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Azel Guen : Décryptage de l'Actu Autrement - Page 21

  • EN PARALLÈLE DES NÉGOCIATIONS USA-IRAN


    Exclusif : Les projets secrets d’Israël et de l’Arabie saoudite

    par Thierry Meyssan

     

    La réponse de Tel-Aviv et de Riyad aux négociations entre les États-Unis et l’Iran se situe dans le prolongement du financement de la guerre contre Gaza en 2008 par l’Arabie saoudite : l’alliance d’un État colonial et d’une monarchie obscurantiste. Alors que le Proche-Orient s’apprête à vivre un changement pour dix ans de ses règles du jeu, Thierry Meyssan dévoile ici le contenu des négociations secrètes entre Tel-Aviv et Riyad.

     

    D’aucun, au Moyen-Orient, a conscience que les accords secrets qui devraient être signés le 30 juin prochain —en marge de l’accord multilatéral sur le nucléaire— par Washington et Téhéran vont probablement fixer les règles du jeu pour les dix années à venir.

    Ces accords interviennent alors que les États-Unis sont devenus le premier producteur mondial de pétrole, devant l’Arabie saoudite et la Russie. Ils n’ont donc plus besoin pour eux-mêmes du pétrole moyen-oriental et ne s’y intéressent que pour maintenir le marché mondial en dollars.

    En outre, Washington a débuté un repositionnement de ses troupes, d’Europe occidentale et du Moyen-Orient vers l’Extrême-Orient. Ceci ne signifie pas qu’il abandonne ces régions, mais qu’il souhaite assurer autrement leur sécurité.

    Israël

    Selon nos informations, depuis 17 mois (c’est-à-dire depuis l’annonce des négociations entre Washington et Téhéran qui durent, elles, depuis 27 mois), Tel-Aviv mène des négociations secrètes avec l’Arabie saoudite. Des délégations à très haut niveau se sont rencontrées cinq fois en Inde, en Italie et en Tchéquie.

    La coopération entre Tel-Aviv et Riyad s’inscrit dans le plan états-unien de création d’une « Force arabe commune », sous les auspices de la Ligue arabe, mais sous commandement israélien. Celle-ci est déjà effective au Yémen où des soldats israéliens pilotent des bombardiers saoudiens dans le cadre d’une Coalition arabe dont le quartier général a été installé par les Israéliens au Somaliland, un État non-reconnu situé de l’autre côté du détroit de Bab el-Mandeb [1].

    Cependant, Riyad n’entend pas officialiser cette coopération tant que Tel-Aviv refusera l’initiative de paix arabe, présentée à la Ligue arabe en 2002 par le prince Abdullah avant qu’il ne devienne roi [2].

    Israël et l’Arabie saoudite sont tombés d’accord sur plusieurs objectifs.

    Au plan politique : 
     « Démocratiser » les États du Golfe, c’est-à-dire associer les peuples à la gestion de leurs pays tout en affirmant l’intangibilité de la monarchie et du mode de vie wahhabite ; 
     Changer le système politique en Iran (et non plus faire la guerre à l’Iran) ; 
     Créer un Kurdistan indépendant de manière à affaiblir l’Iran, la Turquie (pourtant longtemps un allié d’Israël) et l’Irak (mais pas la Syrie, qui est déjà durablement affaiblie).

    Au plan économique : 
     Exploiter le champ pétrolier de Rub’al-Khali et organiser une fédération entre l’Arabie saoudite, le Yémen, voire Oman et les Émirats arabes unis ; 
     Exploiter les champs pétroliers de l’Ogaden, sous contrôle éthiopien, sécuriser le port d’Aden au Yémen, et construire un pont reliant Djibouti au Yémen.

    En d’autres termes, si Tel-Aviv et Riyad font « contre mauvaise fortune bon cœur » et admettent que les deux tiers de l’Irak, la Syrie et la moitié du Liban soient contrôlés par l’Iran, ils entendent : 
     S’assurer que l’Iran renoncera à exporter sa révolution ; 
     Contrôler le reste de la région en excluant la Turquie qui a succédé à l’Arabie saoudite dans la supervision du terrorisme international et vient de perdre en Syrie.

    Palestine

    La reconnaissance internationale d’un État palestinien, conformément aux accords d’Oslo et à l’initiative de paix arabe, ne sera qu’une affaire de mois après la signature des accords états-uno-iraniens.

    Le gouvernement palestinien d’union nationale, qui n’a jamais fonctionné, a soudainement démissionné. Il parait certain que le Fatah de Mahmoud Abbas sera largement soutenu par son peuple dès lors que l’État palestinien entrera aux Nations unies.

    Le Hamas, qui incarnait depuis 2008 la Résistance, s’est soudainement discrédité en officialisant son appartenance aux Frères musulmans (alors que la confrérie a tenté plusieurs coups d’État en Arabie saoudite) et en prenant les armes contre le seul État de la région effectivement pro-Palestiniens, la République arabe syrienne. Aussi, pour se refaire une image, a-t-il décidé de se faire discret et de soutenir désormais plutôt des actions non-violentes.

    La reconnaissance de l’État palestinien mettra fin au droit au retour des Palestiniens chassés de leurs terres, mais leur ouvrira un nouveau statut. Les États-Unis et l’Arabie saoudite investiront massivement pour développer l’économie du nouvel État.

    D’ores et déjà, plusieurs candidats se pressent pour succéder à Mahmoud Abbas (qui est âgé de 80 ans et dont le mandat a expiré en 2009). Parmi ceux-ci Mohammed Dahlan, l’ancien chef de la sécurité qui aurait organisé l’empoisonnement de Yasser Arafat et avait été contraint de quitter le pays en 2007. Après avoir travaillé pour les Émirats arabes unis, puis obtenu les nationalités monténégrine —comme l’ancien Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra— et serbe, il est rentré en février en Palestine avec l’aide de ses anciens adversaires du Hamas. Devenu milliardaire, il achète sans compter combattants et voix. Un candidat plus sérieux pourrait être Marouane Barghouti, qui purge actuellement cinq peines de prison à perpétuité en Israël, et qui pourrait être libéré dans le cadre de l’accord de paix. C’est en effet la seule personnalité palestinienne non-corrompue et ayant échappé aux tueurs du Mossad.

    Arabie saoudite

    Dans ce contexte, le voyage en Russie du prince Mohamad bin Salman, fils du roi Salman d’Arabie saoudite, a soulevé une vive inquiétude, une campagne de presse laissant entendre qu’il souhaitait négocier une cessation de l’aide russe à la Syrie. Il suivait d’une semaine le déplacement du directeur de l’Organisation de coopération islamique, Iyad bin Amin Madani. Il était accompagné de plusieurs ministres et d’une trentaine d’hommes d’affaire. La délégation saoudienne a participé au Forum économique de Saint-Petersbourg et le prince a été reçu par le président Vladimir Poutine.

    Depuis sa création, le royaume wahhabite entretient des relations privilégiées avec les États-Unis et considère l’union soviétique, puis la Russie, comme des adversaires. Il semble que ceci soit en train de changer.

    L’importance considérable des accords économiques et de coopération, qui ont été signés, initie une politique nouvelle. L’Arabie saoudite a ainsi acheté 16 centrales nucléaires, accepté de participer au programme russe de recherche spatiale, et également négocié des accords pétroliers dont les détails sont pour le moment non publiés.

    Pour lever toute ambiguïté sur ce rapprochement, le président Poutine a tenu à déclarer que la Russie ne modifiait en rien son soutien à la Syrie et qu’elle aiderait à toute solution politique conforme aux vœux du peuple syrien. Dans des interventions précédentes, il avait indiqué que ceci implique le maintien au pouvoir du président el-Assad jusqu’à la fin du septennat pour lequel il a été démocratiquement élu.

    Les perdants de la redistribution des cartes

    Tout laisse à penser qu’une fois les accords états-uno-iraniens signés [3], les perdants seront : 
     Le peuple palestinien qui se verra privé du droit inaliénable au retour pour lequel trois générations se sont battues ; 
     La Turquie qui risque de payer chèrement son rêve hégémonique, son soutien aux Frères musulmans et sa défaite en Syrie [4] ; 
     La France qui s’est acharnée durant quatre ans pour rétablir ses intérêts coloniaux dans la région et qui se retrouve, en définitive, en simple position de fournisseur d’Israël et de l’Arabie saoudite [5].

     

     

     

  • Palmyre: LETTRE OUVERTE À LA DIRECTRICE GÉNÉRALE DE L’UNESCO

    LETTRE OUVERTE À LA DIRECTRICE GÉNÉRALE DE L’UNESCO

    Madame Bokova, Palmyre, Sana’a et Ninive exigent votre démission

    par Hassan Hamadé

    L’intellectuel libanais Hassan Hamadé interpelle Irina Bokova, la directrice générale de l’Unesco, au vu de sa passivité devant les destructions des trésors archéologiques syro-mésopotamiens. Pour lui, elle n’a aucune excuse, alors que le vice-président des États-Unis, Joe Biden, a publiquement dénoncé les trois États qui arment et soutiennent Daesh.

    Au IIIe siècle après J.C., Zénobia, épouse du prince de Palmyre Odénat —un général ayant reçut la nationalité romaine et ayant vaincu les Perses sassanides—, profita du désordre à Rome pour proclamer son fils empereur. Elle libéra tous les Etats du Levant de la dictature romaine et fit de sa cité, Palmyre, la capitale des peuples libres. La « cité du désert » devint un modèle unique de liberté philosophique et religieuse, où égyptiens, juifs, zoroastriens, païens et chrétiens discutaient d’égal à égal. Ce fut aussi un centre artistique exceptionnel jusqu’à son occupation par les légions d’Aurélien. Palmyre est à la fois le symbole de la résistance au colonialisme occidental de l’époque et une civilisation bien plus raffinée que le militarisme romain.
    © Unesco/Ron Van Oers

    Madame,

    Cela va faire faire bientôt un mois et demi que l’une des plus prestigieuses perles de notre patrimoine archéologique est tombée sous les coups de Daesh et risque de subir le même triste sort que d’autres phares de la culture syro-mésopotamienne : la destruction totale par explosion ou par bulldozers. Je vous adresse un cri d’alarme, un SOS, qui se résume par un seul mot : Palmyre.

    Avez-vous jamais entendu ce mot avant ?... Rien n’est moins sûr, hélas.

    Conscient, comme les millions d’humains épris de justice et de paix, de l’importance extrême de la protection des patrimoines culturels des peuples en général et du notre en particulier, celui de la Sainte Syrie et de la Mésopotamie, j’ai suivi avec désolation, tristesse et colère votre attitude décevante, timide et irresponsable face aux génocides culturels continus qui frappent ce berceaux de la civilisation humaine : Sourakia.

    En tant que dirigeante de l’Unesco vous n’auriez pas dû vous contenter de lancer de simples appels routiniers à la sauvegarde des sites archéologiques et des autres vestiges culturels, ni de vous contenter de jeter la responsabilité sur la seule organisation terroriste Daech. Ce n’est plus un secret pour personne que cette organisation, ainsi que ses cousines de la tristement célèbre Al-Quaïda, est armée et financée par des États « politiquement corrects » selon les normes de la soi-disant « communauté internationale ».

    Leur rôle dans le financement et l’armement de ces organisations a été dénoncé par le vice-président des États-Unis, Joe Biden, lors d’une conférence tenue à l’université de Harvard le 2 octobre 2014. Il s’agit, selon M. Biden, de l’Arabie saoudite, de la Turquie et des Émirats arabes unis [1].

    Je présume que vous vivez comme nous sur la planète terre, Madame, et que vous avez eu écho de ces révélations. Qu’en avez-vous fait, vous qui êtes directement concernée par la protection des sites archéologiques ? ...Au nom de la conscience culturelle mondiale dont vous êtes dépositaire vous auriez dû agir en lançant une vaste campagne juridico-médiatique afin de sensibiliser l’opinion publique internationale, saisir la justice internationale ainsi que les Nations unies, et ce en accord avec les résolutions pertinentes du conseil de sécurité (2170 [2], 2178 [3] et 2199 [4]) prises sous le chapitre 7 de la Charte [5]. Au lieu d’agir conformément à vos responsabilités, c’est-à-dire de faire tout simplement votre travail —car vous êtes payée par nous, citoyens des États membres de l’Onu—, vous avez opté pour le moindre effort, fuyant ainsi les exigences de votre tâche. Cette attitude est on ne peut plus perverse, honteuse, je dirai même déshonorante. N’oubliez pas, Madame, que votre mutisme est une sorte de non-assistance à patrimoine culturel mondial en danger d’autant que vous portez la responsabilité primordiale de veiller à la survie de ce patrimoine.

    Il semblerait, Madame, que votre comportement est calqué sur celui des gouvernements engagés dans la Coalition internationale. Ceux-là prétendent faire la guerre contre Daech tandis que leurs actions militaires contredisent totalement leur prétention. Ce n’est plus un secret pour personne que la connivence totale qui existe entre l’US Air Force, colonne vertébrale de l’aviation coalisée qui contrôle tout l’espace aérien de Sourakia, et les destructeurs des sites a rendu et rend toujours possible l’exécution de leurs plans annoncés d’avance. C’est bien grâce à cette connivence que les gigantesques colonnes de blindés, de bulldozers et de véhicules de transports de troupes se déplacent en parfaite quiétude à travers l’immensité des déserts syro-mésopotamiens, parcourant à ciel découvert des centaines de kilomètres, allant d’une ville historique à une autre, attaquant l’un après l’autre ces sites millénaires. Ces colonnes de braconniers culturels auraient pu être prises pour cibles faciles par l’aviation coalisée. Leur anéantissement, leur extermination, est à la portée de cette aviation.

    Face à ce génocide culturel continu, votre attitude parait compromettante et pose la grande question sur l’utilité de l’organisation que vous dirigez.

    À l’engagement inlassable qu’exigerait votre fonction, et aux actions qui devraient en découler, vous semblez lui préférer les privilèges de celle-ci. Entre les paroles et les actes, vous semblez préférer celles-là. En écoutant vos condamnations je ne pouvais que penser à Paul Valery qui avait raison de dire :

    « Il est des mots que l’on peut détacher de toute proposition et d’autres qui ne sont qu’en acte, et qui n’ont point de puissance ».

    Libre à vous, Madame, de respecter ou d’ignorer cette sentence du grand poète.

    Au nom de Palmyre (Syrie), de Sana’a (Yémen) et de Ninive (Irak), je vous prie de démissionner.

     

  • Syrie: LETTRE OUVERTE À FRANÇOIS HOLLANDE

     
    LETTRE OUVERTE À FRANÇOIS HOLLANDE 

    Semer la sauvagerie dans nos pays se retournera contre vous

    par Hassan Hamadé

    C’est avec beaucoup d’assurance et de satisfaction que le président français, François Hollande, a reçu les Amis du Peuple syrien, le 6 juillet 2012. C’est avec orgueil qu’il leur a lu un discours, écrit pour lui par le département d’État et mal traduit en français. En quelques instants, il s’est converti en leader de l’opposition armée syrienne agitant le drapeau vert, blanc, noir de la colonisation française. Depuis, il ne perd aucune occasion de vouloir, d’annoncer, puis de renoncer à la guerre. Hassan Hamadé observe sa triste agitation.

     
     

     

    Le 6 juillet 2012, François Hollande présidait un sommet des Amis de la Syrie. Parmi les invités d’honneurs, on comptait plusieurs criminels contre l’humanité (c’est-à-dire ayant organisé l’exécution massive de personnes au seul motif de leur appartenance religieuse). Douze jours plus tard, il donnait l’ordre d’assassiner les membres du Comité syrien de Sécurité nationale et de donner l’assaut de Damas.

    Monsieur le président,

    J’ai tenu à vous adresser par la présente une parole vraie, avec l’espoir qu’elle puisse être lue avec attention par votre Excellence. Cette parole émane d’une personne admirative du patrimoine culturel français, attachée à sa diversité et à sa richesse ; un attachement d’autant plus intense que, pour lui, le grand héritage des Lumières subit de nos jours, une véritable persécution. Ses nobles principes sont brutalement écartes de la vie publique, à commencer par ceux contenus dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, énoncée le 26 août 1789, en pleine Révolution.

    C’est avant tout un héritage libre de par sa nature. Il forge, immunise et protège des êtres humains libres, tels que Dieu les a crées et voulus. Il porte en lui des valeurs humaines, sociales, qui ne peuvent être ligotées, ni refoulées dans les coulisses de la mémoire, sans que cela constitue un crime culturel contre l’humanité. Des valeurs résumées par le fameux triptyque, Liberté, Égalité, Fraternité, faisant de la Révolution française le flambeau et la boussole pour plusieurs peuples au monde et préparant le terrain à la naissance du système démocratique, en France et dans d’autres pays.

    Hélas, ces valeurs sont exclues, remplacées par une culture visant à amadouer les gens, à les priver petit à petit de leurs acquis sociaux, à les porter à accepter l’injustice sociale, voire même l’esclavage masqué, préparant ainsi la naissance d’un homme quasi-robotisé, dépourvu de dignité, de sentiment et d’ambition.

    Comment ne pas réagir face à ce contraste flagrant, révoltant, entre l’actuelle culture décadente et celle des Lumières, construite par des hommes libres qui n’ont pas hésité à annoncer leurs convictions devant le grand roi de France Louis XIII : 
    « Pour grands que soient les rois, ils sont ce que nous sommes, 
    Ils peuvent se tromper comme les autres hommes ». 
    Le Cid, de Pierre Corneille, 1637, soit un siècle et demi avant la Révolution française.

    C’est cette même flamme de la liberté qui a porté le vrai philosophe Jean Paul Sartre à refuser, en 1964, le prix Nobel. Comme s’il prévoyait que ce prix allait être décerné à des politiciens tels Shimon Peres, commanditaire du massacre de Cana et père de la bombe atomique israélienne, ainsi qu’à d’autres de son genre avides de guerres d’agressions.

    Je me contenterai de ces deux exemples, riches en symboles et en significations, sans oublier de saluer la mémoire de Voltaire, de Rousseau et d’autres phares de la culture franco-universelle, pionniers et contemporains.

    Monsieur le président

    Comment se fait-il que cet héritage fantastique n’a plus droit de cité dans les choix politiques actuels de la France ? Est-il possible qu’il en demeure ainsi ? Comment ne pas poser ces questions alors nous assistons à des transformations rapides dans le conflit en Syrie, dont vous êtes un des principaux intervenants étrangers, depuis sa conception et sa préparation par le camp militaro-politique auquel vous appartenez, sans jamais parvenir à influencer les choix décisifs. Ces transformations ainsi que leurs répercussions et les indications dangereuses qu’elles portent, justifieraient une simple question : n’avez-vous donc pas pensé, ne serait-ce qu’un instant, à l’éventualité de voir votre principal allié, les États-Unis vous réserver une mauvaise surprise, récidivant sa perfidie de 1956 qui avait réduit en cendres les espoirs franco-britanniques de récupérer les propriétés coloniales nationalisées par le président Gamal Abdel Nasser ? Une volte face qui a facilité la défaite humiliante des deux ex-empires européens, remplacés par le fameux condominium soviéto-états-unien avec l’entrée triomphale de Moscou sur la scène régionale etc..

    Nul chef d’État ne peut se payer le luxe d’ignorer les leçons de l’Histoire. Elles doivent être prises en compte dans les analyses et les prévisions qui précèdent l’action dans les crises internationales.

    Monsieur le président,

    Vous avez fait preuve d’un enthousiasme étrange pour renverser militairement l’État syrien. Vous étiez même prêts à participer à une vaste offensive de l’Otan, sous le prétexte de la nécessité de trancher à tout prix, d’autant que vos alliés sur le terrain se montraient incapables d’arriver au but. N’avez-vous pas remarqué que ces massacres, perpétrés depuis plus de deux ans et sept mois, ne sont pas moins que la destruction totale de la Syrie en tant qu’État et société ? Une question clé se pose ici : renverser un régime que vous décrivez des plus despotiques au monde, justifierait-il la destruction du pays en entier pour le transformer en un vaste cimetière ? Quel est donc ce système démocratique qui naîtra des cimetières ?

    Vous avez manifesté une très ferme détermination à engager l’Otan dans une guerre d’agression contre la Syrie au motif que « le régime » utiliserait des armes chimiques. Soit. Vous avez approuvé a priori la décision US, annoncée publiquement, de recourir pour cette expédition « punitive » à des missiles de croisière Tomahawk. Cependant, nous savons d’après l’expérience irakienne, que les États-Unis, utilisant une technique française, les équipent d’ogives couvertes d’uranium appauvri et ce pour deux raisons. 
    La première c’est le besoin de se débarrasser d’une partie de l’énorme stock d’uranium appauvri en le vidant sur des pays destinés à être détruits, sans tenir compte des conséquences catastrophiques que cela pourrait avoir sur l’environnement et la santé des générations à venir des peuples cibles. 
    La deuxième raison est économique. Car les armes à uranium appauvri ont une capacité de destruction et de pénétration des blindages nettement supérieure aux armes conventionnelles. L’effet direct de ce procédé permet une réduction substantielle des coûts et des dépenses de la guerre. Les États-Unis ont ainsi utilisé, lors de la guerre de destruction de l’Irak en 2003, plus de 2 800 tonnes d’uranium appauvri, selon les témoignages précis d’experts internationaux réputés pour leurs compétences scientifiques et leur intégrité morale, tels qu’Hans Christopher Van Spoonek ou Denis Halliday. 
    La morale de cette histoire : vous êtes résolument opposé à l’extermination des populations en Syrie par des armes chimiques, mais vous ne trouvez pas d’inconvénient dans leur extermination par les armes nucléaires ! Étrange est vôtre logique.

    Comme vous le constatez, Monsieur le président, j’évite d’avancer une quelconque opinion quant à la véracité des accusations que vous portez sur l’usage d’armes chimiques par l’État syrien. Cependant, il m’est extrêmement difficile d’ignorer les affirmations du juge international, Carla Del Ponte. La magistrate a déterminé, preuves à l’appui, la responsabilité directe des opposants armés dans l’utilisation d’armes chimiques contre des civils à Khan Al-Assal. Je ne conteste pas la sincérité de vos accusations parce que vous insistez toujours pour ignorer les massacres commis par les terroristes, vos alliés. Depuis plus de deux ans et sept mois, l’Otan n’en a dénoncé aucun. Pas même un seul. Ce comportement, pour étrange qu’il puisse paraître, s’inscrit dans la logique qui guide les choix du commandement de l’Alliance atlantique dans la confrontation internationale qui se déroule en Syrie. Votre camp procède au ramassage des « djihadistes »(d’Al-Qaïda et de ses dérivés) et à leur transfert vers la Syrie. Il se charge de leur fournir les armes sophistiquées et la logistique nécessaire à l’accomplissement de leurs missions destructrices. Aujourd’hui, les masques sont tombés. Ce n’est que par respect pour votre prestigieuse fonction présidentielle que je m’abstiendrai de tout commentaire des déclarations compromettantes d’officiels français de haut rang, tels par exemple les dires de votre ministre des Affaires étrangères (dont le génie, les compétences et les performances diplomatiques ne peuvent passer inaperçus). Selon lui, « Les gars d’Al-Nosra font du bon boulot sur le terrain ». Cette déclaration, déjà gravée dans les Annales de ce conflit, est certes antérieure à l’annonce officielle de la fusion de leurs structures organisationnelles avec celles d’Al-Qaïda en Mésopotamie, mais bien ultérieure à de multiples massacres perpétrés par « Al-Nosra » dans différentes régions de Syrie.

    Monsieur le président,

    Pour comprendre la politique d’un pays il faudrait tout d’abord avoir ne serait-ce qu’un simple aperçu de son patrimoine culturel. Partant de ce principe, j’ai tenu à évoquer le patrimoine culturel français et son rôle déterminant dans le façonnage de la démocratie française et dans le rayonnement de vôtre pays. Mais, comme je l’ai évoqué plus haut, ce patrimoine se trouve, hélas, persécuté. Pourquoi en est-il ainsi ? Tout simplement parce que, de nos jours, il n’a plus droit de cité, ni dans la vie publique ni dans les choix diplomatiques. Il suffit simplement d’observer, de près, les modalités du fonctionnement des médias pour se rendre compte que la culture prédominante dans ce milieu est quasiment réduite à des stéréotypes dont l’unique mission est de lancer des campagnes de propagande en faveur du bellicisme états-unien et de ses entreprises guerrières sur la scène internationale.

    Justifier les « guerres d’agressions » et le « chaos constructeur », dont les théories sont mises en place à Washington par « les princes de l’obscurité », telle semble-il est la principale mission politique des « grand intellectuels » qui monopolisent vos écrans. Terrible fracture entre aujourd’hui et hier. André Malraux fut le philosophe et le penseur le plus proche de l’esprit et du cœur du général De Gaulle. Permettez-moi, Monsieur le président, de vous poser une question qui pourrait paraitre naïve : quel est le philosophe ou le penseur le plus proche de votre esprit et de votre cœur ? Est-ce Bernad-Henri Lévy, Alain Alain Finkielkraut ou d’autres parmi les fervents thuriféraires des guerres de l’Otan ? Des « intellectuels » qui défendent un concept politique visant, conformément aux directives de Washington et d’Israël, à « semer la sauvagerie » (selon l’expression du penseur libanais Youssef Aschkar) dans nos pays, avoisinants l’Europe. Des « intellectuels » qui ne réalisent pas qu’en implantant la sauvagerie dans nos terres, c’est à l’Union européenne qu’il font le plus grand tort. Des « intellectuels » monopolisant les médias et les transformant, avec l’aide des patrons du monde de la finance et des complexes militaro-industiels, en outils de terrorisme, menaçant quiconque oserait exprimer son refus de se soumettre au diktat de la « pensée unique ».

    Comme vous le savez bien, la « pensée unique » est une rhétorique idéologique, injuste de nature, qui mène la plupart du temps aux pires aboutissements. Dans le livre de Youssef Aschkar, intitulé La Mondialisation de la terreur [1], il apparait clairement que « ce qui se passe actuellement dans la Méditerranée et ce qui pourrait s’y passer est dangereux, abominable et destiné à l’être encore d’avantage si l’on permet à cette percée idéologique monstrueuse avec toutes ces facettes, de conduire cette opération qui consiste à "semer la sauvagerie" au point de non-retour, où tous les partenaires de la Méditerranée, en premier les Européens, découvriront trop tard qu’ils sont en face d’un courant incontournable et devant des dégâts et des dommages à jamais irréparables ».

    Excusez-moi si j’ai utilisé le terme « terrorisme » en évoquant vos médias qui incitent à « semer la sauvagerie » et à mener des guerres offensives contre nos pays. Et je ne suis pas le seul à le dire. Votre prédécesseur, le président Nicolas Sarkozy a reconnu cette réalité lorsqu’il s’était plaint durant sa dernière campagne électorale d’être devenu la cible du « terrorisme du système médiatique ». C’est un aveu, qui sert désormais de référence, une confirmation que vos média exercent le terrorisme. Des médias terroristes. Le président Sarkozy va même jusqu’à évoquer l’existence d’un « système » médiatique terroriste. Et comme vous le savez, Monsieur le président, le terme « système » dans ce contexte porte une connotation fort péjorative, car il englobe également la propagande du « discours unique » qui est loin d’être une attribution des démocraties.

    Cette opinion, fort précise, converge avec la vôtre, Monsieur le président, voire même la complète. Comment ? Vous avez, Monsieur le président, proclamé de vive voix lors de la même campagne électorale, dans un discours que vous avez prononcé en janvier 2012 à l’aéroport du Bourget : « J’ai un adversaire, et mon adversaire n’a ni visage ni adresse, ni parti politique, il ne se porte pas candidat aux élections, mais c’est lui qui gouverne. C’est le monde de la finance ».

    Vous avez fort raison, Monsieur le président. Vos paroles sont très claires. Le pouvoir réel dans votre pays ne réside plus dans les institutions constitutionnelles du « Pouvoir ». Le temps, à ce qu’il parait, est devenu celui de la post-démocratie. C’est l’ère de « l’oligarchie », le pouvoir de la finance. D’ailleurs le « néolibéralisme », qui est la forme la plus brutale du capitalisme déchaîné, ne peut coexister avec les systèmes démocratiques. Le néolibéralisme enfante des dictatures proclamées ou camouflées. Nous ne sommes donc pas étonnés de voir les médias érigés en « système » terroriste, sachant qu’ils appartiennent en majorité aux grands capitaux, aux complexes militaro-industriels et au monde de la finance. Ceci étant, il est normal que leur vocation devienne l’implantation de la sauvagerie, non seulement dans nos pays, mais dans les vôtres aussi… Pouvons-nous par exemple reprendre les mots de Pierre Corneille sur les erreurs des rois et remplacer le vocable « rois » par « néolibéralisme » ? … ou employer le mot « Israël » à la place « des « rois » ?

    Nous sommes devant plusieurs éléments qui constituent le grand puzzle de la scène globale, dans votre pays comme dans le nôtre et dans le monde entier. Ce paysage est réel. Il ne peut être éclipsé, ni rendu crédible par les prétextes avancés pour détruire un pays en entier : tuer ses habitants, éradiquer sa société, ses fondements économiques, culturels, environnementaux et existentiels, tout en y semant la sauvagerie pour le « renvoyer à l’âge de la pierre » comme le répètent, en toute arrogance, sans jamais être critiqués, les dirigeants des États-Unis et d’Israël quand il s’agit de faire souffrir nos pays. Y a-t-il un terrorisme plus terrible que d’anéantir des peuples et des pays entiers pour les renvoyer à « l’âge de la pierre » ?

    N’est-ce pas l’apogée du terrorisme que de soumettre les peuples de Syrie, du Liban et de Palestine — durant trois mois — aux menaces d’une guerre de destruction massive, par des missiles de croisière qui rappellent la destruction de l’Irak avec les mêmes armes à l’uranium appauvri ?

    Monsieur le président, si vous aviez visité la Syrie, le Liban ou la Palestine, et aviez eu des contacts directs avec ses peuples, vous auriez rencontré un chauffeur de taxi qui vous aurait récité des poèmes de Victor Hugo. Je vous demande, vous qui êtes si enthousiaste pour la destruction de nos pays : avez-vous lu de votre vie, l’ouvrage d’un seul intellectuel syrien ?…

    Monsieur le président,

    Je vous invite à envoyer une invitation à la grande chercheuse, Hoda Abdel Nasser, pour qu’elle vous présente les précieuses lettres échangées entre son père, le président Gamal Abdel Nasser, et le général De Gaulle. Ce serait peut-être un moyen pour vous de vous soigner de ce « prurit belliqueux » qui atteint certain chefs d’États. D’autant que Washington a brusquement fait volte-face, sans prendre votre avis, comme lors de l’agression tripartite contre Suez. Je vous conseille également de lire 1956, Suez, un ouvrage écris par l’ancien ministre français des Affaires étrangères, le diplomate chevronné Christian Pineau.

    Croyez-moi, Monsieur le président, seule la culture est capable de stopper l’avancée de cette stratégie diabolique visant a implanter la sauvagerie et à renvoyer nos pays à « l’âge de la pierre ».

    Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir prendre en considération cet humble conseil provenant d’un allié de l’opposition démocratique syrienne, qui a refusé, dès le début, la militarisation de l’opposition, l’argent corrompu des pays du Golfe, vos ingérences destructrices et le maintien en place du régime au pouvoir. Je parle de l’opposition démocratique que vous-même avez refusé d’écouter, bien que nul en Syrie ne doute de sa sincérité.

    Je réitère mes remerciements pour toute l’attention que vous pourriez réserver à cette parole vraie car elle tient à la sauvegarde des relations de respect et d’amitié entre nos pays et la France.

    As Salam Aleiqom (La paix soit avec vous).

    Source 
    As-Safir (Liban)

  • Vous avez parlé du "terrorisme" ?

    Aux États-Unis aussi, la définition médiatique du « terroriste » est à géométrie variable

    par FAIRle 25 juin 2015

    Si l’on trouve des « terroristes » et du « terrorisme » sous toutes les plumes journalistiques ou presque, en France, aux États-Unis et ailleurs, force est de constater que les grands médias appliquent trop souvent, dans ce domaine aussi, le « deux poids, deux mesures ». En effet, s’ils s’empressent de brandir le terme dans certains contextes et pour certains individus (plutôt « islamistes » ou, par défaut, « musulmans »), ils répugnent parfois à le faire alors même que tout semble indiquer qu’il se justifierait (les individus sont alors plutôt « occidentaux » ou, comme on le dit dans le monde anglophone, de type « caucasien »). À cet égard, le traitement du « cas Breivik » fut « exemplaire ».


    Le court texte qui suit, paru le 19 juin dernier sous le titre « Why Are persons Unknown More Likely to Be Called « Terrorist » Than a Known White Supremacist ? », sur le site de l’observatoire américain des médias Fair, revient sur ce travers journalistique. (Acrimed)

    Au lendemain d’un acte de violence de masse, un pays hébété se tourne généralement vers ses grands médias pour voir la façon dont ils présentent les évènements. Les termes utilisés par les journalistes dans les heures qui suivent un massacre contribuent à former l’opinion publique tout en ayant une influence majeure sur les réactions politiques.

    Lorsque deux bombes ont explosé le 15 avril 2013 lors du marathon de Boston, faisant trois morts et des centaines de blessés, cela a immanquablement fait les gros titres : une recherche effectuée le lendemain de l’attentat à partir d’une base de données regroupant les journaux américains indiquait que 2593 articles mentionnaient le marathon, tous ou presque relatant les explosions. Parmi ceux-ci, 887 (34%) eurent recours au terme « terrorisme » ou assimilé (« terroriste », sous sa forme adjectivale ou nominale) – bien que l’on ne connût les auteurs, et a fortiori leur motivation, que plusieurs jours plus tard.

    Lorsque neuf personnes ont été tuées le 17 juin dernier dans l’Eglise épiscopale méthodiste africaine Emanuel, 367 articles ont paru le lendemain qui mentionnaient « Charleston » et « l’église », selon la même base de données ; un important fait d’actualité, certes, mais loin du traitement hors norme des attentats du marathon de Boston. Et parmi ces 367 articles, seuls 24 (7%) parlaient de « terrorisme » ou de « terroriste », bien que d’emblée, Dylan Roof, suspect n°1, fût identifié, tout comme furent exposées les preuves selon lesquelles il était mu par une idéologie suprémaciste blanche ainsi que le désir de « déclencher une guerre civile » (selon le journal local de Caroline du Sud The State).

    D’après certains, on a tellement usé et abusé du terme « terrorisme » que l’on ferait mieux de s’en passer. Reste que la violence motivée politiquement ciblant des civils – invariant de toutes les définitions du « terrorisme » – est un phénomène bien réel qu’il est difficile de ne pas nommer.

    Si les médias veulent utiliser ce terme, néanmoins, ils doivent le faire sans recourir au « deux poids, deux mesures ». En l’appliquant à des attaques dont les auteurs n’étaient alors pas encore identifiés, tout en refusant, dans la plupart des cas, de l’utiliser pour qualifier un massacre attribué à un blanc suprémaciste souhaitant déclencher une guerre raciale, ils ont échoué.

    Jim Naureckas

    (Traduit par Thibault Roques)

  • WikiLeaks : Laurent Joffrin serait-il devenu « paranoïaque » ?

    EN BREF

    par Julien Salingue, le 25 juin 2015

    La nouvelle a été annoncée à grands renforts de teasing : mardi 23 juin, à 22 heures, du « très lourd » serait publié par Mediapart et Libération. Et, à l’heure dite, le couperet est tombé : de nouveaux documents rendus publics par WikiLeaks établissent que les États-Unis ont espionné les autorités françaises durant de longues années, y compris au plus haut niveau de l’État.

    On ne peut évidemment que se féliciter du fait que de telles informations soient portées à la connaissance du public, et saluer le travail de WikiLeaks et des journalistes qui ont contribué à les rendre accessibles : le moins que l’on puisse dire est en effet que ces révélations (ou confirmations preuves à l’appui) sont d’utilité publique.

    Mais les esprits chagrins (ou taquins) que nous sommes n’ont pu s’empêcher de relever, en voyant Laurent Joffrin faire la tournée des plateaux de télévision et de radio pour exposer et défendre le travail fourni par le journal qu’il dirige, que certains nageaient en plein paradoxe. En consultant nos archives, nous avons en effet retrouvé ceci :

    C’est d’ailleurs un paradoxe que de voir WikiLeaks s’attaquer essentiellement aux démocraties, laissant de côté les dictatures les plus opaques et les plus répressives. Aussi bien, il est assez réconfortant de voir que les échanges secrets des grandes diplomaties sont fort peu différents, sur le fond, de leur discours public. Il faut croire que le machiavélisme qu’on prête aux gouvernants, toujours soupçonnés d’organiser de noirs complots, est moins grand dans la réalité que dans l’esprit de certains militants quelque peu paranoïaques.

    Lignes écrites par un certain… Laurent Joffrin, le 30 novembre 2010, dans un éditorial de… Libération, consacré aux premières révélations de WikiLeaks, et titré – ça ne s’invente pas – « Paradoxe ». Nous avions relevé à l’époque que la ligne éditoriale de Libération avait alors été très fluctuante, de la dénonciation du « Big brother » Wikileaks au soutien affirmé au groupe dirigé par Julian Assange, et nous formulions alors le souhait que ces évolutions traduisent une saine prise de conscience.

    Cinq ans plus tard, l’éditorialiste, de retour à Libération, semble être beaucoup plus nuancé quant à l’intérêt des révélations WikiLeaks, et c’est tant mieux. Mais que penserait Joffrin Laurent (cuvée 2010) de la posture de Laurent Joffrin (cuvée 2015) ? Le rangerait-il parmi les « militants quelque peu paranoïaques » ? Ou peut-être serait-il classé dans cette autre catégorie que le directeur de Libération affectionne, celle de « complotiste » ?

    À voir. Mais faisons un vœu : Laurent Joffrin, pris ces derniers jours, selon ses propres termes, en flagrant délit de « paranoïa » [1], sera désormais plus prudent lorsqu’il sera tenté de jeter des anathèmes sur ceux qui l’empêchent d’éditorialiser en rond, y compris et notamment le pôle de la critique des médias dont nous nous revendiquons et qu’il aime à qualifier de « média-paranoïaque ». Ce serait la moindre des choses, n’est-ce pas ?

    Julien Salingue

     

    Notes

    [1] Comme nous le notions dans un précédent article, à propos de l’utilisation du terme « paranoïa » par Laurent Joffrin, « l’usage péjoratif de termes psychiatriques n’est pas la marque d’une grande compassion pour ceux qui souffrent des troubles que ces termes désignent, [et] leur usage à des fins polémiques ne témoigne ni d’une grande originalité, ni d’une grande finesse ».