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Societe - Page 22

  • Cannabis vs Alcool

     

    Suite à l’article « Cannabis, données essentielles », de vives réactions sont venues alimenter le débat, en criant au scandale de l’alcool qui jouissait encore d’une bonne notoriété alors que sa consommation est bien plus redoutable. Comme je suis tout à fait d’accord avec cette assertion, mais partant du principe que même s’il y a pire ailleurs, ce n’est pas une raison pour ne pas en parler, j’entreprends de comparer les données du cannabis avec celles de l’alcool.

    L’alcool est avec le tabac la substance psychoactive la plus consommée en France, même si on note une diminution régulière de celle-ci. On estime à 42,5 millions les expérimentateurs (12-75 ans) de l’alcool en France. Les usagers réguliers sont estimés à 9,7 millions. Pour le cannabis, on dénombre 12,4 millions d’expérimentateurs et 550 000 usagers réguliers.

    Lors d’une enquête menée en 2002, 61 % de la population déclarent se sentir informés sur les drogues. Lorsqu’on leur demande de citer les principales drogues, 82 % des sondés citent le cannabis contre 18,8 % l’alcool. L’alcool jouit encore d’une notoriété bien installée et n’est pas considéré comme une drogue. Cependant, 70 % des sondés sont convaincus que l’abus d’alcool représente des dangers plus grands pour la société que la consommation de substance illicite, notamment le cannabis.


    Les effets de l’alcool

    L’alcool n’est pas digéré, il passe directement du tube digestif aux vaisseaux sanguins. En quelques minutes, l’alcool se retrouve dans toutes les parties de l’organisme, véhiculé par le sang. Le taux d’alcoolémie est donc très rapidement élevé et baisse progressivement avec le temps selon la quantité absorbée. Il augmente très rapidement d’autant que l’on a mangé ou non lors de l’absorption. Il faut compter en moyenne, une heure par verre absorbé, pour voir son alcoolémie diminuer.

    L’alcool provoque un état d’ivresse qui peut entraîner des troubles digestifs, des nausées, des vomissements, une nette diminution de la vigilance, une perte de contrôle de soi qui peut conduire à des comportements violents, à des passages à l’acte, des agressions sexuelles, suicides, homicides. Mais aussi à une exposition à des agressions par une attitude parfois provocatrice, ou tout simplement par la faiblesse induite par l’alcool qui rend la personne inapte à se défendre. Elle devient donc une proie privilégiée selon le degré d’imbibition.

    La consommation régulière augmente le risque de nombreuses pathologies comme le cancer (bouche, gorge, œsophage...), la cirrhose, maladie du pancréas, troubles cardiovasculaires, hypertension artérielle, maladies du système nerveux et troubles psychiatriques (anxiété, dépression, troubles du comportement).

    Il existe une réelle dépendance à l’alcool. La personne est incapable de diminuer ou d’arrêter sa consommation, malgré les dommages. Des symptômes apparaissent comme les tremblements, crampes, anorexie, trouble du comportement. Cette dépendance s’accompagne de difficultés majeures d’ordre relationnel, social, professionnel, sanitaire et judiciaire.

    De plus la consommation d’alcool lors de la grossesse a des effets dévastateurs pour l’enfant à naître. Le seuil de consommation n’étant pas défini, il est vivement recommandé de s’abstenir durant toute la période de grossesse.


    Les effets du cannabis
    Une prise de cannabis entraîne une euphorie souvent modérée et un sentiment de bien-être suivis d’une somnolence, mais aussi un affaiblissement de la mémoire à court terme (dite de travail) et des troubles de l’attention. En fonction de la dose, de la tolérance et de la sensibilité de l’usager, une altération des performances psychomotrices apparaît ainsi que des troubles de l’attention et de la coordination motrice, de l’allongement du temps de réaction, une altération des capacités cognitives et des modifications des perceptions sensorielles et de l’évaluation du déroulement du temps. Ces troubles peuvent devenir aigus ou chroniques.

    Sur le plan somatique, une prise de cannabis provoque une accélération du débit et de la fréquence cardiaque et une dilatation des vaisseaux sanguins périphériques pouvant entraîner une hypotension en position debout, des maux de tête, une hypersudation. Elle est également responsable des fameux « yeux rouges ». Dans un premier temps, l’inhalation provoque une dilation bronchique responsable de réactions inflammatoires susceptibles d’entraîner une toux. L’appétit augmente également.


    Consommation
    Si le cannabis est la drogue illicite la plus consommée en France, l’alcool est la drogue licite, avec le tabac, les plus consommés.

    15 % des adultes déclarent consommer de l’alcool tous les jours. Ce sont les 45-75 ans qui en consomment le plus quotidiennement, alors que l’usage quotidien chez les jeunes est plus rare. Contrairement au cannabis, plus populaire chez les jeunes et qui voit sa consommation diminuer avec l’âge.

    Pour les deux produits, ce sont les hommes les plus consommateurs. On dénombre 42,5 millions d’expérimentateurs, dont 39,4 millions consommateurs occasionnels, et dont 9,7 millions de consommateurs réguliers d’alcool contre 550 000 de consommateurs réguliers de cannabis.

    Si la France fait partie des pays les plus consommateurs de cannabis en Europe, elle se situe à la quatrième place pour l’alcool. Ce sont les Pays-Bas qui détiennent la première place pour la consommation d’alcool chez les jeunes (20e pour la France), alors qu’ils sont 16e pour une consommation globale.


    Risques et conséquences de l’abus d’alcool

    La consommation excessive d’alcool est associée à d’importants dommages sur le plan sanitaire et social.

    L’alcool est directement à l’origine d’un peu plus de 22 500 décès (2000), que ce soit par cirrhose, psychose alcoolique ou cancer. 80 % étaient des hommes et 50 % âgés de moins de 65 ans. Mais l’alcool est également impliqué dans de nombreuses pathologies et causes de décès (AVC, accidents de la route, domestiques, etc.). On peut donc estimer à environ 45 000 le nombre de décès attribuables à l’alcool.

    Un tiers de l’ensemble des décès par accidents de la route est imputable à l’alcool, soit 2 300 décès par an. Le nombre de décès décroît régulièrement depuis plusieurs décennies, expliqué par la diminution de la consommation, mais aussi par les progrès thérapeutiques.

    En termes de recours aux soins, 80 à 90 000 personnes ont été reçues dans le système spécialisé de soins en 2003. 93 000 séjours avec diagnostic de troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de l’alcool ont été comptabilisés et plus de 26 000 séjours pour sevrage alcoolique. Une enquête auprès des médecins de ville a révélé un nombre de 48 000 pour les patients vus en une semaine pour sevrage alcoolique.

    Un tiers des nouveaux consultants dans les structures spécialisées est demandeur d’emploi ou exerce une activité précaire, 12 % n’ont pas de domicile stable.

    En 2003, 67 400 personnes ont été interpellées pour ivresse publique, plus de 243 000 dépistages de l’alcoolémie routière se sont révélés positifs. Les tribunaux ont prononcé environ 104 600 condamnations pour conduite en état alcoolique, 3 736 pour blessures involontaires par conducteur en état alcoolique et 421 pour homicide par conducteur en état alcoolique. Les autres infractions n’ont pas fait état de mesure en France.

    On dénombre 230 accidents attribuables à la consommation de cannabis.


    Faits et chiffres
    12,4 millions d’expérimentateurs de cannabis contre 42,5 millions pour l’alcool.

    1,2 million de consommateurs occasionnels de cannabis contre 39,4 millions pour l’alcool.

    550 000 usagers réguliers de cannabis contre 9,7 millions pour l’alcool.

    49,5 % des jeunes de 17 ans ont expérimenté le cannabis avec un début vers l’âge de 15 ans. Si avant 14 ans la consommation d’alcool reste rare, à 17 ans 57 % déclarent avoir déjà été ivres. 46 % d’entre eux ont eu un comportement d’alcoolisation correspondant au binge drinking anglo-saxon. Contrairement à l’alcool, l’usage intensif ponctuel ne présente pas les mêmes risques.

    La peine encourue peut aller jusqu’à 1 an d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende pour l’usage de cannabis. La conduite sous l’emprise de stupéfiants est sanctionnée d’une peine de 2 ans et de 4 500 euros d’amende. Pour l’alcool, l’ivresse publique et manifeste est actuellement passible d’une contravention de 2e classe (150 € d’amende). L’ivresse dans une enceinte sportive constitue un délit passible d’emprisonnement, notamment en cas de violences. L’alcoolémie au volant est passible entre autres d’une peine d’amende (de 135 à 4 500 €), du retrait de points du permis de conduire, de la suspension ou du retrait du permis, voire d’une peine de prison. En cas d’accident corporel, les peines sont aggravées et peuvent atteindre dix ans d’emprisonnement en cas d’homicide involontaire avec manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence.

    Le coût social du cannabis s’élève à 919 millions d’euros, soit 0,06 % du PIB de 2003 ou encore un peu plus de 15 euros par habitant. Pour l’alcool, le coût social s’élève à 2,37 % du PIB soit 599 euros par habitant. Soit 40 fois plus que le cannabis.
  • Las Vegas, stade suprême des Etats-Unis


    Urbanisme de la solitude

     

    Jugeant qu’une victoire dans le Nevada sera décisive lors de l’élection présidentielle américaine du 6 novembre prochain, les deux principaux candidats y ont engagé des sommes dépassant l’entendement. A Las Vegas, métropole de cet Etat et capitale du jeu, tout est démesuré. A commencer par l’urbanisme, qui isole les individus et corrode les rapports sociaux.

    par Allan Popelard et Paul Vannier, août 2012

    Sur le Strip. Du nord au sud, l’avenue, longue de sept kilomètres, concentre la majeure partie des casinos, hôtels et salles de spectacle de Las Vegas. L’arpenter, c’est faire l’expérience d’un tour du monde en quatre-vingts minutes. Face à la pyramide de l’hôtel Luxor se dresse l’Excalibur, immense château fort. Non loin, Les Quatre Saisons de Vivaldi passent en boucle sur le parvis du Venetian. Dans une piscine, entre les reproductions du palais des Doges et du Campanile, officient quelques gondoliers. Les amoureux s’embrassent et se prennent en photo, tandis que, sur le pont du Rialto, quelques passants s’attardent en rêvant.

    A quelques pas de là, entre une simili-tour Eiffel et un Arc de triomphe en modèle réduit, l’hôtel Paris - Las Vegas s’ouvre sur la Seine. Soudain, les eaux dormantes du fleuve se mettent en branle : vaguelettes et jets d’eau somptuaires. Ailleurs, le cratère d’un volcan éructe : colonnes de feu, averses de lave. Le vacarme se gonfle du grondement des voix, des frissons et des vivats de la foule.

    Pareil aux allées centrales des expositions coloniales le long desquelles, jadis, les métropoles édifiaient des pavillons de style indigène, le Strip permet la célébration spatiale d’une « république impériale ». Bondé de jour comme de nuit, encombré de touristes et de voitures, il s’organise en un long corridor où passerelles et galeries canalisent le parcours. Des salles de jeu aux attractions, le flâneur s’engouffre dans un circuit saturé de néons et d’enseignes clignotantes, à travers d’infinis tunnels marchands. Des diffuseurs vaporisent des parfums de synthèse. Encastrées dans les murs, camouflées dans les troncs, de petites enceintes débitent inlassablement babils débiles et cantiques patriotiques — God Bless the USA. N’espérez pas vous arrêter dans un bar pour souffler : le comptoir y sera serti de machines à sous. Aucun temps, aucun lieu n’est laissé à la divagation secrète de l’esprit. Ce spectacle total distrait, capte et désoriente les sens. L’agencement urbain emprisonne et ordonne le mouvement des corps, noie les individus dans une cohue anonyme.

    Les attractions ne réduisent pas l’impression de solitude. Le casino est le lieu des séparations et des retranchements. A leurs tables, les joueurs de poker s’isolent sous leur capuche, derrière leurs lunettes de soleil, dans le silence bourdonnant de leur baladeur. A quelques pas, c’est le règne du simulacre high-tech : des regards hébétés s’enfoncent dans le décolleté d’un hologramme féminin distribuant des cartes virtuelles. Roulette, roue de la fortune, jeux « de société », le casino apparaît comme l’allégorie d’un monde où toute communauté et toute solidarité ont sombré, ne laissant que des solitudes antagonistes ; où chaque joueur, captif de son désir confus, n’a ni partenaire ni adversaire, sinon le hasard et la probabilité.

    Ce ne sont pas les joueurs qui se suicident,
    mais les habitants

    « Dans l’Etat du Nevada, le taux de prévalence des addictions au jeu est de 6 %. C’est le triple de la moyenne nationale », affirme Mme Carol O’Hare, directrice du Conseil du Nevada pour les problèmes de jeu, un organisme privé affilié à l’Etat. Au seuil silencieux de la nuit, à l’écart de la foule, une vingtaine de joueurs, hommes et femmes de tous âges, se sont donné rendez-vous devant la porte d’un petit local où trônent des tables disposées en U et un réfrigérateur. Ici comme dans les quinze réunions qui se tiennent au même moment dans la ville, le rituel est toujours le même. D’abord, la lecture scrupuleuse du livret dans lequel sont consignés les commandements de l’association. Ensuite, le rappel des règles : la parole doit être répartie également entre les participants. Vient enfin le temps des confidences. Récits de ruine et de malentendus familiaux, de disputes et de séparations, de vies déchirées, désertées, désolées. Et puis le réconfort qu’il y a à se trouver parmi cette assemblée compréhensive. La réunion achevée, les membres des Joueurs anonymes se retrouvent dehors et s’adossent à la rambarde. Ils semblent reformer ici un semblant de société. Derrière eux, on distingue la clarté électrique du Strip. Une dernière cigarette, puis on se sépare jusqu’au lendemain.

    La prévalence de l’addiction au jeu n’est pas la seule anomalie statistique. Coïncidence ou pas, Las Vegas présente une autre caractéristique : un taux de suicides parmi les plus élevés des Etats-Unis. Ces deux indicateurs contrastent avec l’image festive de la ville ; ils semblent révéler une déréliction. Et, loin d’en être le simple support, l’organisation spatiale pourrait bien en être le facteur déterminant.

    Les désargentés affluent ici dans la luxuriance des savanes plastiques et le raffinement de plâtres palatins. Décors mis à part, il ne subsiste rien de l’opulence et du faste des images cinématographiées. Ni les coquets déshabillés, ni les smokings soignés ; ni Steven Soderbergh et ses héros à la dégaine extravagante (Ocean’s Eleven), ni Martin Scorsese et ses personnages à la chevelure gominée (Casino). Mais des casquettes de base-ball, des tee-shirts flottants aux couleurs de la bannière étoilée, des shorts mi-longs laissant les chevilles dénudées. Et l’odeur du tabac froid.

    Par bien des traits, l’endroit rappelle l’usine. L’enfilade des machines, l’espace rationalisé de la chaîne. Les guirlandes sonores et les tintements bariolés évoquent le fracas martelé de la ferraille et l’éclat étincelant des fers à souder. Les joueurs sont à leur poste. Chacun s’acharne à gagner son salaire de fortune. Mines machinales, gestes mécaniques, réflexes réglés. Les bras sont branchés aux claviers ; les yeux, fixés aux compteurs. Les corps ne font qu’un avec l’appareil. Le contremaître, travesti en agent de sécurité, assure l’ordre dans l’espace productif. Sous le regard de centaines de caméras de vidéosurveillance, il veille au maintien de la cadence, au bon fonctionnement des automates, à la circulation des flux.

    Certes, les causes des suicides sont multiples. Mme Linda Flatt, animatrice de l’Office de prévention du suicide du Nevada, cite « l’accès difficile aux soins, notamment pour les malades psychiatriques, aggravé dans un contexte de coupes budgétaires, et l’accès facile aux armes » caractéristiques de la société américaine. Et de décrire une géographie du suicide, celle des Etats présentant des taux supérieurs à la moyenne nationale, dessinant de l’Alaska au Nouveau-Mexique un arc à travers les montagnes Rocheuses. Mais, dans cette « ceinture du suicide », Las Vegas occupe une place à part. « Nous sommes depuis plusieurs années dans le top 5 des villes où l’on se tue le plus aux Etats-Unis », souligne M. Michael Murphy, médecin légiste du comté de Clark, dont fait partie l’agglomération de Las Vegas, qui nous reçoit dans son bureau. Dans un décor de série télévisée — diplôme du Federal Bureau of Investigation (FBI) accroché au mur et photographies des enfants sur l’écran de l’ordinateur —, M. Murphy, la cinquantaine, drôle et enjoué, tient son rôle à merveille. Sous son scalpel défile le cortège funèbre des morts violentes du comté : « Les gens pensent que ce sont d’abord les touristes et les joueurs qui se suicident. Or ce sont très majoritairement les habitants. »

    Les représentations associées à Las Vegas ne laissent rien paraître de cette réalité morbide. Le halo d’images qui auréole la ville attire chaque année une masse de nouveaux résidents. Depuis vingt ans, le solde migratoire du Nevada est le plus fort des Etats-Unis, et Las Vegas en est la principale bénéficiaire. Entre 2001 et 2010, sa population est passée d’un million et demi à deux millions d’habitants (1). La structure du marché du travail encourage la croissance démographique, avec une surreprésentation d’emplois faiblement qualifiés dans les secteurs dynamiques du bâtiment et de l’hôtellerie qui contribue à faire de la cité du jeu un eldorado pour les chômeurs.

    Une fiscalité trop faible
    pour financer des équipements collectifs

    « Quand les gens déménagent ici, ils s’installent, plus qu’ailleurs, pour prendre un nouveau départ, analyse M. Murphy. Mais ils ne mettent pas longtemps à se rendre compte que leur situation est aussi dure à vivre qu’auparavant. » En outre, nombreux sont ceux dont les rêves ont été fracassés par la ruine immobilière qui a sapé les fondations de l’économie urbaine. Stephen Brown, professeur d’économie à l’université de Las Vegas, rappelle qu’« avec un taux de chômage de 13,5 %, Vegas détient un record pour une ville de cette dimension aux Etats-Unis ». Le cercle de réflexion de la Brookings Institution note que, parmi les cent plus grandes aires métropolitaines du pays, c’est ici que la hausse du taux de chômage a été la plus forte ces trois dernières années (2). Une détérioration que le médecin légiste mesure… à sa façon. « Depuis deux ans, nous assistons à un pic des suicides-homicides [lorsqu’une personne tue son conjoint avant de se donner la mort]. On trouve deux cas de figure, précise-t-il. Il y a ceux qui ont tout perdu et qui ne savent plus où aller. Généralement, ils ont plus de 50 ans. Et ceux qui, épuisés, ne se sentent plus capables d’assumer la charge d’un conjoint, notamment si ce dernier est gravement malade. Je ne peux rien prouver, mais ma profonde conviction est que, dans la grande majorité des cas, ces suicides sont liés à la crise économique. »

    Depuis la fin de 2006, les prix de l’immobilier ont chuté de 60,5 % (3). Des franges urbaines fantomatiques, hantées par le souvenir des classes moyennes auxquelles leurs promoteurs les destinaient, aux ghettos péricentraux de Las Vegas, partout, la crise grave dans la pierre ses motifs sériels. Mêmes planches obstruant l’entrée des maisons saisies, mêmes panneaux « A vendre » fleurissant dans les jardins. Mme Desi Coleman, 55ans, habite l’un de ces îlots misérables des quartiers nord où la ville semble en voie de « cabanisation ». Autour d’une antenne de l’Armée du salut, entre l’autoroute et le cimetière Woodlawn, une centaine de sans-domicile-fixe, survivant dans un paysage de friches, ont installé leurs tentes en surplomb de Vegas Drive. Non loin de là, des habitants abattent à la hache les arbres de leur jardin pour en faire des bûchettes, tandis que, sur le pas d’une porte, la brocante des pauvres s’organise : bric-à-brac d’objets soldés, canapé exposé sur le trottoir. « Ici comme dans d’autres quartiers, il y a beaucoup de gens qui ont perdu leur maison, raconte Mme Coleman. L’un de mes cousins, dans une rue à côté, par exemple... Et tout le monde a été touché. Sauf les riches ! »

    Avec la multiplication des saisies immobilières (4), le voisinage s’est étiolé. Le départ forcé d’une partie des habitants n’a fait que renforcer l’anomie sociale qui résultait déjà de la forte rotation résidentielle (5). A Las Vegas, 91 % des habitants sont en effet originaires d’un autre Etat, tandis que 45 % affichent leur intention de déménager (6). A l’est de la ville, les quartiers de caravanes témoignent de l’hypermobilité d’une partie de la société américaine. M. Robert Schoffield, gérant du Royal Mobile Home Park, estime à trente-cinq mille le nombre de ces habitations dans la ville. Parmi les deux cent trente-sept résidents de son parc, on trouve essentiellement « des retraités et des actifs aux revenus inférieurs à la moyenne ». Si nombre de retraités ont choisi de vivre ainsi, les travailleurs, eux, sont souvent contraints, de crise en crise, à une vie itinérante. En somme, « personne n’est d’ici », résume M. Murphy, avant d’ajouter : « Le taux de suicides tient sans doute aussi à cela, à l’isolement des individus, à l’absence de soutien de proches en cas de coup dur, à la faiblesse des relations de voisinage. Une très grande majorité des habitants n’ont personne sur qui compter en cas de difficulté. »

    L’aménagement du territoire ne permet guère de déjouer la solitude urbaine. Au contraire, il en aggrave les effets. Selon Matt Wray, professeur de sociologie à l’université Temple de Philadelphie et auteur de plusieurs études sur le suicide à Las Vegas, « la forte croissance démographique ne s’est pas accompagnée de la création d’institutions locales, comme des centres communautaires ou des écoles, par exemple. Or ces lieux auraient permis de tisser du lien social, de favoriser la convivialité. Leur manque est destructeur pour la société urbaine. » La raison de cette lacune « Le très faible taux d’imposition de la ville, qui ne permet pas à la municipalité de financer de tels équipements. » L’Etat du Nevada et la ville de Las Vegas ont en effet l’une des fiscalités les plus basses des Etats-Unis : ni impôt sur le revenu, ni impôt sur les successions, ni impôt sur les sociétés. Si l’on ajoute à cela la permissivité des mœurs — jeu, prostitution, alcool, mariage-divorce —, Las Vegas apparaît comme le laboratoire de la ville libertarienne.

    Dislocation de l’espace, dislocation du temps

    Mise sous surveillance par les agences de notation (7), la municipalité a parié sur la « stratégie du choc » pour accélérer la libéralisation de son économie (8). Depuis 2008, tous les budgets publics ont été sabrés : — 43,6 % pour l’administration, —27,2 % pour la justice, — 23,6 % pour la culture, — 9,8 % pour la sécurité. Des écoles ainsi que des centres culturels et sportifs ont fermé. Quant au financement des travaux publics, il a été raboté de moitié. Les autorités urbaines préfèrent dorénavant s’en remettre aux partenariats public-privé, comme dans le cadre de l’opération de réaménagement du centre-ville, dont l’objectif est de créer ex nihilo une centralité qui n’existe pas encore. Pour l’heure, le Strip est l’espace où convergent les touristes du monde entier, mais il n’est pas un lieu de rencontre pour les habitants. Ces derniers n’en ont pas, ni dans la ville, ni dans les banlieues.

    La traversée de ces dernières s’apparente à une expérience rythmique, celle de l’infinie répétition des formes. Lignes et colonnes pavillonnaires, parallèles et perpendiculaires du réseau viaire composent un territoire qui administre la solitude des habitants en organisant l’évitement des flux et le cloisonnement des espaces. De part et d’autre des rues principales, les barrières ferment l’accès des lotissements, obligent au contournement. La butte, la tour, le rempart. La herse, même. L’Amérique réactive les formes et les fonctions de l’architecture médiévale. Les fortifications des communautés fermées, hérissées de tourelles, quadrillent l’espace urbain. Il n’est pas possible d’entrer dans ces quartiers résidentiels sans une invitation, sans que le gardien ait vérifié la plaque d’immatriculation et obtenu du propriétaire une confirmation téléphonique. La ségrégation est séparation des différences autant qu’agrégation des ressemblances. Chaque îlot, chaque alvéole fait sécession. Ici, les retraités ; là, de jeunes actifs. Et, désormais, la classe moyenne déclassée, à l’adresse de laquelle on peut lire sur les murs de la ville : « Votre maison a été saisie ? Vous avez le blues ? Venez visiter notre résidence. »

    Dans la clarté blafarde d’un supermarché Walmart s’affairent des employés, rôdent une poignée de clients. Il est 4 heures du matin. Les casinos ouverts jour et nuit imposent leur cadence à toutes les activités de la ville. Les horaires des magasins se sont calés sur l’emploi du temps des croupiers et des femmes de chambre. Dans les cuisines des restaurants, le coup de feu a fait long feu. Ici règne une atmosphère de fermeture permanente. De rares clients se relaient sans cesse, finissant seuls de souper à leur table. « Las Vegas, c’est la ville vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! J’adore ça !, s’exclame M. Butch, 61 ans, natif de la ville. J’ai envie d’acheter quelque chose à 2 heures du matin ? J’y vais ! Je veux aller au restaurant à 3 heures du matin ? J’y vais ! Ici, tu peux aller où tu veux, quand tu veux. » L’urbanité hagarde de Las Vegas est celle de l’exploitation continue du temps. Et, dans cette ville qui a érigé les 3 x 8 en style de vie, ne restent aux citadins expropriés ni les lieux ni les moments qu’ils partageaient.

    Comme l’ont relevé les architectes Robert Venturi et Denise Scott Brown, sur le Strip, « tout n’est pratiquement qu’enseigne. (…) La grande enseigne surgit pour relier le conducteur au magasin et, plus loin, en d’immenses panneaux infléchis vers l’autoroute, les farines à gâteau et les détergents sont vantés par leurs fabricants nationaux. Le signe graphique dans l’espace est devenu l’architecture de ce paysage (9) ». L’aménagement de Las Vegas met en scène le triomphe du consommateur, reléguant le travailleur, celui de Walmart ou des casinos, dans l’escalier de service de l’économie urbaine.

    La nouvelle économie tertiaire, qui représente actuellement l’écrasante majorité des emplois aux Etats-Unis, a promu le consommateur au rang de nouvel acteur de la transformation sociale. Ancien centre de production mondial, les Etats-Unis deviennent peu à peu un simple espace de consommation. Dans cette société où le consensus consumériste semble avoir remplacé les antagonismes de classe, les travailleurs n’ont pourtant pas disparu. Depuis les années 1990, le développement de l’industrie du jeu a conduit à la construction de nouveaux casinos plus gigantesques les uns que les autres. Plusieurs centaines ou milliers d’employés y sont réunis sur le même lieu de travail. Tandis que les dynamiques de peuplement tendent à disperser les habitants dans la ville, la nouvelle géographie du salariat fait émerger, le long du Strip, des concentrations propices à des formes inédites d’organisation syndicale.

    Entre 1950 et 1980, « Las Vegas était l’une de ces villes où l’on se faisait des syndicats une image caricaturale, corrompue et “mafieuse” », que le patronat n’hésitait pas à invoquer pour combattre leur développement, observent les sociologues Rick Fantasia et Kim Voss (10). Durant cette période, les employés pâtirent du fonctionnement des syndicats américains, qui fait dépendre les statuts et les salaires d’accords décentralisés passés sur le lieu de travail entre employeur et employés. La corruption syndicale et la répression patronale mirent à mal les solidarités locales.

    Dans les casinos,
    des formes inédites d’action syndicale

    Il fallut un certain temps pour construire et organiser, dans les espaces de la Sunbelt, un « mouvement employé » doté d’une force comparable à celle du mouvement ouvrier des villes du Midwest. Un mouvement capable de s’opposer à la régression salariale qui vit le crédit se substituer au salaire et la « liberté » du consommateur prévaloir sur la condition des travailleurs. Dans les bureaux de la section 226 des culinary workers (travailleurs de la restauration), la présidente du syndicat, Mme Geoconda Argüello-Kline, se souvient : « Au début des années 1980, nous étions mal en point, et les travailleurs des casinos avaient des problèmes avec leurs directions. Ils ont alors ressenti la nécessité de s’organiser et de se battre. »

    Le renouveau s’amorce au milieu des années 1980. « En 1984, on a fait une grève très dure qui a réuni dix-huit mille travailleurs. Dans les années qui ont suivi, nous nous sommes efforcés de créer des comités dans chaque casino. Puis, en 1991, est survenue la grève au Frontier. Elle a duré six ans, quatre mois et dix jours. » Déclenchée lors de la négociation de la convention collective des employés de l’hôtel, cette grève fut la plus longue et l’une des plus importantes que les Etats-Unis aient connues depuis 1945 : vingt mille grévistes défilent sur le Strip ; une marche de cinq cents kilomètres à travers le désert du Mojave permet de médiatiser leur cause (11). Et, pour finir, la victoire, en 1998. Un combat qui « a montré aux entreprises que les travailleurs étaient capables de s’organiser, qu’ils savaient pourquoi ils se battaient et qu’ils étaient unis dans la lutte, pour leurs familles, pour des conditions de vie dignes ».

    A Las Vegas, le syndicalisme représente le seul espoir de mettre un frein à la logique de l’exploitation. « Prenez le cas du Station, poursuit Mme Argüello-Kline. Dans ce casino, les travailleurs ont décidé de s’organiser, car là-bas vous pouvez travailler trente ans et ne pas avoir de retraite. Vous n’avez pas la sécurité de l’emploi, vous devez payer 100 dollars par mois votre assurance-santé. Vous pouvez mesurer la différence entre le statut de ces travailleurs et celui de nos syndiqués. Elle est très grande. » Aujourd’hui, 90 % des salariés des casinos sont syndiqués. Les culinary workers comptent ainsi cinquante-cinq mille membres, soit cinq mille de moins qu’en 2008. « C’est vrai que la crise économique a affecté l’économie du Nevada, conclut Mme Argüello-Kline, mais nos adhérents restent protégés. Ils continuent de bénéficier de leur retraite et d’une assurance-maladie gratuite pour eux et leur famille. Tout ça n’a pas changé avec la récession. Les salariés conservent la sécurité de l’emploi. Le syndicat forme autour d’eux comme une bulle protectrice. »

    Comme Detroit à l’époque de la grande industrie, Las Vegas, à l’ère de l’économie des services, apparaît comme une ville combative et fortement syndiquée. Par-delà la scénographie privatisée de son territoire, par-delà le toc et le kitsch des consensus factices, elle dévoile peut-être la modernité de la société américaine : celle d’un esprit de résistance et d’un sens de l’action collective ayant survécu à toutes les tentatives de réduire à néant les solidarités salariales, à toutes les velléités d’ériger l’atomisation de la société en principe d’organisation socio-spatial. Installés au milieu du désert, au creux des croupes rouges et des monts mauves, ses travailleurs seraient-ils, face au vide et au vent de l’histoire, des pionniers d’un genre nouveau ?

    Allan Popelard et Paul Vannier

    Géographes.

    (1) «  2011 Las Vegas perspective  », Metropolitan Research and Association, Las Vegas.

    (2) Global Metro Monitor, «  The path to economic recovery  », Brookings Institution, Washington, 2010.

    (3) Entre le 4e trimestre 2006 et le 1er trimestre 2011, la moyenne nationale pour les cent plus grandes métropoles n’était que de 26,5 %, ce qui place la ville au 98e rang.

    (4) Leur nombre est passé de 1 493 en 2006, avant le début de la crise, à 4 173 en 2007, 7 941 en 2008, 6 784 en 2009 et 7 675 en 2010. Source : «  2011 Las Vegas perspective  », op. cit.

    (5) Le taux de mobilité résidentielle, qui mesure le taux moyen de rotation dans les logements, est particulièrement élevé aux Etats-Unis : environ 15 %, contre 8 % en France.

    (6) Robert Futrell (sous la dir. de), «  Las Vegas metropolitan area social survey, 2010 highlights  », département de sociologie de l’université du Nevada, Las Vegas, mars 2010.

    (7Las Vegas Sun, 26 janvier 2011.

    (8) Naomi Klein, La Stratégie du choc. La montée d’un capitalisme du désastre, Actes Sud, Arles, 2008.

    (9) Robert Venturi, Stephen Izenour et Denise Scott Brown, L’Enseignement de Las Vegas, Mardaga, Wavre, 2008 (1re éd. : 1972).

    (10) Rick Fantasia et Kim Voss, Des syndicats domestiqués. Répression patronale et résistance syndicale aux Etats-Unis, Raisons d’agir, Paris, 2003.

    (11Ibid.

     
  • Buvez du coca !

    NUTRITION

     

    SNI_coca

    Lundi 18 février 2013

    Ce qui arrive dans votre corps 30 mn après avoir bu un Coca

     

    Soleil, chaleur, gorge sèche. Votre main se referme sur la canette en fer-blanc, glacée, et constellée de petites gouttes d’eau.

    Vous faites pivoter l’anneau du couvercle…« Pshhht ! », c’est le soulagement.

    Le liquide pétillant s’écoule à flots dans votre gorge. Le gaz carbonique vous monte au nez,vous fait pleurer, mais c’est si bon ! Et pourtant…

    Une dizaine de minutes plus tard

    La canette vide, vous avez avalé l’équivalent de 7 morceaux de sucre ! [1] En principe, vous devriez vomir d’écœurement [2] Mais l‘acide phosphorique contenu dans la boisson gazeuse masque le sucre par un goût acidulé, donnant ainsi l’illusion de désaltérer. [3]

    Après une vingtaine de minutes

    Votre taux de sucre sanguin augmente brutalement, mettant une première fois votre organisme à l’épreuve.Votre pancréas s’emballe, sécrète de l’insuline en masse. Celle-ci est malgré tout vitale, elle seule peut permettre de transformer l’énorme surplus de sucre que vous avez dans le sang en graisse, ce que votre corps est mieux capable de supporter. En effet, il peut stocker la graisse, certes, sous forme de bourrelets disgracieux, mais provisoirement inoffensifs, tandis que le glucose est pour lui un poison mortel lorsqu’il est en haute dose dans le sang. Seul le foie est capable de stocker le glucose mais sa capacité est très limitée.

    Après une quarantaine de minutes

    La grande quantité de caféine présente dans le Coca est entièrement absorbée par votre corps. Elle dilate vos pupilles et fait monter votre pression sanguine.

    Au même moment, les stocks de sucre dans votre foie saturent, ce qui provoque le rejet du sucre dans votre sang.

    Après ¾ d’heure

    Votre corps se met à produire plus de dopamine. Il s’agit d’une hormone qui stimule le « centre du plaisir » dans le cerveau. Notez que la même réaction se produirait si vous preniez de l’héroïne.

    Et ce n’est pas le seul point commun entre le sucre et les drogues. Le sucre peut également provoquer une dépendance. A tel point qu’une étude a démontré que le sucre était plus addictif que la cocaïne. [4] Ce n’est donc pas un hasard si « l’accro » qui s’apprête à boire son Coca est aussi fébrile qu’un narcomane en manque.

    Après 1 heure

    Vous entrez en chute de sucre (hypoglycémie), et votre niveau d’énergie, aussi bien physique que mental, s’effondre.

    Pour éviter cette cascade de catastrophes, la seule véritable solution est de boire de l’eau.

    « Je ne suis pas une plante verte ! »

    Il est difficile de se remettre à boire de l’eau quand on s’est habitué pendant des années à des boissons sucrées ou du moins composées (café, thé, vin, bière…).

    On croit ne plus pouvoir se contenter du goût fade de l’eau. « Je ne suis pas une plante verte ! » ; « L’eau, c’est pour les bains de pied ! » s’amuse-t-on à dire à table en empoignant la bouteille de vin rouge.

    En réalité, le mal est souvent plus profond qu’une affaire de goût. Les personnes qui rechignent à boire de l’eau sont souvent des personnes qui n’ont pas vraiment soif. Et si elles n’ont pas soif, c’est parce que, généralement, elles manquent d’exercice physique.

    Lorsque vous avez bien transpiré, au travail ou au sport, boire plusieurs verres d’eau n’est pas seulement une nécessité – c’est un suprême plaisir.

    Ma prévenante maman m’avait inscrit avec mon grand frère dans un club de judo. Nous étions quarante garnements dans une salle municipale de 30 mètres carrés éclairée au néon et garnie de tatamis, qui n’était aérée que par un étroit vasistas. Après un intense échauffement où nous devions sauter, courir, puis faire des séries de pompes et d’abdominaux, le professeur nous faisait enchaîner les prises, combats debout et au sol, avant de terminer (c’était le meilleur moment !) par une grande bataille de « petits chevaux » où, monté sur le dos d’un camarade, il fallait précipiter les autres par-terre.

    A la fin du cours, rouges, soufflants, suants, nous nous élancions vers les vestiaires où se trouvaient, au dessus de grandes vasques attenantes aux urinoirs, des robinets-poussoirs d’où sortait de l’eau chaude mais, en ces moments, si savoureuse ! L’affreuse odeur des latrines n’empêchait aucun d’entre nous de s’en remplir l’estomac avec délice. Les plus pressés appliquaient directement leur bouche sur le robinet, tandis que les autres, plus civilisés, formaient une cuvette avec leurs mains et lapaient sans reprendre haleine le précieux liquide. Je n’ose penser à la quantité de mucus et de microbes qui s’échangeaient à cette occasion.

    Toujours est-il que je ne me souviens pas avoir jamais bu meilleure boisson que l’eau des cabinets de notre club de judo.

    Pourquoi arrêter le Coca

    Réfléchissez-y. Après l’effort, vous pouvez aussi avoir envie de boire un Coca-Cola ou une bière bien fraîche, mais vous vous rendrez compte que cela ne vous procure pas un plaisir aussi intense que l’eau. L’eau est le plaisir suprême quand on a vraiment soif, de même que, lorsqu’on a faim, lors d’une grande promenade en montagne par exemple, il n’y a rien de tel qu’un saucisson, qu’on ne touchera plus une fois rentré à la maison et repris le rythme habituel.

    Mais il n’y a pas que le plaisir. Boire de l’eau réduira votre consommation de toutes les substances néfastes qu’on trouve dans les sodas, à commencer par :

    • l’acide phosphorique, qui interfère avec le métabolisme du calcium, et cause de l’ostéoporose ainsi qu’un ramollissement des dents et des os ;
    • le sucre, facteur de diabète, maladies cardiovasculaires, inflammation chronique, arthrose, cancer ;
    • l’aspartame : il y a plus de 92 effets secondaires liés à la consommation d’aspartame, dont les tumeurs cérébrales, l’épilepsie, la fragilité émotionnelle, le diabète ;
    • la caféine, qui provoque tremblement, insomnie, maux de crâne, hypertension, déminéralisation et perte de vitamines.

    Sans compter que l’acidité du Coca-Cola est désastreuse pour les dents. Avez-vous déjà remarqué comme vos dents sont râpeuses après avoir bu du Coca-Cola ? Plus acide que le jus de citron, il peut-être utilisé pour décaper les pièces en métal (faites l’expérience de laisser une pièce sale de 50 centimes pendant une demi-heure dans un verre de Coca). L’émail de vos dents devient poreux, jaunâtre, grisâtre lorsque vous buvez souvent du Coca-Cola et c’en est la conséquence.

    Inutile enfin, de parler des effets sur l’obésité : surtout chez les enfants, la consommation de sodas augmente le risque de 60 %. Il n’y a aucune bonne raison de faire boire des sodas à vos enfants, sauf si vous voulez

    • augmenter leur risque de diabète ;
    • augmenter leur risque de cancer ;
    • leur créer une dépendance au sucre.

    Alors voilà une bonne source d’économies en ces temps difficiles : ne plus laisser aucune boisson sucrée franchir le seuil de votre maison. Et réapprendre à boire de l’eau : commencez votre journée par boire un grand verre d’eau, avant même le petit-déjeuner. Vous ferez un merveilleux cadeau à vos reins, eux qui travaillent si dur à nettoyer votre sang toute la journée. Ils seront plus sains, plus propres, et vous vous sentirez en meilleure forme.

    A votre santé !

    Jean-Marc Dupuis

     

    Sources :

    [1] Sugar Stacks beverages,
    http://www.sugarstacks.com/beverages.htm

    [2] What Happens to Your Body Within an Hour of Drinking a Coke,
    http://articles.mercola.com/sites/articles/archive/2008/01/19/what-happens-to-your-body-within-an-hour-of-drinking-a-coke.aspx

    [3] Coca-Cola une boisson dangereuse et cancérigène,
    http://www.dangersalimentaires.com/2011/04/coca-cola-une-boisson-dangereuse-et-cancerigene/

    [4] Intense Sweetness Surpasses Cocaine Reward,
    http://www.plosone.org/article/fetchArticle.action?articleURI=info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pone.0000698



    Pour en savoir plus, cliquez ici : http://www.santenatureinnovation.com/quelles-solutions/nutrition/ce-qui-arrive-dans-votre-corps-30-mn-apres-avoir-bu-un-coca/#ixzz2aJF8rnYl

  • Vacanciers et fauchés :

     Comment survivre aux « tarifs aoûtiens »

    Elsa Ferreira | Journaliste

    Pour partir les poches vides, il faut de la débrouille. Cinq futurs vacanciers nous racontent comment ils espèrent conjuguer vacances et budget serré.


    Une voiture stationnée sur le bord d’une route (John Millar/Flickr/CC)

    LES FRANÇAIS VEULENT PARTIR, MAIS NE SAVENT PAS ENCORE OÙ

    L’année dernière, 63% des Français sont partis en vacances. Cette année, 66 % espèrent partir pendant l’été. Mais vouloir n’est pas toujours pouvoir : à ce jour, seulement 44 % des vacanciers sont certains de partir. Pour les 22 % restants, on en est toujours au stade de projet, selon un sondage réalisé pour Easyvoyage.

    Pour faire dégonfler la facture (859 euros par personne en moyenne), les vacanciers partent moins loin ou comptent sur l’improvisation : sept Français sur dix ne quitteront pas le pays cet été, et un quart d’entre eux n’ont toujours pas choisi leur destination.

    Glwadys est à découvert. Nous sommes le 1er du mois. Elle a tout de même décidé de partir deux semaines à Prague en août, et prend sa situation avec humour :

    « J’ai bon espoir : j’ai planté des pièces de dix centimes dans un pot, et je soulève toutes les pierres que je croise. Je trouverai le budget. »

    Virginie aussi prend la période de vacances avec philosophie, malgré un budget plus que serré. Au chômage depuis six mois, elle a décidé de s’accorder du bon temps. Pour les dettes qui s’accumulent, à la banque et auprès des amis, on verra plus tard. Même si ça lui pèse souvent, « surtout la nuit ». Avec un ton de défiance, elle écrit :

    « Des vacances, j’en ai prévu. Eh ouais. On part en Sicile. Juste comme ça. Et après nous, le déluge. »

    De la philosophie, il en faudra pour ces Français qui ont passé leur année à rogner par tous les bouts leur budget pour faire face à la baisse du pouvoir d’achat. Partira, partira pas ? La question reste ouverte.

    1. Sylvia, 24 ans, 600 euros pour deux semaines de road trip en Écosse
    2. Claire, 30 ans, 300 euros pour un mois en van (et en famille) en France
    3. Janis, 32 ans, 400 euros pour deux mois de vacances à domicile
    4. Caroline, 31 ans, 150 euros pour deux semaines en système D
    5. Jacqueline, 44 ans, 1 000 euros à deux pour trouver une maison à retaper

    Sylvia « ne gagne pas un salaire mirobolant », mais elle adore voyager. Avec un week-end tous les deux mois et un grand voyage par an, elle est devenue la reine « des dépenses sans parachute ». Quitte à se mettre, un peu, en difficulté :

    « Les voyages, c’est ma priorité. Même si j’ai un pépin, je préfère taper dans mon découvert (autorisé), ou demander un délai de paiement aux administrations plutôt que de toucher à mon budget voyage. C’est sûr que ce n’est pas l’attitude la plus responsable, mais c’est la mienne ! »

    Un « mélange de chance et de culot », qui pour l’instant marche bien.

    Sylvia est chargée de la communication dans un centre d’art contemporain. Payée au smic, elle met entre 100 et 150 euros de côté par mois pour partir.

    Elle est aussi photo-reporter de vocation. Une passion qu’elle « ne veut pas lâcher ». Elle profite donc de ses voyages pour faire des reportages qu’elle vend ou présente à des concours. Avec l’argent gagné, elle découvre un nouveau pays. Et ainsi de suite.

    Elle remplit aussi des dossiers de demande de bourses (« des heures de boulot »). Il y a quelques années, elle a ainsi obtenu 500 euros de la mairie de Paris pour partir en Inde.

    Un cycle d’autofinancement qui demande de l’énergie (elle y consacre pratiquement tout son temps) mais qui fonctionne : une série de photos en Afrique du Sud lui a permis de remporter un concours organisé par une compagnie aérienne. Le prix : un billet pour le Chili, un autre pour le Vietnam où elle a réalisé un reportage pour le National Geographic.

  • Maroc: Sale temps pour les immigrés

     

     
     
     

    Les autorités mènent une guerre sans merci aux sans-papiers depuis trois semaines. Les associations dénoncent et appellent à une politique migratoire respectueuse de l’être humain. Quelles sont les raisons de ce tour de vis ?

      

    A l’heure du déjeuner ce lundi, on sert du tiébou dieun, le plat national sénégalais. Nous sommes au petit marché de la vieille médina de Casablanca, sur l’avenue des FAR. Les commerces des immigrés subsahariens ont désormais pignon sur rue. Les filles se font des tresses dans la boutique de coiffure du coin, tandis que Mohamed Mustapha Guèye, le premier Sénégalais à s’installer dans ce marché en 2009, s’affaire a confectionner les costumes et habits traditionnels et de ville dont il maîtrise la technique. L’ambiance est détendue et les affaires marchent. Le courant semble passer entre les nouveaux gérants des boutiques spécialisées dans les produits « africains » et les vendeurs marocains de DVD et d’accessoires de téléphone.

     

    Entre 500 à 600 expulsions

    Mais au-delà de cette apparente quiétude, se cache un profond malaise des immigrés subsahariens. Depuis environ trois semaines, les associations font état d’une large campagne d’arrestation d’immigrés sans papiers et dénoncent des délits de faciès. Les rafles ont concerné d’abord la ville de Casablanca, puis Rabat, Fès, Tanger ou encore Taourirt. Mais c’est cette dernière localité qui s’est particulièrement distinguée.

    Un rapport de l’AMDH (Association marocaine des droits humains), publié le 14 juin, dénonce une violente campagne d’arrestation dans cette petite ville proche de Nador. L’association accuse les autorités de Taourirt d’avoir monté les habitants contre les immigrés, en brûlant notamment leurs bagages devant la foule !

    A Hay Salam à Oujda, les Marocains qui hébergent des étrangers « clandestins » ont été menacés de poursuites pour « assistance et hébergement de personnes en situation irrégulière ». Résultat : les habitants ont peur de louer des logements aux Subsahariens, même à ceux qui sont en situation régulière.

     

    D’autres incidents ont été signalés notamment dans la gare de Fès ou 150 immigrés ont été arrêtés. Plusieurs autres associations, dont l’OMDH, le syndicat ODT et les associations de Subsahariens dénoncent cette « chasse » aux clandestins. Une pétition circule et un rassemblement devait se tenir jeudi 21 juin devant l’ambassade marocaine à Paris.

    En tout et pour tout, « 500 à 600 immigrés ont été conduits au poste frontière d’Oujda en près de trois semaines », croit savoir Hicham Rachidi, secrétaire général du GADEM (Groupe anti-raciste d’accompagnement et de défense des étrangers et des migrants). Selon les estimations des ONG, il y aurait entre 12 000 et 15 000 immigrés en situation irrégulière sur le territoire national. Et ces derniers temps, il ne fait pas bon en faire partie.

     

    Vols de passeports, bakchichs…

    Cette campagne a installé un climat de terreur dans les milieux des immigrés. Au souk de la vieille médina de Casablanca,  Malik, vendeur de colliers sénégalais est à bout de force. Il envisage de rentrer au plus tôt dans son pays après deux ans passés au Maroc. « On est fatigué, il y a trop de problèmes. Je passe mon temps à contourner la police dans la rue. » Comme nombre de ses concitoyens, il trouve toutes les difficultés du monde à renouveler sa carte de séjour.

    Mohamed Mustapha Guèye est lui aussi condamné à se cacher en attendant sa carte. « Chaque année, ils demandent de nouveaux documents. Je suis le premier commerçant étranger ici. Je fais travailler des Marocains et des Subsahariens. Ils veulent des bulletins de salaire, mais un contrat de bail devrait suffire ! Je suis pour mettre dehors les gens qui font des trafics, mais moi je ne fais pas de zigzag. Je ne suis pas un mafiosi », s’insurge-t-il.

     

    Daouda Mbaye, lui, est journaliste. Il est installé au Maroc depuis plus de vingt ans avec sa petite famille dans un appartement qu’il a acheté. Ses enfants sont de nationalité marocaine. Tout cela ne lui épargne pas les tracasseries administratives et policières. Il dénonce la multiplication des délits de faciès. « J’ai été contrôlé par la police une ou deux fois mais, heureusement, j’avais mes papiers. Il faut être en règle, on est d’accord ; mais le hic est que les démarches sont fastidieuses et à Casablanca, quatre ou cinq policiers s’occupent des formalités administratives de tous les étrangers et sont débordés. Ça favorise les trafics », explique Daouda. Les trafics que dénoncent les immigrés vont du vol de passeport par des bandes organisées aux bakchichs pour obtenir par exemple de fausses déclarations à la caisse sociale.

     

    … Racket et viols !

    Qu’ils soient en attente de papier ou sans papiers, les immigrés vivent dans la peur. S’ils sont arrêtés, ils attendent au poste pendant 48h la décision d’expulsion du juge en vertu de la loi 02-03 qui fixe les modalités du retour au pays d’origine. « On nous prend quatre photos, comme si on était des criminels », s’insurge une jeune femme dont la sœur a fait les frais de ces arrestations. Les immigrés sont la plupart du temps emmenés en bus à Oujda ou « ils sont refoulés aux frontières », explique Pierre Delagrange, président du Collectif des communautés subsahariennes. Il ajoute qu’ils finissent par revenir, en passant par d’autres chemins, en prenant le risque de subir des tirs de sommation des gardes-frontières algériens. « Les arrestations collectives et les refoulements sont normalement interdits par la loi. Le renvoi aux frontières algériennes est illégal. Il faudrait enquêter au cas par cas, les mettre dans un avion à destination de leur pays. Malheureusement, l’Union européenne, qui veut combattre l’immigration, donne les moyens de la répression mais ferme les yeux sur le respect des procédures », renchérit Hicham Rachidi, qui réclame la régularisation de la situation de tous les immigrés.

     

    L’absence de politique migratoire favorise les réseaux de mafias, dénonce un autre militant. Les immigrés sont rackettés, les femmes subissent des viols, et certaines jeunes femmes tombent sciemment enceintes pour ne pas être expulsées, car la loi interdit le renvoi dans ce cas. Quid donc de l’avenir de ces enfants qui naissent sur le sol marocain et devront aller à l’école, à l’hôpital ? On l’aura compris : l’immigration est devenue un véritable enjeu sécuritaire mais aussi humanitaire pour le Maroc. Le Royaume étant passé de pays de transit à une terre d’accueil des immigrés, comment gérer les flux d’arrivée ? Quelle politique migratoire adopter ? Les solutions ponctuelles ont fait leur temps…

    Zakaria Choukrallah

     

    Les immigrés, un risque terroriste ?


    Comment s’explique ce tour de vis ? « C’est à lier à la dernière réunion des pays sahélo-sahariens au Maroc. A chaque réunion officielle, le Royaume veut faire démonstration de sa politique préventive. En 2004, une importante campagne d’arrestations a été menée dans les forêts du Nord. C’était une semaine avant l’arrivée de Zapatero », estime Hicham Rachidi.

    D’autres sources avancent comme argument le risque terroriste que font planer les groupes armés du Sahel, renforcés après la chute du régime de Kadhafi. Le député socialiste Abdelhadi Khairate a même adressé une question orale au gouvernement où il s’inquiète des « armes libyennes qui équipent des candidats à l‘immigration clandestine embusqués au Maroc ». Des déclarations jugées « scandaleuses » et « stigmatisantes » par les associations. « Cela m’étonne de la part d’un député de gauche. Si c’est le cas, pourquoi les autorités ne procèdent-elles pas à des coups de filet dans ce milieu en nous montrant ces armes ? », s’insurge Rachidi, qui y voit une tentative de préparer l’opinion publique à ces campagnes.

     
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