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Afrique

  • Un périple autour du monde : safari cycliste au Botswana

     

    Publié le 24 juin 2015 dans Culture

    Parce qu’un con qui marche va toujours plus loin qu’un intellectuel assis, deux frères sont partis sur les routes depuis de longs mois, traversent les frontières, les villes et les campagnes à l’occasion d’un tour du monde à durée indéterminée, sans casques ni golden-parachutes. Au fil de leur voyage, ils livrent leurs impressions sur des expériences qui les ont marqués.

    Aujourd’hui, route mouvementée à travers le Botswana…

    Par Greg.

    Je n’ai pas vu les plus beaux paysages du Botswana donc ne m’en voulez pas si je n’en parle pas. Je me suis contenté de suivre la route principale jusqu’en Zambie, surtout par manque de temps. Et pourtant, il s’est passé beaucoup de choses pendant ces quelques jours.
    Frustré de n’avoir pas pu me payer les excursions safari trop chères d’Afrique du Sud, j’apprenais peu avant la frontière que le Botswana allait m’offrir ce plaisir gratuitement, et en vélo. Vous me direz, les lions en liberté, les bestioles, comment on gère ça en vélo ? Ça a aussi été ma première question mais tout le monde se voulait rassurant sur le fait que je devrais être OK sur la route. Je gardais quand même l’option de bifurquer au Zimbabwe au dernier moment mais ma rencontre avec Eelco, le retraité cycliste sud-africain m’avait convaincu d’y aller.

    Je passais donc la frontière à Groblersburg, un village planté au milieu du bush. Comme d’habitude, on me questionne beaucoup sur mon voyage des deux côtés. Oui oui, je vis comme ça, c’est un long voyage et oui avec ce vélo, pas celui du voisin. Ils sont toujours aussi marrants au Botswana et surtout fiers que leur pays soit sûr. C’est un point sur lequel ils insisteront beaucoup au cours de mon séjour et c’est vrai qu’à aucun moment je ne me suis senti en insécurité, tout du moins à cause des gens.

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    Mon parcours au sud du pays fut assez monotone. Il y a peu de villes et d’activités sur mon passage et les villages ne sont souvent qu’un ensemble de trois ou quatre huttes rondes en terre dispersées dans la brousse. Les habitants, peu nombreux, accompagnent parfois un troupeau de chèvres au milieu du bush ou glandent à l’ombre d’un arbre. L’activité réduite au milieu des logements au toit bancal me rappelle la campagne laotienne : même climat, même ambiance, pas tellement un hasard finalement. Les Africaines portent tout et n’importe quoi sur la tête, le gamin harnaché dans le dos avec un morceau de tissu coloré : sacs de farine, eau, branches, l’une d’entre elles se promenait avec un sac « Dubaï 2020 ». Les femmes travaillent plus que les hommes mais l’activité ne semble tout de même pas harassante. Tout le monde se déplace à un rythme très africain et celui qui transpire le plus dans l’histoire, c’est moi. L’horizon est aride et la chaleur s’installe logiquement au fur et à mesure que je file au nord. À coups de 100-150km par jour, on a vite fait de prendre 10 ou 15 degrés dans la semaine et cela me fait finalement le plus grand bien après quelques jours de gastro en Afrique du sud. J’ai du choper un coup de froid avec la pluie dans les montagnes du Highveld.

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    J’alterne mes ravitaillements en eau entre les villes (Palapye ou Francistown) ou les petits bleds comme Serule. Je peux transporter 3 ou 4 jours de nourriture mais difficilement plus d’une journée d’eau. Certains refusent de me servir l’eau qu’ils boivent sous prétexte que je ne la supporterais pas (trop salée, c’est vrai qu’elle donne un peu soif et la courante, mais rien de bien grave) et vont puiser dans leurs réserves d’eau de pluie. D’autres veulent bien m’écouter et font confiance à mon estomac canin. À Serule, on me fait attendre une demi-heure pour m’amener de l’eau qu’ils jugent correcte. Il faut dire que la plus grande partie du village est désormais fantôme depuis que le tracé de la nouvelle route le contourne et que les habitants ont fui l’arrivée du train qui tuait le bétail. On prend soin du « white guy » un peu con qui ne veut pas utiliser les bus. Après qu’on m’ait offert une chemise en Afrique du sud, un autre citoyen de ce pays prend pitié de moi et m’offre une paire de lunettes de soleil. Un peu plus tard au Botswana, un expatrié m’offrira un bière sur la route et un couple sud-africain, de la viande séchée. Que demander de plus à ces gens ? Ils sont parfaits et tous heureux de voir des cyclistes traverser leur continent. Ils aimeraient faire savoir au monde entier qu’on peut voyager sereinement dans leurs pays magnifiques.

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    J’arrive à Nata après 3 jours de route. Je pensais la ville plus importante et le supermarché fait peine à voir, je n’achète que le minimum pour mon périple. Au départ, tant que je vois des panneaux signalant la présence de bétail, je pense être tranquille. Puis deux Botswaniens m’invitent alors à partager leur repas au bord de la route : du milmil (farine de maïs) avec du bœuf et des herbes, un plat traditionnel de cette région d’Afrique. Le tout se mange avec les doigts. Ils possèdent une ferme un peu plus loin et apportent le ravitaillement en bière Chibuku aux ouvriers. Les lions tuent régulièrement leur bétail mais eux n’ont pas le droit de les tuer, au risque d’aller en prison. Le gouvernement indemnise la perte à hauteur de 1500 pulas alors que la bête se vend à plus de 3000 sur le marché.

    Je poursuis donc en sachant que le panneau bétail n’est pas forcément synonyme de sécurité. Je commence par apercevoir quelques antilopes/gazelles puis rapidement trois éléphants, l’air pataud. J’ai peine à imaginer ces bestioles agressives. Moi, je tremble surtout pour les lions et les chauffeurs me disent en voir régulièrement au bord de la route, observant les voitures. Me savoir en vélo au milieu de cette faune me fait peur et m’excite au plus au point. Je suis sans cesse partagé entre l’envie et la peur d’en voir plus. Savoir que d’autres cyclistes ont pris cette route par le passé me rassure. Ma première journée se déroule sans accroc, et je peux observer quelques pachydermes d’assez près. Pour peu qu’on les laisse à bonne distance, ils font leur vie sans se soucier des humains. On reconnaît assez vite les zones à éléphants par les troncs d’arbres défoncés et l’écorce arrachée.

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    À 16h, j’arrive vers l’antenne relai qu’Eelco m’avait indiqué. Le petit chemin de terre y menant ne me plaît pas vraiment mais il faut bien y aller. Il n’y a personne sur place et la grille est fermée par un cadenas. Hors de question de dormir à l’extérieur avec les félins en liberté, pour entrer, je coupe un bout du grillage, et je referme immédiatement derrière moi. Je passe la nuit sur un petit toit à 3 mètres de hauteur. Au moins, je dors tranquille.

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    Mon petit déjeuner du lendemain sera en revanche perturbé par un animal auquel je ne m’attendais pas ici : l’abeille. Alors que je cuisinais tranquillement, des dizaines puis des centaines d’abeilles envahissent ma tente, mes affaires, tout est recouvert. Ça devient franchement agaçant, voire inquiétant. Je jette tout en bas et cours d’un coin à l’autre de l’enclos tout en rangeant tout péniblement pour éviter un maximum de piqûres. Elles ne sont pas agressives mais je les ai un peu dérangées et me prends deux coups de dard… Le petit dej’ est foutu et je pars le ventre creux pour mon deuxième jour de savane. J’observe toujours un maximum de gazelles (ou un animal du même genre) quand la circulation est réduite, une bonne dizaine d’éléphants ainsi que des zèbres.

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    Un éléphant, légèrement énervé que ses petits n’aient pas osé traversé la route en me voyant au loin décide de me charger en barrissant. Je descends du vélo et recule immédiatement de 2-3 pas, il s’arrête. Je me sens tout petit, ridicule face à ce monstre. Il est à 20 ou 30 mètres maintenant. Il repart sur 4-5 mètres, je recule de nouveau, il s’arrête encore puis, au moment où il s’apprête à lancer une troisième charge, une voiture arrive et le fait revenir vers ses petiots. Sachant que parfois je ne vois aucun véhicule pendant 20 minutes, c’est un sacré coup de pot ! Mon taux d’adrénaline est à son maximum et je sursaute désormais au moindre mouvement dans les fourrés. Je prends mon bâton en main, c’est dérisoire, mais ça me détend, c’est psychologique. « Croqué par un félin au Botswana », ma famille en parlerait encore pendant quelques générations mais je ne tiens pas spécialement à cette gloire posthume.

    Il fait très chaud et les camionneurs prennent pitié de moi et m’offrent parfois oranges et boissons. La route quant à elle, m’offre encore quelques vues sur des phacochères et une bande d’une trentaine de babouins à l’approche de Pandamatenga, mon refuge pour la nuit. Je passe la soirée à discuter avec une bande d’alcooliques près d’un restaurant rudimentaire fait de bâches plastiques. Rien de bien intéressant n’en sort mais le contact humain fait du bien avant une dernière journée dans la brousse en direction de la frontière Zambienne. Ils me rassurent encore une fois sur les lions qui dorment au loin quand il fait chaud et qui fuient si on leur fonce dessus. On verra pour cette option.

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    On me promet girafes et lions pour le lendemain, je n’aurais finalement droit à rien de tout cela malgré les affirmations des automobilistes me jurant en avoir vu une heure après mon passage. Tant pis pour moi, j’ai droit à quelques buffles au loin (animal peureux et pacifique en Asie et très dangereux en Afrique), des phacochères, des babouins et une espèce d’oiseau énorme, type ptérodactyle des temps modernes. Je traverse ensuite le fleuve Zambèze sur une barque, direction la Zambie avant me rendre à Livingstone où m’attendent les chutes Victoria. Malgré d’autres promesses de spectacles d’animaux en Zambie, rien ne se produira. Les chutes Victoria sont en revanche magnifiques, entourées d’une brume et d’un arc-en ciel permanent, le brouhaha assourdissant est à la hauteur du paysage offert. On tente d’abord de se protéger des trombes d’eau projetée par les chutes, avant de se laisser emporter par la magie du Zambèze, trempé, en tentant d’observer le fond du gouffre masqué par la brume. Quelques Africaines en visite entonnent des chants rythmés qui ajoutent de la couleur à l’endroit et quelques chanceux survolent le tout en deltaplane, comme Belmondo dansItinéraire d’un enfant gâté. Je reste profiter du lieu jusqu’au coucher du soleil.

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    Demain, je m’offrirai quelques jours de repos après 3000km pédalage en un mois et je campe un dernier soir près des chutes, en bordure du Zambèze et de son débit impressionnant, gardé par un type armé d’une kalachnikov, les hippopotames ayant l’habitude de s’aventurer sur mon aire de repos.

    Cela conclut superbement et paisiblement ces quelques jours au milieu des animaux. L’Afrique me procure tous les jours un maximum d’excitation et d’adrénaline, des rires, des chants, des sourires en pagaille. J’ai rarement pris autant de plaisir au cours de ce voyage.

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    Pour ceux qui ont 50 minutes à perdre, j’ai exceptionnellement fait une vidéo de mon safari que vous pouvez visionner ci-dessous. Il y a de vrais morceaux de gros mots et je me plante régulièrement sur les noms des animaux, c’est du live.

  • Afrique : un top 5 des corrompus

     

    Publié le 2 juillet 2015 dans Afrique

    Qui sont les dirigeants corrompus les plus dommageables au développement de l’Afrique ?

    Si l’Afrique est un continent d’une extraordinaire abondance minérale, végétale, et bien sûr humaine et culturelle, ce qui la caractérise trop souvent dans l’inconscient collectif – aidé en cela par des médias prompts à ne relayer que les catastrophes – est l’instabilité des régimes politiques des pays qui la composent. C’est bien cette instabilité qui provoque famines, guerres et pauvreté sur une majeure partie de ce continent pourtant si riche.

    À la source de cette instabilité, difficile de ne pas voir l’incroyable corruption des dirigeants de ces pays. Pour illustrer ce lien néfaste entre la corruption des dirigeants et la misère qu’elle entraîne au sein des populations concernées, passons en revue cinq des dirigeants de pays les plus corrompus.

    Guinée Équatoriale – Teodoro Obiang

    Teodoro Obiang - Amanda Lucidon for White House - domaine public

    Teodoro Obiang - Amanda Lucidon for White House – domaine public

    La Guinée équatoriale est un état pétrolier de 700 000 habitants. Le revenu annuel par habitant y est de 27 000 € mais il cache des disparités abyssales, la majorité de la population vivant avec moins d’un euro par jour. Ce pays est actuellement dirigé par Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, au pouvoir depuis plus de 32 ans, ce qui lui a largement laissé le temps de s’enrichir dans des proportions assez inouïes.

    Cette richesse semble provenir pour une bonne part du trafic international de drogue. Elle s’étend au moins jusqu’à son fils, récemment impliqué dans une vaste affaire de corruption pour laquelle il a dû négocier avec les États-Unis. Il a en effet accepté de renoncer à 30 millions de dollars (23 millions d’euros) d’avoirs dans le cadre d’un accord passé avec le gouvernement américain qui le poursuit pour corruption. Il vendra sa villa de Malibu en Californie, une Ferrari et six statues grandeur nature de Michael Jackson, selon le ministère américain de la justice. Il lui est reproché d’avoir acheté tous ces biens avec de l’argent issu de la corruption, et d’avoir usé de son influence pour « amasser plus de 300 millions de dollars (230 millions d’euros) d’avoirs par la corruption et le blanchiment d’argent, en violation de la loi de Guinée équatoriale et des États-Unis ».

    Guinée – Alpha Condé

    alpha condé Alpha Condé at WEF 2012 in Davos - CC BY SA 2.0

    Alpha Condé at WEF 2012 in Davos – CC BY SA 2.0

    L’élection d’Alpha Condé en 2010 a été controversée. Alpha Condé a en effet perdu le premier tour du scrutin avec 18% des voix contre 44% pour son adversaire principal. Dix jours avant le second tour, le responsable de la commission électorale de Guinée a été emprisonné pour fraude électorale. Suite à de nombreux reports du second tour, Alpha Condé a remporté les élections avec une marge de 141 000 voix après que 177 000 voix aient été déclarées nulles.

    Le 9 novembre 2012, la directrice du trésor public guinéen, une ardente défenderesse de la transparence et de la lutte contre la corruption au sein du ministère des finances du pays, a été assassinée.

    En avril 2015, alors qu’Ebola faisait rage en Guinée, Alpha Condé séjournait au moins 4 nuits au luxueux hôtel Four Seasons à Washington D.C. dans une suite présidentielle coûtant 18 500 dollars la nuit (le revenu national par habitant en Guinée est de 1,2 dollar par jour).

    Malgré de riches ressources naturelles (la région guinéenne de Simandou contient ce qui est probablement le plus grand gisement de minerai de fer non-exploité au monde), la plupart des Guinéens vivent dans la pauvreté, en partie à cause de la corruption rampante.

    Cinq ans après son élection, il est devenu clair que la gestion des ressources minérales du pays est plus que jamais sous le contrôle personnel d’Alpha Condé et de soutiens extérieurs comme Tony Blair et George Soros par exemple. Ce contrôle prend la forme du protectionnisme et des expropriations. La corruption dans l’entourage d’Alpha Condé est endémique. Peu de temps après l’élection d’Alpha Condé, l’entreprise Rio Tinto aurait ainsi versé 732 millions d’euros à l’État guinéen sans que l’on en connaisse la raison exacte. On semble depuis avoir perdu la trace de cet argent.

    Soudan – Omar Al Bashir

    Omar Al Bashir -12th AU Summit - Jesse B. Awalt - Domaine Public

    Omar Al Bashir -12th AU Summit – Jesse B. Awalt – Domaine Public

    Le président actuel, Omar Al Bashir, en place depuis plus de 21 ans, s’est maintenu au pouvoir en écrasant systématiquement toute contestation, au besoin dans le sang.
    Cette longue période aura laissé toute latitude au dirigeant pour appauvrir sa population en pillant les ressources du pays : selon les télégrammes diplomatiques américains qui ont fuité fin 2010, plus de 9 milliards de dollars ont été ainsi siphonnés du pays vers des banques londoniennes.

    Luis Moreno-Ocampo, procureur de la Cour Pénale Internationale qui a ouvert une instruction pour génocide en 2008 à l’encontre du président soudanais, a révélé qu’une partie des fonds étaient détenus dans la Llyods Banking Group, partiellement nationalisée. Il a aussi expliqué à des officiels américains qu’il devenait nécessaire de rendre public l’ensemble de ces informations et l’échelle des extorsions et méfaits d’Al Bashir pour pouvoir retourner l’opinion publique mondiale contre lui.

    Zimbabwe – Robert Mugabe

    Robert Mugabe - 12th AU Summit - Jesse B. Awalt - Domaine Public

    Robert Mugabe – 12th AU Summit – Jesse B. Awalt – Domaine Public

    Dans la liste des corrompus africains, on ne présente plus guère Robert Mugabe, en poste depuis plus de 27 ans, qui a assez phénoménalement réussi à propulser son pays sur les pires pentes du socialisme et du collectivisme avec tout ce que cela peut comporter de corruption, de misère et de violences.

    Outre les tortures et meurtres d’opposants, outre une hyperinflation galopante qui a durement touché son pays suite à des décisions monétaires désastreuses et qui est devenue depuis emblématique de ce qu’il ne faut surtout pas faire en matière d’économie, Robert Mugabe apparaît régulièrement sur les listes des leaders les plus corrompus du monde.

    La liste des scandales dans lesquels il est directement ou indirectement impliqué (au travers de sa famille qui a mis le pays en coupe réglée) est maintenant si fournie qu’il est difficile de les énumérer. Citons au passage des détournements de diamants, le pillage du fonds de soutien aux victimes de guerre, le scandale de la ZISCO (Zimbabwe Iron and Steel Company), celui de la ZUPCO (Zimbabwe United Passenger Company), celui de la NOCZIM (National Oil Company of Zimbabwe) ou celui de l’extension de l’aéroport international d’Harare.

    Cameroun – Paul Biya

    Paul Biya - Amanda Lucidon - White House - Domaine public

    Paul Biya – Amanda Lucidon – White House – Domaine public

    Paul Biya est le président du Cameroun depuis plus de 32 ans, et, comme son homologue Mugabe pour le Zimbabwe, il est régulièrement dépeint comme l’un des dirigeants de pays les plus corrompus au monde (ce dernier a même reçu la douteuse distinction de Pays le plus corrompu au monde en 1998 et en 1999).

    L’histoire de la République du Cameroun, un État pétrolier de l’Afrique centrale, est assez typique de la trajectoire suivie par les pays décolonisés dans les années 50. Paul Biya est arrivé au pouvoir en 1982 (il y a plus de 30 ans, donc) avec le support tacite de la communauté. En 2008, il réussit à modifier la constitution du Cameroun pour en devenir quasiment le président à vie.
    Dans un récent rapport du CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement) sur les Biens Mal Acquis, il est estimé que la fortune personnelle de Biya s’élève à plus de 200 millions de dollars. La liste des possessions personnelles de Biya est énorme : plusieurs châteaux en France et en Allemagne, et la villa Isis sur la Côte d’Azur.

     
  • Roi des Rois de l’Empire du Mali

    Soundiata, Roi des Rois de l’Empire du Mali, premier des libéraux

    Publié le 13 avril 2015 dans Histoire du libéralisme

    Le premier libéral connu, historiquement, ne serait-il pas Soundiata, Roi des rois, qui vécut en Afrique durant le 13ème siècle ?

    Par Nafy-Nathalie D.

    L’histoire de l’Afrique est méconnue mais elle est d’une richesse infinie. C’est ainsi qu’en Afrique sub-saharienne se sont développés des empires et des royaumes médiévaux incroyables.

    Et alors qu’en Angleterre en 1215 se dessinait la Grande Charte, des textes fondaient le Royaume du Mali. En effet, à cette époque, le Manding (dans la Guinée) était dirigée par le roi Naré Maghann Konaté à qui un chasseur avait prédit que s’il épousait une femme laide, il aurait un fils qui deviendrait le plus grand des rois. Il mit donc de côté la prédiction et continua sa vie jusqu’au moment où lui fut amené Sogolon Kondé du pays de Do, avec laquelle il eut plusieurs enfants dont un fils Soundiata. À la mort de son père, Soundiata fut obligé de s’exiler au Royaume de Mena dans lequel il grandit et se forma aux armes pendant que le puissant roi-sorcier du Sosso envahissait le Manding.

    Lorsque Soundiata fut enfin assez grand et entraîné, il rassembla des guerriers et partit à la reconquête de son royaume en rassemblant les armées de différents petits royaumes, ce qu’il réussit à faire en remportant, en 1235, la bataille de Kirina. Les royaumes réunis constituèrent l’Empire du Mali dont Soundiata Keïta devient « Mansa », ce qui signifie « Roi des rois » vers la fin de l’année 1236.

    L’UNESCO inscrit en 2009 « la Charte du Mandén proclamée à Kouroukan Fouga » sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, confondant de manière surprenante les deux textes distincts qui ont fondé le nouvel empire du Mali.

    Le premier texte est autoproclamé par Soundiata au moment de son intronisation comme empereur du Mali en 1222. Il est nommé « le serment des chasseurs » ou « injonction au monde » ou encore Charte du Manden ou Manden kalikan. Ce texte est d’autant plus intéressant qu’il est considéré comme l’une des premières déclarations des droits de l’homme de l’humanité, il comporte sept articles de tendance libérale évidente :

    1. « Toute vie est une vie » : égalité entre les hommes.
    2. « Tout tort causé à une vie exige réparation » : droit à réparation et responsabilité de ses actes.
    3. « Que chacun veille sur son prochain » : respect des droits individuels et solidarité.
    4. « Que chacun veille sur le pays de ses pères » : principe écologique de sauvegarde de la terre et des peuples qui la composent, principe du capital.
    5. « La faim n’est pas une bonne chose » : principe de dignité de l’homme par l’autonomie alimentaire.
    6. « L’essence de l’esclavage est éteinte ce jour » : principe de liberté et de propriété qui commence par la propriété de sa propre vie.
    7. « Chacun dispose désormais de sa personne ; Chacun est libre de ses actes ; Chacun dispose désormais des fruits de son travail » : principes de liberté et de propriété.

    Le second texte est la charte du Kouroukan Fouga. Il date de 1236. Même s’il reprend en partie le serment des chasseurs, il diffère sur deux points :

    1. L’esclavage n’est plus à abolir mais à humaniser : liberté et égalité relative.
    2. Le concept d’égalité qui devient relative puisqu’il hiérarchise la société.

    C’est un texte, à mi-chemin entre un code civil et une constitution, qui résulte du travail des dignitaires et permet d’organiser le nouvel empire du Mali concrètement. Il s’avère qu’en effet, depuis le 11ème siècle, cette partie de l’Afrique s’entredéchirait et Soundiata ainsi que ses dignitaires avaient observé que la plupart des conflits naissaient de problèmes de propriété. Voyant cela, ils décidèrent donc d’organiser la société de manière à fixer des tempérances sociales. Dès lors, ce texte subdivise la société pour mieux en relier les parties dans un système complexe d’alliance perpétuelle avec la règle de la parenté à plaisanterie qui est toujours en cours. Cette fraternité dans un système de droits et de devoirs réciproques crée une égalité relative qui permet l’installation d’un humanisme très élevé et rapproche les peuples au sein d’un empire de 3000 km de long, de la presqu’île du Cap Vert jusqu’à Niamey.

    Pour Soundiata, la dignité et la liberté de l’homme passant par l’autosuffisance alimentaire, il met en avant la prospérité individuelle résultant du travail de l’homme libre. C’est l’article 4 : « Le travail étant facteur de libération et valorisation, il en est fait une obligation pour tous. » L’article 5 quant à lui institue le caractère sacré de la vie et le respect dû à la personne humaine. Un devoir d’éducation des enfants par la société est également créé (à l’article 9). Il n’oublie pas non plus les femmes, imposant leur respect tant dans la sphère privée que dans la politique, avec l’article 16 : « Les femmes, en plus de leurs occupations quotidiennes, doivent être associées à tous nos gouvernements. »

    Et s’il n’abolit pas l’esclavage, il institue un droit des esclaves à être bien traités, à avoir des jours de repos, posséder des biens qui leur sont inaliénables et même à s’enrichir (article 20). Il crée aussi l’immunité diplomatique, avec deux articles spécifiques : le 24, « Ne faites jamais de tort aux étrangers » et le 25, « Le chargé de mission ne risque rien au Mandé ».

    Les bases du droit de propriété qu’il crée sont repris dans différents articles, à commencer par l’article 34 : « Il y a cinq façons d’acquérir la propriété : l’achat, la donation, l’échange, le travail et la succession. Toute autre forme sans témoignage probant est équivoque. » Les articles suivants précisent même le rendement qui peut être attendu par des métayers :

    • Article 35 : « Tout objet trouvé sans propriété connue ne devient propriété commune qu’au bout de quatre ans. »
    • Article 36 : « La quatrième mise bas d’une génisse confiée est la propriété du gardien. »
    • Article 37 : « Un bovin doit être échangé contre quatre moutons ou quatre chèvres. »
    • Article 38 : « Un œuf sur quatre est la propriété du gardien de la poule pondeuse. »

    Il confirme le principe de solidarité et de dignité humaine comme valeur primordiale de la société. Personne ne peut ou ne doit mourir de faim dans le Royaume du Mail si son voisin est dans la prospérité. Ainsi, l’article 39 proclame que : « Assouvir sa faim n’est pas du vol si on n’emporte rien dans son sac ou sa poche. »

    Quant à la démocratie, il la met en place à un moment où l’Europe est dans les Ténèbres. Ainsi, l’article 42 énonce que « dans les grandes assemblées », il faut se contenter des légitimes représentants. En d’autres termes, chacun (y compris les femmes) doit y être représenté, à défaut d’y être présent.

    Sa gouvernance était fondée sur la concertation et il institue le kolagnokorognoya, c’est-à-dire l’obligation de faire connaître et de rendre compte à tous des actes que l’on mène au niveau de la cité et du pays afin de permettre à tous de savoir et de s’exprimer. Il a également laissé au peuple (confrérie des chasseurs et les 34 familles de base du Mandé) le soin de désigner son successeur.

    Il crée enfin une gestion écologique des ressources en proclamant dans son article 40 que « la brousse est notre bien le plus précieux, chacun se doit de la protéger et de la préserver pour le bonheur de tous. »

    À la lecture de ces articles, on ne peut donc écarter que le premier libéral connu, historiquement, serait Soundiata, Roi des rois, qui vécut en Afrique au 13ème siècle : il a mis le bonheur des hommes au cœur de son projet en essayant de fonder une société plus juste, équitable, basée sur le respect de l’Homme et sa dignité, en garantissant la liberté de chacun en donnant à tous les moyens financiers et matériaux de le devenir.

    Il meurt en 1255 après avoir instauré un gouvernement d’inspiration démocratique et libérale quasi-parfaite. Il fut d’une sagesse et d’une tolérance remarquables puisqu’il a permis durant sa vie, en instituant la liberté de culte, la coexistence pacifique de l’animisme ancestral et de l’Islam, dont il était pratiquant. Il est resté dans les souvenirs comme un remarquable guerrier, et également comme un grand administrateur qui a développé le commerce, l’exploitation de l’or et l’agriculture de son pays.

  • "Charlie" et l’Afrique"

    "Charlie" et l’Afrique : témoignage d’un général français de retour du Mali

     
         

    Je viens de rentrer d’une semaine à Bamako, où j’ai travaillé avec des Maliens, des Nigériens et des Mauritaniens, sur des questions de lutte anti-terrorisme. J’étais accompagné là-bas par une collègue belge et un collègue espagnol.

    Dans le petit hôtel « le Campagnard », où nous étions logés et où se déroulaient nos réunions, la télévision, comme souvent en Afrique était allumée toute la journée. La chaîne France 24, chaîne chargée de faire connaître le rayonnement de la France, diffusait plusieurs fois par jour, un petit clip d’une minute où l’on pouvait voir toute une succession de personnes, de toutes origines ethniques, portant une pancarte « Je suis Charlie ». À la fin, ça devenait énervant, même pour moi. Cela l’était encore plus pour mes amis africains. Depuis la parution du dernier numéro de Charlie Hebdo, vendu à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires, à des collectionneurs opportunistes et à des gens sincères, encore sous le coup de l’émotion, les Musulmans d’Afrique noire sont de moins en moins Charlie et de plus en plus Coulibaly.

    Ils ne sont pas pour autant complices des djihadistes, dont ils subissent tous les jours les atrocités, dans l’indifférence générale de tous les Charlies, partis depuis en vacances de neige, mais ils n’aiment pas que l’on se moque de leur Prophète.

    Évidemment, ils ne sont pas assez développés, ni instruits, ni tolérants, pour apprécier à leur juste valeur les subtilités de la laïcité à la française, de la liberté d’expression et du droit au blasphème germanopratin. Moi non plus d’ailleurs, mais c’est normal étant donné que j’ai passé toute ma vie à essayer, comme « l’adjudant Kronenbourg, soldat à la solde du grand capital » [personnage de Cabu, NDLR], de défendre mon pays et de permettre à ceux de Charlie, qui au fond, me haïssaient, de le faire en toute liberté.

    Il n’empêche que grâce à tous ces bien-pensants, les trois abrutis qui ont assassiné les journalistes de Charlie Hebdo, puis les clients du magasin casher de la porte de Vincennes, ont atteint leur but au-delà de tout ce qu’ils avaient pu imaginer dans leurs petites têtes de crapules, rattrapées par la foi.

    Le chef d’état du Mali, Ibrahim Boubacar Keita, doit, rappelons-le, son élection à l’appui du Président du Haut Conseil Islamique de son pays, l’Imam wahhabite Mahmoud Dicko. Il a, je suppose, dû être fortement convaincu de venir à Paris le 11 janvier, pour manifester sa solidarité au nom de ce qu’il doit à la France et à ses amis socialistes. Il est désormais complétement discrédité. Son peuple, depuis la parution du dernier Charlie, lui reproche sa complicité avec les blasphémateurs.

    France 24 le lui rappelle toutes les deux heures.

    Le chef d’État du Niger, Mahamadou Issoufou, de la même obédience, et en difficulté face à son opposition, mais aussi face à la menace venant de Libye, du Mali et de Boko Haram, a également dû être convaincu par les conseillers de l’Élysée qu’il serait bien qu’il vienne aussi défiler à Paris. Que pourrait-il refuser à Paris dans la situation où il se trouve ? Manque de chance, depuis la sortie de la dernière caricature du Prophète, son peuple l’assimile aux blasphémateurs, aux chrétiens, aux Blancs, aux Occidentaux, donc aux Français. Le peuple a d’ailleurs réagi plus violemment qu’au Mali. Les manifestations ont fait plus de dix morts, tous musulmans. 25 églises ont été détruites, le centre culturel français de Zinder également, ainsi que le restaurant « Le Toulousain » de Niamey. C’est dans ce petit restaurant, tenu par un Français, qu’avaient été enlevés, par les djihadistes en janvier 2011, deux jeunes Français retrouvés morts le lendemain par nos forces spéciales, près de la frontière malienne. Au Niger aussi, France 24 rappelle toutes les deux heures que nous sommes Charlie.

    Et deux de chute, Messieurs les Présidents.

    Dans la rue à Bamako, certains vous disent qu’ils sont Coulibaly. Il faut dire que ce patronyme est plus courant là-bas que celui de Charlie.

    Coulibaly de France, tu n’es pas mort pour rien.

    Ma collègue Belge, qui s’était aventurée de l’autre côté de la rue, devant l’Institut National de Formation Judiciaire de Bamako, où un certain Moussa Coulibaly (encore un) avait fort bien organisé une formation sur « les menaces terroristes pesant sur le Sahel et les moyens d’y faire face », avec notre appui, a été prise à partie par un septuagénaire en boubou, affichant une belle barbe blanche de notable. Ce dernier s’est proposé à deux fois de la gifler, la prenant pour une Française. Il déclarait avoir servi dans l’armée française, et reprochait à notre pays de tout manipuler au Mali, et en particulier son Président, qu’il qualifiait de marionnette. Il lui a annoncé que tout cela finirait très mal pour nous. C’est la première fois, en 45 ans de fréquentation de l’Afrique noire, que je constate ce type de menace, surtout de la part d’un vieil homme qui n’avait rien d’un fou, et s’exprimait très clairement.

    Bravo Charlie.

    J’ai longuement discuté avec un officier de gendarmerie nigérien, amoureux de la France et des philosophes français. Comme musulman, il ne comprenait pas que l’on puisse continuer à soutenir ceux qui avaient humilié son prophète. Il sortait de cette affaire très admiratif des Américains, qui avaient refusé de montrer à la télévision la caricature du dernier Charlie.

    Merci France 24.

    J’ai également longuement discuté avec un serveur de mon petit hôtel. Il était licencié en histoire et avait passé plusieurs années en Côte-d’Ivoire, où il connaissait très bien tous les anciens petits chefs rebelles, désormais au pouvoir. Il ne m’a pas vraiment dit ce qu’il avait fait là-bas. Il avait renoncé à trouver un poste dans l’éducation nationale malienne, ou dans une autre administration, car la corruption est telle qu’il est impossible pour un pauvre gars comme lui de pouvoir être retenu. Il a conclu son propos en disant que son seul recours désormais était Dieu (lire Allah). D’après l’officier de gendarmerie nigérien, cet homme est mur pour basculer.

    Encore un effort Charlie.

    Un officier de gendarmerie français m’a dit qu’il avait demandé aux deux femmes qui travaillent à son domicile de venir désormais voilées, car on leur avait lancé des cailloux pour les punir de travailler chez lui.

    Bravo la France.

    J’ai aussi rencontré un officier français à la retraite, installé au Mali depuis plus de vingt ans, marié à une Malienne, et qui m’a confié que sa femme, musulmane, avec laquelle il avait deux enfants, chrétiens, passait, depuis peu, beaucoup plus de temps à faire ses prières.

    Continue, Charlie.

    Ils croient tous là-bas que nous sommes Charlie. Du coup ils sont de plus en plus Coulibaly et en arrivent à admirer les Américains. C’est un comble.

    Bref, j’ai passé une excellente semaine.

    Merci pour ce moment.

    Michel Joana
  • SOLDATS DE FORTUNE


    19/07/2013 à 14h26

    Des mercenaires français pour protéger le président centrafricain

    Pierre Haski | Cofondateur Rue89


    Le président issu du coup de force de mars 2013, Michel Djotodia à son arrivée à Bangui (SIA KAMBOU / AFP)

    Une vingtaine de mercenaires français, pardon, d’employés d’une société de sécurité privée, assurent depuis peu la protection rapprochée du président issu du coup de force armé de mars dernier en République centrafricaine, Michel Djotodia.

    « Mercenaire », c’est pourtant ainsi qu’un officiel français cité par le site de Jeune Afrique qualifie ces hommes dont Paris tente en vain de demander le renvoi par les nouveaux maîtres de Centrafrique, qui ont bien du mal à consolider leur pouvoir.

    Depuis quelques jours, ajoute Jeune Afrique, l’ambassade de France à Bangui tente de convaincre le président Djotodia de les renvoyer :

    « Elle cherche aussi la faille juridique dans le contrat conclu avec ces retraités très spéciaux de l’armée française. Mais ceux-ci appartiennent à une société,Roussel G-Sécurité, immatriculée dans l’État du Delaware, aux États-Unis.

    “ On n’a aucun moyen de pression sur eux ”, reconnaît-on à Paris. »

    Du 3e RPIMa à Bangui

    Selon La Lettre du Continent, c’est un ancien du célèbre 3e RPIMa (Régiment parachutiste d’infanterie de marine), Jérôme Gomboc, qui commande cette petite armée privée au camp Roux, à Bangui, pour le compte de la société Roussel, qui est en fait basée à Fréjus.


    Le logo de la société Roussel qui a remporté le contrat centrafricain (capture d’&eacute ; cran)

    Roussel a de nombreuses activités de sécurité privée, dont la société fait état sur son site, assurant la protection de concerts, de camps de vacances ou de grands magasins de grandes enseignes.


    Sur le site de Roussel (capture d’écran)

    Mais, dès la page d’accueil, elle donne comme « référence » la République centrafricaine, en reproduisant les armoiries de la RCA, et un écusson de formateur de la garde présidentielle centrafricaine.

    En faisant appel à une société militaire privée, le nouveau pouvoir centrafricain se dote de moyens militaires que la France lui refuse, dans un climat de confusion politique, militaire et humanitaire totale.

    La semaine dernière, cinq ONG françaises (Médecins Sans Frontières, Action Contre la Faim, Médecins du Monde, Première Urgence-Aide Médicale Internationale et Solidarités International) avaient lancé un appel urgent à renforcer l’action des Nations unies en Centrafrique, « alors que le pays est plongé dans le chaos et l’instabilité politique et que les besoins des populations sont criants ».

    Elles ajoutaient :

    « Au moment où se profilent une dégradation nutritionnelle et un important pic de paludisme, ce désintérêt aggrave encore une crise humanitaire particulièrement alarmante. Confrontée depuis des décennies au chaos politico-militaire, la République Centrafricaine (RCA) est devenue un contexte d’urgence humanitaire et médicale chronique. »

    La Séléka au coeur du problème

    Dans ce contexte, les anciens rebelles de la coalition Séléka qui ont pris Bangui en mars dernier non seulement ne parviennent pas à stabiliser la situation, mais font partie du problème. Fin juin, Bangui connaissait une nouvelle flambée de violences faisant six morts, et au cours desquelles les ex-rebelles pourtant au pouvoir ont été accusés de pillages, notamment au Crédit mutuel de Centrafrique.

    L’arrivée des hommes de Roussel à Bangui apporte un élément de tension supplémentaire en venant renforcer le pouvoir du président de transition alors que c’est du côté des forces multinationales, africaines ou onusiennes, que l’on attendrait des renforts.

    D’où la tension avec la France, qui redoute surtout d’être associée aux luttes pour le pouvoir à Bangui, dans la meilleure tradition de la Françafrique qui a longtemps sévi dans ce pays.

    D’autant que si les hommes de Roussel venaient à être considérés comme des « mercenaires », ils seraient passibles de poursuites en France où cette activité est proscrite depuis une loi de 2003.

    Eloge de la sécurité privée

    Cette affaire centrafricaine survient alors qu’un débat a été lancé en France, l’an dernier, par un rapport parlementaire qui prenait ouvertement parti en faveur de la légalisation en France des sociétés militaires privées (SMP), sous prétexte que le « marché » est dominé par les anglo-saxons.

    Les rapporteurs (au cours de la précédente législature), Christian Ménard (député UMP du Finistère) et Jean-Claude Viollet (député PS de Charente), se lamentaient :

    « Le développement du secteur en France semble pâtir de la mauvaise image accolée aux prestations privées touchant à la défense. Leur offre souffre d’un amalgame avec les activités de mercenariat ».

    Et Christian Ménard déclarait même au NouvelObs.com qu’un des avantages des SMP pouvait être d’assurer « une porte de sortie pour les militaires à la retraite et qui souhaitent se reconvertir ». Comme les anciens du 3e RPIMa présents à Bangui...

    Un autre avantage de cette privatisation, aux yeux des rapporteurs de droite comme de gauche, serait de permettre de faire des choses que les Etats ne peuvent pas assumer. Les exemples abondent, en Afrique, en Irak ou en Afghanistan...

    En attendant, la France a une affaire de mercenaires, ou de prestataires de services privés si on préfère, sur les bras. Au coeur d’une poudrière africaine qui s’appelle Bangui.