PAUL VACCA ET LES BANKSTERS
Posté par 2ccr le 6 décembre 2012
« Haut les mains ! »Au début du rêve américain était le hold-up, cette faculté d’arracher des mains le bien d’autrui… Dans un essai original, Paul Vacca, amateur de film noir, braque les projecteurs sur l’origine du capitalisme, et illustre, à sa manière, un dialogue entre un parrain et son fils : « Petit, tu ne braqueras plus les banques, tu en créeras une ! »
Il y a peu de chose commune, hormis l’appât du gain, entre les dilettantes du Colt 45, Bonny Parker, Clyde Barrow, Dillinger, et les as de la finance qui organisent, aujourd’hui, à temps plein, au travers d’algorithmes, expropriations, guerres et famines. Dans la vie, tout oppose les deux figures, bankster et « casseur » : l’origine sociale, l’éducation, les moyens et la durée de l’entreprise.
Tel un pilote de drone, à l’encontre du braqueur, le bankster n’a aucun contact physique avec les victimes, et agit sur ordre. En pianotant sur son clavier, le filou provoque un maximum de dégâts économiques pour une montagne de fric virtuel, en quelques jeux d’écriture ou de savantes combinaisons posées comme des mines à retardement sur les flux financiers ; sa finalité est de blanchir l’argent en même temps qu’il dévalise des populations entières. Voici deux exemples donnés par Paul Vacca :
a) Le casse des subprimes. En 2007, une « association de malfaiteurs » composée de banques, d’assureurs, d’investisseurs et d’agences de notation mettent au point une chaîne de crédits subprimes à base de titrisation… Des millions de foyers américains cèdent aux sirènes des annonceurs et achètent des titres pourris pour rembourser leurs dettes ; résultat : plus d’un million de propriétaires perdent leur maison que les aigrefins rachètent à vils prix. Le butin est évalué à plusieurs milliards de dollars !
b) Le plan Paulson. Le 3 octobre 2008, un accord est signé entre les banquiers du secteur privé et le secrétaire du trésor américain, Henry Paulson, un ancien dirigeant de Goldman Sachs, sur le dos des contribuables ; ces derniers sont contraints, au nom d’un chimérique projet de sauvetage, de racheter les emprunts toxiques des banques américaines. Les observateurs estiment, à cette occasion, que chaque américain est rançonné de 3 500 dollars !
c) Butin amassé par la bande dite des « déréglementeurs » : plus de 700 milliards de dollars !
Comparativement, Ronald Biggs et Albert Spaggiari (fameux gangsters historiques) sont des hommes du Néanderthal, fascinés par la couleur verte des billets. Certes, le voyou à l’ancienne et le bankster sont animés tous deux d’une même injonction : « enrichis-toi ! ». Mais le point de ressemblance s’arrête-là… L’un est dans la brutalité immédiate des choses : secouer un employé et ouvrir un coffre-fort ; l’autre dans l’infini et l’immatérialité du pouvoir : gouverner la Planète. Les affaires sont choses trop sérieuses, aujourd’hui, pour les laisser aux mains du Milieu.
Avec les hold-up financiers, l’on assiste à une inversion totale de polarité. En l’espèce, ce n’est plus un citoyen qui braque une banque, mais la banque qui braque l’ensemble des citoyens. Et, alors que le hold-up traditionnel était illégal, et pouvait être à certains égards (et c’est ainsi que le présente le cinéma) légitime, le hold-up des financiers en est la parfaite image inversée. Totalement légal (puisque ce sont les acteurs du système financier qui édictent leurs propres règles sous le regard approbateur de l’Etat) mais illégitime, car les seuls à en payer le prix sont les citoyens. Si le braqueur à l’ancienne était hors la loi, les braqueurs de la finance sont confortablement installés au-dessus des lois. Cyniques et iniques, favorisant leur caste, les banques se comportent en Robin des Bois à rebours : elles volent les pauvres pour donner aux riches. »
Lisez Paul Vacca « La Société du hold-up », et vous aurez envie de cogner très fort sur votre banquier ! … ou de bâtir votre propre banque.