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  • Maroc : le nouveau visage de l’esclavagisme

     

    Publié le 25 juin 2015 dans Afrique

    Une forme de traite humaine perdurant dans ce pays demeuré très inégalitaire, et qui touche la majorité des pauvres. Comment en est-on arrivés là ? Et comment s’en sortir ?

    Par Hicham El Moussaoui et Siham Mengad.

    Maroc - De dos d'âne - Nwardez (CC BY-NC-SA 2.0)

    Maroc – De dos d’âne – Nwardez (CC BY-NC-SA 2.0)

    Selon le « collectif pour l’éradication du travail des petites bonnes », entre 60 000 et 80 000 fillettes de 8 à 15 ans sont exploitées comme domestiques au MarocUne forme de traite humaine perdurantdans ce pays demeuré très inégalitaire, et qui touche la majorité des pauvres. Comment en est-onarrivés  ? Et comment s’en sortir ?

    Appréhender un tel phénomène n’est pas chose aiséemais l’on peut structurer les principauxdéterminants autour de deux aspects : l’offre et la demande du travail domestique. Du côté de l’offre, le chômage (9,9% en 2014) et son corollaire la pauvreté (15% en 2014), conduisent les parents àdevenir incapables de subvenir aux besoins de base de leurs enfantsce qui les contraint à donnerleurs petites filles à des familles plus aisées afind’une part, de se décharger du fardeau de subvenirà leurs besoins, et d’autre part, avoir un revenu supplémentairequoique modeste, pour être capabled’assumer la charge des autres enfantsDans les familles nombreuses, les parents en position defaiblesse n’ont pas vraiment les moyens de négocier des conditions dignes pour l’accueil de leursfillesce qui explique aussi que les familles d’accueil ont tendance à abuser de leur pouvoirsurtoutdevant le silence des petites fillesCelles-ci deviennent en quelque sorte le bouc émissaire del’incapacité des parents à assumer leurs responsabilités. La rareté des opportunités d’emplois etd’activités génératrices de revenus, rend inéluctable le travail des petites filles dans les villes.L’endettement des parents les pousse à donner leurs filles sans se préoccuper de leurs conditions de travail.

    Par ailleurs, l’analphabétisme des petites filles (53% des analphabètes) résultant de leur exclusion de la scolarisation, limite leur horizon en termes d’opportunités, facilitant ainsi  le travail au foyer des autres. La division sexuelle du travail (hommes à l’extérieur/femmes à l’intérieur), enracinée encore dans la société marocaine, justifie encore pour beaucoup cette situation, la cuisine étant considérée comme le lieu « normal » pour la gente féminine. Et ce n’est pas le chef du gouvernement marocain, M. Benkirane, qui dira le contraire.

    Cette culture résultant de l’ignorance des familles a « normalisé » le travail de la « fille mineure ». Elle a permis même, vu le contexte de rareté, de la considérer  comme une source légitime de revenu complémentaire. Certains parents y voient même une chance pour leurs petites filles car elles vont être sauvées de la misère et cela leur ouvrira d’autres portes, notamment celles du mariage. Le statut inférieur des jeunes filles, dans un pan important de la société marocaine, accentue leur vulnérabilité et les rend sujettes à tous les « débordements » et à tous les handicaps sociaux (déscolarisation, exploitation).

    Du côté de la demande, si aujourd’hui les petites filles de parents pauvres sont sollicitées c’est parce que le mode de vie des Marocains a évolué. Ainsi, le taux d’urbanisation est passé à 60%, ce qui implique un changement dans la division du travail entre les hommes et les femmes. Ces dernières se retrouvent de plus en plus à travailler hors foyer et n’ont plus suffisamment de temps pour assurer certaines tâches ménagères.  La demande de bonnes s’est accrue pour satisfaire le besoin croissant des femmes d’avoir un «substitut» domestique permettant à un plus grand nombre d’entre elles d’accéder au marché du travail, mais aussi de permettre à d’autres filles de poursuivre tranquillement leurs études. Un besoin qui a été amplifié par l’absence d’horaires aménagés pour qu’elles puissent assurer quelques tâches domestiques, mais aussi par la rareté des crèches, le déficit dans des services aussi comme le transport scolaire. Autrement dit, la femme marocaine n’est pas du tout aidée logistiquement parlant, d’autant qu’elle n’a pas toujours les moyens d’acquérir les équipements électroménagers lui permettant de gagner en temps et en énergie.

    Si les facteurs susvisés expliquent les raisons d’être du travail des petites bonnes, c’est le vide juridique qui permet à des familles de les exploiter. L’absence de contrat explicite entre les parents et la famille d’accueil ouvre la porte à tous les abus et fragilise la position des petites filles, qui deviennent soumises au bon vouloir et parfois aux pires sévices de leurs employeur(e)s. Aussi, l’absence de définition de la traite des personnes en droit interne ne peut permettre de sanctionner ces abus et encourage l’impunité. Le manque de protection juridique des petites filles qui subissent cette exploitation les dissuadent de révéler les sévices qu’elles subissent. D’où la nécessité, de mettre en place une loi spécifique définissant la traite des personnes, car le code du travail marocain laisse en dehors de son champ d’application le travail domestique dont les conditions d’emploi et de travail doivent être fixées par une loi spécifique (article 4). Après la publication du code de travail, la loi ad hoc prévue par le code n’a jamais vu le jour, alors que des agences de placement du personnel de maison commencent à  s’installer au Maroc en l’absence de réglementation de la profession. De même, le code ne régit pas le travail informel qui constitue avec le travail à domicile le domaines privilégié du travail des mineurs, notamment les filles pour le travail à domicile et les garçons dans les ateliers. Il est nécessaire qu’une loi interdise le travail des mineurs. Elle doit être accompagnée bien évidemment d’un grand travail de sensibilisation de tous les maillons de la chaine judiciaire et toutes les parties prenantes afin de la rendre effective.

    Parallèlement à cette loi, il est bien évidemment incontournable de traiter les facteurs qui favorisent l’offre et la demande du travail des petites bonnes. La scolarisation des filles est incontournable pour leur offrir des perspectives d’emploi plus intéressantes que les tâches ménagères. La lutte contre la pauvreté dans le monde rural est une nécessité pour permettre aux parents de subvenir aux besoins de leurs enfants. De même, fournir aux femmes qui travaillent la logistique et les prestations sociales leur permettant de concilier leur vie professionnelle avec leur vue personnelle, est une nécessité. Enfin, pour un suivi efficace et un ajustement des mesures à prendre, un observatoire de ce phénomène est incontournable.

    Somme toute, le travail domestique n’est pas à combattre en tant que tel, mais c’est contre le travail domestique assuré par des filles mineures et toutes les formes d’exploitation qu’elles subissent, qu’il faudrait lutter.

    Hicham El Moussaoui

  • Heureusement, en France, le port d’arme est toujours interdit.

     

    Publié le 24 juin 2015 dans Édito

    Jeudi 18 juin, une fusillade éclate dans le quartier du square Abbé-Maillet à Meudon. Les tireurs ont pris la fuite sans faire de blessé, ni être inquiétés, mais la situation est tout de même un peu tendue puisque cela fait plusieurs jours que de telles rixes se déroulent entre Clamart et Meudon. Ces petites entorses au vivre-ensemble encouragent les élus des deux communes à se rencontrer pour en discuter. C’est important, le dialogue.

    apathie - peut-être que si on ne s'occupe pas des citoyens, ils arrêteront de nous emmerder ?

    Vendredi 19 juin, au sud de Toulouse, une fusillade éclate au niveau du péage de Palays, là où les policiers du service régional de la police judiciaire de Montpellier et Toulouse (SRPJ) attendaient un go-fast. Deux hommes ont été interpellés et 90 kilos de pâte à modeler ah non de résine de cannabis ont été saisis. Il n’y a heureusement pas eu de blessés dans la fusillade. Saluons la maréchaussée qui, pour une fois, était sur place avant les échanges de coups de feu et qui aura effectivement interpellé des individus. Manifestement, les excès de vitesse, ça motive plus que les deals en quartiers chauds.

    distributeur de tickets d'attenteDans la nuit du vendredi 19 au samedi 20 juin, un homme de 28 ans a succombé à trois blessures par balles d’un tireur isolé aux Bleuets, une cité bucolique des quartiers nord de Marseille, ces quartiers qu’on dit émotifssensibles. Écartant l’hypothèse hardie d’un différent scientifique pour déterminer qui, de Leibniz ou de Newton, avait inventé le calcul infinitésimal le premier, la police se risque plutôt à imaginer un bête règlement de comptes sur fond de drogue, en attendant d’avoir quelques précisions suite à l’enquête qui a pris un ticket comme les fois précédentes et attend avec les 50 autres en salle de pause en fumant une clope (légale).

    Samedi 20 juin au soir, un jeune homme de 19 ans a été abattu à Grenoble. Deux jours plus tôt, deux autres fusillades avaient éclaté dans le centre de la ville, heureusement sans faire de victime. Là encore, des soupçons tendraient à faire penser que tout ceci serait probablement lié à des histoires de substances qui font rire (les substances, pas les histoires), que les fusillades en question auraient comme qui dirait un rapport avec des règlements de comptes (et toujours aucun lien avec des équivoques philosophiques, c’en est presque dommage).

    Notons tout de même que les habitants des quartiers concernés sont un chouilla remontés contre l’équipe municipale dont tout indique qu’il s’agit d’une fière brochette d’élus compétents et impliqués comme en témoigne l’intéressante vidéo suivante :



    … Intéressante vidéo où l’on découvre donc que tout le monde, à Grenoble, connaît assez bien la situation, les principaux fautifs, et les différentes planques d’armes et de drogue. Où l’on découvre aussi que des pétitions et des lettres ont été envoyées, à plusieurs reprises, aux équipes municipales, qui n’ont jusqu’à présent pas démontré ni s’intéresser au problème, ni avoir tenté de résoudre au moins ce qui était directement et explicitement pointé du doigt. L’existence de ces pétitions et de ces courriers papiers tendrait à faire croire hardiment que la situation dure depuis un certain moment, surtout en factorisant la vitesse légendaire des service postaux français.

    Et dans ce contexte, à force, l’immobilisme et l’incompétence ont cette fâcheuse tendance à rendre les victimes particulièrement agressives lorsqu’elles tiennent un responsable de leur situation sous la main. La réaction du maire à la suite de la violente apostrophe lancée à son encontre, toute en paroles ouatées loin de la réalité et de l’action, en parfait décalage avec ce qui lui est demandé, laisse malheureusement supposer que cette douloureuse situation va perdurer un petit moment encore…

    Décidément, cela ressemble tant à cette autre semaine que je décrivais il y a tout juste deux mois.

    Et il y a deux mois, je me refusais d’être bêtement taquin et de remarquer qu’en quelques jours, on recensait tout de même pas mal de fusillades, de morts et de blessés. Tout comme, il y a deux mois, je n’allais pas non plus jusqu’à relever les poignants articles de la presse fustigeant l’inaction américaine face à son « problème avec les armes », presse qui oublie dans le même temps ces petits débordements français maintenant quasi-quotidiens. Franchement, la taquinerie, ce n’est pas mon genre.

    Je ne terminerais donc pas ce billet en notant, exactement comme il y a deux mois, que la guerre contre la drogue, en France, n’a jamais marché et que l’interdiction de port d’arme ne sert, concrètement, à rien puisqu’elle n’a en rien dissuadé ces innocentes fusillades d’apaisement (ni celles du 7 janvier, au passage).

    Non, tout ça, je ne le dirais pas puisque ça ne sert à rien. Je me contenterais de noter seulement que tout ceci confirme décidément ce petit sentiment d’insécurité qui s’empare des Français, notamment les honnêtes, qui payent taxes et impôts locaux.
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  • Un périple autour du monde : safari cycliste au Botswana

     

    Publié le 24 juin 2015 dans Culture

    Parce qu’un con qui marche va toujours plus loin qu’un intellectuel assis, deux frères sont partis sur les routes depuis de longs mois, traversent les frontières, les villes et les campagnes à l’occasion d’un tour du monde à durée indéterminée, sans casques ni golden-parachutes. Au fil de leur voyage, ils livrent leurs impressions sur des expériences qui les ont marqués.

    Aujourd’hui, route mouvementée à travers le Botswana…

    Par Greg.

    Je n’ai pas vu les plus beaux paysages du Botswana donc ne m’en voulez pas si je n’en parle pas. Je me suis contenté de suivre la route principale jusqu’en Zambie, surtout par manque de temps. Et pourtant, il s’est passé beaucoup de choses pendant ces quelques jours.
    Frustré de n’avoir pas pu me payer les excursions safari trop chères d’Afrique du Sud, j’apprenais peu avant la frontière que le Botswana allait m’offrir ce plaisir gratuitement, et en vélo. Vous me direz, les lions en liberté, les bestioles, comment on gère ça en vélo ? Ça a aussi été ma première question mais tout le monde se voulait rassurant sur le fait que je devrais être OK sur la route. Je gardais quand même l’option de bifurquer au Zimbabwe au dernier moment mais ma rencontre avec Eelco, le retraité cycliste sud-africain m’avait convaincu d’y aller.

    Je passais donc la frontière à Groblersburg, un village planté au milieu du bush. Comme d’habitude, on me questionne beaucoup sur mon voyage des deux côtés. Oui oui, je vis comme ça, c’est un long voyage et oui avec ce vélo, pas celui du voisin. Ils sont toujours aussi marrants au Botswana et surtout fiers que leur pays soit sûr. C’est un point sur lequel ils insisteront beaucoup au cours de mon séjour et c’est vrai qu’à aucun moment je ne me suis senti en insécurité, tout du moins à cause des gens.

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    Mon parcours au sud du pays fut assez monotone. Il y a peu de villes et d’activités sur mon passage et les villages ne sont souvent qu’un ensemble de trois ou quatre huttes rondes en terre dispersées dans la brousse. Les habitants, peu nombreux, accompagnent parfois un troupeau de chèvres au milieu du bush ou glandent à l’ombre d’un arbre. L’activité réduite au milieu des logements au toit bancal me rappelle la campagne laotienne : même climat, même ambiance, pas tellement un hasard finalement. Les Africaines portent tout et n’importe quoi sur la tête, le gamin harnaché dans le dos avec un morceau de tissu coloré : sacs de farine, eau, branches, l’une d’entre elles se promenait avec un sac « Dubaï 2020 ». Les femmes travaillent plus que les hommes mais l’activité ne semble tout de même pas harassante. Tout le monde se déplace à un rythme très africain et celui qui transpire le plus dans l’histoire, c’est moi. L’horizon est aride et la chaleur s’installe logiquement au fur et à mesure que je file au nord. À coups de 100-150km par jour, on a vite fait de prendre 10 ou 15 degrés dans la semaine et cela me fait finalement le plus grand bien après quelques jours de gastro en Afrique du sud. J’ai du choper un coup de froid avec la pluie dans les montagnes du Highveld.

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    J’alterne mes ravitaillements en eau entre les villes (Palapye ou Francistown) ou les petits bleds comme Serule. Je peux transporter 3 ou 4 jours de nourriture mais difficilement plus d’une journée d’eau. Certains refusent de me servir l’eau qu’ils boivent sous prétexte que je ne la supporterais pas (trop salée, c’est vrai qu’elle donne un peu soif et la courante, mais rien de bien grave) et vont puiser dans leurs réserves d’eau de pluie. D’autres veulent bien m’écouter et font confiance à mon estomac canin. À Serule, on me fait attendre une demi-heure pour m’amener de l’eau qu’ils jugent correcte. Il faut dire que la plus grande partie du village est désormais fantôme depuis que le tracé de la nouvelle route le contourne et que les habitants ont fui l’arrivée du train qui tuait le bétail. On prend soin du « white guy » un peu con qui ne veut pas utiliser les bus. Après qu’on m’ait offert une chemise en Afrique du sud, un autre citoyen de ce pays prend pitié de moi et m’offre une paire de lunettes de soleil. Un peu plus tard au Botswana, un expatrié m’offrira un bière sur la route et un couple sud-africain, de la viande séchée. Que demander de plus à ces gens ? Ils sont parfaits et tous heureux de voir des cyclistes traverser leur continent. Ils aimeraient faire savoir au monde entier qu’on peut voyager sereinement dans leurs pays magnifiques.

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    J’arrive à Nata après 3 jours de route. Je pensais la ville plus importante et le supermarché fait peine à voir, je n’achète que le minimum pour mon périple. Au départ, tant que je vois des panneaux signalant la présence de bétail, je pense être tranquille. Puis deux Botswaniens m’invitent alors à partager leur repas au bord de la route : du milmil (farine de maïs) avec du bœuf et des herbes, un plat traditionnel de cette région d’Afrique. Le tout se mange avec les doigts. Ils possèdent une ferme un peu plus loin et apportent le ravitaillement en bière Chibuku aux ouvriers. Les lions tuent régulièrement leur bétail mais eux n’ont pas le droit de les tuer, au risque d’aller en prison. Le gouvernement indemnise la perte à hauteur de 1500 pulas alors que la bête se vend à plus de 3000 sur le marché.

    Je poursuis donc en sachant que le panneau bétail n’est pas forcément synonyme de sécurité. Je commence par apercevoir quelques antilopes/gazelles puis rapidement trois éléphants, l’air pataud. J’ai peine à imaginer ces bestioles agressives. Moi, je tremble surtout pour les lions et les chauffeurs me disent en voir régulièrement au bord de la route, observant les voitures. Me savoir en vélo au milieu de cette faune me fait peur et m’excite au plus au point. Je suis sans cesse partagé entre l’envie et la peur d’en voir plus. Savoir que d’autres cyclistes ont pris cette route par le passé me rassure. Ma première journée se déroule sans accroc, et je peux observer quelques pachydermes d’assez près. Pour peu qu’on les laisse à bonne distance, ils font leur vie sans se soucier des humains. On reconnaît assez vite les zones à éléphants par les troncs d’arbres défoncés et l’écorce arrachée.

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    À 16h, j’arrive vers l’antenne relai qu’Eelco m’avait indiqué. Le petit chemin de terre y menant ne me plaît pas vraiment mais il faut bien y aller. Il n’y a personne sur place et la grille est fermée par un cadenas. Hors de question de dormir à l’extérieur avec les félins en liberté, pour entrer, je coupe un bout du grillage, et je referme immédiatement derrière moi. Je passe la nuit sur un petit toit à 3 mètres de hauteur. Au moins, je dors tranquille.

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    Mon petit déjeuner du lendemain sera en revanche perturbé par un animal auquel je ne m’attendais pas ici : l’abeille. Alors que je cuisinais tranquillement, des dizaines puis des centaines d’abeilles envahissent ma tente, mes affaires, tout est recouvert. Ça devient franchement agaçant, voire inquiétant. Je jette tout en bas et cours d’un coin à l’autre de l’enclos tout en rangeant tout péniblement pour éviter un maximum de piqûres. Elles ne sont pas agressives mais je les ai un peu dérangées et me prends deux coups de dard… Le petit dej’ est foutu et je pars le ventre creux pour mon deuxième jour de savane. J’observe toujours un maximum de gazelles (ou un animal du même genre) quand la circulation est réduite, une bonne dizaine d’éléphants ainsi que des zèbres.

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    Un éléphant, légèrement énervé que ses petits n’aient pas osé traversé la route en me voyant au loin décide de me charger en barrissant. Je descends du vélo et recule immédiatement de 2-3 pas, il s’arrête. Je me sens tout petit, ridicule face à ce monstre. Il est à 20 ou 30 mètres maintenant. Il repart sur 4-5 mètres, je recule de nouveau, il s’arrête encore puis, au moment où il s’apprête à lancer une troisième charge, une voiture arrive et le fait revenir vers ses petiots. Sachant que parfois je ne vois aucun véhicule pendant 20 minutes, c’est un sacré coup de pot ! Mon taux d’adrénaline est à son maximum et je sursaute désormais au moindre mouvement dans les fourrés. Je prends mon bâton en main, c’est dérisoire, mais ça me détend, c’est psychologique. « Croqué par un félin au Botswana », ma famille en parlerait encore pendant quelques générations mais je ne tiens pas spécialement à cette gloire posthume.

    Il fait très chaud et les camionneurs prennent pitié de moi et m’offrent parfois oranges et boissons. La route quant à elle, m’offre encore quelques vues sur des phacochères et une bande d’une trentaine de babouins à l’approche de Pandamatenga, mon refuge pour la nuit. Je passe la soirée à discuter avec une bande d’alcooliques près d’un restaurant rudimentaire fait de bâches plastiques. Rien de bien intéressant n’en sort mais le contact humain fait du bien avant une dernière journée dans la brousse en direction de la frontière Zambienne. Ils me rassurent encore une fois sur les lions qui dorment au loin quand il fait chaud et qui fuient si on leur fonce dessus. On verra pour cette option.

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    On me promet girafes et lions pour le lendemain, je n’aurais finalement droit à rien de tout cela malgré les affirmations des automobilistes me jurant en avoir vu une heure après mon passage. Tant pis pour moi, j’ai droit à quelques buffles au loin (animal peureux et pacifique en Asie et très dangereux en Afrique), des phacochères, des babouins et une espèce d’oiseau énorme, type ptérodactyle des temps modernes. Je traverse ensuite le fleuve Zambèze sur une barque, direction la Zambie avant me rendre à Livingstone où m’attendent les chutes Victoria. Malgré d’autres promesses de spectacles d’animaux en Zambie, rien ne se produira. Les chutes Victoria sont en revanche magnifiques, entourées d’une brume et d’un arc-en ciel permanent, le brouhaha assourdissant est à la hauteur du paysage offert. On tente d’abord de se protéger des trombes d’eau projetée par les chutes, avant de se laisser emporter par la magie du Zambèze, trempé, en tentant d’observer le fond du gouffre masqué par la brume. Quelques Africaines en visite entonnent des chants rythmés qui ajoutent de la couleur à l’endroit et quelques chanceux survolent le tout en deltaplane, comme Belmondo dansItinéraire d’un enfant gâté. Je reste profiter du lieu jusqu’au coucher du soleil.

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    Demain, je m’offrirai quelques jours de repos après 3000km pédalage en un mois et je campe un dernier soir près des chutes, en bordure du Zambèze et de son débit impressionnant, gardé par un type armé d’une kalachnikov, les hippopotames ayant l’habitude de s’aventurer sur mon aire de repos.

    Cela conclut superbement et paisiblement ces quelques jours au milieu des animaux. L’Afrique me procure tous les jours un maximum d’excitation et d’adrénaline, des rires, des chants, des sourires en pagaille. J’ai rarement pris autant de plaisir au cours de ce voyage.

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    Pour ceux qui ont 50 minutes à perdre, j’ai exceptionnellement fait une vidéo de mon safari que vous pouvez visionner ci-dessous. Il y a de vrais morceaux de gros mots et je me plante régulièrement sur les noms des animaux, c’est du live.

  • Chers gouvernants, partez

     

    Publié le 27 juin 2015 dans Édito

    Chers dirigeants, partez. On ne vous regrettera pas.

    Chers gouvernants,

    Vous appeliez de vos vœux un discours de vérité. Vous le jugiez nécessaire, et je pense que vous avez raison. Je pense aussi qu’il ne faut pas attendre de vous que vous le teniez ; que c’est à chacun d’entre nous de montrer l’exemple, surtout à vous qui en avez si cruellement besoin.

    Vous mentez. Vous mentez quand vous cherchez des prétextes politiques urgents pour justifier d’utiliser l’argent public pour assister en famille à un match de football. C’était la finale, monsieur Valls, et vous aimez cette équipe ; c’est le cas de nombreux supporters qui font le déplacement, et pas tous en jet privé.

    Que répondez-vous au légitime mécontentement des Français ? Fidèle à votre passion du sport, vous déclariez – depuis Roland Garros !

    « Il faut que ceux qui critiquent se disent qu’au fond, parfois, il faut être un peu plus optimiste et se dire que le sport ça apaise, c’est le respect des uns et des autres. » – Manuel Valls, Premier ministre de la République française en 2015.

    Sous votre gouvernement, l’optimisme consiste bien en une capacité à accepter les outrages et mensonges quotidiens. Pour vos prochaines déclarations en public, sachez cependant que l’idée que vous cherchez à exprimer peut s’appeler par exemple clémence ou mansuétude.

    Vous faites d’ailleurs, chers dirigeants, preuve de clémence. D’une clémence de benêt. Vous condamnez les chauffeurs de taxis, mais leur pardonnez aussitôt et leur donnez raison après quelques heures de sauvagerie, de vandalisme et d’agressions violentes.

    Vous acceptez la violence comme un mode de contestation et cédez à la pression et à la peur. Vous agissez sans délai, et sans réfléchir, et demandez la dissolution d’Uber comme d’un groupuscule d’extrême droite évalué à 40 milliards de dollars. Vous courbez l’échine devant des individus violents qui s’en prennent à des innocents. Certes, leur situation n’est pas enviable ; ils ont payé cher pour obtenir sans attendre une licence que vous leur imposez. Mais c’est une affaire entre vous et eux ; Uber n’a rien à voir là-dedans.

    Et vous avez par là transmis un message fort – celui de votre faiblesse. Vous avez démontré à tous ceux qui pourraient prochainement être tentés de recourir à la violence pour défendre leurs privilèges que vous leur donnerez raison, renoncerez aux économies budgétaires bientôt inévitables et accèderez à leurs demandes, aussi illégitimes soient-elles.

    Vous vous êtes émus des écoutes américaines. Vous avez protesté contre un État allié qui espionnerait vos secrets professionnels et vos conversations privées. Vous avez protesté parce que cette fois, c’est vous que l’on surveille – pas comme dans la loi sur le renseignement que vous avez demandée et votée il y a quelques semaines à peine, qui instaurait (ou légalisait ?) la surveillance généralisée des citoyens. Quel niveau d’hypocrisie faudra-t-il désormais juger comme inacceptable, alors que vous placez la barre si haut ?

    Certains d’entre vous, chers dirigeants, proposaient des mesures préventives, au premier rang desquelles un changement de la Constitution américaine. À quel point faut-il être ignorant de la politique et des fondements de l’État américain pour avoir ce genre d’idées, pire : les exposer en public, pire ! À des journalistes ?

    Il y a quelques jours, chers dirigeants, l’un d’entre vous, et pas des moindres : le chef de l’État, la plus haute autorité du pays pour ceux qui lui en reconnaissent une, échangeait avec Bill Gates. Dans un anglais épouvantable, qui en dit long sur sa curiosité et son ouverture au monde. Pour la postérité (1’50):

    « You have promote the great idea to to to be in solidarity with people we can increase your intervention and there’s and there’s also intervention of France in the next years in speciocially (?) in particularly in Africa. » – François Hollande, Président de la République française en 2015

    Et ce même Président de la République se félicitait qu’il existe des riches qui « redistribuent ce qu’ils ont pu gagner », et se congratulait d’avoir reconduit le soutien de la France à la recherche contre le SIDA pendant toute la durée de son quinquennat. Sachez, chers dirigeants, qu’il y a une immense différence entre vous et Bill Gates (plus d’une, croyez-moi) : il redistribue l’argent qu’il a gagné. Vous redistribuez l’argent des autres. Vous le leur prenez, et vous décidez de ce que vous en faites.Tenez-vous le pour dit : il est très louable de chercher à guérir le SIDA, mais vous n’y avez absolument aucun mérite.

    Vous auriez du mérite, chers dirigeants, si vous saviez quoi faire et comment le faire. Des gens, crédules certes, vous ont fait confiance – si vous ne le faites pas pour vous, faites le pour eux. Réduisez enfin la dépense publique, abolissez les privilèges (y compris les vôtres) et ramenez l’égalité. Supprimez l’emploi à vie, mettez fin à tous ces gaspillages dont vous avez le secret. Simplifiez la vie des citoyens en simplifiant la loi, le code, le règlement. Décoincez l’étau administratif et fiscal qui empêche les entreprises d’être flexibles et la France de se développer.

    Prenez l’exemple des taxis : il n’y aurait aucun problème si vous ne leur imposiez pas en premier lieu une licence. C’est aussi simple que cela. Vous voulez demander des gages de qualité et de sécurité aux chauffeurs, aux compagnies ? Non pas que je le propose ou l’approuve. Mais il est frappant qu’à aucun moment, les chauffeurs de taxi n’aient proposé une telle mesure, qui répond parfaitement aux considérations altruistes qu’ils affichent. Tout comme il est frappant que vos préoccupations incluent le choix qu’ils ont fait de faire un marché d’une chose que vous donnez gratuitement.

    Car oui, c’est vous qui leur imposez la licence. En arrivant au pouvoir, vous prenez la responsabilité de l’État et tout ce qu’il impose. Tout ce que vous n’enlevez pas aussi rapidement que possible de la loi, vous l’approuvez. Tout comme ce que vous laissez derrière vous sera votre héritage, le cadeau ou le fardeau que vous laisserez à la France. Et compte tenu de l’estime que vous avez de vous-mêmes et du crédit que vous vous donnez, j’ose penser que vous faites de votre mieux.

    J’ose penser donc, chers dirigeants, que ce discours de vérité vous inspirera des envies d’autre chose, des envies d’ailleurs. J’ose espérer que vous saurez réaliser que vous n’êtes pas à la hauteur, que vous n’avez pas l’étoffe de ce que vous croyez être. Vous êtes incapables de changer la France, vous êtes incapables de la sauver du mal dans lequel vous semblez vous échiner à l’enfoncer. Vous êtes incapables de délester la France de cet État devenu monstrueux, qui se veut tout à la fois Big Brother, catalyseur de l’économie, historien et coach en nutrition.

    Alors, s’il vous plaît, partez.

  • Limitation de vitesse à 80 km/h

    Manifestation contre la limitation de vitesse à 80 km/h

     

    La Ligue de Défense des Conducteurs organise un rassemblement aujourd’hui devant la préfecture de Vesoul, avec le soutien des élus locaux, contre l’expérimentation de l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur la RN57.

    Par Christiane Bayard.
    Un communiqué de la « Ligue de Défense des Conducteurs ».

    Limitations de vitesse (Crédits : cris.ie, licence CC-BY-NC-ND 2.0), via Flickr.

     

    La Ligue de Défense des Conducteurs organise un rassemblement samedi 27 juin 2015 à 15h, devant la préfecture de Vesoul, avec le soutien des élus locaux, pour protester contre l’expérimentation de l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur la RN57 en Haute-Saône, première étape d’une baisse généralisée de la vitesse sur le réseau secondaire.

    Alors que l’expérimentation gouvernementale de la baisse de la limitation de vitesse à 80 km/h sur quatre tronçons de routes secondaires en France, dont la RN57 en Haute-Saône entre Vesoul et Rioz, débutera le mercredi 1er juillet pour deux ans, la Ligue de Défense des Conducteurs appelle à un grand rassemblement de tous les conducteurs opposés à cette mesure à Vesoul, le samedi 27 juin à 15h devant la préfecture.

    « L’objectif de ce rassemblement est de montrer aux pouvoirs publics que les conducteurs ne sont pas dupes de ce projet « d’expérimentation », qui n’est qu’une manière détournée d’arriver à une généralisation de l’abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h à tout le réseau secondaire », explique Christiane Bayard secrétaire générale de la Ligue de Défense des Conducteurs.

    « Plutôt que d’abaisser la vitesse, pénalisant une fois de plus injustement les conducteurs, les pouvoirs publics feraient mieux d’entretenir et d’aménager un réseau d’infrastructures routières vieillissant, et de plus en plus délaissé » ajoute-t-elle. « La sécurisation de la RN57 nécessite des aménagements notamment en deux fois deux voies. Les élus de la Haute-Saône le réclament d’ailleurs depuis plus de vingt ans, sans être entendus. Y réduire la vitesse pour toute panacée devient criminel, c’est scandaleux ».

    Ce rassemblement de conducteurs responsables bénéficie d’ailleurs du soutien d’élus locaux, eux aussi opposés à cette expérimentation. A commencer par le député-maire de Vesoul Alain Chrétien, accompagné de plusieurs maires, qui se joindront au rassemblement devant la préfecture. Une délégation sera ensuite reçue en préfecture.

    Tous comme les élus, les Français restent majoritairement opposés à ce projet inutile et injuste de généralisation du 80 km/h, qui aura pour seul effet de faire exploser le nombre de PV, les pertes de points et les retraits de permis.  L’an dernier, ils ont notamment été plus d’1,5 million à signer la pétition de la Ligue de Défense des Conducteurs « Non à la baisse des limitations de vitesse ».