroît la probabilité d’erreur causant des victimes civiles.

    CarteYemen_0.jpg Carte du Yémen © Afdec

    Le traitement médiatique de l’utilisation des drones laisse également perplexe. Tandis que leurs effets controversés sont désormais discutés, les Unes des principaux médias internationaux continuent de « vanter » leurs mérites, parfois à tort. Ainsi, le 17 décembre 2009, la presse internationale faisait état de 34 membres supposés d’Al-Qaïda tués par une frappe américaine : il s’agissait en réalité de 41 civils, dont 14 femmes et 21 enfants. De façon similaire en septembre 2012, les « dix militants [de groupes armés. ndlr] tués par un drone » se révélaient être des civils.

    L’effet boomerang des drones

    Les questions de la souveraineté yéménite, des victimes civiles et de la légalité de telles actions contribuent à rendre contre-productive cette politique américaine, selon certains analystes. En effet, il semblerait que les cibles éliminées soient rapidement remplacées, tandis que le montant des destructions et des victimes servent d’outil de recrutement par Al-Qaïda auprès de la population. Alors que l’on estimait à quelques centaines le nombre des membres de groupes armés liés à Al-Qaïda en 2011, les derniers chiffres de la CIA font état de quelques milliers. Il serait inexact d’attribuer cette nette augmentation à la seule utilisation des drones, mais le sentiment antiaméricain et le nombre de manifestations contre la politique américaine sont autant d’indicateurs du potentiel recruteur d’une telle politique pour les groupes armés.

    Les supporters des drones rétorquent qu’il n’y a pas d’alternative efficace. Même si ce point est discutable, il existe néanmoins des éléments permettant de limiter l’aggravation de la situation : des excuses officielles et une compensation pour chaque erreur ayant entraîné la mort de civils – comme c’est le cas en Afghanistan ou au Pakistan – une plus grande transparence quant à l’ajout de personnes sur les kill-list, un suivi plus étroit de l’aide militaire apportée à un régime corrompu, etc. Sur le long terme, un soutien plus efficace et une aide directe à la population pourraient s’avérer le meilleur moyen de lutter contre l’extrémisme. Pour certains Yéménites, les millions dépensés pour l’organisation des élections présidentielles de 2012 ou pour le dialogue, tandis que près de la moitié de la population est en insécurité alimentaire, sont perçus comme un signe de l’indifférence de la communauté internationale quant à la gravité de la situation au Yémen.

    Benjamin Wiacek pour La Chronique

    *Courrier international, 12 mars 2013

    Consultez le sommaire complet de La Chronique du mois de mai sur http://www.amnesty.fr/Informez-vous/Les-actus/Le-magazine-La-Chronique-de-mai-est-sorti-8406

  • La reconquête citoyenne

     

    L’espoir fait vivre.

    La crise semble interminable et aucune lueur d’optimisme nous est donnée pour penser qu’elle finira sous peu. La crise est systémique, inhérente au système, et ne pourra donc finir que mal…Dans toute chose malheur est bon dit-on, alors peut-être que cette crise sera le détonateur pour retourner aux vraies valeurs humaines qui importent à chacun d’entre nous.

    La solidarité est la seule opposition à la volonté destructrice.

    La solidarité est la seule opposition à la volonté destructrice.

     

    La crise est inhumaine de par son ampleur dévastatrice et sa propension à frapper durement les plus pauvres, les plus modestes, les plus fragiles d’entre nous, alors qu’elle favorise outrancièrement les plus riches, les plus favorisés, les plus forts. Cette dichotomie sociétal nous mène droit à la rupture il ne peut en être autrement. Cette rupture peut avoir deux conséquences fortes et opposées: une guerre civile ou la construction d’une nouvelle société.

    La guerre civile et plus largement une guerre mondiale, est la volonté de l’oligarchie dominante pour sceller la rupture sociétal. Les riches ne veulent plus assumer les pauvres, les pauvres ne peuvent plus encaisser les riches. Pour « libérer de la place » dans la pyramide sociale rien de tel qu’une bonne guerre. On remplacera par des humains d’importation, du bétail que l’on fera venir par routes mal famées d’Afrique et qu’on embarquera sur des embarcations de fortune à qui l’on demandera de railler la terre promise européenne. Remplacer une classe de pauvres mais ayant une certaine éducation entrainant une conscience claire de leur situation sociale dans la société, par une classe d’esclaves immigrés ne parlant parfois même pas la langue du pays d’accueil n’est que bénéfice pour cette classe oligarchique capitaliste et mondialiste. Elle a beau jeu de dénoncer le racisme lorsque les pauvres s’opposent à l’arrivée de vague migratoire incessante qui de plus ne s’intègre nullement, ou très peu, à la culture française.
    Le réel bénéfice c’est que les esclaves sont prêts à tout pour survivre et savent se contenter de peu. Les pauvres, eux, aspirent au moins à la dignité et même cela on leur refuse. En mettant en contact les pauvres et les esclaves ont travaille à l’érosion du lien social indispensable dans une société humaine responsable. On crée les conditions du racisme nécessaire à la future guerre civile que l’on prépare avidement. Tout est fait pour diviser surtout que dans les mêmes temps on rogne sur les prestations sociales, on augmente la précarité salariale, on repousse le droit à la retraite, on fait des coupes dans le budget de la santé, on privatise les droits élémentaires,…bref on repousse toujours plus loin les conditions de l’indignité.

    Les pauvres, qui au départ ne l’étaient pas toujours, pourraient avoir la haine facile contre ces esclaves mais quel bénéfice pour eux au final si ce n’est la lente descente aux enfers? C’est là le piège que nous tend notre oligarchie notamment à travers la stigmatisation de l’Islam qui est la religion majoritaire de ces nouveaux arrivants. Attiser la tension religieuse amène le soufre satanique. Bien sûr nous avons une identité culturelle et religieuse à défendre, ce sont nos racines, mais la montée de l’Islam en France n’est que la conséquence d’une volonté oligarchique. Plus il y aura d’immigrés islamiques, plus il y aura de tensions, plus les pauvres se taperont dessus entre eux, et moins ils s’occuperont des affaires de l’état, de LEUR état, de LEUR société.

    Du moins c’est ce qu’ils espèrent! Mais l’âme humaine de ce XXI ème siècle reflète quand même le poids de l’histoire. On sait dans nos fibres culturelles ce que représente une révolte populaire avec les dégâts que cela entrainent. On sait que cela finit toujours mal pour celles et ceux qui en viennent aux armes car la force est TOUJOURS du côté de l’oligarchie car elle détient le nerf de la guerre: l’argent. Ce combat est donc perdu d’avance si on se décide à la suivre.
    En fait le vrai chemin, la voie à suivre, est celui de reconstruire du lien social, une société humaine, sans eux. Avec des valeurs humaines simples et compréhensibles par tous: le respect, la dignité, les droits et les devoirs, … Cette société-là n’est pas une utopie elle est à notre portée et elle a d’ailleurs déjà commencée. Il existe des embryons de micro-société, d’entraides solidaires et citoyennes, qui fait qu’on pourrait avoir la possibilité de désamorcer les plans de guerre de l’oligarchie faute de combattants.

    Si on décidait de faire tout l’inverse de ce à quoi elle nous prépare? Si au lieu de nous déchirer entre nous on commençait à créer des filières de solidarité ne serait-ce qu’avec notre entourage, notre famille, nos amis? Si on comprenait qu’il existe des choses beaucoup plus importantes que de se battre pour ce Dieu? Oui chacun de nous avons une théorie sur la vie, l’univers, Dieu mais cela vaut-il le coup de se battre pour l’imposer aux autres? C’est ce que l’on fait depuis que ce livre biblique a été écrit non? Et puis l’argent fait-il vraiment le bonheur? Est-ce l’essence même de la vie? Est-ce vraiment notre raison de vivre? Il y a matière en tout cas à  profiter de « l’opportunité » de cette crise systémique pour construire une société véritablement humaine.

    Un exemple de mouvement citoyen qui nait de la dureté des circonstances et qui commence à imposer sa « loi » aux autorités:

     

                    Mis en ligne par : News360x

    Publié par : le citoyen engagé

     
     
     
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    Samedi 3 novembre 2012

    sandy_fake.jpg<< L’ouragan Sandy, rapidement rebaptisé Frankenstorm, a atteint NewYork avant-hier, y causant aussitôt une dizaine de morts. Le quotidien Libération a alors publié un article titré Sandy touche terre et fait ses premières victimes, ce qui semble un peu léger, puisqu’avant d’atteindre la côte Est des États-Unis, le cyclone a tout de même fait au moins soixante-quinze morts dans les caraïbes, dont cinquante sur la seule île d’Haïti1. >>

    Article entier....

    Publié par : le dernier des blog

    via : les mots ont un sens

     
     
     
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    Mercredi 19 septembre 2012

    Un monde sans oiseaux serait bien triste, je vous invite

    à aider ceux qui nous font l'honneur de rester pour nous

    accompagner cet hiver à se nourrir et à s'abriter !

    Merci pour eux.

     
     
     
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    Mardi 28 août 2012

     

                 
    mis en ligne par : joetke
    publié par : Vérités et mensonges
     
     
     
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    Samedi 4 août 2012

    Sinkholes.jpg<< Je remarque, particulièrement dans les derniers jours, et depuis les deux dernières années, un nombre incroyable d'affaissements (sinkholes) de la route ou de partie de sol dans différentes régions du globe. À presque tous les jours, les médias rapportent ce type de phénomène, la plupart du temps associé à des bris de canalisation d'eau. Ces bris de tuyauterie souterraine, selon les explications données, sont causés par des pluies diluviennes. >>

    article et vidéos....

    publié par : conscience du peuple

     
     
     
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  • Du colonialisme français à l’intervention française au Mali


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    29

    6 mai 2013

    F :  

    « La guerre au Mali a pour but de se débarrasser des islamistes radicaux », nous dit-on. Pourtant, ces mêmes islamistes combattent dans « notre » camp en Libye et en Syrie. Et ils sont financés par « nos amis » : Arabie Saoudite et Qatar. Spécialiste de l'Afrique et auteur chez Investig'Action de « La stratégie du chaos », Mohamed Hassan éclaire les dessous d'une guerre beaucoup trop schématisée par les médias. Troisième et dernier volet de notre série « Causes et conséquences de la guerre au Mali » (IGA).

     

     
     

     

     

    Le conflit au Mali s’inscrit dans un large contexte et il a toute une histoire derrière lui. Il y a les djihadistes qui ont quitté la Libye pour le nord du Mali, armés par le Qatar et l’Arabie saoudite. Et il y a les militaires français, belges et autres, occidentaux et africains, qui sont intervenus au Mali. Pour situer correctement cette intervention française, nous devons faire un retour sur le colonialisme français au Mali.

     

    Quand les colonialistes français ont conquis le Mali, le territoire faisait partie d’une vaste zone économique s’étendant autour du Sahel. Les caravanes partaient d’une ville oasis vers une autre, tout droit à travers le désert. Dans cette économie originelle régnait une bonne intelligence entre les paysans et les nomades. Les paysans avaient besoin des nomades pour pouvoir acheter des marchandises venant d’autres régions et constituaient donc leur clientèle. Toute la population de cette région était musulmane.

     

    Cette zone économique était très prospère à l’époque. L’an dernier, le site Internet celebritynetworth.com a classé un Malien à la première place du classement des vingt-cinq individus les plus riches ayant jamais vécu. Le journal a converti les biens du roi Mansa Moussa Ier qui, de 1312 à 1337, a régné sur un royaume situé à l’intérieur du Mali actuel, en tenant compte de l’actuel prix de l’or et de l’inflation au fil des siècles. L’homme, aujourd’hui, pèserait quelque 400 milliards de dollars. Il y avait également une vie intellectuelle très riche : Tombouctou est connue comme l’un des premiers et principaux centres intellectuels du monde. À son apogée, le royaume malien s’étendait jusqu’à la côte du Sénégal. L’arabe y était la langue véhiculaire.

     

    Le colonialisme français a détruit tout ce système. Pour tuer toute capacité intellectuelle, des milliers de professeurs ont été assassinés. À l’instar de la quasi-totalité des pays africains, le Mali que nous connaissons aujourd’hui a des frontières artificielles. La région faisait partie de ce qu’on appelait le Soudan français. En 1960, elle devint indépendante, d’abord comme une fédération avec le Sénégal, mais, après deux mois à peine, le Sénégal se retira de cette fédération. Le Mali actuel est le quatrième pays d’Afrique par sa superficie. Après le coup d’État contre le premier président nationaliste du Mali, Modibo Keita (1960-1968), le pays est devenu un État néocolonial.

     

    Un tel État ne peut constituer une nation ni ne peut se développer de façon autonome. Le Nord, une région désertique, est abandonné à son sort et les habitants y sont discriminés. Il y a des tensions ethniques entre les Touaregs (nomades) et les autres groupes de population. Le commerce à grande échelle de jadis a complètement décliné. Que reste-t-il pour un grand nombre de nomades qui sillonnent la région avec leurs caravanes ? Contrebande, enlèvements moyennant rançon, trafic d’humains…

     

    Une partie importante de ces Touaregs sont devenus soldats en Libye, dans l’armée de Kadhafi. Après leur retour dans le nord du Mali, ils ont entamé une guerre au Nord-Mali pour l’indépendance de ce qu’ils appellent l’Azawad — une lutte qui, depuis quelques décennies, s’anime brusquement puis se calme à nouveau. Le 24 janvier 2012, ils se sont emparés de la ville d’Aguelhok et y ont tué une centaine de soldats de l’armée malienne. Au cours des mois suivants, ils se sont mis à attaquer d’autres villes dans le nord.

     

    Le massacre d’Aguelhok a suscité un énorme mécontentement dans l’armée et parmi les familles des soldats, car c’est très pauvrement armés qu’il leur a fallu combattre les insurgés bien équipés et entraînés. Le 22 mars, le président malien Amadou Toumani Touré (surnommé « ATT ») a été renversé par un coup d’État de militaires mécontents et d’officiers subalternes sous la direction d’Amadou Sanogo.

     

    Pour les pays voisins du Mali qui, après le renversement du président ivoirien Gbagbo, subissent fortement l’influence de la France, ce fut un prétexte pour annoncer un embargo sur les armes contre l’armée malienne qui, de la sorte, n’avait pas l’ombre d’une chance contre les insurgés accourant en masse. Les mois suivants, le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) s’empara de tout le nord du pays. Ensuite, le MNLA fut chassé à son tour par trois groupes djihadistes : Ansar Dine, Al Qaeda dans le Maghreb islamique (AQMI) et MUJAO — des groupes qui reçoivent des armes et de l’argent du Qatar et de l’Arabie saoudite — et ainsi la boucle fut bouclée.

     

    Quand il a semblé alors que ces djihadistes allaient se précipiter vers la capitale malienne Bamako, le président par intérim Dioncounda Traoré aurait demandé au président français François Hollande (PS) d’intervenir militairement. Ce qui rendait en fait impossible un plan soigneusement et difficilement élaboré des Nations unies et de l’Union africaine.

     

    Conclusion

     

    Comment la situation devrait-elle évoluer ? Toute solution au conflit du Mali est contrecarrée par trois problèmes importants.

     

    Primo : personne ne permet aux Maliens de résoudre eux-mêmes leurs différends et problèmes mutuels. L’ingérence étrangère rend la chose impossible. La guerre ne fera qu’exacerber les tensions mutuelles dans tout le pays. Si vous avez la peau plus claire et qu’on vous prend donc pour quelqu’un du nord, vous risquez aujourd’hui de ne plus pouvoir traverser à l’aise les rues de Bamako.

     

    Secundo : les États africains sont très faibles, quand on voit qu’un pays comme le Mali ne peut même pas venir à bout d’une rébellion bien organisée de quelque 500 djihadistes. L’Union africaine (UA) elle aussi est faible. Les pays de la SADC (Southern African Development Community) essaient bien de changer le cours des choses et étaient à l’avant-plan de l’opposition de l’UA à la guerre en Libye. Mais il y a encore bien trop de chefs d’État africains qui pensent davantage à leur propre intérêt et aux ordres qu’ils reçoivent de leurs maîtres en Europe et aux États-Unis qu’à l’unité africaine.

     

    Tertio : si, depuis que la crise du capitalisme mondial s’est aggravée en 2008, la France ne veut pas devenir une nouvelle Espagne, Italie ou Grèce, elle va devoir défendre son hégémonie en « Françafrique » et autour de la Méditerranée. Mais les choses ne s’annoncent pas très bien pour la France, car les contradictions avec les États-Unis en Afrique s’accroissent. En Côte d’Ivoire, l’armée française est intervenue pour installer Ouatarra au pouvoir ; or, en fait ce dernier est avant tout un pion des États-Unis. Et les États-Unis ont tiré parti de la guerre au Mali pour installer une base pour leurs drones dans le pays voisin, le Niger. En d’autres termes, nous pouvons nous préparer à une période durant laquelle le Mali et toute la région qui l’entoure vont se retrouver dans un conflit permanent, comme celui qu’a connu la Somalie au cours des années 90.


     

    Extrait de « Causes et conséquences de la guerre au Mali », article paru dans Études marxistes, n°101.

     

    Voir aussi « L'Occident à la conquête de l'Afrique » et « Ces islamistes que soutient l’Occident ».

     

    Mohamed Hassan est spécialiste du Moyen-Orient et de l’Afrique. Il est l’auteur, avec David Pestieau, de L’Irak face à l’occupation (EPO, 2004) et, avec Grégoire Lalieu et Michel Collon, de La stratégie du chaos, Investig’Action/Couleur Livres, 2012.
     

     

     

    Françafrique - Libye - Mali - Touaregs

     


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  • Les attentats de Boston

    travers le prisme des médias américains

     


    Les attentats de Boston vus à travers le prisme des médias américains

    le 6 mai 2013

    Nous publions ci-dessous, avec leur autorisation, un article paru le 17 avril dernier sur le site socialistworker.org [1]. Il est suivi d’un post-scriptum d’Acrimed.

    Les médias ont essayé d’inscrire les explosions dramatiques du marathon de Boston dans le cadre cynique et raciste de la « guerre menée contre le terrorisme », selon Nicole Colson. 

    ***

    Dans la confusion, l’horreur et la désolation qui ont suivi les explosions du marathon de Boston le 15 avril, une seule chose était claire : certains avaient décidé qui étaient les responsables, au mépris des faits.

    Avant même qu’il y ait un bilan précis des victimes, certains dans les médias de droite et parmi les islamophobes patentés se sont mis à suggérer que cet acte ne pouvait bien évidemment être le fait que de terroristes musulmans.

    Dans l’ensemble, dans les heures qui ont suivi les explosions ayant fait 3 morts et 176 blessés, les médias sont restés, pour l’essentiel, assez mesurés, comparés à certains drames précédents. Les présentateurs n’ont fait que répéter la stricte vérité : il était trop tôt pour savoir qui avait perpétré ces attaques et connaître les motivations de leurs auteurs. Furent surtout mises en avant des images de courage et d’espoir – les secouristes et les gens ordinaires qui se sont précipités sur les lieux du carnage pour s’occuper des blessés, mettre les gens à l’abri et offrir un peu de réconfort.

    Mais au fil des heures, et du temps d’antenne à combler, les spéculations d’insipides « experts » médiatiques ont surgi.

    Sur CNN et WABC, on rapporta que la police recherchait un « homme à la peau foncée ou un homme noir » parlant « éventuellement avec un accent étranger ». Le New York Post, qui ne rate jamais une occasion de se vautrer dans le racisme, rapporta à tort que 12 personnes avaient été tuées, que la police croyait un Saoudien responsable de ces actes et que cet homme était sous surveillance dans un hôpital des environs.

    Sous entendu : on assistait à un nouveau 11 septembre.

    Or la police de Boston déclara un peu plus tard qu’il n’y avait pas de suspect en garde à vue, Saoudien ou autre.

    Un Saoudien, étudiant à l’université de Boston fut bien interrogé dans un hôpital des environs. Il figurait parmi les victimes des explosions ayant subi de graves brûlures. Selon Boston.com, un responsable des forces de l’ordre a affirmé que l’homme avait été taclé puis retenu par un passant après avoir été aperçu quittant les lieux précipitamment, à l’instar de centaines d’autres essayant d’échapper aux explosions.

    Malgré la déclaration de la police, Steve Emerson, expert en terrorisme autoproclamé, est allé sur C-SPAN dire ce qu’il pensait de l’étudiant saoudien non identifié, dès le lendemain des explosions. « J’ai eu accès à certaines informations top secrètes », a dit Emerson. « Il semble que c’est un acte terroriste commis pour des raisons politiques… sur la page Facebook de la personne en question, il y avait des messages assez révélateurs hostiles aux États-Unis. Certes il n’a pas été inculpé à l’heure qu’il est, mais les brûlures sur sa peau correspondent aux résidus de la bombe qui a explosé. »

    Sur Fox News, Emerson fut contraint d’admettre que « le suspect saoudien a été mis hors de cause ». Mais il a assuré à la présentatrice de Fox Megan Kelly que les explosions ne pouvaient être que l’œuvre de terroristes islamistes. Pourquoi ? Parce que l’utilisation d’une bombe est « la marque de fabrique » des terroristes islamistes, tandis que, toujours selon lui, les terroristes d’extrême droite « utilisent des armes à feu pour perpétrer leurs attaques ».

    Apparemment, cet « expert » en terrorisme avait oublié que c’est bel et bien une bombe qui explosa devant un bâtiment fédéral à Oklahoma City – attaque terroriste la plus meurtrière sur le sol américain jusqu’au 11 septembre –, déposée par des membres d’une milice suprémaciste blanche.

    Le raccourci raciste consistant à n’envisager la responsabilité que d’un terroriste musulman ne se limita pas aux médias. Les hommes politiques eurent tôt fait d’entrer dans l’arène.

    Interrogée pour savoir si elle connaissait le pourquoi des ces explosions, la sénatrice du Maine Susan Collins (membre du Parti républicain et de la commission chargée du renseignement au Sénat) déclara : « chaque fois qu’une attaque de ce genre se produit, il est difficile de ne pas songer à la responsabilité de l’extrémisme islamiste. » Semblant se rendre compte qu’elle était en train de proférer publiquement des accusations sans fondement, elle s’empressa d’ajouter : « Mais je n’ai aucune preuve qui puisse accréditer cette thèse. »

    Sur CNN, l’ancienne députée démocrate Jane Harman apparut dans l’émission The Lead quelques heures après les explosions dans lesquelles elle crut non seulement déceler la main d’Al-Qaïda, mais où elle annonçait également d’autres attaques à venir : « Je dirais, en m’appuyant sur ce qu’on sait de nos jours d’Al-Qaïda et des organisations liées à Al-Qaïda, que nous devons, si leur responsabilité est confirmée, nous attendre à d’autres attaques lors d’évènements sportifs, dans des villes très exposées ou encore lors de rassemblements de masse les jours fériés. »

    Le député républicain de l’Iowa Steve King profita de l’occasion pour lancer des pistes en matière de réforme de l’immigration. « Si l’on ne peut plus contrôler les antécédents des gens qui viennent d’Arabie saoudite, comment va-t-on contrôler les antécédents des 11 à 20 millions de gens qui vivent ici et qui sont originaires de je-ne-sais-où ?  » s’interrogea-t-il sur la National Review Online.

    Mais tout cela n’était rien comparé aux propos du commentateur de Fow News Erik Rush. Le jour des explosions, Rush a tweeté le message suivant : « Que tout le monde fasse l’autruche en matière de sécurité ! Laissons entrer toujours plus de Saoudiens sans les faire passer par les contrôles ! Allons-y ! » Et lorsque quelqu’un lui demanda si les musulmans dans leur ensemble étaient coupables de ces explosions, Rush répondit : « Oui, ils sont diaboliques. Tuons-les tous. »

    Rush eut recours un peu plus tard à la seule excuse – piteuse – possible : c’était « sarcastique ».

    Mais il ne précisa pas s’il était toujours sarcastique quand il tweeta un peu plus tard : « Qu’il est bon de voir tous ces apologistes de l’islam voler au secours de ceux qui se retourneraient contre eux en un clin d’œil. » Idem pour son article intitulé « Oui, l’islam est l’ennemi à abattre », dans lequel Rush déclarait : « La vérité, la voici : aussi bien la gauche que les islamistes aux États-Unis exploitent le 1er amendement et la nature généreuse des Américains afin de nous conquérir. C’est aussi simple que cela, et si cela doit aboutir à un conflit, je préfère être du côté des vainqueurs, quoi qu’il en coûte. »

    Rush a peut-être le verbe plus haut que les autres, mais ses commentaires reflètent le racisme profond à l’encontre des Arabes et des musulmans qui ne cesse de croître dans la société américaine depuis le 11 septembre.

    Car quand les vedettes médiatiques, les hommes politiques et d’autres attisent l’islamophobie, ce n’est pas sans conséquence. Dans les heures qui ont suivi les explosions de Boston, un torrent d’injures nauséabondes à l’encontre des Arabes et des musulmans s’est répandu dans les médias. Et le lendemain, un vol de la compagnie American Airlines au départ de l’aéroport Logan de Boston et à destination de Chicago fut rappelé à la porte d’embarquement après que des passagers ont fait part de leur inquiétude ayant entendu deux hommes parler arabe à bord. Ceux-ci furent finalement exclus du vol.

    Le délit de « l’Arabe en avion » n’est que trop familier pour de nombreux Arabes et musulmans aux États-Unis depuis le 11 septembre : des passagers sont soupçonnés dès qu’ils prient, qu’ils portent des vêtements islamiques ou, comme à Boston, qu’ils parlent une autre langue, tout simplement.

    Cette montée de la rhétorique anti-musulmans depuis les explosions de Boston accroît considérablement le risque d’attaques racistes. Il nous faut être solidaire de nos amis arabes et musulmans pour éviter qu’un tel retour de flammes ne se produise.

    L’islamophobie est la conséquence directe du jeu malsain de l’establishment politique américain avec la peur du terrorisme afin d’obtenir un plus large soutien à la guerre au terrorisme menée à l’étranger, tout en restreignant les libertés publiques ici, sur le territoire national.

    Comme l’a écrit le chroniqueur du Guardian Glenn Greenwald, « l’histoire de ce type d’attaques depuis 10 ans est claire et cohérente : elles sont menées afin d’accroître le pouvoir du gouvernement, de renforcer la surveillance de la part de l’État et de confisquer les libertés individuelles. »

    De nombreux organes de presse et autres commentateurs conservateurs se sont élevés contre l’absence du mot « terrorisme » dans la première déclaration de Barack Obama sur les explosions de Boston (sans doute parce que, dans la loi américaine, qualifier un acte de « terroriste » a des conséquences juridiques).

    Que les conservateurs de tous poils se rassurent, cependant. Moins d’un jour a suffit à Obama pour déclarer que « chaque fois que des bombes sont utilisées contre des citoyens innocents, c’est un acte de terreur. »

    Comme l’a écrit Greenwald : « Bien sûr, derrière la question "s’agit-il ou non de terrorisme ?", s’en cache une autre : "des musulmans sont-ils responsables ?" » Et pour cause : dans le discours politique américain, le « terrorisme » signifie forcément des violences commises par des musulmans contre l’Occident. La raison pour laquelle il y a eu une telle confusion et un tel flou autour de la notion de terrorisme est qu’il n’existe aucune définition claire et cohérente de ce terme. À l’heure actuelle, ce n’est guère plus que de la propagande visant à émouvoir et à manipuler.

    Parmi les spéculations sur la responsabilité des Arabes ou des musulmans dans les explosions de Boston, personne ou presque dans les médias n’a rappelé la longue série d’actes terroristes sanglants perpétrés par les racistes d’extrême droite.

    De la destruction du bâtiment Alfred P. Murrah à Oklahoma City en 1995 à l’explosion dans Centennial Park lors des Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996 en passant par les incendies visant des cliniques où sont pratiquées l’avortement et des mosquées, la liste d’attaques violentes et de complots terroristes issus de la droite est longue.

    Et pourtant, le visage du terrorisme reste associé aux Arabes ou aux musulmans. Le New York Times, par exemple, a affirmé que les explosions de Boston marquaient « la fin de plus d’une décennie au cours de laquelle les États-Unis subirent étonnamment peu d’attaques terroristes, notamment grâce à une stratégie fondée sur un maintien de l’ordre beaucoup plus strict au lendemain des attentats du 11 septembre. »

    De manière assez révélatrice, le journal a omis de parler du meurtre en 2009 de George Tiller, médecin pratiquant des avortements et ayant subi pendant des années menaces et violences avant d’être abattu dans une église par un fanatique anti-avortement. Pas plus que le journal de référence n’a mentionné les six victimes du néonazi Wade Michael Page lors de la fusillade survenue l’an dernier dans un temple sikh du Wisconsin.

    Est-ce parce que les auteurs étaient des hommes blancs que ces gens ne sont pas considérés comme victimes du terrorisme ?

    L’occultation par le New York Times de la violence d’extrême droite va de pair avec l’argument selon lequel la guerre menée contre le terrorisme a accru la sécurité des Américains – notamment sur le territoire américain, se traduisant par un renforcement des mesures de sécurité qui a généré une augmentation sans précédent des lois sécuritaires et une diminution des libertés publiques depuis le 11 septembre.

    « Dans le sillage du 11 septembre, il y a eu une révolution dans la façon dont les autorités ont traité ce problème » estime Gary Lafree, directeur du consortium national sur l’étude du terrorisme, dans les colonnes du New York Times. « Les équipes de police sous la houlette du FBI font beaucoup plus de prévention. Elles stoppent les complots avant même que les terroristes ne sortent de chez eux. »

    Mais dans un grand nombre de cas, le FBI et la police ne « stoppent » pas les complots. Elles les fomentent puis attrapent des individus vulnérables considérés comme responsables avant de les diaboliser.

    La vérité, c’est que la plupart des gens inculpés de terrorisme aux États-Unis au cours des dix dernières années dans cette guerre menée contre le terrorisme n’ont non seulement jamais tué quiconque, mais n’ont même jamais été sur le point de commettre une quelconque attaque sur le sol américain.

    Prenez par exemple le cas de Newburgh : quatre Afro-Américains originaires de Newburgh dans l’État de New York, arrêtés pour terrorisme en 2009 et suspectés d’avoir préparé des attentats dans deux synagogues et de vouloir abattre des avions militaires à l’aide de missiles. Ces hommes n’avaient ni les moyens ni la motivation de commettre de tels actes avant de rencontrer Shahed Hussain, agent provocateur du FBI, qui les a recrutés dans une mosquée locale en leur promettant une rétribution. Devant le tribunal, même les juges ont dit que cette affaire relevait de tout « sauf du terrorisme ».

    Au-delà de ces abus commis sur des individus marginaux comme le quatuor de Newburg, le gouvernement fédéral exploite ces « complots terroristes », aussi invraisemblables soient-ils, pour renforcer la sécurité nationale. Comme l’écrit encore Greenwald : « C’est précisément ce que fait le gouvernement à chaque fois (aidé en cela par l’armée déplorable "d’experts en terrorisme"), à savoir exploiter la peur suscitée afin d’accroître son propre pouvoir et d’affaiblir celui des individus, y compris celui d’avoir une vie privée. »

    Il est néanmoins possible de résister à l’hystérie médiatique, à ceux qui attisent la peur et à la tentation de faire d’un drame horrible un prétexte à un nouveau tour de vis gouvernemental. Les gens ordinaires à Boston ont montré la voie, des milliers de gens ayant pris part à une veillée funèbre pour les victimes en signe de soutien à leurs familles et à leurs amis.

    Les parents de Trayvon Martin – cet adolescent afro-américain assassiné par un milicien raciste l’an dernier en Floride – ont de la même façon marqué les esprits en envoyant un message à la famille de l’une des victimes des explosions, Martin Richard, âgé de huit ans (la sœur et la mère de Martin ont également été grièvement blessées).

    Une photo prise par Martin Richard brandissant lui-même une photo sur laquelle figure un symbole de paix après le meurtre de Trayvon Martin a beaucoup circulé dans les médias. Les parents de Trayvon, Sybrina Fulton et Tracy Martin, ont envoyé un message de solidarité à la famille du petit Martin : « Il semble que le symbole de paix que Martin brandit en photo qui circule actuellement dans les médias fit suite à un cours de son professeur portant sur la mort de notre fils et le problème de la violence en général. Nous vous adressons nos pensées et nos prières les plus sincères et nous souviendrons de votre fils pour toujours. »

    Puisse cet exemple synonyme de solidarité au cœur de l’horreur et de refus de céder à la peur être suivi à l’avenir.

    Traduction de Thibault Roques


    Post-scriptum d’Acrimed

    Ce type de journalisme de précipitation et d’anticipation, qui prétend connaître les coupables avant qu’ils soient identifiés, peut voir, parfois, ses prédictions tomber juste, ce qui ne change rien au fait qu’il se contente de relayer des rumeurs ou les préjugés de ses « sources », et ne se fonde en tout cas sur aucune information consistante et vérifiée…

    Du fait de la course au scoop et de la « nécessité » de tenir l’antenne ou de remplir des pages, la déontologie et les règles habituelles du journalisme semblent comme suspendues dans les heures, voire les jours qui suivent ce type d’évènement dramatique. En mars 2004, par exemple, faisant fi de toute prudence, les médias français, dontLe Monde, comme nous le soulignions ici-même, emboîtaient le pas de leurs confrères espagnols pour accuser à tort l’ETA d’être responsable des attentats qui venaient d’avoir lieu à Madrid.

    Il est ainsi quelque peu cocasse de lire dans Le Monde du 23 avril dernier un article – remarquable au demeurant – tançant CNN pour sa couverture des attentats de Boston… Nous attendons avec intérêt le jour où Le Monde se penchera avec la même lucidité critique sur ses propres turpitudes passées, présentes et à venir, comme sur celles des médias français.

    Notes

    [1] Site américain d’information alternative ancré à gauche.