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Azel Guen : Décryptage de l'Actu Autrement - Page 109

  • L’agriculture biologique prise au piège

    BUSINESS

    L’agriculture biologique prise au piège de la grande distribution

    PAR SOPHIE CHAPELLE (10 DÉCEMBRE 2012)

    Les produits biologiques ont envahi les rayons des supermarchés. Mais derrière l’étiquette « bio », on trouve aussi des gigantesques fermes, une main d’œuvre sous-payée et sans droits, des aliments importés de l’autre bout du monde. Les produits chimiques en moins, le label bio en plus. Des dérives de « l’industrie du bio » dénoncées par le journaliste Philippe Baqué dans son ouvrage La Bio entre business et projet de société. Entrez dans les coulisses du nouveau business mondial.

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    Basta ! : On trouve de plus en plus de produits biologiques dans les rayons des supermarchés. Mais la surface agricole cultivée en bio stagne à 3 % en France. Comment expliquer ce décalage ?

    Philippe Baqué [1 : On assiste depuis 15 ans à un développement fulgurant de l’agriculture biologique. Environ 40 millions d’hectares seraient certifiés bio aujourd’hui dans le monde, selon l’Agence Bio (soit l’équivalent de l’Allemagne et de la Suisse, ndlr). Les deux tiers de ces surfaces sont des prairies qui appartiennent à de grandes exploitations, où paissent des troupeaux qui pour la plupart ne sont même pas vendus en bio. C’est le cas en Argentine où 90 % des 4,4 millions d’hectares labellisés bio sont des terres consacrées à l’élevage de moutons appartiennant à d’immenses fermes.

    En dehors de ces prairies, la majeure partie des surfaces certifiées bio appartiennent à de grandes exploitations, spécialisées dans des monocultures d’exportation – soja, huile de palme, blé ou quinoa. Cette agriculture biologique certifiée se développe surtout en Amérique latine (+26% entre 2007 et 2008), en Asie (+10 %), en Afrique (+6 %), sur des terres où les habitants ne consomment pas, ou très peu, leurs propres productions [2]. Celles-ci sont exportées vers l’Europe, le Japon et l’Amérique du Nord. Cette agriculture bio reproduit le modèle économique agro-industriel dominant qui met les paysans du Sud au service exclusif des consommateurs du Nord et les rend de plus en plus dépendants.

    Sur quelle stratégie commerciale se fonde ce « bio-business » ?

    C’est une véritable OPA de la grande distribution, qui a vu dans le bio un marché qu’elle devait investir à tout prix. Aujourd’hui, en France, 50 % des produits bio sont vendus dans les grandes surfaces. C’est énorme ! Les hypermarchés basent leur stratégie sur la « démocratisation » des produits biologiques. Cela se traduit par de grandes campagnes publicitaires, comme celle d’Auchan qui propose 50 produits à moins de un euro. Ce qui conduit au développement d’une agriculture biologique industrielle intensive, avec l’importation d’une grande quantité de produits à coûts réduits. La France est ainsi devenue importatrice de produits bio, après en avoir été exportatrice.

    Dans le secteur des fruits et légumes, la grande distribution reproduit dans le bio ce qu’elle fait dans le secteur conventionnel. Elle participe à la spécialisation de bassins de production : la province d’Almería en Andalousie s’est ainsi spécialisée dans les légumes ratatouille (tomates, poivrons, courgettes, aubergines...), la région de Huelva dans les fraises. On trouve les mêmes produits dans la plaine d’Agadir au Maroc ou dans le sud de l’Italie. Les producteurs sont mis en concurrence sur l’ensemble du bassin méditerranéen. Si le coût des tomates d’Andalousie est trop élevé, on ira en chercher au Maroc. Le seul coût qui peut être ajusté, c’est celui de la main d’œuvre agricole, exploitée à outrance, immigrée et sans droit.

    Cette stratégie commerciale n’est-elle pas en contradiction avec la réglementation européenne ? Le droit du travail est-il soluble dans l’agriculture biologique ?

    La nouvelle réglementation européenne concernant l’agriculture biologique, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, a été taillée sur mesure pour favoriser le développement de cette agriculture industrielle et intensive, et la mise en concurrence de ces bassins de production. Elle se réduit à des principes agronomiques, techniques, et ne fixe aucun critère social. La main d’œuvre n’est pas du tout prise en compte, pas plus que les tailles des fermes.

    La question du transport est aussi évincée. Le fait que des tomates d’Andalousie ou des carottes d’Israël soient exportées par des norias de camions dans toute l’Europe n’entre pas en contradiction avec la réglementation européenne. Nous citons l’exemple du soja bio importé du Brésil, qui provient d’énormes exploitations de 5 000 à 10 000 hectares, conquises sur des forêts primaires dans l’État du Mato Grasso. La réglementation n’interdit pas que des produits bio soient cultivés sur des terres récemment déboisées ! Même chose pour l’huile de palme bio massivement importée de Colombie : des paysans ont été violemment chassés de leurs terres pour pouvoir lancer cette culture.

    N’y a t-il pas un risque que le consommateur trompé se détourne des produits bio ?

    Si cette logique se poursuit, les gens finiront par ne plus s’y reconnaître. On est très loin de l’esprit des fondateurs et de la charte de 1972 de l’organisation internationale de la bio (IFOAM), avec des principes agronomiques très forts, mais aussi écologiques, sociaux et politiques. Il était question de transparence, de prix équitable, de solidarité, de non-exploitation des pays du Sud, de fermes à taille humaine, diversifiées et les plus autonomes possible, de consommation de proximité... Aujourd’hui, les cahiers des charges officiels de la bio ont totalement échappé aux paysans, même si les organisations professionnelles sont invitées à en discuter. Au final, ce sont des techniciens à Bruxelles, soumis à tous les lobbies, qui définissent cette réglementation. Et interdisent aux États d’adopter une réglementation plus stricte. Il y a un risque véritable que la bio soit totalement vidée de son sens.

    Heureusement, des marques et mentions ont un cahier des charges plus rigoureux que la réglementation européenne. A l’instar de Nature et Progrès, Demeter, BioBreizh ou Bio Cohérence, qui se démarquent clairement de la bio industrielle. Certains producteurs ne veulent pas de la certification européenne et ont contribué à la mise en place de systèmes de garantie participatifs : un contrôle fondé sur la confiance, en présence d’un consommateur et d’un producteur. S’ils détectent quelque chose qui ne fonctionne pas bien, ils voient avec le paysan comment l’aider à améliorer ses pratiques. C’est une logique d’échange et de solidarité.

    Vous ne voulez pas diaboliser ces agriculteurs, dites-vous. Ceux qui sont dans le système de la bio industrielle peuvent-ils en sortir ?

    Les paysans deviennent des sous-traitants. Ils sont tenus par des contrats avec les toutes-puissantes coopératives agricoles. La filière des élevages intensifs de poulets bio, dominée par des coopératives comme Terre du Sud, MaïsAdour ou Terrena, illustre cette évolution. Dans le Lot-et-Garonne par exemple, Terre du Sud a récemment recruté des producteurs, souvent endettés, pour faire du poulet bio. Elle leur garantit des contrats avec la grande distribution et la restauration collective. La coopérative aide à trouver les financements, fournit les bâtiments, le matériel, les conseils de ses techniciens... En contrepartie, le producteur signe un contrat d’intégration : il s’engage à acheter à la coopérative les poussins, la totalité des aliments pour ses volailles, ainsi que les produits phytosanitaires et médicaux [3]. Il doit vendre toute sa production à la coopérative qui est la seule à déterminer les prix.

    Un exemple : le producteur signe pour un élevage de 40 000 poulets. Il doit investir 250 000 euros. La coopérative l’aide à obtenir 50 000 euros de subventions, le reste provient d’un prêt du Crédit agricole. Endetté dès le départ, le paysan est entièrement soumis à la volonté des coopératives qui peuvent décider du jour au lendemain de convertir son exploitation dans une autre production, si elles jugent que celle du poulet bio n’est plus assez rentable.

    Dans chacune de ces filières industrielles – volailles, soja, café, huile de palme, fruits et légumes – existe-t-il des alternatives biologiques locales ?

    Dans chaque pays où nous avons voyagé, nous rendons compte de cette autre agriculture biologique en rupture avec le système agro-industriel, qu’elle soit certifiée ou pas. J’ai été très marqué par une rencontre avec un producteur à Almería (Andalousie), la plus grande région de concentration de serres au monde. Ses parents ont été pris dans cet engrenage de production de fruits hors-saison destinés à l’exportation. Pendant plusieurs années, il a refusé de cultiver. Il a beaucoup voyagé pour rencontrer d’autres agriculteurs en bio. Aujourd’hui, en plein milieu de cette mer de plastique, sur deux hectares de serres et deux hectares en plein champs, il fait de l’agriculture biologique paysanne, produisant un grand nombre de variétés à partir de semences paysannes et vendant uniquement aux consommateurs andalous. Partout, les résistances abondent. Avec une très grande richesse dans les formes – ferme familiales, coopératives, communautés, groupements – ou les méthodes de culture – cultures associées, systèmes d’agroforesterie, permaculture...

    Le changement des pratiques ne passe-t-il pas aussi par une réflexion autour de la distribution  ?

    Le système des Amap (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne) a encouragé l’activité de milliers de maraîchers en France. Les groupements d’achats se développent aussi de façon spectaculaire. Dans le Lot, par exemple, ce sont des personnes bénéficiaires du RSA qui ont décidé de se regrouper afin d’accéder à une alimentation biologique locale. Avec une critique assez radicale de la grande distribution et l’envie d’une relation directe avec les producteurs. Dans l’Aveyron, un groupement a aidé l’un de ses membres à s’installer comme producteur de pâtes locales. Une réflexion plus globale autour de l’alimentation s’amorce.

    La question du prix est-elle essentielle ?

    Des prix de plus en plus bas, la défense du pouvoir d’achat, c’est le combat de la grande distribution. Mais on ne parle jamais du vrai prix des produits « conventionnels », de ce qui n’apparait pas. Pour une tomate « conventionnelle » produite de façon industrielle en Espagne, on ne parle pas du coût du transport, de son coût environnemental, des aides publiques dont cette production bénéficie. Et encore moins des coûts sanitaires dus aux pesticides. Si on prend tout en compte, et que l’on réduit les marges des intermédiaires et des supermarchés, le prix d’une tomate biologique ne serait pas si éloigné du prix d’une tomate conventionnelle. Il n’est pas normal non plus que ce soit les producteurs bio qui paient la certification. Ce devrait être aux pollueurs de payer. Et les maraîchers travaillent 14 heures par jour, six ou sept jours par semaine. Il est essentiel de payer leur travail au juste prix.

    L’agriculture biologique peut-elle être porteuse d’un projet de société ?

    L’agriculture biologique n’est pas une fin en soi. Elle s’inscrit dans un mouvement général basé sur le respect de l’humain et de la nature. On assiste à une querelle d’experts, pour savoir si l’agriculture biologique pourra nourrir ou non la planète en 2050. L’agriculture biologique ne pourra pas nourrir la planète si nous ne changeons pas de système politique. Si nous n’arrêtons pas le transfert massif de populations paysannes vers les bidonvilles des mégalopoles. Si nous n’arrêtons pas de transformer leurs terres en monocultures industrielles destinées à nourrir les élevages des pays riches ou les véhicules. Si nous ne sortons pas de ce capitalisme financier, le plus sauvage à avoir jamais existé. La bio doit nous amener à envisager une société beaucoup plus juste que celle dans laquelle nous vivons. Il existe aujourd’hui un mouvement social diffus et encore peu organisé, mais porteur d’un nouveau projet de société, à l’instar de la lutte du Larzac ou celle de Notre-Dame-des-Landes. Une agriculture biologique ne peut être que paysanne. Si elle est livrée à l’industrialisation, elle ne fera qu’accélérer la disparition du monde paysan.

    Propos recueillis par Sophie Chapelle

    @Sophie_Chapelle sur twitter

    Crédits photo : Philippe Baqué /AlterraviaLes ouvrières de la bio

    A lire : La Bio entre business et projet de société, sous la direction de Philippe Baqué, éditions Agone, 432 pages, 22 euros.

    Notes

    [1] Philippe Baqué est journaliste indépendant, collaborateur du Monde diplomatique, dePolitis, de Silence, de Témoignage Chrétien, auteur du livre Un nouvel or noir (Paris Méditerranée, 1999) et réalisateur de films documentaires : Carnet d’expulsion, de Saint-Bernard à Bamako et Kayes ; Melilla, l’Europe au pied du mur ; L’Eldorado de plastique ;Le Beurre et l’argent du Beurre. Il a coordonné l’ouvrage collectif La Bio entre business et projet de société, paru aux éditions Agone en 2012.

    [2] Chiffres cités par le rapport annuel de l’Agence Bio Les chiffres clés de l’agriculture biologique, la Documentation française, 2010.

  • Obsolescence programmée

    SURCONSOMMATION

    Obsolescence programmée : les Français sont fans de high-tech jetable

    PAR SOPHIE CHAPELLE (2 JANVIER 2013)

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    9,5 millions de produits high-tech auraient été vendus pour Noël, en France, dont 2,2 millions de smartphones [1]. Dans un nouveau rapport, l’association Les Amis de la terre dénonce cette surconsommation, liée à l’innovation et aux stratégies publicitaires, qui contribue à créer une véritable obsolescence programmée : un ordinateur portable est renouvelé tous les 3 à 4 ans, et un téléphone tous les 18 mois ! En France, la consommation énergétique des produits high-tech est évaluée à 13,5 % du total de la consommation électrique, soit 5 % des émissions de gaz à effet de serre.

    Obsolescence logicielle

    Comment les fabricants réduisent-ils la durée de vie des produits ? Durée d’usage conditionnée à des offres commerciales, prix élevé des prestations proposées par les services après-vente, batterie intégrée au produit limitant la vie d’un Ipod à 18 mois... Les Amis de la terre pointent également« l’obsolescence logicielle ». Autrement dit, le bridage des systèmes d’exploitation, qui ne sont compatibles qu’avec les dernières générations de produits. Exemple : impossible d’installer le système d’exploitation développé en 2012 sur l’iPad 1 vendu en... 2010 !

    Comment agir contre cette surconsommation imposée ? Le nouveau site lancé par les Amis de la terre www.dessousdelahightech.org donne des pistes pour entretenir son matériel, prolonger la durée de vie de ses batteries, et des contacts pour pouvoir faire réparer près de chez soi. Comme les Ateliers du bocage, qui donnent une seconde vie aux téléphones portables, quelle que soit leur génération. Les plus vieux seront recyclés, les matières issues des téléphones serviront à nouveau et limiteront le prélèvement de nouvelles ressources. Les plus récents sont vérifiés, vidés de leurs données et si besoin réparés. Au niveau national, le sujet de l’obsolescence programmée devrait être débattu en 2013 dans le cadre du projet de loi « Consommation ». Une proposition de loi pour lutter contre l’obsolescence programmée des biens est en cours d’élaboration.

  • Attaquer les pauvres et les bouches inutiles

    Attaquer les pauvres et les bouches inutiles et les assiéger par l’Austérité.

    Comment régler le problème de l’obsolescence des individus (Dissident Voice)

    William Manson

    Mémorandum : Interne (Confidentiel)
    Problème : Grand excédent de main d’oeuvre
    Solution : Austérité (soit, dans les faits, l’annihilation d’une classe sociale).

    Il y a un problème gênant qui refuse de disparaître : que faire de "l’excédent de population" (pour paraphraser Scrooge*, le Malthusien**) ? Je veux dire que dans notre économie post-industrielle du 21ème siècle, des dizaines de millions de personnes - des être humains, n’est-ce pas ? - ont désormais peu de "valeur marchande" pour ne pas dire plus du tout. Deux facteurs en sont principalement responsables : l’automatisation de haute technologie et la délocalisation (la fuite de capitaux, "la course au coût le plus bas"). Leurs compétences professionnelles traditionnelles sont devenues hors de prix, inutiles, dépassées et désuètes. On ne peut plus les exploiter comme salariés (sous-payés) ni comme consommateurs. Ils ne font rien, ils sont malheureux, agités et sujets à des accès spasmodiques de rage qui engendrent de l’agitation sociale.

    Que faire ? On parle ici d’environ 20% de la population des Etats-Unis. Selon la perspective idéologique du néocapitaliste - pour qui la "valeur" individuelle est totalement circonscrite à la "valeur marchande" - ils "ne valent rien". (Souvenez-vous des paroles de Margaret Thatcher : "Il n’y a pas de société civile"). On ne peut pas juste.... les tuer - bien que ce soit certainement le moyen le plus simple, le plus efficace et le moins coûteux de se débarrasser du problème. L’élite qui représente 1% (ou plutôt le dixième de 1%) pourrait même continuer à profiter, dans une impunité quasi-totale, des crimes et des abus commis par les machines à extorquer l’argent que nous appelons Entreprises. Mais il y a des restes de contraintes légales et normatives qui rendent difficiles le meurtre prémédité. (Avec toutefois une exception dont on ne parle jamais mais qui n’en est pas moins flagrante : le bombardement et la destruction de milliers de gens innocents dans des endroits comme l’Irak et l’Afghanistan.)

    Donc, je repose la question : que faire ? Rien qu’aux Etats-Unis, le chômage structurel (plus le "sous-emploi" du temps partiel) touche près de 20% de la population. Et selon les dernières statistiques de l’UNICEF, 23% des enfants étasuniens vivent désormais dans la pauvreté.

    Il y a une variante très efficace de la "doctrine du choc" qu’on peut résumer ainsi : "En ces temps d’incertitude financière - ou plutôt de crise ! - nous ne pouvons tout simplement plus "nous permettre" d’aider tous ces gens. Après tout, personne ne devrait être "en droit" de bénéficier de services à coûts réduits financés par le gouvernement comme la sécurité sociale et le logement (de standing inférieur)".

    En un mot il s’agit de l’Austérité. Quand ces gens n’auront plus aucune ressource, un coup de pied bien appliqué suffira à les chasser de la société. Réduits au désespoir, ils voleront un miche de pain (au sens figuratif) et cette armée de Jean Valjean pourra alors enfin rapporter un peu d’argent - en devenant des hôtes de longue durée de l’hôtellerie carcérale étasunienne (LLC). Mais la désespérance et l’absence d’avenir peuvent aussi pousser ces malheureux dans d’autres formes d’exclusion sociale autodestructrices et (souvent) mortelles comme l’alcoolisme, la drogue, l’emploi d’armes à feu et les "accidents". Pour parler comme les militaires, d’abord on a attaqué les pauvres et les bouches inutiles et maintenant on les "assiége" par l’Austérité.

    Tout cela n’est que du commerce : il faut faire un maximum de profit, c’est tout. Ces gens n’ont "aucune valeur" n’est-ce pas ? En plus ils nous irritent, nous contrarient, et nous voulons "nous en débarrasser". C’est bien cela n’est-ce pas ? Alors il ne faut plus tergiverser. L’histoire regorge d’exemples qui vous aideront à affiner votre stratégie pour mener à bien cette entreprise.

    William Manson a écrit The Psychodynamics of Culture (Greenwood Press).

  • L’année 2012 en patates

     

    Voici le traditionnel best of de l'année 2012 en patates.

    En janvier, l'actualité était numérique avec la fermeture du site de partage Megaupload et le lancement des offres de téléphonie de Free.

    En févrierFrançois Hollande jouait la carte Mitterrand, the Artist emportait l'oscar du meilleur film et Whitney Houston nous quittait.

    En mars, la campagne des présidentielles se met en pause après les tueries de Toulouse, Nicolas Sarkozy et François Hollande sont déjà presque certains de figurer au second tour et l'iPad 3 se fait attendre.

    En avril, l'actualité c'était la campagne, la campagne et encore la campagne.

    En mai, François Hollande est devenu Le président de tous les Françaisdu coup on a enfin pu parler d'autres choses comme du G8, de la fin de la semaine de 4 jours ou de la journée mondiale des geeks.


    En juin, les législatives ont accouché de quelques triangulaires et l'équipe de France n'a pas brillé lors de l'Euro.

    En juillet, on a découvert le boson de Higgs et c'était super. Du coup, j'ai failli acheter des panneaux solaires.

    En aoûtc'étaient les vacances pour presque tout le monde. Heureusement, il y avaitles jeux olympiques et la sonde Curiosity sur mars pour remplir nos journaux.

    En septembre, la France passait le cap des 3 millions de chômeurs et les Etats-Unis nous copiaient avec leur propre  campagne présidentielle.

    En octobre, l'Europe décrochait le prix Nobel de la paix, Facebook comptait 1 milliard d'amis et Microsoft sortait une nouvelle version de Windows.

    En novembreObama était réélu président, la France entamait son virage de la rigueur et l'UMP se choisissait (presque) un président.

    Et pour bien finir l'année, en décembre, c'était la fin du monde.

    Un grand merci à tous ceux qui ont suivi ce blog en 2012 pour sa 6ème année.
    Rendez-vous en 2013 pour de nombreux nouveaux dessins légers sur l'actualité.
    Et n'oubliez pas, l'album souvenir de l'année passée est toujours disponible en librairie !

     

     

     
  • Après l’Irak et l’Afghanistan, les drones...

    SOURIEZ, VOUS ÊTES DRONÉS29/12/2012 à 17h42

    Après l’Irak et l’Afghanistan, les drones envahissent le ciel américain

    Elsa Ferreira | Rue89

    Utilisés par l’armée américaine en temps de guerre, les drones surveillent désormais aussi les citoyens, ce qui inquiète les défenseurs de la vie privée.


    Deux agents surveillent les frontières américaines grâce aux drones (Eric Gay/AP/SIPA)

    Demain, le futur ? Le ciel des Etats-Unis pourrait bientôt être envahi de dizaines de milliers de drones. 30 000 d’ici 2020. Leur mission : surveiller les citoyens américains.

    On connaît les drones pour leur utilisation par l’armée américaine en territoire étranger. Des bombardements à la télécommande qui ont fait beaucoup de morts dits « collatéraux ».

    Mais ils sont aussi utilisés dans le ciel américain. La police des frontières les utilisent depuis 2005 pour repérer les immigrants clandestins et le trafic de drogue entre les Etats-Unis et ses deux voisins, le Mexique et le Canada. A quelques reprises, et sous des conditions restreintes, le FBI (le Bureau fédéral d’investigation) et la DEA ( l’Agence de lutte contre les trafics de drogue) ont été autorisés à emprunter les robots volants de leurs collègues. En juin 2011, les forces de l’ordre du comté de Nelson (Dakota du Nord), procédaient à lapremière arrestation de citoyens américains assistée d’un drone.

    Espions-robots

    Ce n’est que le début... la « dronaïsation » du territoire s’accélère. En février de cette année, le congrès a voté une loi pressant l’Administration fédérale de l’aviation (la FAA) d’élargir les conditions de survol du territoire domestique aux drones. En plus de l’armée, le secteur privé et les agences civiles du gouvernement (au niveau fédéral, des Etats et local) seront autorisés à faire flotter les engins dans l’espace aérien américain.

    Selon le Christian Science Monitor, il y aurait déjà plus de 110 bases d’activité pour les drones, actuelles ou en construction, dans 39 Etats. La Electronic Fontiere Fondation a établi une carte répertoriant les autorisations données, ou en attente, pour leur utilisation. Le pays entier est quadrillé.

    D’un point de vue technologique, les drones sont de redoutables espions. De la taille d’un avion ou aussi petit qu’un colibri, ils peuvent être équipés de caméras infrarouges, de détecteurs de chaleur, de GPS, de détecteur de mouvement, d’un lecteur automatisé de plaque d’immatriculation et on leur prête un prochain système de reconnaissance faciale.

    Le scénario de science-fiction ne fait pas sourire les défenseurs de la vie privée, qui s’inquiètent d’un « Etat de surveillance ».

    Surveillance non-consensuelle

    Dans son article sur l’imminente « attaque des drones » pour le Guardian,Naomie Wolf publie un document non-classifié de l’armée de l’air américaine, clarifiant les limites de la « surveillance dronaire ». On y apprend que les robots-espions ne pourront pas « mener de surveillance non-consensuelle sur des personnes américaines spécifiquement identifiées, sauf si approuvé expressément par la secrétaire à la Défense. »

    Une bonne nouvelle... jusqu’à ce qu’on lise entre les lignes. Tout d’abord, cela veut dire que la surveillance contre leur gré des citoyens américains ne dépend que de l’approbation de la secrétaire à la Défense. Comme l’écrit Naomie Wolf :

    « Le Pentagone peut désormais envoyer un drone domestique rôder autour de la fenêtre de votre appartement, recueillir des images de vous et de votre famille, si la secrétaire de la Défense l’approuve. »

    Cela veut dire aussi que des personnes américaines non « spécifiquement identifiées » – « une détermination si vague qu’elle en perd son sens » – pourraient être surveillées à leur insu. Comme par exemple « un groupe de militants ou de manifestants », interprète l’auteure américaine.

    La fin du 4e amendement

    La surveillance des citoyens par les drones a déjà commencé. A titre d’entraînement. C’est ce qu’à découvert un journaliste du New York Times lors d’un reportage (en groupe) sur la « drone zone », une base d’entraînement pour les « pilotes » de drones.

    « Cela n’a pris que quelques secondes pour comprendre exactement ce que nous regardions. Un véhicule blanc, roulant sur l’autoroute à côté de la base, arrivait dans le viseur au centre de l’écran et était traqué alors qu’il roulait vers le sud le long de la route déserte. Quand le véhicule sorti de l’image, le drone commença à suivre une autre voiture.

    “ Attendez, vous vous entraînez à traquer l’ennemi en utilisant des voitures de civils ?”, demanda un journaliste . Un officier de l’armée de l’air répondit que ce n’était qu’une mission d’entraînement et le groupe (de journalistes, Ndlr) a été précipité hors de la pièce. »

    Si les informations peuvent être collectées à l’insu des citoyens américains, sous des conditions vagues, que deviennent-elles ensuite ? Là encore, le document de l’armée de l’air réserve quelques surprises.

    Il indique qu’en cas d’informations sur un citoyen américain « reçues par inadvertance », l’unité en question peut conserver ces informations jusqu’à 90 jours, pour déterminer si elles peuvent être gardées de façon permanente. « Ce qui en finit pour de bon avec le quatrième amendement », – amendement qui protège les citoyens américains contre les perquisitions et saisies non motivées et non justifiées –, juge Naomie Wolf.

    1984

    Les américains accueillent les drones avec méfiance. A la question « A quel point seriez vous inquiet si les forces de l’ordre américaine commençait à utiliser des drones avec des caméras haute technologie ? » posée lors d’un sondage réalisé par l’université de Monmouth, 42 % ont répondu qu’ils seraient « très inquiets ».

    Ils s’opposent également en masse (67 %) à l’utilisation des drones lors de dépassement de vitesse. Ils sont cependant largement favorable à l’utilisation des robots pour contrôler l’immigration illégale, pour poursuivre des criminels ou encore pour des missions de recherche et de secours (respectivement 64 %, 67 % et 80 %).

    Dans un article de la Stanford Law Review, le spécialiste de la vie privée et la robotique, Ryan Calo, s’excuse de l’inévitable référence au livre 1984 de George Orwell et écrit :

    « Les citoyens ne bénéficient pas d’une intimité raisonnable en public, même pas sur les portions de leur propriété, visible depuis un lieu public. En 1986, la Cour Suprême n’a pas estimé qu’il s’agissait d’une fouille lorsque la police vola au dessus du jardin d’un suspect avec un avion privé. Quelques années plus tard, la Cour a accepté des preuves obtenues par un officier qui avait regardé depuis un trou dans le toit d’une serre depuis un hélicoptère. Ni la constitution, ni la “ common-law ” ne semblent interdire aux médias ou à la police de faire de la surveillance quotidienne avec des drones. »