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Israel:le petit ogre - Page 8

  • La vidéo que Manuel Valls tente de faire disparaître

     

    Par Hicham Hamza

    Censure. Depuis son accession au pouvoir, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls essaye d’étouffer le scoop d’Oumma dévoilant sa propre confession de son « lien éternel » avec « la communauté juive et Israël ». Retour sur les dessous d’une information embarrassante pour celui qui vise désormais Matignon et l’Élysée.

     

     

    Depuis quelques semaines, la rumeur parcourt les réseaux sociaux et les sites alternatifs : selon certains, Manuel Valls aurait lui-même demandé à Youtube et Dailymotion de retirer une vidéo, révélée en 2011 par Oumma, dans laquelle il affirma, entre autres paroles stupéfiantes, être « par sa femme, lié, de manière éternelle, à la communauté juive et à Israël ». Voici la vidéo en question, désormais remise en ligne.

     

     

    À l’origine de sa diffusion, Oumma apporte aujourd’hui des éléments inédits d’information au sujet du retrait attesté de cette vidéo.

    Rappel chronologique

    - 17/06/11 : candidat aux primaires socialistes, Manuel Valls est invité par Radio Judaïca Strasbourg dans le cadre d’une conférence-débat.

     

     

    - 20/06/11 : le site de la radio communautaire met en ligne un extrait de 4’41 intitulé « Coup de gueule de Manuel Valls à Radio Judaïca » et publié via son compte Dailymotion.

    - 29/09/11 : Oumma repère la vidéo et fait le buzz en publiant le premier articleconsacré à l’information principale contenue dans cette confession choc de Manuel Valls – son « lien éternel » avec « la communauté juive et Israël ». Nous avions alors souligné l’incongruité de la scène : un élu républicain – censé servir la France et le principe de laïcité – en train de déclamer, en raison de son lien conjugal, une préférence communautaire spécifique et une allégeance, formulée en des termes religieux, envers une nation étrangère pratiquant, de surcroît, une politique colonialiste. Le scoop devient rapidement viral : près de 100 000 visionnages cumulés sur le Net et plus de 3 400 partages de l’article sur Facebook (un chiffre rivalisant aisément avec les articles les plus partagés du site Lemonde.fr).

    - Automne 2011/hiver 2012 : l’information continue d’être abondamment relayée et commentée sur le web, notamment via les forums communautaires. Une curieuse exception est à signaler : le célèbre blog ultra-nationaliste Fdesouche – qui se targue de lutter contre le communautarisme, surtout quand celui-ci est musulman – a d’abord publié la vidéo avant de la retirer subitement et sans explication. Une capture d’écran du cache de Google fut réalisée pour attester de cette délicatesse inattendue de la part de la blogosphère identitaire envers Manuel Valls.

     

     

    En dépit du buzz, le plafond de verre médiatique n’est pas percé pour autant : l’ensemble des médias généralistes continuent d’ignorer le sujet.

    - 10/05/12 : l’auteur de ces lignes reçoit le message, envoyé depuis une adresse Hotmail, d’un certain Olivier Jelinek lui demandant de retirer la vidéo, pourtant contextualisée, de son propre compte Youtube. L’homme se présente comme le responsable du site web de Radio Judaïca Strasbourg. Bizarrement, le nom figurant dans la partie « expéditeur » du mail fait référence à Olivier Singer, et non Olivier Jelinek. Le mail est envoyé sept mois après la mise en ligne de notre vidéo – siglée Oumma.com – et quatre jours seulement après l’élection de François Hollande à la présidence de la République. C’est durant ces jours-ci qu’une rumeur prend de l’ampleur : le prochain ministre de l’Intérieur pourrait être Manuel Valls.

     

     

    - 17/05/12 : le journaliste Alain Gresh du Monde diplomatique fait une brève allusion aux propos de Manuel Valls à la fin de d’un billet publié sur son blog.

    - 30/05/12 : l’auteur de ces lignes reçoit un mail de Youtube lui indiquant que ses 2 vidéos (extrait court d’1’/intégral de 4’41) ont été supprimées de son propre compte à la suite d’une demande formulée par Patrick Cohen, président de Radio Judaïca, pour « atteinte aux droits d’auteur ». Si d’autres comptes Youtube ont connu le même sort à propos de cette vidéo, force est de constater que les représailles de la radio communautaire se sont exercées, non pas dans l’immédiat mais huit mois après notre mise en ligne et de manière particulièrement sélective : l’extrait d’une minute continue ainsi d’être disponible sur plusieurs autres comptes vidéo. Entre la date du mail de réclamation et celle du retrait opéré, Manuel Valls est devenu « le premier flic de France ». Faut-il y voir une corrélation ? Toujours est-il que la vidéo de Radio Judaïca est depuis passée, sur le compte Dailymotion du média strasbourgeois, en « mode privé », rendant également impossible son visionnage.

    - 08/11/12 : l’émission « Envoyé spécial » de France 2 consacre un sujet à l’encyclopédie en ligne Wikipédia. Les journalistes du service public y font état d’une information troublante : la mention relative à « son lien éternel » avec « la communauté juive et Israël » a disparu de la page consacrée à Manuel Valls. Prétexte invoqué selonPierre-Carl Langlais, co-administrateur du site : cette information serait « totalement anecdotique ». La question fait pourtant débat comme le révèlent les échanges entre les contributeurs du site.

     

     

    - 09/11/12 : le journaliste Daniel Schneidermann publie sur son site Arrêt sur imageset sur Rue89 un billet à propos de l’émission de France 2. Il s’interroge notamment sur le motif invoqué pour supprimer la déclaration de Valls : « En quoi la citation de Valls, ministre en exercice, sur Israël, est-elle plus “anecdotique” que celle de Georges Frêche sur Jean-Paul II ? »

    - 14/11/12 : la journaliste Aurore Gorius du site Arrêt sur images publie son enquête, très débattue parmi les internautes, à propos de la double suppression – sur Wikipedia et Youtube – des propos de Manuels Valls. Interrogé sur le motif de son intervention, Patrick Cohen accuse Oumma.com d’avoir « détourné notre vidéo » en y « apposant son nom et un commentaire prétendant que Manuel Valls faisait allégeance à une communauté étrangère ». Curieuse allégation : nul « détournement » ni prise d’otage ne s’est produit à propos de cette vidéo.

    À l’instar de nos confrères de la presse généraliste ou alternative, nous avons simplement relayé ce document, avant qu’il ne disparaisse – comme ce sera finalement le cas – et en prenant le soin d’en indiquer la provenance. Quant au fait d’« apposer son nom », c’est la pratique élémentaire quand un média, quel qu’il soit, est à l’origine d’une information exclusive ou passée inaperçue. Partisans du devoir d’informer l’opinion publique sur les dérives de nos élus, nous avons, en conséquence, apposé notre signature, contextualisé les faits et formulé en complément notre propre commentaire éditorial.

    Patrick Cohen affirma également à la journaliste qu’il n’a pas subi de pression pour faire retirer la vidéo tout en précisant être « en contact » avec le cabinet de Manuel Valls. Quant au motif du retrait de la vidéo de son propre site, il est savoureux : « Manuel Valls avait changé de statut entre-temps. Et cela me gênait car il répondait à une question du public qui accusait le PS d’être anti-juif. Il s’emporte un peu dans sa réponse. Mais dans la vidéo, on ne voit pas le contexte. » Avant de conclure : « Et ce n’était plus d’actualité depuis des mois. Un site doit être mis à jour. »

    Le même jour, sur son blog, Alain Gresh s’étonne du prétexte invoqué par Patrick Cohen au sujet des « droits d’auteur », ajoutant que « la censure est difficile sur Internet ». Une réalité numérique déjà conceptualisée dans ce que l’on nomme « l’effet Streisand » : en tentant de faire disparaitre du Net la photo de sa maison, Barbra Streisand avait décuplé sa diffusion. En outre, le recours à des sites étrangers de partage vidéo comme Rutube ou Metacafe permet d’ores et déjà de contourner toute tentative de censure hexagonale.

     

     

    - 27/11/12 : le journaliste du Monde diplomatique revient à nouveau sur les déclarations passées sous silence de l’homme de la place Beauvau. Dans un nouveaubillet, il affirme : « Lorsque l’on a un ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, qui peut proclamer que, par sa femme,il est “lié de manière éternelle à la communauté juive et à Israël”, nous pouvons nous inquiéter. Valls a tenté d’obtenir la suppression de cette citation, notamment dans sa biographie sur Wikipedia et en demandant à la radio de Strasbourg, sur laquelle il a proféré ces insanités, de les retirer au nom du droit d’auteur. Mais la censure ne peut rien contre Internet. »

    Quand Valls reprend le mensonge des « jumelles de Giscard »

    En ce 12 décembre 2012, la vidéo de Manuel Valls continue de susciter l’étonnement des nombreux internautes, jour après jour, qui la découvrent. Sur la forme, l’image contraste avec celle affichée dans la récente émission « Des paroles et des actes » de France 2. On y découvre un homme coléreux, vindicatif et un brin méprisant, notamment à l’encontre de Roland Dumas et de Valéry Giscard d’Estaing.

    Sur le fond, son dédain manifesté à propos de ces deux anciens responsables politiques est tout aussi révélateur que sa phrase, désormais célèbre, au sujet de la communauté juive et d’Israël. Sur la question israélo-palestinienne, Valls et Dumas – qualifié de « sale bonhomme » – représentent deux écoles de pensée radicalement opposées. Il en va de même sur la controverse du 11-Septembre : si Roland Dumas ne croit pas à la version officielle – comme il nous l’avait expliqué en 2010 – Manuel Valls, lui, considèreque tout sceptique sur le sujet est comparable à ceux qui « nient la Shoah ». Une attitude saluée par les membres de l’association « Europe-Israël » comme l’illustre leur montage vidéo.

     

     

    Quant à l’ancien président de la République, il permet à l’ex-candidat aux primaires socialistes de se joindre aux artisans d’une désinformation politico-communautaire qui perdure : selon Manuel Valls, Valéry Giscard d’Estaing se serait rendu coupable d’avoir « regardé Israël depuis la Jordanie avec des jumelles ». L’élu fait ici allusion à une photo de VGE, capturée par l’agence Gamma lors d’un périple moyen-oriental en mars 1980 et diffusée par Henri Hadjenberg, alors responsable du mouvement « Renouveau juif » et futur dirigeant du CRIF. Comme le démontra en 1992 la journaliste Josette Alia, il s’agissait d’une opération mensongère de propagande visant, en période pré-électorale, à diaboliser VGE, jugé trop pro-palestinien, au profit de son rival François Mitterrand.

    La chose est troublante : en juin 2011, soit trente ans plus tard, le futur responsable de la police nationale et du Renseignement intérieur faisait mine, pour séduire les électeurs strasbourgeois pro-israéliens, de croire qu’il s’agissait d’une authentique photo afin de pouvoir s’en indigner avec emphase.

     

     

    Oumma reviendra prochainement sur Manuel Valls en publiant un portrait spécial consacré à l’homme qui se rêve déjà président de la République. Nous reviendrons en détail sur ses connexions politiques, sécuritaires et communautaires, notamment à travers sa relation avec des personnages essentiels de « l’État profond » français telAlain Bauer. Enfin, nous tenterons d’expliquer pourquoi le ministre, loin d’être simplement un social-libéral clintonien, est davantage un néoconservateur à la française, de plus en plus dévoué à l’axe atlanto-sioniste et potentiellement menaçant pour la liberté d’information des citoyens.

     

    Quelques commentaires d'internautes...


    Personnellement je ne vois (ou plutôt revois) rien de bien nouveau....pour réussir une carrière politique en France,il faut être ouvertement acquis à la cause sioniste,ça n’a rien de nouveau,même si,je vous l’accorde s’est malheureusement la preuve que la pseudo-démocratie n’est qu’une sinistre illusion "humaniste" et que tout est manipulé en coulisse par cette communauté à qui il faut en permanence cirer les pompes crasseuses pour pouvoir accéder aux miettes qu’elle veut bien nous laisser.
    La communauté juive de France représentant 1% de la population devrais selon toute logique occuper 1% de la scène médiatico-politique....on voit bien la l’inversion des proportions....vu qu’elle l’occupent à 99% ^^ 
    A part ça,ces gens ont toujours été persécuté à tort au cours de l’histoire....la bonne blague....persécuté pour leur religion soit disant,rien à voir avec les agissements abjectes dont ils sont coupable,c’est l’art de présenter le bourreau en victime



     

    Vidéo disponible également ici, pour ceux qui comme moi n’ont pas réussi à la télécharger depuis Rutube : http://www.youtube.com/watch?v=2_ZF...

     

    De mon côté c’est bon, stockée chez moi et dupliquée sur des serveurs distants. Lien envoyé à des contacts qui vont eux aussi la télécharger.

     

    Valls grillé.

     

     

     

     

     

    Je vous l’avez dit. Celui là c’est le pire de tous, un vrai salaud de traitre vendu à l’américano-sionisme intégralement et sans aucune concession. N’oublions pas que les politiciens du futurs seront avertis concernant "les dangers" d’Internet car de plus en plus jeunes et conscients de la gestion très fine et rusée de leur image.

    Je n’ai qu’une question à poser à Vals : "Que t’as dis Rockefeller pauvre enflure ? Quels furent les consignes distillées et qu’est-ce qui nous pend au nez pour les années à venir". N’oublions pas que Vals fut convoqué à la Kommandantür Etats-Unienne et ça c’est pas bon du délire de parano vu qu’il le confirme aux gars de WAC Paris.

     

     

     

     

     

    "Valls avec Bachir"
    Il arrive que les masques tombent. Encore faut-il savoir ou et quand regarder. Ou : Radio Judaïca Strasbourg, quand : dans le passé, comme malheureusement trop souvent, en juin 2011. Emmanuel Valls, notre actuel Ministre de l’Intérieur, ne reçoit pas de leçon d’antisémitisme mais nous en donne une MAGISTRALE ! Grinçant ? oui, très. Quand je pense a tous les musulmans qui on voté Hollande et PS… quelle tristesse… quelle politique de la confusion… Valls s’échauffe, remue, dénonce dans une finalité électorale, et nous assistons a une véritable déclaration d’amour et de fidélité a Israël en vue d’écarter l’amant de droite Sarkosy d’un futur électorat O combien influent… Mais cela va bien plus loin, il y est question de sa propre personne ou se mêlent ses convictions intimes, sa situation familiale, dans un lien sacralisé et inébranlable avec Israël. Cela explique sa fougue, que m’inspirerait celle d’un cocu éternel ou d’un prétendant de seconde classe. Ce qu’il est et restera d’ailleurs. Car n’oublions pas que Valls joue d’abord ses primaires PS, dont on se souvient tous le score… Mr le Ministre nous dévoile ici son sinistre intérieur. « Merde ! quand même ! », a chacun d’apprécier…

     

     

     

  • Justice et tribalisme

     

    Par la rédaction d’E&R

    Parce qu’il suspectait un manque possible d’impartialité pour des raisons confessionnelles, un avocat de Lyon a demandé la récusation du juge Albert Lévy dans une affaire où le père de la prévenue s’appelle Moïse. Bien entendu, l’antiracisme institutionnel a immédiatement fait feu de tout bois.

    Le MRAP, s’est dit « scandalisé » que l’avocat ait demandé la récusation d’un juge « parce que juif »... L’association « antiraciste » a par ailleurs demandé à l’ordre des avocats de Lyon « d’étudier les sanctions disciplinaires qu’appelle la situation ».

    L’ordre des avocats de Lyon a plaidé pour la tenue d’un conseil de discipline à l’encontre de Me Alexis Dubruel, tandis que le syndicat de la Magistrature dénonçait lui aussi la démarche de l’avocat.

    Alain Jacubowicz, avocat du juge Lévy et accessoirement président de la LICRA, a également fustigé cette demande de récusation, annonçant attendre « de voir comment va réagir l’autorité judiciaire. Le parquet général peut saisir le procureur de la République pour d’éventuelles poursuites. »

    Le Parquet général a décidé d’engager la procédure disciplinaire.

    La garde des Sceaux Christiane Taubira s’est fendue d’un communiqué dans lequel elle « exprime sa plus vive réprobation à l’égard de toute mise en cause de l’impartialité d’un magistrat dans l’exercice de ses fonctions du fait de ses origines, de son patronyme, ou de son appartenance ou sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, ou une religion déterminée ».

    Parallèlement à cette affaire, l’humoriste Dieudonné vient d’être condamné à 20 000 euros d’amende par la 17e chambre du Tribunal de grande instance de Paris, pour avoir produit la vidéo Shoahnanas. Rappelons que SOS Racisme et la LICRA s’étaient constituées parties civiles du procès ; Cindy Léoni, nouvelle présidente « israélo-sénégalaise » de SOS Racisme, assistait au délibéré.

    Bien entendu, nous ne saurions à notre tour faire de lien entre l’attaque en justice de Dieudonné pour Shoahnanas et la confession religieuse de ceux qui l’ont attaqué, car ces avocats et militants associatifs sont animés par la plus grande neutralité professionnelle, la République française n’est parasitée par aucun lobby, et la solidarité tribale n’existe pas.

    Retrouvez Dieudonné dans le Dieudo-Shop et sur Kontre Kulture :

  • Libérer les Palestiniens des mensonges de Bernard-Henri Lévy (II)

     


    mardi 20 novembre 2012
    , par Alain Gresh

    L’homme est entré à Gaza sur les tourelles d’un char israélien début 2009, lors de l’opération « Plomb durci ». Il n’a rien vu à Gaza, aucun crime, aucune violation du droit international. Pour justifier une opération qui a fait plus de 1 400 morts du côté palestinien (en majorité des civils), il a utilisé les mêmes arguments, les mêmes mensonges qu’invoquait l’armée française durant la guerre d’Algérie — ces arguments que défendaient le général Bigeard, à qui le gouvernement de gauche rend hommage ce 20 novembre, et certains intellectuels de l’époque (oui, il existait des intellectuels affirmant que la torture n’était pas pratiquée en Algérie).

    J’avais, dans un précédent papier, appelé à libérer les Palestiniens des mensonges de Bernard-Henri Lévy. Il remet cela aujourd’hui, dans une de ses chroniques du Point (22 novembre), intitulée « Obscénités ».

    « Remettons les choses en place. Tsahal a évacué Gaza, unilatéralement, sans conditions, en 2005, à l’initiative d’Ariel Sharon. Il n’y a plus, depuis cette date, de présence militaire israélienne sur ce territoire qui est, pour la première fois, sous contrôle palestinien. »

    Premier mensonge. Gaza reste, pour les Nations unies, un territoire occupé. La seule différence, c’est que les geôliers sont hors de la prison, pas à l’intérieur. Mais ils ne soumettent pas seulement le territoire à un blocus, ils empêchent Gaza d’exporter ses productions agricoles et, comme le rappelle l’ONU, 35 % des terres cultivables et 85 % des eaux pour la pêche sont partiellement ou totalement inaccessibles aux Gazaouis en raison des restrictions israéliennes.

    « Les gens qui l’administrent et qui, par parenthèse, ne sont pas arrivés par les urnes mais par la violence et au terme — juin 2007 — de plusieurs mois d’un affrontement sanglant avec d’autres Palestiniens, n’ont plus avec l’ancien occupant l’ombre d’un contentieux territorial du type de celui qu’avait, mettons, l’OLP de Yasser Arafat. »

    S’il y a eu une guerre civile interpalestinienne, le Hamas a gagné des élections démocratiques en 2006, en Cisjordanie et à Gaza. Et que veut dire : les gens qui administrent (Gaza) n’ont pas de contentieux territorial avec Israël ? C’est à peu près le langage que tenaient les Américains pendant la guerre du Vietnam, lorsqu’ils disaient que le Nord-Vietnam n’avait aucun contentieux territorial.

    L’enjeu, rappelons-le, est l’édification d’un Etat palestinien indépendant que le gouvernement israélien rejette.

    « Des revendications d’un Arafat comme de celles, aujourd’hui, de Mahmoud Abbas, on pouvait estimer qu’elles étaient excessives, ou mal formulées, ou inacceptables  : au moins existaient-elles et laissaient-elles la possibilité d’un accord politique, d’un compromis, alors que, là, avec le Hamas, prévaut une haine nue, sans mots ni enjeux négociables — juste une pluie de roquettes et de missiles tirés selon une stratégie qui, parce qu’elle n’a plus d’autre but que la destruction de l’“entité sioniste”, est une stratégie de guerre totale. »

    Excessives, les revendications d’un Mahmoud Abbas qui réclame 22 % de la Palestine historique ? Et, contrairement à ce que prétend notre « philosophe », il n’y aura aucun accord politique possible tant que les gouvernements israéliens rejetteront l’application du droit international et le retrait d’Israël de tous les territoires occupés. Quant à la position du Hamas, BHL la déforme totalement. S’agissant de la recherche d’une solution politique, le Hamas est bien plus modéré qu’Avigdor Lieberman, ministre des affaires étrangères israélien et militant d’extrême droite notoire. Paradoxalement, si Lieberman avait été élu dans un pays européen, BHL serait le premier à demander son boycott par les autorités françaises.

    « Et quand Israël, enfin, s’avise de cela, quand ses dirigeants décident de rompre avec des mois de retenue où ils ont accepté ce qu’aucuns autres dirigeants au monde n’ont jamais eu à accepter, quand, constatant, de surcroît, dans l’effroi, que le rythme des bombardements est passé d’une moyenne de 700 tirs par an à presque 200 en quelques jours et que l’Iran a, par ailleurs, commencé de livrer à ses protégés des FAJR-5 pouvant frapper, non plus seulement le sud, mais le cœur même du pays, et jusqu’aux faubourgs de Tel-Aviv et Jérusalem, ils se résolvent à réagir — que croit-on qu’il se passe  ? »

    Encore un mensonge. Comme en 2008, c’est le gouvernement israélien qui a rompu la trêve. Entre juin 2008 et novembre 2008, le cessez-le-feu régnait, et c’est l’assassinat par l’armée israélienne de militants palestiniens à l’intérieur de Gaza qui déboucha sur une escalade. La simple consultation des rapports hebdomadaires des Nations unies sur la situation à la frontière, en octobre-novembre 2012, montre que, à chaque fois, ce sont des assassinats ciblés israéliens qui ont entraîné l’engrenage de la violence.

    « Le Conseil de sécurité des Nations unies, que l’on a rarement vu, ces derniers mois, si prompt à la détente, se réunit dans l’urgence pour débattre, non de l’éventuelle disproportion, mais du principe même de la légitime défense israélienne. Le ministre des Affaires étrangères britannique, à qui l’on ne souhaite pas de voir la partie sud de son pays sous le feu d’une organisation reprenant le sentier de la guerre terroriste, menace l’Etat hébreu de perdre, en faisant son travail de protection de ses citoyens, les maigres derniers soutiens qu’il a la bonté de lui reconnaître sur la scène internationale. »

    « La responsable de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, commence par dédouaner le Hamas d’attaques fomentées pour partie, selon elle, par d’“autres groupes armés” et ne trouve à déplorer, dans le plus pur style tartufe du renvoi dos à dos des extrémistes-des-deux-bords, qu’une “escalade de la violence” où, comme dans la nuit hegelienne, toutes les vaches sont devenues grises »

    Ces déclarations européennes ne doivent tromper personne. Tout le monde sait que, depuis des années, l’Union européenne développe des relations bilatérales avec Israël, indépendamment de l’action de ce pays dans les territoires occupés, indépendamment de la construction quotidienne de colonies, indépendamment de la violation régulière des droits humains.

    « Le Parti communiste, en France, exige des “sanctions”. Les Verts, que l’on n’a guère entendus, ni sur la Syrie, ni sur la Libye, ni sur les centaines de milliers de morts des guerres oubliées d’Afrique ou du Caucase, clament que “l’impunité d’Israël doit cesser”. Des manifestants “pacifistes”, qui ne daignent pas, eux non plus, sortir de chez eux quand c’est Kadhafi ou Assad qui tuent, descendent soudain dans la rue — mais c’est pour dire leur solidarité avec le seul parti qui, en Palestine, refuse la solution des deux Etats, donc la paix. »

    « Et je ne parle pas de ces experts ès conspiration qui, confortablement installés dans leur fauteuil d’éditorialiste ou de stratège en chambre, ne veulent voir dans cette histoire que la main démoniaque d’un Netanyahou trop heureux d’une nouvelle guerre qui va faciliter sa réélection. Je n’entrerai pas dans des comptes d’apothicaire remontrant à ces ignorants que tous les sondages, avant la crise, donnaient Netanyahou déjà largement gagnant. Je ne m’abaisserai pas à confier à des gens pour qui, de toute façon, quoi qu’il fasse, Israël est l’éternel coupable, ce qui, si j’étais israélien, me dissuaderait, moi, de voter pour la coalition sortante. »

    Vous l’avez compris, BHL n’est pas confortablement installé dans son fauteuil, et si l’armée israélienne envahit Gaza, nul doute qu’on le verra sur un char israélien. Quant à la dimension électorale de l’action, elle est évidente, même si elle n’est pas la seule dimension de cette intervention. Car, contrairement à ce qu’écrit notre « philosophe », l’avance de Nétanyahou ne l’assurait pas du tout de la victoire. Quant au vote de BHL, il irait sans doute à l’opposition, celle qu’incarnent M. Olmert et Mme Livni, ceux-là mêmes qui ont mené la guerre de 2006 contre le Liban et de 2008-2009 contre Gaza, avec l’appui, rappelons-le, du mouvement La Paix maintenant.

    « Et quant à rappeler à ces petits malins que, s’il y a une manœuvre, une seule, aux sources de cette nouvelle tragédie, c’est celle d’un establishment Hamas qui est prêt à toutes les surenchères et toutes les fuites en avant, et qui est décidé, en réalité, à lutter jusqu’à la dernière goutte de sang du dernier Palestinien plutôt que d’avoir à rendre le pouvoir, ainsi que les avantages qui vont avec, à ses ennemis jurés du Fatah — à quoi bon  ? »

    Le plus étonnant, c’est que, comme le reconnaissent divers journalistes israéliens bien plus courageux que BHL, le Hamas tente, depuis cinq ans, de faire appliquer le cessez-le-feu, mais il fait face à des groupes radicaux qui se nourrissent du désespoir palestinien (et qui sont armés, entre autres, avec du matériel issu des arsenaux libyens que plus personne ne contrôle).

    « Face à ce concert de cynisme et de mauvaise foi, face à ce deux poids deux mesures qui fait qu’un mort arabe n’est digne d’intérêt que si l’on peut incriminer Israël, face à cette inversion des valeurs qui transforme l’agresseur en agressé et le terroriste en résistant, face à ce tour de passe-passe qui voit les Indignés de tous pays héroïser une nomenklatura brutale et corrompue, impitoyable avec les faibles, les femmes, les minorités et enrôlant ses propres enfants dans des bataillons de petits esclaves envoyés creuser les tunnels par où transiteront les douteux trafics qui vont les enrichir encore, face à cette méconnaissance crasse, en un mot, de la nature réelle d’un mouvement dont “Les protocoles des sages de Sion” sont un des textes constitutifs et que son chef, Khaled Mechaal, dirigeait jusque récemment depuis une confortable résidence à Damas, il n’y a qu’un mot  : obscénité. »

    « Obscénité » : BHL fait sans doute référence à ses propres « arguments » pour justifier l’injustifiable.

    Sur BHL, lire notre dossier en ligne « L’imposture Bernard-Henri Lévy ».

  • Israël : l’impunité jusqu’à la nausée…

     

    Quelle scène pitoyable que ce Netanyahu avec son accent de guerrier va-t-en-guerre à la tête de l’état dont les services secrets sont les plus crains au monde, à la tête d’un pays disposant de suffisamment de têtes nucléaires pour raser la région, à la tête d’un état qui n’a de compte à rendre à personne pas même aux Etats-Unis où l’état est sous la coupe de leurs lobbies et le peuple américain sous le joug de l’implacable propagande sioniste, à la tête d’un état capable de frapper des individus n’importe où en toute impunité allant même jusqu’à falsifier des passeports européens, à la tête d’un état créé par les services secrets des plus grandes puissances de l’occident, à la tête d’un état bénéficiant d’un insondable soutien armé et financier de l’Europe et des USA avec une coopération dans tous les domaines, à la tête d’un état qui peut terroriser le monde selon l’expression de Golda Meir, voilà ce Netanyahu qui parle comme s’il avait attaquer un terrible adversaire quand il ne s’agit que du Hamas de la bande de Gaza, ce camp de réfugiés qui manquent de tout, dont les armes les plus sophistiquées sont des roquettes préhistoriques qu’ils tirent comme des lance-pierres dont les plus puissantes s’effondreront en mer avant d’atteindre Tel-Aviv.

    Israël s’apprête encore à entrer dans Gaza pour tuer les têtes pensantes, les leaders de la résistance et tout détruire comme il y a 4 ans. Ils laisseront là encore certainement 1500 victimes au bas mot où on ne comptera plus les femmes et les enfants.

    Qui peut s’opposer à cela ? Israël ne fait qu’appliquer la règle avec laquelle les vieilles démocraties et tous les états du monde ont créé leur nation à savoir la guerre, la colonisation et l’expropriation. Ce fut ainsi de tout temps jusqu’au jour où les nations s’estimant enfin civilisées décrétèrent que ce temps fut un temps barbare et qu’à l’avenir « plus jamais ça ! ». Désormais les peuples auraient droit de disposer d’eux-mêmes, fini le temps des colonies, fini le temps de la barbarie. Chacun serait maître chez soi en épongeant les ardoises barbares de l’histoire pour recommencer à partir du nouveau temps de l’humanité des sociétés occidentales devenues civilisées.

    Mais à toute règle fallait une exception ou du moins ne fallait-il pas laisser en rade ce peuple juif métissé par 2000 ans d’errance et si martyrisé par l’occident. Pour mieux l’éloigner, on lui trouva une terre loin de l’occident. Mais de même que l’Amérique était peuplée d’indiens et n’était nullement un territoire vierge à découvrir, il se trouve que la Palestine est peuplée de palestiniens. La suite on la connaît. En moins de 60 ans, Israël est devenue une invincible puissance nucléaire autant que politique car Israël n’est rien que le corps d’une tout autre puissance dont l’esprit est ailleurs dans toutes les capitales occidentales où les élus ne peuvent plus rien faire car dit-on les sionistes font et défont leurs présidents.

    Théorie du complot vous répondront-ils ! Eh bien si cela n’est pas vrai, oublions les faits, tout ce que nous savons déjà et voyons ce que fut la dernière visite de Netanyahu au congrès américain. Tout est dit… Ce texte sans appel n’est pas d’un palestinien mais Uri Avnery en 26 mai 2011.

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    Il y a 6 mois - 1 minute

    En Israël, tout le monde s'attendait à une dissolution du Parlement et à des élections (...)

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    C’est cela le plus dramatique, il n’y a plus rien à espérer des USA pour tempérer Israël : la créature domine son créateur. D’où viendra la solution ? Vouloir espérer un état deux peuples vu l’état du fait accompli c’est espérer pour les palestiniens le sort des arabes israéliens. Israël est une terre créé pour les sionistes aussi il ne peut y avoir de solution que lorsque l’une des parties se retirera ou baissera définitivement les armes. Peut-on imaginer Israël s’effondrer ? Qui peut dire ce que réserve l’histoire vu que tôt ou tard nous verrons les USA s’effondrer comme d’autres empires ont disparu ? Peut-on imaginer que le Hamas fasse comme l’OLP et baisse le ton face au fait accompli ? C’est oublier que l’islam combattant peut être jusqueboutiste car l’histoire de l’islam apprise à chacun est pleine d’exemples où un petit nombre finit par renverser des forces supérieures avec l’aide de Dieu. Renoncer à se battre sans concessions reviendrait à renier sa religion selon cette interprétation qui peut être suicidaire surtout quant on estime que la mort est préférable à l’humiliation comme c’est écrit dans le coran « la persécution est pire que le meurtre ».

    Nous assistons là au face-à-face entre deux logiques : d’un côté d’Israël avec la logique des armes et de la loi du plus fort et de l’autre la logique de la passion, de la fierté et de l’invincible foi qui réclame d’aller jusqu’au bout « vaincre ou mourir ».

    Peut-on en vouloir à ceux qui se battent jusqu’à la mort ? Chaque pays est plein de ses héros qui sont tombés avec cette philosophie.

    O vaillant peuple palestinien ! De notre cynisme, de notre lâcheté, de notre impuissance, de la société de consommation où l’on dit que c’est la fin de l’histoire, nous contemplons ce qui vous distingue de nous… Vous êtes les martyrs de la résistance dont le sang coule, nous sommes les indignés de la plume à l’abri…

    Vlane.A.O.S.A

     
     
  • Israël ne cédera jamais les territoires occupés

    EN MÉMOIRE DE NOTRE ESTIMÉ CONFRÈRE GIORGIO S. FRANKEL 

    Notre confrère Giorgio S. Frankel(*) était un journaliste d’une rare honnêteté. Il a inlassablement dénoncé la politique poursuivie par les gouvernements successifs de l’Etat juif d’Israël. Un Etat qui s’est installé par la force sur une terre volée aux Palestiniens. Très peinée par sa disparition, le 20 septembre 2012, nous tenons à lui rendre hommage en republiant le long et fascinant entretien qu’il nous avait accordé en mai 2011 alors qu’il était très atteint par la maladie. Il nous avait parlé de la complicité lâche des journalistes alignés sur Israël qui mentent et couvrent les crimes les plus odieux. Nous gardons un souvenir émouvant de cet homme élégant dont le regard bleu intense et bon continue de nous habiter. - Silvia Cattori


    1ER OCTOBRE 2012 | THÈMES (S.CATTORI) : SIONISME RÔLE DES MÉDIAS

    Giorgio S. Frankel

    Israël ne cédera jamais les territoires occupés 
    (Entretien avec Giorgio S. Frankel publié en Italie le 25.05.2011)

    Les dirigeants israéliens affirment être « prêts à faire la paix » avec les Palestiniens. En réalité les gouvernements qui se sont succédé n’ont jamais eu la moindre intention de faire la paix. Ils se sont au contraire servis du dit « processus de paix » pour continuer leur politique de destruction et de déshumanisation, non seulement de la Palestine mais aussi d’autres pays et peuples du Proche et Moyen Orient. Ils ont pu continuer de massacrer et d’expulser le peuple palestinien hors de sa terre sans jamais subir de sanctions. L’écrivain Giorgio S. Frankel, met en relief dans cet entretien la complicité de ces journalistes partisans - et gouvernements occidentaux - dans l’expansion de l’État juif et dans la prolongation des souffrances du peuple palestinien.


    Silvia Cattori : Comme vous le savez quand il s’agit des crimes commis par l’armée israélienne contre les Arabes, la presse n’est pas du tout neutre. N’êtes-vous pas vous-même un de ces journalistes qui, dans le passé, a contribué à peindre une image idyllique d’Israël ?

    Giorgio S. Frankel [1] : Oui, dans le passé, j’ai participé à cette propagande sioniste parce que j’ai grandi dans un contexte favorable à Israël. Donc j’avais absorbé cette culture. Dans un certain sens la presse et les médias occidentaux contribuent activement à perpétuer l’image et l’idéologie d’Israël. Il y aurait ici un long discours à faire sur le pouvoir des forces pro-israéliennes dans la presse et les médias.

    N’oublions pas que pratiquement tous les correspondants des journaux étasuniens en Israël sont des Juifs pro-israéliens. Nombre d’entre eux ont servi volontairement dans les forces armées israéliennes. Donc ce phénomène existe. Un des piliers de la puissance israélienne dans le monde est cette capacité à perpétuer la narration israélienne et à continuellement modifier l’histoire pour la réécrire de façon favorable à Israël. Par exemple plus de 40 années sont maintenant passées depuis la guerre de juin 1967. Plus personne quasiment ne se souvient de la façon dont elle a commencé. La littérature pro-israélienne écrit avec désinvolture que ça a été une guerre dans laquelle Israël a dû se défendre d’une agression arabe. Cette agression n’a jamais existé. C’est Israël qui en juin 1967, à la fin d’une longue crise politique avec la Syrie, a attaqué l’Égypte par surprise. On écrit aujourd’hui qu’Israël a dû mener une guerre de défense après une agression arabe. C’est un exemple.

    Silvia Cattori : Le fait que les correspondants états-uniens envoyés en Israël soient, comme vous le soulignez, « quasiment tous des Juifs pro-israéliens » est certainement un problème. Mais, à votre avis, ne voyons-nous pas le même phénomène dans les pays européens ?

    Giorgio S. Frankel : L’Europe a eu une attitude partagée jusqu’à il y a quelques années. Dans un passé pas très lointain, l’Europe tendait davantage à sympathiser avec les Palestiniens. Dans les années 70 et 80, l’Italie était manifestement plus pro-arabe que pro-israélienne. L’attitude européenne a changé après l’attaque du 11 septembre 2001, quand s’est déchaînée dans le monde cette politique anti-arabe. L’attaque a été identifiée comme une offensive arabe contre le monde occidental. Après ce virage une hostilité croissante envers l’Islam s’est diffusée dans le monde occidental.

    L’islamophobie en Europe a été transmise par les États-Unis. Aujourd’hui, l’Europe -la politique des pays européens alignés après le 11 septembre sur les positions états-uniennes et la guerre d’Irak- poursuit une politique anti-arabe. Cette islamophobie croissante est en grande partie alimentée, partagée, soutenue par Israël. Il faut savoir que les Européens les plus racistes, comme le Hollandais Gert Wilders, et d’autres racistes nordiques, sont aujourd’hui considérés comme des héros en Israël. Gert Wilders est régulièrement invité à tenir des conférences même dans les universités israéliennes.

    On a cette attitude aussi dans les médias européens ; un peu moins dans les médias britanniques. Mais, en effet, pour de nombreuses raisons, Israël est arrivé à imposer son langage, son récit des épisodes proches et moyen orientaux. Les Israéliens ont un grand pouvoir, ils ont une grande capacité de propagande. Les Palestiniens ne disposent pas de cette force. Les Arabes n’ont pas cette capacité. Israël a pris le contrôle petit à petit. Il y a employé beaucoup de temps. Il a maintenant pratiquement le contrôle des communautés juives en Europe et aux États-Unis. Autrefois ce n’était pas comme ça. Autrefois les communautés juives critiquaient la politique d’Israël. Ainsi, si nous pensons à la propagande en faveur d’Israël, celle-ci n’est pas faite par des émigrés : elle est faite par des Juifs états-uniens qui en partagent la culture, le langage. Ce ne sont pas des étrangers. Les Juifs états-uniens sont pleinement intégrés, membres du Congrès, journalistes. La propagande pro-israélienne est renforcée de ce fait.

    Silvia Cattori : Quand ce contrôle politique d’Israël sur le monde juif a-t-il pris ce virage ?

    Giorgio S. Frankel : Il faut rappeler qu’à l’origine le sionisme était seulement hébergé dans le monde juif, surtout chez les Juifs états-uniens. Il a fallu beaucoup de temps pour que les sionistes arrivent à s’affirmer. Ceci, entre autres, est une des origines historiques de l’arrogance notoire, de la propension à la violence du sionisme. Le sionisme est devenu arrogant et politiquement violent justement à cause de son expérience aux États-Unis, quand il devait s’affirmer dans le judaïsme états-unien. Surtout après la deuxième guerre mondiale. Les Juifs du monde entier ont toujours eu une attitude très favorable et très sentimentale à l’égard d’Israël. Si l’on doit parler de virage, c’est après la guerre de juin 1967 qu’il y a eu un virage important. Cette guerre est très importante dans l’histoire d’Israël. Elle a créé dans la mentalité israélienne un sentiment de sécurité et de puissance. Ainsi il y a toujours eu une dialectique entre Israël et le judaïsme, quant à celui qui devait dominer l’autre. Mais après la guerre de 1967, les gouvernements israéliens ont décidé que c’était à eux qu’il revenait de dominer le monde juif. Cela s’est fait petit à petit.

    Silvia Cattori : Donc, à votre avis, la propagande des autorités israéliennes, qui a toujours consisté à dénigrer et déshumaniser les Arabes et les musulmans, sert, entre autres, à impliquer et à obtenir l’adhésion totale des Juifs au projet sioniste de domination et de destruction du peuple palestinien ?

    Giorgio S. Frankel : La peur des peuples musulmans a grandi après le 11 septembre. Cet événement a permis aux forces israéliennes de désigner le monde musulman comme un ennemi historique du monde occidental, ennemi avec lequel on ne peut pas faire la paix. En Europe, pour des raisons historiques, qui remontent aux Croisades, il y a cette peur ancestrale des musulmans. Après le 11 septembre il a été facile de relancer cette peur.

    Silvia Cattori : Cette propagande israélienne contre le monde arabe et musulman a réussi jusqu’à présent, avec l’aide de nos journalistes et gouvernements, à masquer de graves crimes comme l’épuration ethnique, l’annexion de Jérusalem, les massacres qui se répètent. Il est difficile de comprendre que des crimes aussi graves et massifs ne posent pas un problème moral aux Juifs qui soutiennent l’État qui les commet en leur nom. Nous voyons même des journalistes progressistes, des militants de groupes « Juifs pour la paix » tenir un discours qui « épargne » et dans un certain sens « légitime » le projet raciste de l’État exclusivement juif. Seuls quelques petits groupes marginaux ont toujours soutenu clairement le droit au retour des Palestiniens [2]. Ceci n’a-t-il pas toujours été une manière de légitimer la politique d’un État dont le projet raciste, dont l’idéologie violente, a vidé la Palestine de ses habitants ?

    Giorgio S. Frankel : C’est extrêmement compliqué. Si l’on s’en tient à des phases de la négociation israélo-palestinienne, les négociateurs palestiniens eux-mêmes disent implicitement que si l’on faisait un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza, le retour des réfugiés serait compris dans l’État palestinien ; qu’ils se contenteraient d’une déclaration de la part d’Israël d’une assomption de responsabilité historique du drame des Palestiniens chassés en 1948 ; qu’Israël pourrait ne laisser entrer que quelques dizaines de milliers de Palestiniens. Dans le plan de paix proposé par le roi d’Arabie saoudite en 2002, confirmé en 2007, n’est pas mentionné explicitement le droit au retour, mais une solution négociée entre Israël et les Palestiniens.

    Dans l’hypothèse d’une solution « deux États » le problème est de savoir si cette solution « deux États » est possible, avec Israël à l’intérieur des frontières de 67, et un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza. Pendant ces dix dernières années, on a continué à parler de « deux États pour deux peuples ». Ce qu’on a vu, peut-être définitivement en 2010, c’est que maintenant cette solution n’est absolument pas possible, parce qu’Israël a pris la moitié des terres confisquées en 1967 pour construire des colonies.

    Israël ne cédera jamais ces territoires palestiniens. Ce qui est apparu c’est qu’Israël n’est pas pressé : qu’Israël veut arriver, avec le temps, à la domination de tout le territoire. La domination totale de la Cisjordanie et de Gaza. Ce qui implique de fait, par conséquent, l’expulsion des Palestiniens qui y vivent.

    Silvia Cattori : L’Autorité de Ramallah, et les dirigeants de l’OLP -compromis dans des « processus de paix » qui ont permis à Israël de continuer à coloniser la Cisjordanie - ont renoncé aux droits légitimes de leur peuple, en pensant obtenir en échange leur « État » palestinien. Arriveront-ils à avoir cet État ?

    Giorgio S. Frankel : Oui, en effet. Même le président Yasser Arafat était sur cette position : si nous faisons un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza, nous ne prétendons plus au droit au retour. Dans les négociations avec Israël le droit au retour a été utilisé comme une carte négociable. Ce qui était important pour les dirigeants palestiniens était d’avoir leur État en Cisjordanie et à Gaza. Cet État désormais n’existera jamais plus. Il est possible que ces dirigeants palestiniens soient aujourd’hui en collusion avec Israël. Qu’ils soient donc pratiquement des fantoches d’Israël. Après toutes ces négociations ils n’ont absolument rien obtenu. Les conditions de vie des Palestiniens ont empiré.

    N’oublions pas que depuis qu’en 1993 a eu lieu la rencontre entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin, la fameuse poignée de main à la Maison Blanche, les Israéliens ont continué à exproprier des terres en Cisjordanie, à chasser les Palestiniens de leurs maisons pour développer leurs colonies. En ces 17 années on a amplement démontré qu’Israël n’a pas la moindre intention de faire une paix qui porterait à la création d’un État palestinien en Cisjordanie et Gaza.

    Quand les dirigeants israéliens parlent d’un État palestinien ils ne disent jamais où il devrait naître. Pour eux, l’État palestinien est la Jordanie. Leur objectif est de renverser la monarchie jordanienne et d’envoyer là-bas tous les Palestiniens. Voilà la doctrine : la Jordanie est la Palestine pour les Israéliens. Tout leur discours se trouve là. Les Israéliens n’ont jamais été disposés à restituer les territoires conquis en 1967. Jamais. Donc la question du droit au retour pour Israël ne se pose pas comme un objectif réaliste. Le problème est celui-ci : la formule des deux États n’est plus possible. Alors y aura-t-il un État qui comprend Israël, l’actuelle Cisjordanie et Gaza ? Il faut voir si cet État sera un État unique (binational), comme dit Ilan Pappé. Ou bien si ce sera un État dominé par les Israéliens dans lequel les Palestiniens ne seront jamais démographiquement en majorité mais seront soumis à la « domination juive ». Ils pourraient même en être chassés…

    Silvia Cattori : Cette éventualité, selon vous, est-elle probable ?

    Giorgio S. Frankel : Je pense qu’Israël - même si c’est une grande puissance mondiale, une puissance militaire, nucléaire et technologique - est en réalité en train d’aller au désastre. Vers un collapsus intérieur. Les indices en sont cette folie croissante de la classe dirigeante israélienne. On a vu cette dernière année justement l’escalade de racisme en Israël. Racisme envers les Arabes citoyens d’Israël. Il y a en Israël des manifestations de racisme contre les Arabes, de xénophobie envers les travailleurs étrangers, de xénophobie envers la composante russe. Il y a des fractures croissantes dans le monde juif entre ashkénazes et séfarades, entre blancs et noirs falashas. Toute la société israélienne est en train de se fragmenter, de couler et de se dégrader en un complexe de haine raciale envers tout le monde. Israël a une attitude de plus en plus hostile envers le reste du monde. Un rien suffit pour créer des incidents diplomatiques.

    Alors que des générations de jeunes juifs états-uniens sont de plus en plus désenchantées vis-à-vis d’Israël. Ce qui signifie qu’Israël risque le collapsus, si des choses extérieures n’interviennent pas. La classe dirigeante israélienne est d’un niveau de plus en plus bas. L’intelligentsia israélienne est de plus en plus basse. Israël ne produit pas de culture, ne produit pas d’idées, ne produit pas de projets. Il produit des armes, des installations électroniques ; mais il ne produit pas de culture. Sa classe politique est de plus en plus corrompue économiquement, culturellement et dans ses coutumes. Un ex-chef de l’État israélien a été condamné pour violence sexuelle. Ceci est exemplaire de la corruption israélienne actuelle.

    Israël est voué au déclin. Ce déclin peut être accéléré par le fait qu’Israël est complètement lié aux États-Unis. Aujourd’hui sa politique se révèle très dangereuse parce que la situation intérieure états-unienne est de plus en plus grave. L’avenir d’Israël est plein de doutes.

    Silvia Cattori : Et pourtant Israël n’apparaît pas comme étant dans une position de faiblesse mais de domination. Il ne souffre pas de crise économique. Sa monnaie est forte et stable. Il continue à tenir tête au monde ; à ne pas céder de terrain et à poursuivre, sans être perturbé, sa politique de purification ethnique des Palestiniens. Il est même en mesure de revendiquer des concessions de plus en plus humiliantes, pour rendre impossible toute solution aux problèmes créés à ses voisins arabes. Malgré la gravité des crimes commis depuis plus de 60 ans, Israël non seulement n’est pas sanctionné mais est courtisé par nos gouvernements. Si Israël peut se comporter de façon aussi arrogante et violente, défier les grandes puissances, il doit y avoir une raison secrète qui a permis à tous les gouvernements israéliens de défier quiconque. Comment interprétez-vous cette arrogance croissante, sans précédent en politique internationale ?

    Giorgio S. Frankel : C’est vrai. Les fondements de cette arrogance sont multiples. Un de ces fondements est la puissance atomique israélienne. Israël est peut-être la quatrième puissance atomique dans le monde. Dès les années 70, c’est-à-dire il y a presque 40 ans, on disait qu’Israël était capable d’exercer une menace nucléaire contre l’Union soviétique. Ceci expliquait pourquoi l’Union soviétique avait toujours été très prudente vis-à-vis d’Israël. Il y a quelques années seulement, un historien militaire israélien d’origine hollandaise, Martin Van Cleveld, chercheur renommé et auteur d’études militaires, déclara dans une interview qu’Israël avait des armes atomiques pointées contre toutes les capitales du monde occidental. On parle beaucoup de cette doctrine Samson [3]. L’idée est celle-ci : si Israël se trouvait dans une situation telle qu’il lui semble être sur le point de succomber, alors il entraînerait le monde avec lui. Avant de succomber il lancerait des bombes atomiques sur l’Europe, sur le monde arabe et sur les États-Unis. Des scientifiques israéliens ont plusieurs fois affirmé que les Israéliens peuvent frapper n’importe quel point du globe.

    Connaissant l’histoire et la mentalité israéliennes cette attitude peut apparaître rationnelle dans le sens d’une argumentation destinée à forcer les autres pays à respecter la volonté d’Israël. Après tout, un pays européen peut se demander pourquoi soutenir la cause des Palestiniens, si on risque d’être attaqué et bombardé.

    Le fait qu’Israël puisse exercer un chantage atomique, direct ou indirect, qu’il puisse menacer de faire une guerre aux pays arabes ou à l’Iran en utilisant des bombes atomiques, déchaînerait une crise mondiale. Les possibilités d’utiliser directement un chantage atomique sont très nombreuses. Ceci est un fait, je dirais, fondamental.

    Puis, le lien stratégique avec les États-Unis, qui a débuté après la guerre de juin 1967, a conféré à Israël un pouvoir international notable et une sorte d’immunité. Quoi que fasse Israël, les États-Unis le protègent. S’il y a une résolution en cours au Conseil de sécurité contre Israël, elle ne peut pas passer parce que les États-Unis, en tant que membre permanent, peuvent opposer leur veto.

    Tout cela a donné à Israël un pouvoir notable, un degré d’impunité très élevé. Ensuite s’est créé dans le monde, je ne sais pas si c’est un mythe - mais étant donné que quasiment toutes les chancelleries le prennent au sérieux…- l’idée que, si des pays et des forces politiques veulent avoir de bons rapports avec les États-Unis, ils doivent avoir de bons rapports avec Israël. Il y a une propension dans nombre de pays du Tiers-monde à établir de bons rapports avec Israël de façon à ce qu’ensuite le lobby pro-israélien aux États-Unis soutienne ce pays. La Turquie l’a fait dans les années précédant le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. Nombre d’autres pays l’ont fait. On a vu que ces pays qui ont eu de bons rapports avec Israël ont été gratifiés par les États-Unis.

    Les raisons pour lesquelles Israël est aussi puissant aux États-Unis sont dues au fait qu’Israël a établi un contrôle sur le Congrès. Israël domine le Congrès aux États-Unis ; il le domine vraiment. Depuis des décennies, les Israéliens ont créé aux USA une série de structures, d’institutions appelées lobby israélien. Ce lobby est formé de diverses organisations spécialisées : il y a le lobby au Congrès, celui qui fait pression sur la Maison Blanche, celui qui s’occupe des sommets militaires, etc.

    En tenant compte qu’il y a aux États-Unis 6 millions de Juifs aisés, ces organisations qui sont financées par le monde juif disposent de fonds énormes. L’une des plus importantes, l’AIPAC, a 100.000 adhérents. Elle a un pouvoir énorme. Ses membres envoient des fax, des e-mails aux députés, aux sénateurs, recueillent des fonds.

    Une chose très importante dont les journaux européens ont peu parlé, mais les journaux israéliens oui, ainsi que certains journaux juifs, est le fait que, au début de l’année 2010, les rapports entre Obama et Israël étaient très mauvais. Obama était prêt à avoir une politique de pression de plus en plus dure à l’encontre d’Israël. C’est ce qu’il semblait. En mai, Obama a complètement changé et a cédé peu à peu à toutes les requêtes des Israéliens. Les journaux israéliens ont révélé que les principaux financeurs juifs du parti démocrate avaient coupé les financements. Les milliardaires juifs, en mars 2010, ont fait savoir qu’ils ne donneraient pas un dollar si Obama ne changeait pas de politique. Obama s’est retrouvé à la veille des élections de mi-mandat en difficulté politique avec son propre parti, qui avait perdu ses financements juifs. C’est donc une source de pouvoir.

    Ajoutons aussi un autre facteur de pouvoir provisoire. Dans l’ère de la globalisation économique, Israël est devenu un élément structurel de ce super-pouvoir global qui s’est développé à partir des années 80 et 90. Dans l’élite mondiale qui a le pouvoir économique, etc.…, Israël est une partie intégrante de cette structure de pouvoir. Ce pouvoir économique, plus le pouvoir stratégique militaire, dans la mesure où les États-Unis visent la domination du Moyen-Orient, renforcent le pouvoir militaire et stratégique d’Israël.

    En 2003, quand les États-Unis ont attaqué l’Irak, les journalistes états-uniens et l’élite pro-israélienne disaient ouvertement que l’attaque contre l’Irak n’était que le début d’une stratégie vouée à démanteler le Moyen-Orient. Qu’après l’Irak, ce serait le tour de l’Égypte, puis de l’Arabie saoudite, etc. C’était la vision de l’époque. Ensuite la guerre contre l’Irak a mal tourné pour eux. Ce qui montre que le pouvoir militaire n’est valable que jusqu’à un certain point. Les États-Unis, malgré leur super-puissance militaire et technologique, perdent toutes les guerres. En voyant l’expérience des États-Unis nous pouvons garder à l’esprit que même pour la super-puissance israélienne les jours pourraient être comptés. Pour le moment Israël est une partie du super-pouvoir mondial. Mais ce pouvoir perd du terrain avec l’expansion du pouvoir asiatique.

    Silvia Cattori : Vous avez étudié ce sujet. Vous connaissez la réalité de près. Mais pour les gens en général il est très difficile de comprendre que ce ne sont pas les Arabes et les musulmans le problème mais la politique conflictuelle israélienne. La pression continue exercée par Israël contre le programme nucléaire civil iranien en fait partie. Croyez-vous en une attaque possible de l’armée israélienne ou d’autres, contre des sites iraniens ?

    Giorgio S. Frankel : Je n’y crois pas parce qu’Israël a commencé à menacer d’attaquer l’Iran au début des années 90 ; ça fait 20 ans que les autorités israéliennes répètent qu’elles vont attaquer l’Iran, que l’Iran est en train de fabriquer la bombe atomique, que l’Iran est une menace. Mais quand, dans l’histoire, un pays menace de faire la guerre et ne la fait pas pendant vingt ans, il ne la fera jamais.

    Cette menace contre l’Iran sert à Israël pour maintenir un climat de tension au Proche et au Moyen-Orient. En menaçant plusieurs fois par an de faire la guerre à l’Iran, il crée une situation de péril aux États-Unis et en Europe. La probabilité qu’Israël attaque l’Iran est très faible. Mais si Israël attaque vraiment l’Iran, les conséquences mondiales seraient tellement catastrophiques que, même si tout le monde pense que la menace du gouvernement israélien tient du bluff, personne ne va vérifier si c’est vraiment du bluff.

    Israël n’est pas en mesure d’attaquer l’Iran, il suffit de regarder une carte géographique. Il doit passer à travers d’autres pays. Il y a deux ans, les États-Unis firent un cadeau empoisonné aux Israéliens. Comme Israël parlait du danger iranien, les États-Unis envoyèrent en Israël un grand appareil radar qui contrôle le ciel autour du pays sur des centaines de kilomètres. Cette station est gérée par des militaires états-uniens. Elle fut présentée comme un geste de solidarité envers Israël ; en réalité les Israéliens ne sont pas très contents. Parce que les États-Unis savent exactement ce que font les avions israéliens. Les États-Unis ont affirmé de façon récurrente qu’ils ne veulent pas une guerre contre l’Iran, parce que ce serait une catastrophe.

    Ce sont des périodes cycliques. De temps en temps les Israéliens sortent cette carte iranienne. On en parle pendant quelques semaines et puis ça s’arrête. Le général Moshe Yalon, vice-premier ministre et ministre pour les menaces stratégiques, a déclaré : le programme nucléaire iranien est en retard ; donc nous avons deux ou trois ans pour prendre une décision. Ceci est un message pour indiquer qu’en ce moment il n’y a pas de danger iranien. Ce danger sert aux Israéliens pour entretenir un climat de tension et contraindre les États-Unis et les Européens à faire certaines politiques. Les Israéliens espéraient créer un climat de tension suffisant pour provoquer un affrontement entre l’Iran et les pays arabes. Cette stratégie aussi a échoué.

    Combien de temps a-t-il fallu aux autres puissances nucléaires pour fabriquer la bombe atomique ? Les États-Unis dans les années 40, quand on ne savait même pas à coup sûr qu’on pouvait faire la bombe atomique, y ont employé trois années. Israël a mis dix ans. Maintenant on dit depuis plus de vingt ans que l’Iran construit la bombe. C’est la bombe atomique la plus lente de l’histoire ! L’agence nucléaire qui doit contrôler la bombe atomique continue à dire qu’il n’existe pas d’indices de programme militaire.

    La bombe iranienne sert à Israël pour créer des problèmes stratégiques dans la région. La grande peur d’Israël est qu’un dialogue politique ne s’ouvre entre les États-Unis et l’Iran. Après quoi l’Iran serait reconnu comme puissance régionale avec laquelle on doit parler et discuter.

    L’autre puissance régionale qui est en train de s’affirmer est la Turquie. À présent Israël a des problèmes avec la Turquie parce qu’elle pourrait devenir la principale interlocutrice des États-Unis, du monde arabe et du monde musulman.

    L’autre grande arme d’Israël est l’accusation d’antisémitisme. C’est une arme à laquelle les Israéliens ont un grand et immédiat recours. Toute forme de critique d’Israël est dénoncée comme acte d’antisémitisme. Au début cela faisait un grand effet ; aujourd’hui un peu moins ; tôt ou tard, elle perdra son importance. Quand on abuse de ces armes elles perdent leur valeur. Israël accuse tout le monde d’antisémitisme. Si un Juif critique Israël, on dit que c’est un Juif qui a la haine de lui-même.

    A la fin, ça aussi ça s’écroulera. Parce que l’antisémitisme est une chose ; la critique d’Israël en est une autre. D’antisémitisme, il y en a peu actuellement, dans le monde. S’il resurgit c’est parce que cette façon qu’ont les Israéliens d’établir une identité entre judaïsme et « israélisme » est vraiment dégoûtante : c’est là un terrain très glissant.

    Silvia Cattori : Pendant ces années d’offensive militaires par Tel Aviv, on a assisté, en France par exemple, à une intensification des accusations d’antisémitisme même de la part de militants de groupes de « juifs pour la paix ». Des accusations d’antisémitisme et de négationnisme, se sont mises à pleuvoir sur des journalistes ou des militants qui mettent en évidence l’idéologie qui a amené l’État juif à conduire des politiques inacceptables depuis le début [4]. Si comme vous le soulignez, critiquer la politique israélienne n’a rien à voir avec le racisme, que cherchent alors, en vérité, ceux qui accusent les gens d’antisémitisme ?

    Giorgio S. Frankel : La grande erreur est celle commise par les communautés juives dans le monde en tant que, comme communautés juives, elles pensent avoir le droit de parler au nom d’Israël. De nombreux Juifs non Israéliens pensent pouvoir, en tant que Juifs, avoir le droit de soutenir Israël. C’est leur droit. Mais cela comporte que, tôt ou tard, on imputera aux Juifs non israéliens ce que font les gouvernements israéliens. D’autre part, quand Israël proclame qu’il veut être reconnu non seulement comme État juif, mais comme État national du peuple juif, cela veut dire qu’il demande, au niveau international, que lui soit reconnue une sorte de primauté aussi à l’égard des Juifs qui sont dans les autres pays. Cela devient très dangereux.

     

    Silvia Cattori : Pourquoi dangereux ?

    Giorgio S. Frankel : Parce qu’à la fin il est possible que, dans l’avenir, Israël veuille interférer dans la politique intérieure d’autres pays sous prétexte que ce pays a une politique hostile aux Juifs. Chirac refusa de participer à la guerre contre l’Irak. Peu de temps après le premier ministre israélien Ariel Sharon déchaîna une politique hostile à la France en avertissant les Juifs français : faites vos valises, quittez la France, venez en Israël. A l’avenir les Israéliens pourraient se comporter comme si c’était à eux qu’il revenait de définir le destin des Juifs italiens ou français.

    Silvia Cattori : Cette arme de l’antisémitisme a toujours permis à Israël de mettre les gouvernements qui ne suivent pas la ligne politique de Tel Aviv sous pression. Cela fait donc vingt ans qu’Israël essaie d’inciter le reste du monde à intensifier la pression contre l’Iran pour l’isoler, le sanctionner, en empêchant son développement normal. D’après vous, y arrivera-t-il ?

    Giorgio S. Frankel : Je n’en sui pas convaincu, parce que l’Iran jusqu’ici est protégé par la Chine et en partie par la Russie. Il a de bons rapports avec ses voisins : Turquie, Irak et avec des pays comme l’Azerbaïdjan et la Géorgie. Il a de bons rapports avec le Pakistan, avec l’Inde, avec les pays arabes du Golfe, en particulier avec le Qatar. Il est en train d’étendre sa présence diplomatique en Amérique latine. L’Europe suit la ligne dure : mais d’autres pays ne la suivent pas.

    Les Israéliens mènent cette déstabilisation intérieure de l’Iran par le biais d’attentats, de massacres, etc. ; c’est ce qu’ils sont probablement en train de faire. Il faut voir s’ils vont y arriver.

    Silvia Cattori : Israël seulement et pas les États-Unis [5] ?

    Giorgio S. Frankel : Tous les deux. Mais surtout les Israéliens.

    Silvia Cattori : Pourquoi « surtout les Israéliens » ? Ont-ils des moyens particuliers de pénétration et de manipulation des minorités ethniques ?

    Giorgio S. Frankel : Le problème de la stabilité de l’Iran est très complexe. On peut entrer clandestinement dans plusieurs zones. Il y a des populations hostiles au gouvernement central. Le Kurdistan est la région la plus importante pour le pétrole. Une minorité sunnite y vit. Il suffit de leur fournir des financements pour l’entraînement et de leur fournir des armes. Ce genre d’opérations s’appelle « la guerre de l’ombre ». Les possibilités d’intervention sont nombreuses.

    Silvia Cattori : Nous vous remercions.


    (*) Diana Carminati e Alfredo Tradardi : In memoria di Giorgio S. Frankel (22.09.2012 
    http://www.silviacattori.net/article3711.html

    Silvia Cattori

    Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio (24.06.2011)

    Texte original en italien (25.05.2011) : 
    http://www.silviacattori.net/article1639.html

     


     

    [1] Giorgio S. Frankel, analyste de questions internationales et journaliste indépendant, travaille sur le Moyen-Orient et le Golfe persique depuis le début des années 70. Il est l’auteur de : « L’Iran et la bombe », DeriveApprodi, Roma, 2010.

    [2] Le droit au retour est permis par la loi : mais nos gouvernements et partis politiques, de même que les défenseurs d’une « juste paix » l’ont toujours ignoré, parce que reconnaître aux réfugiés palestiniens le droit au retour obligerait Israël à reconnaître les expulsions de 1948, 1967, 2000 et à admettre que sa « guerre d’indépendance » est en réalité un crime.

    [3] « Option Samson » (ainsi appelée par des dirigeants israéliens d’après la figure biblique de Samson, qui abattit un temple philistin entraînant sa mort et celle de centaines de Philistins) suppose que face à une menace existentielle le projet nucléaire israélien comprend une attaque nucléaire contre les nations qui le menacent.

    [4] Voir : “1001 bugie su Gilad Atzmon” (“1001 mensonges sur Gilad Atzmon”), de Gilad Atzmon, comedonchisciotte.net , 2 novembre 2006.

    [5] Le journaliste Bob Wedford affirme que les services de la Cia, du Mossad et du MI-6 collaborent pour conduire des actions de sabotage contre l’Iran. En 2009 et 2010, l’Iran a arrêté plusieurs espions d’origine états-unienne entrés illégalement, parmi lesquels une femme qui possédait des « hidden spying equipment ». La France mène une diplomatie agressive contre l’Iran depuis que, en 2007, le président français Sarkozy a parlé de la possibilité de bombarder l’Iran. On se souviendra de l’appel de Bernard Kouchner aux nations, pour « se préparer au pire », à la « guerre » contre l’Iran.