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  • La Syrie, vue de Russie

     par Thierry Meyssan

    Selon la rhétorique occidentale, la Syrie serait une dictature écrasant dans le sang une révolution. Elle serait soutenue par la Russie car celle-ci n’avait pas vu de problème à écraser la rébellion tchétchène. Au contraire, vu de Moscou, l’impérialisme occidental s’est ligué depuis 35 ans avec les dictatures religieuses du Golfe pour détourner le jihadisme de la libération de la Palestine et le retourner contre l’URSS en Afghanistan, puis contre la Russie et ses alliés. Par conséquent, la Russie ne soutient pas la Syrie, elle est attaquée en Syrie.

    Réseau Voltaire | Moscou (Russie) | 31 mars 2013
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    À Moscou l’intelligentsia pro-occidentale voit la guerre de Syrie comme un conflit lointain dans lequel le Kremlin a engagé le pays du mauvais côté pour maintenir une inutile base navale à Tartous.

    Au contraire, Vladimir Poutine perçoit cette guerre comme un épisode du conflit qui, en vertu de la « doctrine Brzezinski », oppose depuis 1978 la grande coalition occidentalo-islamiste contre l’URSS, puis la Russie. Pour le Kremlin, il ne fait aucun doute que les jihadistes, qui se sont aguerris au Proche-Orient, poursuivront bientôt leur œuvre destructrice en Tchétchènie, en Ingouchie et au Daguestan. De ce point de vue, la chute de la Syrie serait immédiatement suivie de l’embrasement du Caucase russe. Dès lors, soutenir la République arabe syrienne n’est pas une tocade exotique, mais un impératif de sécurité nationale.

    Ceci étant posé, les attentes du Kremlin à l’égard de la Syrie n’en sont que plus fortes. Au cours des entretiens que je viens d’avoir avec plusieurs dirigeants russes lors d’un voyage à Moscou, j’ai entendu plusieurs critiques.

    1- Moscou ne comprend pas pourquoi Damas n’a pas engagé d’action juridique et diplomatique pour affirmer ses droits. La diplomatie syrienne se place toujours en défense lorsqu’elle est attaquée devant le Conseil des Droits de l’homme à Genève et ne parvient pas à défendre son image. Elle pourrait facilement inverser cette tendance en portant plainte contre ses agresseurs devant la Cour internationale de Justice, comme l’avait jadis fait avec succès le Nicaragua contre les États-Unis. Bien sûr l’important ne serait pas d’obtenir une condamnation de la France, du Royaume-Uni, de la Turquie, du Qatar et de l’Arabie saoudite —laquelle ne pourrait intervenir qu’à l’issue de trois à quatre années de procédure—, mais de renverser la rhétorique du Conseil de sécurité.

    Le dépôt de cette plainte devrait être suivi d’une lettre au Conseil de sécurité affirmant le droit de la Syrie à riposter à ses agresseurs. Cette lettre ouvrirait la possibilité pour des groupes combattants arabes syriens d’entreprendre de leur propre initiative des actions armées contre des objectifs militaires de Londres à Doha.

    2- De nombreux collaborateurs de Vladimir Poutine sont devenus des admirateurs de Bachar el-Assad en qui ils voient l’homme de la situation. Il ne fait aucun doute que le Kremlin, estimant son autorité à la fois légitime et légale, le soutiendra jusqu’à la fin de son mandat. Cependant, les dirigeants russes s’interrogent sur la volonté du président syrien de gouverner le pays au delà. Ils observent que, malgré leurs appels répétés, Bachar el-Assad n’a toujours pas exposé de programme politique pour le futur du pays. À ce jour, ils ignorent ses choix en matière économique, sociale, culturelle etc. Ils voient en lui le garant d’une société multiconfessionnelle, tolérante et moderne, mais doutent de son intention d’aller plus loin, de sa volonté d’être celui qui repensera et reconstruira le pays une fois la paix revenue.

    3- Enfin au Kremlin, on a toute confiance dans l’Armée arabe syrienne et dans l’Armée de défense nationale. On souligne que Damas n’a perdu aucune bataille face aux Contras jihadistes, mais que ceux-ci ont pourtant gagné des positions sans avoir à combattre, comme l’a montré la trahison de Raqqa. Par conséquent, l’État syrien peut tenir encore le temps nécessaire à la finalisation d’un accord de paix régional américano-russe, mais il peut aussi s’effondrer soudainement sous l’effet de trahisons.

    C’est pourquoi les dirigeants russes sont ulcérés par le manque de sécurité autour de Bachar el-Assad qu’ils ont testé au cours d’une audience qu’il a accordée à son domicile à une de leurs délégations. Un invité, passant outre les consignes qui lui avaient été données à l’entrée, a conservé avec lui son téléphone portable durant toute la rencontre. Le téléphone a sonné deux fois sans qu’aucun garde n’intervienne. On sait que les services syriens ont déjoué plusieurs tentatives d’assassinat de Bachar el-Assad commanditées par les services d’États membres de l’OTAN, mais force est de constater que sa sécurité rapprochée n’est pas assurée. Certains dirigeants font valoir que la Russie prend un grand risque en soutenant un leader qui peut être assassiné si facilement.

     
  • La France veut armer les « rebelles syriens » !

    par André Chamy

    Réagissant aux déclarations de Laurent Fabius et François Hollande appelant à armer « l’opposition » en Syrie, André Chamy, du Réseau Voltaire France, explique en quoi cette position belliqueuse est tout simplement illégale à la lumière du droit international et porte un coup très sévère à la réputation de la France dans le monde. Plus grave encore, selon lui, cette crise syrienne, avec son cortège de massacres et d’attentats terroristes, pourrait à terme s’exporter en France. Les Français vivraient alors sur leur propre sol le cauchemar qu’on impose au peuple syrien depuis deux ans.

    Réseau Voltaire | Paris (France) | 1er avril 2013
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    La France s’aligne sur la position anglaise concernant la livraison d’armes aux bandes armées en Syrie. Mais qu’est ce qui lui prend ? Laurent Fabius et son équipe sont-ils devenus fous ? Après les bavures diplomatiques en Afrique ayant abouti au limogeage d’un certain nombre de responsables au Quai d’Orsay et alors que les perspectives d’enlisement se font jour au Mali, la France déclare la guerre à la Syrie.

    La décision française n’a pas d’autre signification. L’esprit colonial serait-il de retour, si tant qu’il ait disparu ? Les responsables français, chantres des droits de l’Homme et du droit international, viennent de franchir un pas impardonnable dans les relations avec le Moyen-Orient. Cette démarche va avoir des répercussions sur les relations de la France avec le monde entier et le fait que la plupart des Européens se prononcent contre cette idée aurait dû nous mettre la puce à l’oreille. Mais rien n’y a fait. Le duo Hollande-Fabius a décidé de faire la guerre.

    Une déclaration de guerre illégale au regard du droit international 

    L’échec politique de François Hollande dans sa politique économique intérieure, en raison de sa politique européiste insensée, l’incite à créer un écran de fumée tout en arguant qu’il défend les libertés dans le monde. Ce genre de manœuvre ne trompe plus personne.

    Pour comprendre le caractère illicite de cette déclaration de guerre, il est important de rappeler les termes de l’article 2 de la Charte des Nations Unies qui stipule que :

    Article 2 L’Organisation des Nations Unies et ses Membres, dans la poursuite des buts énoncés à l’Article 1, (en l’occurrence de maintenir la paix et la sécurité internationales et de prendre, à cette fin, des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d’écarter les menaces à la paix) doivent agir conformément aux principes suivants :

    1. L’Organisation est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres.
    2. Les Membres de l’Organisation, afin d’assurer à tous la jouissance des droits et avantages résultant de leur qualité de Membre, doivent remplir de bonne foi les obligations qu’ils ont assumées aux termes de la présente Charte.
    3. Les Membres de l’Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en danger.
    4. Les Membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies.
    5. Les Membres de l’Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action entreprise par elle conformément aux dispositions de la présente Charte et s’abstiennent de prêter assistance à un État contre lequel l’Organisation entreprend une action préventive ou coercitive.
    6. L’Organisation fait en sorte que les États qui ne sont pas Membres des Nations Unies agissent conformément à ces principes dans la mesure nécessaire au maintien de la paix et de la sécurité internationales.
    7. Aucune disposition de la présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte ; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l’application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII.

    La France a donc tout faux ! Comment peut-on parler d’une solution politique en Syrie alors que ce pays est agressé depuis plus deux ans et que cette agression vient de prendre un tour particulier avec l’entrée sur ce terrain de deux puissances, en l’occurrence le Royaume-Uni et la France, qui déclarent vouloir armer les rebelles.

    Quelle est la légitimité de ces deux pays pour intervenir dans ce conflit ? Ont-ils soumis cette intervention à leurs peuples respectifs, ou même à leurs représentations nationales ? Dans le cas précis de la France, c’est ce qu’impose l’Article 35 de la constitution de la Cinquième République. La réponse est négative. Il est vrai qu’au regard de ces règles fondamentales du droit international, couchées noir sur blanc dans la Charte des Nations Unies, nous deviendrions indiscutablement des hors-la-loi.

    Parlons sereinement des principes qui régissent les relations internationales. Le premier des principes est celui de la souveraineté nationale : aucun État ne peut porter atteinte à l’intégrité territoriale d’un autre État. Le deuxième de ces principes interdit à tous les États de s’immiscer dans des affaires relevant des compétences nationales d’un autre État. Le troisième principe enjoint aux États d’agir dans le sens du maintien de la paix et de la sécurité internationale.

    Mais la France est en train de faire tout le contraire, puisqu’elle attente à l’intégrité territoriale de la Syrie en livrant des armes à des combattants qui attaquent l’armée régulière de cet État arabe et ses forces de sécurité. Même si l’on devait admettre, pour les besoins de la cause, la thèse française selon laquelle il y aurait un devoir moral à soutenir par tous les moyens une opposition se défendant contre un pouvoir injuste (thèse évidemment très discutable dans le cas qui nous occupe), nous n’avons pas à armer un camp plutôt qu’un autre.

    Nous nous plaçons ipso facto dans la position de l’agresseur et nous sommes à cent lieues de manifester le souci de favoriser les solutions pacifiques au règlement d’une crise internationale.

    La France ne peut s’arroger le droit d’attaquer directement ou indirectement la souveraineté d’un autre État, même s’il s’agit de la Syrie, que Paris n’apprécie guère.

    C’est un comble de l’ironie, soulignons-le au passage, que la France tienne en même temps à être présente dans toutes les réunions des « Amis de la Syrie » ! Ce pays peut très bien se passer de cette amitié.

    Comment ne pas parler de crise internationale alors que plusieurs pays sont notoirement impliqués dans la déstabilisation de la Syrie tels que la Turquie, l’Arabie saoudite, le Qatar, ou la Libye… Quant à la France, qui prétendait jusqu’à lors se contenter d’aider les réfugiés, plusieurs de ses agents ont été « aperçus » dans le quartier de Baba Amr, à Homs, ou aux frontières avec le Liban et la Turquie, sans le moindre démenti des autorités concernées. Nous venons de franchir un pas supplémentaire dans l’escalade militaire, ce qui n’est pas sans implications…

    Qu’arriverait-il si la Russie, par exemple, pour ne citer qu’elle, estimait que ses intérêts directs sont menacés par cette volonté française de changer le régime en Syrie et décidait d’y envoyer des troupes ? La France est-elle prête à faire face à cette éventualité ? Que cherche-t-elle en adoptant cette posture belliqueuse ?La France entend-elle sauver la paix ? Certainement pas puisque depuis deux ans ce conflit s’envenime justement en raison du flux incessant d’armes et de combattants, qui passent à travers les quatre frontières de la Syrie avec ses voisins, la Turquie, le Liban, la Jordanie et l’Irak.

    Mais le risque principal est peut-être ailleurs…

    Vers une reproduction de la crise syrienne... sur le sol français 

    La France semble se préparer à l’idée de subir ce que la Syrie traverse en ce moment. Ce pays semble servir de ballon d’essai pour plusieurs pays occidentaux qui se croient exposés à un risque de guerre urbaine.

    Aucun observateur honnête ne saurait contester cette réalité. C’est la raison pour laquelle j’émets une hypothèse qui ne relève plus de la fiction, en raison de sa reconnaissance par Monsieur Valls, le ministre de l’Intérieur, en l’occurrence la crainte de troubles généralisés en France, accompagnés de mouvements de foules ou de bandes organisées, particulièrement celles liées à des organisations salafistes, à l’instar de ce qui se passe en Syrie.

    Depuis quelques années la France envisage un tel risque. Le terrorisme islamique est considéré en France comme un « péril fatal ». La caractéristique de cette menace : elle réside en banlieue et est sensible aux discours radicaux délivrés par les organisations proches d’Al-Qaïda, le GSPC algérien, le GICM marocain..

    Que ferait la France si elle devait être exposée à ce danger ? Différents plans semblent être prêts et on est en droit de se demander si notre pays ne joue pas avec le feu. Laisser partir des combattants et fournir des armes qui finiront par tomber entre les mains des salafistes est, en effet, le meilleur moyen pour retrouver ensuite ces mêmes armes dans les banlieues parisiennes, lyonnaises ou marseillaises…

    La présence avérée d’armes de guerre dans le cadre des faits divers survenus dernièrement dans notre pays démontre que nous sommes déjà passés à un stade supérieur pour ce qui est des armes qui circulent dans les banlieues françaises. Pis encore, puisque des sources concordantes confirment la présence de jihadistes français parmi les combattants en Syrie. S’ils ne sont pas tués au combat, que feront-ils à leur retour en France ? La perspective de voir passer à l’action des centaines de Mohamed Merah ne semble pas interpeller nos politiques.

    Envoyer l’armée dans ces territoires marginalisés n’est pas une hypothèse d’école et cet envoi n’aurait pas simplement pour but d’y ramener l’ordre ; il s’agirait avant tout d’en reprendre le contrôle des mains des doctrinaires, à l’étranger comme en France, ainsi que l’indiquait en 2006 une note du CHEAR, le Centre des hautes études de l’armement :

    « De nouvelles frontières dessinent les contours de l’insécurité ou de la confrontation armée dans ces zones urbaines ou dévastées par le terrorisme ou la guerre (....) Ces frontières urbaines délimitent, selon une géographie plus humaine que physique, des groupes d’identité commune ou de communautés de valeurs prêts à défendre par la violence la sanctuarisation de zones dont ils s’estiment détenteurs exclusifs. En France, ces frontières ne sont pas reconnues officiellement par les pouvoirs publics qui usent d’expressions “codées”, cédant au “politiquement correct”, pour évoquer allusivement : “quartiers sensibles”, “quartiers populaires” (sic), “zones de non-droit. Le citoyen, quant à lui, sait très bien où elles se situent et là où … “ça craint. Ces zones acquièrent alors dans l’esprit de ces communautés un statut implicite de territoire “conquis” sur la puissance régalienne de l’État ou sur le pouvoir souverain dont la légitimité est contestée et, si nécessaire, combattue. À l’intérieur de ces frontières urbaines, les représentants des communautés tirent leur autorité d’une sorte de droit coutumier des temps modernes, tendant à se substituer progressivement et subrepticement aux lois souveraines de l’État démocratique. Face à ce type d’évolution, l’emploi de la violence légitime apparaît souvent comme l’ultime recours des démocraties pour réduire ces menaces. » [1]

    Ce rapport n’est pas unique puisqu’après les émeutes de l’automne de l’année 2005, la Délégation aux affaires stratégiques (DAS), un organisme dépendant du ministère de la Défense, lançait un appel d’offre qui posait par la même occasion la question :

    « de quelle capacité doivent disposer les armées pour pouvoir mener des missions sur le territoire national ? »

    En réalité, au-delà de la menace terroriste alléguée, on lit en filigrane la question des violences urbaines dans les banlieues. [2]

    Les banlieues sont devenues un nouveau marché pour la guerre urbaine. La France veut être la spécialiste dans le domaine, ce qui explique l’aide apportée aux rebelles en Syrie en matière de planification des attaques contre les aéroports et contre les bases aériennes. Les services français s’entraineraient-ils sur ce terrain pour expérimenter des nouveaux moyens et des nouvelles techniques de guérillas ?

    Le sociologue Mathieu Rigouste souligne à juste titre :

    « La bataille de Grenoble, comme celle de Villiers-le-Bel et comme chaque opération intérieure, est l’occasion d’expérimenter des nouvelles techniques et de présenter aux marchés internationaux de la sécurité les nouveaux dispositifs tactiques français. » [3]

    Dans cette guerre aux cités, l’État dispose ainsi d’un soutien intéressé des entreprises de défense et de sécurité. Elle considèrent que leur expérience en matière de guerre urbaine sur des théâtres d’opération extérieurs majeurs (Irak, Afghanistan, Côte d’Ivoire, etc.) leur vaut légitimité sur le territoire national et vice versa.

    Ces marchés sont proposés à des Etats pour des opérations de maintien de l’ordre (! !), ce qui aurait pu profiter à la Tunisie de Ben Ali si les déclarations de Mme Alliot-Marie, dans les quelles elle proposait d’apporter au régime tunisien le « savoir-faire » français n’avaient pas suscité un tollé, l’amenant à se rétracter.Ces moyens sont également proposés à des États craignant des manœuvres de déstabilisation, à des villes désireuses de se fournir en moyens de surveillance pour faire face à des mouvements de foules incontrôlés, grâce, par exemple, à la mise en place de systèmes de suivi GPS, de vidéosurveillance et de capteurs sonores.

    La France tente même de créer des partenariats avec d’autres services ayant une expérience dans ce domaine. La France et Israël poursuivent ainsi depuis des années une discrète coopération militaire dans le domaine de la guérilla urbaine. Par exemple, un article du Canard enchaîné paru le 2 juin 2010 révélait que « des officiers de l’armée israélienne ont participé, en France, à des simulations de guerre électronique, d’attaques de sites-radars sur les bases de Biscarosse (dans les Landes) de Cazaux en Gironde ». Le Canard indique également que des militaires français iront s’entraîner en Israël aux combats en zone habitée.

    L’on ne peut s’empêcher de constater la similitude avec ce qui se passe en Syrie.(Attaques des aéroports et des sites radars). Cette expérience française aurait-elle été mise au service du Qatar, qui finance ces opérations en Syrie ? Le problème est que, pendant que les deux grandes puissances (les États-Unis et Russie) discutent des questions stratégiques, la France se contente du rôle de vendeur de quelques prestations, qui restent somme toute insignifiantes par rapport aux enjeux mis sur le tapis.

    Si nous facturons ce type de prestations à des pays étrangers, le peuple français est en droit d’en être informé. Les citoyens français n’accepteraient certainement pas que leurs services républicains soient transformés en entreprises mercenaires travaillant pour des puissances étrangères.

    La difficulté, si l’on passait du stade de l’entraînement au stade de l’explosion dans les banlieues, est de savoir si notre expérience serait suffisante. Allons-nous assister sur le sol français à des scènes similaires à celles qui se déroulent en ce moment en Syrie ? Personne ne peut répondre pour le moment à cette question. En tout cas, le silence est de rigueur par rapport à toute discussion sur cette éventualité.

    Pis encore, que dira-t-on si le Qatar ou l’Arabie saoudite, à qui nous apportons notre expérience, décidaient, à travers leurs réseaux islamistes, d’armer les quartiers « mécontents » pour se battre à Marseille, à Lyon ou à Paris contre les forces de l’ordre françaises ? Que dira-t-on si les armes sophistiquées et les missiles livrés au rebelles syriens revenaient en France en empruntant les réseaux des Balkans (Bosnie, Kosovo ou Albanie), qui sont aux frontières de l’Europe ?

    Il n’y a pas de doute que nos militaires sont parfaitement entraînés et qu’ils sont d’excellents professionnels. Mais, la France a-t-elle les moyens de s’offrir une guerre urbaine ? La France est-elle obligée de jouer avec le feu ? Et de le faire, qui plus est, au service d’intérêts qui ne sont pas ceux des citoyens : en interne, ceux du lobby militaro-industriel ; à l’extérieur ceux des États qui ne veulent pas œuvrer pour la paix et pour la stabilité.

    Les autres pays européens sont conscients de ces enjeux brûlants, ce qui semble expliquer leur farouche opposition à cette escalade. Il est tout à fait remarquable, à ce propos, que le système allemand nous soit présenté comme un modèle quand il s’agit de promouvoir des réformes visant à diminuer les droits sociaux des salariés. À l’inverse, quand il s’agit de promouvoir la paix en Syrie, la France récuse la position allemande et suit les va-t-en guerre…

    Cette position est d’autant plus étonnante qu’à ce jour aucun débat n’a été proposé au peuple français pour lui permettre de savoir dans quel sens la France est en train de s’engager et surtout les motivations réelles de cet engagement !

    Un tel débat est d’autant plus essentiel qu’il faudra bien expliquer au peuple français comment nous trouvons les fonds considérables que nécessitent ces guerres et pourquoi nous ne les trouvons pas pour financer notre système de retraites, notre système de santé. Et pourquoi nous sommes devenus incapables de remettre nos jeunes et moins jeunes au travail...

     
  • Le gouvernement des Etats-Unis se prépare-t-il

    Le gouvernement des Etats-Unis se prépare-t-il à la guerre civile ?

    Des sphères « conspirationnistes » jusqu'aux institutions officielles de l'état, c'est la question que se posent de nombreux citoyens des États-Unis. La politique du Département de la sécurité intérieure au cours des derniers mois, son goût immodéré pour l'acquisition d'armes en des proportions qui ne peuvent que conduire à l'incompréhension ainsi que son incapacité à justifier ses actes en réponse à des questions formulées clairement par des membres officiels du gouvernement invitent tout citoyen curieux à un doute raisonnable. 

    Créé en réponse aux attaques du 11 septembre 2001, le Département de la sécurité intérieure a pour mission première de protéger les territoires des États-Unis d'Amérique des attaques terroristes, des accidents causés par des erreurs humaines et des catastrophes naturelles. Avec plus de 200 000 employés, c'est le troisième département du gouvernement par le nombre. Il a disposé de plus de 58 milliards de dollars au cours de l'année 2012, se hissant ainsi à la quatrième place du plus important budget après les départements de la défense, de la santé et de l'éducation. [1]

    Initiée sous la présidence et avec l'appui de George W. Bush, la création du Département de la sécurité intérieure a constitué la plus grande réorganisation des agence fédérales des États-Unis depuis plus d'un demi-siècle, faisant fusionner 22 agences gouvernementales en un seul département. [2] En 2008, le président Barack H. Obama [3] soulignait lui aussi la nécessité d'une telle organisation et laissait envisager l'essor de son importance :

    « Nous ne pouvons pas continuer à nous en remettre uniquement à notre armée dans le but de remplir les objectifs de sécurité nationale que nous nous sommes fixés. Nous devons disposer d'une force nationale civile de sécurité qui serait aussi puissante, aussi forte, aussi bien financée. »

    Des rapports commencèrent à émerger au cours du mois d'avril 2012, indiquant que le Département de la sécurité intérieure initiait une politique d'acquisition massive d'armements. Le 15 février 2013, le Denver Post [4] révélait que le département souhaitait acheter 1,6 milliard de munitions au cours des quatre prochaines années, l'équivalent de cinq cartouches par citoyen états-unien. L'explication officielle alors avancée : subvenir aux besoins des agents du département au cours de leur entraînement et de leurs missions.

    Parmi les balles commandées, 360 000 d'entre elles au bas mot – les chiffres sont en constante augmentation – sont des balles à tête creuse.[5] Ces dernières sont conçues pour se déformer lors d'un impact avec un organisme vivant, les tissus organiques, constitués essentiellement d'eau incompressible, déforment la balle et entraînent sa dilatation et son explosion à l'intérieur du corps, maximisant ainsi les dommages causés aux tissus ainsi que la perte de sang. [6] Du fait même de cette déformation, la profondeur de pénétration est réduite et ces balles restent à l'intérieur du corps. Pour ces raisons, elles ont été bannies d'emploi lors de conflits armés internationaux par la convention de La Haye de 1899 [7] , et par suite par la convention de Genève de 1949, qui interdisent :

    « 3°. […] l'emploi de balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que les balles à enveloppe dure dont l'enveloppe ne couvrirait pas entièrement le noyau ou serait pourvue d'incisions. »

    D'après Jonathan Lasher [8] , l'assistant de l'inspecteur général de l'Administration de la sécurité sociale, ces balles seraient destinées aux 295 agents qui enquêtent sur des fraudes à la sécurité sociale, une justification pour le moins surprenante.

    En septembre 2012, le Département de la sécurité intérieure faisait déjà l'acquisition de 7 000 fusils d'assaut automatiques 5.56x45mm de l'OTAN [9], achetait et modernisait 2717 tanks légers conçus par Navistar Defense pour les guerres d'Irak et d'Afghanistan, capables de résister à des mines anti-personnelles et destinés à être utilisés dans les rues des villes états-uniennes.[10] Le département a également commandé de nombreuses « no-hesitation targets » pour un montant de 2 millions de dollars, des cibles montrant des femmes enceintes, des enfants ou encore des personnes âgées tenant des armes à feu, dans le but de renforcer la détermination des agents à tirer sur une menace potentielle, quelle qu'elle soit. [11]

    Le sénateur Tom Coburn fut l'un des premiers à s'interroger sur la politique d'armement du département. On lui répondra [12] au mois de février dernier que :

    « Le Département de la sécurité intérieure établit régulièrement des contrats d'approvisionnement stratégique qui combinent les besoins de l'ensemble de ses composantes pour les biens et services communément achetés tels que des munitions. Ces contrats d'approvisionnement stratégique participent à l'augmentation du pouvoir d'achat du Département de la sécurité intérieure afin de se procurer de façon efficace des équipements et fournitures à des coûts considérablements plus bas. »

    Faire des économies donc. Une explication qui ne satisfera pas de nombreux autres membres du Congrès, commençant à s'interroger à leur tour sur ces acquisitions pour le moins surprenantes. L'un d'entre eux, Timothy Huelskamp, confiait récemment [13,a] [13,b] en marge du Comité d'action de politique conservatrice :

    « Ils n'ont pas de réponses à nos questions. Ils refusent d'y répondre. Ils refusent de nous laisser savoir ce qui se passe, donc je n'ai pas vraiment de réponse à cela. De nombreux membres du Congrès se posent ces questions. »

    Le 5 mars 2013, sous l'impulsion de Doug LaMalfa [14] , quinze membres du Congrès ont écrit une lettre au Département de la sécurité intérieure exigeant des explications quant à cet achat massif de munitions de divers calibres, expliquant qu'ils n'étaient pas satisfaits des réponses données jusque-là par des officiels de « bas-niveau » (« lower-level officials », sic).

    Les laborieuses explications de restrictions budgétaires alors fournies par le Département de la sécurité intérieure ne résistent pas à un examen attentif des chiffres. D'après Peggy Dixon [15] , la représentante du Centre d'entraînement de l'application de la loi fédérale, le nombre de balles utilisées chaque année par les agents du Département de la sécurité intérieure culmine à quinze millions.En achetant 1,6 milliard de balles, c'est donc l'équivalent de 107 annéesd'entraînement que le département souhaite acquérir en munitions.

    Les chiffres officiels du gouvernement sur la guerre en Irak [16] corroborent eux aussi la démesure des quantités de munitions en jeu : à l'apogée de la guerre, 72 millions de balles sont utilisées annuellement. Le Département de la sécurité intérieure sera donc en possession de stocks de munitions lui permettant demener une guerre semblable en intensité à la guerre d'Irak à son apogée pour une durée d'un peu plus de 22 ans, ce sur le sol des Etats-Unis.

    Si ces chiffres ne suffisaient pas à jeter le discrédit sur les motifs de coupes budgétaires invoqués, les Services d'immigration et de douane, l'une des agences fédérales du département à qui est destinée la majeure partie des munitions commandées, subliment l'art de la mauvaise foi enrelâchantdes centaines d'immigrants illégaux pour cause officielle de restrictions financières – héritées en grande partie, est-il besoin de préciser, de cet achat massif d'armements. [17]

    Comme le confirmeront plusieurs anciens Marines dont Richard Mason [18], les balles à tête creuse n'ont jamais été utilisées pour l'entraînement des agents du département, notamment car elles sont deux fois plus chères que des munitions standards :

    « Nous ne nous entraînions jamais avec des têtes creuses (sic), nous n'avons même jamais vu de têtes creuses au cours de mes quatre ans et demi dans le corps des Marines. »

    Cet achat massif par le Département de la sécurité intérieure a créé, sans surprise, une pénurie de munitions dans de nombreux états au moment même où un virulent débat à propos de l'interdiction du port d'armes scinde la population après les différentes tueries des derniers mois, parmi lesquelles celles d'Aurora et de Newton. La simultanéité d'un armement massif des agences gouvernementales et de la dépossession des citoyens des États-Unis de leurs armes, enterrant par là-même le deuxième amendement de leur constitution, laisse planer un doute légitime sur les objectifs véritables du gouvernement des Etats-Unis.

    Mais les fantaisies du Département de la sécurité intérieure ne s'arrêtent pas là : l'une des menaces les plus prises au sérieux n'est rien d'autre qu'une attaque de zombies. Le département a d'ailleurs débloqué des fonds afin d'organiser la simulation d'une telle attaque et de tenir des sommets à ce propos. [19,a] [19,b] La probabilité qu'un tel scénario advienne de façon naturelle étant proche de zéro, il convient de questionner la crédibilité scientifique du département, sa bonne gestion des ressources financières des citoyens des États-Unis ou peut-être encore, au mieux son silence complice, au pire sa participation active, dans l'élaboration préméditée d'une attaque de « zombies ».

    Le scénario ne relève qu'à moitié du fantasme à l'heure où les productions hollywoodiennes en tout genre à ce propos innondent les écrans de télévision : la base de données IMDb recense pas moins de 334 films avec le mot-clé « zombie » au cours des cinq dernières années, soit plus d'un film toutes les semaines. [20] Avec presque 12 millions de téléspectateurs, la série The walking dead est quant à elle la série la plus regardée aux États-Unis. [21]

    Côté pratique, la conception par bio-ingéniérie d'un virus donnant lieu à une telle épidémie s'avère théoriquement possible, notamment via la combinaison des virus de la grippe et de la rage, comme l'a confirmé le professeur Andreanski de l'université de Miami à la chaîne National Geographic.[22]

    Mais probablement ne faut-il qu'y voir une nouvelle affaire de détournements de fonds...

    Quoi qu'il en soit, la démesure des achats d'armement par le Département de la sécurité intérieure invite le citoyen raisonnable à se douter que le gouvernement des États-Unis prévoit sûrement plus que de l'entraînement pour les agents de sa force civile au cours des années à venir.

     
  • Putain de révolution ! En finir avec l’entropie !

    Putain de révolution ! En finir avec l’entropie ! Le déséquilibre de l’information et l’énigme des transformations naturelles 

    Dans doute vais-je me livrer à quelques audaces spéculatives mais c’est le minimum pour tenter de comprendre cette nature et cet univers qui nous entoure tout en nous constituant et dont nous sommes chacun une partie. La science du temps reste une énigme fondamentale, une question essentielle.Nous ignorons les origines et les fins de la nature et de l’homme, même si des options théoriques nous sont proposées par la science contemporaine et que les sagesses antiques ont suggéré quelques voies. La thèse du big bang est couramment mentionnée alors que nous ne savons rien des origines de la vie.La « mort thermodynamique » de l’univers est prévue alors que le monde présent n’est compris que superficiellement. Ces quelques remarques nous invitent à prendre conscience que la loi du temps nous a échappé, malgré les efforts des plus redoutables des physiciens. Peut-être faut-il voir la science du temps comme intimement intriquée avec la conjecture de l’information et de l’énergie. Auquel cas, une super synthèse entre théorie de l’entropie-information et mécanique quantique pourrait ouvrir une compréhension nouvelle pour les systèmes se transformant et notamment le vivant. Ce qui, pour donner une vue synthétique, aboutit non plus à trois physiques fondamentales mais vers deux super physiques. L’une, déjà évoquée, inclut la gravitation entropique et la théorie entropique du trou noir ; en ce cas, on peut établir un lien avec la conscience. La seconde, qui associerait méca Q et information, serait en relation avec la compréhension des transformations dans la nature, depuis les systèmes statistiques jusqu’au mécanismes moléculaires du vivant.

    Je vais donc tenter de partir de l’idée de l’information, comme énergie efficiente capable de structurer le réel, le milieu, le champ. Il y a plusieurs types de champs et notamment le champ phénoménologique qui pour les physiciens correspond sans qu’il y coïncide à l’espace-temps et au champ de gravité entropique. Et le champ morphogénétique en évolution dans le vivant. Il se peut bien qu’il y ait deux catégories d’informations structurantes et entrelacées, la première liée au champ spatiotemporel et la seconde aux systèmes « matériels » en évolution. La nature et l’univers interprétés comme des systèmes fait d’informations structurantes, efficientes, et de champs et milieux structurés. Une conjecture qui se retrouve dans la formulation des opérateurs quantiques, entropiques et dans l’idée suggérée par Davies d’une hiérarchisation de l’information comme explication de l’origine de la vie.Maintenant, il faut conjecturer cette notion d’information structurante et oser penser plus loin que ne l’ont fait les physiciens jusqu’alors. Monde super-in-formé et monde dé-formé ai-je suggéré, puis nature calculante et nature calculée (clin d’œil au credo alchimique sur les deux natures, naturée et naturante). Le monde des cohérences quantiques et celui des manifestations classiques.

    Ici se situe l’énigme du monde naturel. On sait que la mécanique quantique est la science de la rencontre entre la trame microphysique du monde phénoménal et l’activité observante et théorisante de l’homme. Avec deux aspects complémentaires, l’épistémologique et l’ontologique. Comment l’homme connaît les particules et que sont au juste ces particules ? Une fois cela établi, avec l’hypothèse du monde cohérent et du monde déformé, que pouvons-nous dire de la réalité biologique, humaine, cosmologique ? C’est le mystère issu de l’entropie. Car « l’entropie fondamentale » n’est pas un résultat ni une quantité mais une interrogation fondamentale sur la nature ; une énigme entrelacée avec les mystères de la mécanique quantique ; alors que la cosmologie semble se fissurer et devenir de plus en plus incertaine car il y a d’un côté la gravitation et de l’autre le rayonnement des particules. Ces deux domaines sont irréconciliables sauf localement dans notre système, avec la cosmologie relativiste qui formalise les déformations suivies par les énergies radiatives. La vérité se situe derrière les apparences et rend possible le succès opérationnel de la science moderne qui a su utiliser les mécanismes en occultant la connaissance de l’univers. La thermodynamique est la science qui interroge tout en recélant des failles épistémologiques majeures. Avec une sorte de dilemme entre la théorie des échanges d’énergie et la théorie des transmissions d’informations. Au centre, les équations de Boltzmann et Shannon, la première n’ayant pas de signification physique et la seconde ayant une signification physique mais restreinte et du reste inopérante dans la compréhension des transformations systémiques. Mais l’histoire des sciences retiendra que la thermodynamique fut un cheval de Troie pour faire entrer la notion d’information dans le paradigme universel.

    En ce début du 21ème siècle, les débats concernant la théorie de l’information, la thermodynamique, la logique moléculaire du vivant, sont pour ainsi dire saturés. Le paradigme nouveau repose sur un dédoublement du réel. La nouvelle science de l’information devrait permettre de tracer un pont entre la transformation des ensembles matériels et les origines de la vie. Le paradigme nouveau met l’information au centre du dispositif ontologique. La nature, comme je l’ai indiqué à maintes reprises, repose sur des systèmes cognitifs et perceptifs. Il n’y a pas de monde objectif absolu. Tout est perception et chaque système vivant perçoit en adéquation avec ses finalités (essentiellement, percevoir le prédateur, la nourriture, le partenaire sexué). Et toute perception est par essence une gestion efficiente des informations. L’étude de la nature par les méthodes de calcul, mesures et de techniques a mis l’accent sur les forces, la disposition spatiotemporelle, les échanges de matière et d’énergie, mais elle a semble-t-il raté l’essence informationnelle de la nature. Autrement dit le fait que la nature est un système qui utilise l’information afin structurer, mettre en forme le milieu et de s’orienter dans ce même milieu. L’élucidation de la nature calculante reste en suspens. La science a pris les choses du côté externe, le plus évident et accessible. La grande erreur, c’est d’avoir pensé l’ordre à partir du désordre et de l’entropie. La vision anthropologique étant un poison pour la vérité ontologique. Les sciences physiques et biologiques se sont égarées tout en progressant inexorablement dans la formalisation des détails de la nature (découpée et mesurée). Pour bien comprendre la nature, il faut comprendre l’ordre et la forme d’abord, pour en déduire le désordre et l’entropie. Le monde matériel est structuré ou du moins, pré-structuré par un calculateur quantique opérant de manière trans-locale. Pour le dire autrement, la nature se présente comme un champ préformé, structuré comme un système consistant où les éléments évoluent en respectant des règles de disposition. Un composant est toujours en relation avec d’autres composants évoluant dans le champ.

    Ainsi, un système évoluant selon la physique du temps passe d’un ordre à un autre. L’augmentation de l’entropie dans un système fermé ne signifie pas l’évolution vers le désordre mais vers un ordre différent. La thèse de l’ordre qui vient du chaos fut prisée dans les années 1980 mais en vérité, l’ordre ne vient pas du désordre ou du chaos mais d’une autre forme d’ordre. Il faut en quelque sorte déstabiliser l’ordre ancien pour que les composants interagissent, échangent des informations et qu’une instance calculatrice se constitue pour structurer autour d’elle un dispositif ordonné et organisé. C’est de cette manière que la vie est apparue. Un éclaircissement épistémologique pourrait expliquer les raisons pour lesquelles les physiciens et les biologistes ont vu le désordre sous un aspect pré-ontologique ; lui accordant un rôle au-delà de ses possibilités. La science du 20ème siècle a été marquée par la fascination du hasard, de la vie émergeant à partir de rien à la faveur d’un heureux concours de circonstances. Cette vision est erronée et sera abandonnée dans le courant du 21ème siècle. Il reste maintenant à construire cette science du temps, des transformations, du calcul quantique, de l’évolution d’un ordre à un autre. Une science des champs morpho-cognitifs et morpho-calculants. Avec comme principe l’information et une sorte d’asymétrie faisant que le champ contient des singularités structurantes et un environnement structuré. D’un côté ce qui calcule et devient forme efficiente, de l’autre ce qui est calculé et se présente comme champ formé, voire informé. C’est cette notion d’asymétrie et de déséquilibre de l’information qui est la plus délicate à formaliser mais à dire plus aisée à concevoir et c’est pour cette raison que j’en fait état dans ces quelques réflexions. Avec en ligne de mire le paradigme de l’auto-cognition ou de l’auto-computation, paradigme bien plus puissant que celui de l’auto-organisation

    Sans doute, depuis bien longtemps, l’épistémologie et la réflexion ontologique permettent d’établir que la science contemporaine s’est fourvoyée en suivant des schémas prosaïques, superficiels et centrés sur l’homme et ses techniques.Le scientifique moderne a compris la nature avec les catégories ordinaires érigées en savants concepts scientifiques. Energie, force, interaction, désordre, disposition… Ce schéma risque de devenir radicalement dépassé ces prochaines décennies. L’informatique biologique gagne du terrain mais elle rate l’essentiel. Le niveau sous-jacent et transcendental du calculateur quantique.Une page d’un livre inédit vient de s’ouvrir. A vous d’écrire ce livre.

     
  • Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley

    Aldous Huxley est né le 26 Juillet 1894 à Godalming UK, décès par injection létale de LSD le 22 Novembre 1963 (à sa demande car gravement malade), le jour de l'assassinat de JFK.

    J'entends parler ici très souvent du célèbre livre "Le meilleur des mondes" de Aldous ce qui m'a poussé à le lire.

    Je voudrais ici en faire une synthèse afin de permettre à ceux qui ne l'ont pas (encore) lu de se faire une idée de cet ouvrage.

    La forme est belle et agréable, se lit sans peine et fait sans cesse référence à William Shakespeare, ce qui parsème ce texte de culture ancienne dans un monde bien curieux comme nous allons le constater.

    Dans la préface destinée à l'édition Française, Aldous prend soin de donner une sorte de clé :

    "Tout livre est le produit d'une collaboration entre l'écrivain et ses lecteurs. Se fiant à cette collaboration, l'écrivain suppose l'existence, dans l'esprit de ses lecteurs, d'une certaine somme de connaissances, d'une familiarité avec certains livres, de certaines habitudes de pensée, de sentiment et de langage. Sans les connaissances nécessaires , le lecteur se trouvera inapte à comprendre le sujet du livre ( c'est le cas ordinaire des enfants). (NDR quel humour !).

    Sans les habitudes appropriées de langage et de pensée, sans la familiarité nécessaire avec une littérature classique, le lecteur ne percevra pas ce que j'appelerai les harmoniques de l'écriture. Car ainsi qu'un son musical évoque tout un nuage d'harmoniques, de même la phrase littéraire s'avance au milieu de ses associations. Mais tandis que les harmoniques d'un son musical se produisent automatiquement et peuvent être entendus de tous, le halo d'associations autour d'une phrase littéraire se forme selon la volonté de l'auteur et ne se laisse percevoir que par les lecteurs qui ont une culture appropriée.

    Le livre :

    Suite à une guerre de neuf ans, le monde se retrouve divisé en deux, celui des sauvages qui correspond au notre actuel et le meilleur des mondes dans lequel tout est prévu, maitrisé, parfumé, agréable, beau etc. Les deux mondes sont séparés par des clotures éléctrifiées empéchant tout échanges.

    Le monde des sauvages dispose encore de croyances, de Dieu, de livres, de groupes humains avec des langues propres , de familles et même de la reproduction sexuée, mais ce sont des sauvages, il faut les excuser.

    Dans le meilleur des mondes, tout est bien plus aseptisé, plus de livres, plus de Dieu ni croyances, plus de doute, plus de famille, juste le travail, le loisir et le sexe.

    Pas de maladie, pas de vieillesse chacun à sa place parcourt sa vie organisée ainsi.

    Le seul culte est celui de Ford, on a scié la partie supérieure des croix pour en faire des "T" et dans chaque conversation, le nom de "Dieu" est remplacé par "Ford" (nom de Ford, oh mon Ford etc...)

    Les habitants vivent sous "soma" une espèce de drogue qui efface tous les doutes, rend heureux et permet d'oublier, cette drogue est largement distribuée partout (restaurant cinémas "sentants" au travail etc.

    Le point de départ de cette "civilisation" provient de centres d'incubations et de conditionnement qui fabriquent les êtres nécessaires en fonction des besoins. Ces centres ont pour devise : Communauté, Identité, Stabilité.

    Ce sont les Prédestinateurs qui envoient les demandes aux Fécondateurs, et ainsi chaque embryon sera placé dans la chaine souhaitée qui donneront après incubation des Alphas,,Betas ou des Epsilons. Ces classes désignent la fonction dans la société, ainsi le DIC, directeur de ce centre serra un Alpha, le personnel des Betas, les soldats seront des Deltas et les Epsilons seront ouvriers ou serviteur.

    Pour plus de facilité, chaque embryons est "Bolkanisé" pour produire le plus possible de jumeaux (1200 enfants par ovule).

    Seuls les Alphas ou les Betas pourraient se reproduire par sexe mais ils doivent utiliser leur "Ceinture Malthusienne" pour éviter absolument cette abomination, les autres sont stériles.

    Chacun d'eux reçoit un conitionnement par "Hypnopédie" pour être satisfait de son sort ( ne pas envier ceux qui sont dessous ni ceux du dessus) et accepter cette merveilleuse vie sous le regard de Notre Ford.

    Au dessus de cette machine, il y a les Administrateurs (qui eux ont accès aux livres anciens) et qui contrôlent tout, c'est à dire surtout la science réservée bien sûr aux Alphas.

    Tout se déroule bien jusqu'à ce qu'un Alpha soit autorisé à ramener un Sauvage dans ce merveilleux monde, et en plus celui-ci connaît presque par coeur les oeuvres de William, ce que seul l'Administrateur peut connaitre aussi.

    Cela se termine bien sûr plutôt logiquement et donc mal.

    Sur la fin du livre au chapitre 16 (il y en a 18), la conversation entre l'Administrateur et le Sauvage seuls est très interessante bien sur puisqu'elle se déroule entre lettrés et non plus avec des Hypnopédisés, quelques extraits :

    Au sujet du monde d'avant : (c'est l'Administrateur qui parle)

    -"Parce que notre monde n'est pas le même que celui d'Othello. On ne peut pas faire de tacots sans acier, et l'on ne peut pas faire de tragédies sans instabilité sociale. Le monde est stable, à présent. Les gens sont heureux ; ils obtiennent ce qu'ils veulent, et ils ne veulent jamais ce qu'ils ne peuvent obtenir. Ils sont à l'aise ; ils sont en sécurité ; ils ne sont jamais malades ; ils n'ont pas peur de la mort ; ils sont dans une sereine ignorance de la passion et de la vieillesse ; ils ne sont encombrés de nuls pères ni mères ; ils n'ont pas d'épouses, pas d'enfants, pas d'amants, au sujet desquels ils pourraient éprouver des émotions violentes ; ils sont conditionnés de telle sorte que pratiquement, ils ne peuvent s'empêcher de se conduire comme ils le doivent. Et si par hasard quelque chose allait de travers, il y a le "soma"- que vous flanquez froidement par la fenêtre au nom de la liberté, monsieur le Sauvage. La liberté ! et voilà que vous vous attendez à ce qu'ils comprennent Othello ! Mon bon ami !"

    Plus loin :

    "bien entendu. Le bonheur effectif paraît toujours assez sordide en comparaison des larges compensations qu'on trouve à la misère. Et il va de soi que la stabilité, en tant que spectacle, n'arrive pas à la cheville de l'instabilité. Et le fait d'être satisfait n'a rien du charme magique d'une bonne lutte contre le malheur, rien du pittoresque d'un combat contre la tentation, ou d'une défaite fatale sous les coups de la passion ou du doute. Le bonheur n'est jamais grandiose."

    et encore :

    "Notre civilisation a choisi les machines, la médecine et le bohneur. C'est pourquoi il faut que je garde ces livres enfermés dans le coffre-fort, ils sont de l'ordure, les gens seraient scandalisés si....."

    Je vous remercie de votre lecture.

    jacques