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  • Les tournures étranges de la liberté d’expression

    PRÉSENTATION :: En temps de guerre, aller regarder la France depuis l’autre côté de la Manche permet de voir la direction du manche (la barre en navigation aéronautique). D’outre-Atlantique, regarder la France c’est la voir de plus loin encore. Mais l’éditorialiste américain engagé dans l’information pour la liberté d’expression, Glenn Greenwald, plusieurs fois primé pour ses travaux, survole de près, où qu’il se trouve.
    Pour observer il ne s’embarrasse pas de la morale, en technicien du droit il va au droit et regarde la façon dont s’exécute le droit, par rapport aux textes de référence attachés aux libertés humaines.
    Ici, il entreprend un questionnement pragmatique de la liberté en France. Il explore, en l’informant, la liberté exécutive sous l’égide du slogan de la liberté d’expression sorti des protestations solidaires après les attentats de Charlie Hebdo. Non seulement en France, mais incidemment au Royaume Uni, aux USA, et dans la société occidentale en général.
    Spécialement, la France de « Charlie » paraît renouveler le cycle régressif qui inspire le monde, où auparavant les USA s’étaient particulièrement distingués. « Il faut bien être premier en quelque chose » ironisait Gilles Kepel évoquant, à propos de son livre sur le terrorisme et la guerre [1], la première place de l’Hexagone en nombre de djihadistes internationaux introduits au Moyen Orient. Glenn Greenwald nous explique qu’en matière de liberté nous aurions également innové un pire.
    Avec l’information sociale de la double contrainte (double bind) en pleine austérité, entre la politique étrangère de la guerre et la politique nationale des pétrodollars et de l’armement, le pays se disloque dans un double et même triple langage à travers les déclarations politiques, les actes attendus, les résultats, et leur communication. Mais les gens y seraient aussi pour quelque chose — du moins ceux qui défilèrent le 11 janvier 2015 : qu’entendent-ils par liberté d’expression ?
    L’auteur n’y va pas par quatre chemins, en déconstruisant la chronologie d’une gestation « communautarienne » occidentale et post-coloniale du concept et de l’application de la liberté d’expression, telle qu’elle se manifeste en France depuis les attentats de Charlie Hebdo, il dévoile au-delà de la réalité liberticide l’injustice et l’inégalité qui composent le cadre hiérarchique de la société, l’administration des citoyens et de surcroît, le plus inquiétant pour la suite, les tables constitutionnelles communes à tous, où le registre sécuritaire transforme le droit en non droit.
    On est surpris de retrouver Dieudonné cité en exemple des cas abusifs d’accablement répressif. Dieudonné, on n’osait plus en parler, on auto-censurait de l’évoquer. Ce n’est pas une provocation mais le regard externe qui considère les abus contre le droit à la liberté d’expression, tel qu’il est situé dans les conventions internationales et entre autres concernant le web depuis 2012 [2].
    La liberté de parole ne suppose pas l’adhésion à l’idée exprimée ni l’autorisation au passage à l’acte de ce qu’elle exprime, c’est un principe diptyque avec la liberté de penser, c’est pourquoi les deux forment et demeurent un droit inaliénable quelle que soit l’idée exprimée : réduire ou dissocier cette liberté, c’est l’abolir.
    Le droit international reste respectable, et les constitutions ne sont pas des magmas de chewing gum. Pourtant, on assiste à des phénomènes contraires, qu’on a laissés venir, sans réagir aux prémisses, qu’on a laissés prendre forme, pour toujours — et demain ?
    Au moment où soutenue par Podemos une Musulmane arborant le foulard, tout juste mandatée comme « conseillère communale » à la mairie d’un village catalan, inaugure ses actes publics en célébrant un mariage gay, tandis qu’en France les ouvriers syndiqués subissent la plus grande répression judiciaire jamais vue (9 mois de prison ferme, le temps de la gestation d’un enfant, pour les insurgés de Good Year) et des vieux — pas très vieux — se suicident après la saisie de leur maison par une banque, pour un endettement de 75.000 euros (soit sur un an l’équivalent mensuel de 6.500 euros par mois — pour donner une idée de leur niveau d’endettement par rapport au seuil moyen des allocations publiques des élus nationaux deux fois plus élevées et en partie défiscalisées), on voit que les SDF sont hors piste, et on pourrait commencer à se dire qu’aujourd’hui, en France, « la république communautarienne » non seulement occidentale mais réduite à très peu de couches sociales, s’engage au-delà de son économie financière et libérale désastreuse pour les gens, des banques, de son racisme endo-xénophobe, et de ses guerres, dans la dictature arbitraire contre tous sous la loi du non droit.
    Demain il sera trop tard, et les prochaines élections présidentielles sur fond de terreur et de loi d’urgence durable constitutionnalisée n’y changeront rien, sauf événement par ailleurs imprévu dont elles deviendraient l’émergence, (une chance à laquelle le liberticide laisse peu de place). (L. D.)


    Où étaient les croisés de la liberté d’expression post-Hebdo
    pendant que la France passait l’année dernière
    à concasser la liberté d’expression ?

     

    Voilà bientôt un an que plus d’un million de personnes — menées par les tyrans les plus répressifs de la planète [3] — défilèrent ostensiblement à Paris en faveur de la liberté d’expression [4]. Depuis lors, le gouvernement français, qui dans le sillage des meurtres de Charlie Hebdo avait ouvert le chemin en claironnant l’importance vitale de la liberté d’expression, à plusieurs reprises poursuivit différentes personnes pour les opinions politiques qu’elles avaient exprimées, et sinon exploita la peur du terrorisme pour écraser les libertés civiles en général. Il l’a fait en recevant à peine un regard de protestation furtif de la plupart de ceux qui, partout dans le monde occidental, agitaient les drapeaux de la liberté d’expression à l’appui des dessinateurs de Charlie Hebdo.

    C’est pourquoi, beaucoup de ces croisés de fraîche date pour la liberté d’expression, exploitant les meurtres de l’Hebdo, n’étaient pas, comme je l’avais soutenu à l’époque [5], des partisans authentiques en cohérence avec la liberté d’expression — au lieu de cela, ils invoquent ce principe seulement dans les cas les plus faciles et les plus égoïstes, à savoir la défense des idées qu’ils soutiennent ; mais quand les gens sont punis pour avoir exprimé des idées qu’eux détestent ils restent silencieux ou appuient l’interdiction : tout le contraire d’un plaidoyer sincère pour la liberté de parole.

    Quelques jours après la marche de Paris, le gouvernement français arrêta le comique Dieudonné M’bala M’bala « pour être “un apologue du terrorisme” d’après la suggestion sur Facebook qu’il éprouvât de la sympathie pour un des bandits armés de Paris. » [6]. Deux mois plus tard, il fut reconnu coupable, recevant une peine de prison de deux mois avec sursis [7] [8]. En novembre, pour des charges séparées, il fut reconnu coupable par un tribunal belge « de racisme et de commentaires antisémites dans un spectacle en Belgique » et reçut une peine de prison de deux mois [9]. Il n’y a pas eu de hashtag #JeSuisDieudonné en tendance, et pour cette attaque à la liberté d’expression il est à peu près impossible de trouver des dénonciations par les voix les plus fortes des croisés de la liberté d’expression post-Hebdo, à l’égard des gouvernements français et belges.

    En France, dans les semaines qui suivirent la marche pour la liberté d’expression, des dizaines de personnes « furent arrêtées pour discours de haine ou autres actes insultant les croyances religieuses, ou acclamant des hommes ayant perpétré les attaques. » [10]. Le gouvernement « ordonna aux procureurs à travers le pays de réprimer le discours de haine, l’antisémitisme et la glorification du terrorisme ». Il n’y avait pas de paliers dans la défense de leur droit à la liberté d’expression.

    Au mois d’octobre, le plus haut tribunal français confirma la condamnation pénale de militants qui prônaient le boycott et les sanctions contre Israël en tant que moyen pour mettre fin à l’occupation [11]. Qu’avaient fait ces criminels ? Ils « sont arrivés au supermarché en portant des maillots arborant les mots : “Vive la Palestine, Boycott d’Israël” » et « également distribuèrent des tracts qui disaient que “l’achat de produits israéliens signifie la légitimation des crimes contre Gaza” ». Parce que le boycott contre Israël était considéré comme « antisémite » par le tribunal français, le préconiser était un crime [12]. Où étaient tous les croisés post-Hebdolorsque ces 12 personnes furent condamnées en pénal pour avoir exprimé leurs opinions politiques critiques d’Israël ? Introuvables.

    Plus généralement, à la suite de l’attaque de Paris le gouvernement français se saisit les pouvoirs de l’« état d’urgence », dont à l’origine il déclara qu’il devait durer douze jours. Il l’a ensuite étendu à trois mois, et alors que l’échéance approche il est maintenant question de réitérer indéfiniment l’extension de ces pouvoirs, ou de les installer en permanence [13]. Ces pouvoirs ont été utilisés exactement comme on pouvait s’en douter : avoir fait irruption sans mandat dans des lieux où des musulmans français se rassemblaient, fermer des mosquées et des cafés, détenir sans charges des personnes, et par ailleurs abolir les libertés fondamentales [14]. Ils ont également été utilisés au-delà de la communauté musulmane, contre les militants du climat [15]. Si ce genre de répression classique, rampante, ne vous met pas en colère et ne vous bouleverse pas, alors vous pouvez être beaucoup de choses mais aucun d’entre vous ne peut être un véritable défenseur de la liberté d’expression en France.

    Même avant les meurtres de l’Hebdo, les poursuites contre les Musulmans en Europe pour l’expression de leurs opinions politiques étaient monnaie courante, en particulier lorsque ces opinions critiquaient la politique occidentale. En effet, une semaine avant l’Hebdo, j’avais écrit un article détaillant cette menace croissante pour la liberté d’expression au Royaume-Uni, en France et dans tout l’Occident [16]. Ces types d’actions — menées par les gouvernements les plus puissants du monde — étaient, et restent, la plus grande menace pour la liberté d’expression en Occident. Pourtant, ils ne reçoivent qu’une fraction minuscule de l’attention contre-liberticide portée aux raisons annoncées des meurtres de l’Hebdo [17].

    Alors, où sont tous les avocats auto-proclamés de la liberté d’expression ? Ce fut seulement lorsqu’un petit nombre de Musulmans s’engagea dans la violence, les caricatures anti-Islam étant en cause, que ces avocats auto-proclamés se rendirent soudain animés et passionnés pour la liberté d’expression. C’est parce que la légitimation de la rhétorique anti-Islam et la diabolisation des Musulmans était leur cause réelle ; la liberté d’expression était juste un prétexte.

    Durant toutes les nombreuses années où j’ai travaillé pour la défense de la liberté d’expression, je n’en ai jamais vu le principe aussi manifestement exploité à d’autres fins par des personnes qui manifestement n’y croient pas, comme ce fut le cas pour les meurtres de l’Hebdo. C’était aussi transparent que malhonnête. Leur véritable ordre du jour était d’illustrer comment ils inventaient un nouveau genre de liberté d’expression particulièrement à cette occasion : défendre la liberté d’expression ce n’est pas seulement défendre le droit d’exprimer une idée, décrétèrent-ils, mais de plus en embrassant cette idée [18].

    Ce tout nouveau « principe » est, en fait, l’antithèse exacte des véritables protections de la liberté d’expression. Le plus important dans une croyance réelle en les droits à la liberté d’expression est le point de vue que toutesles idées [19] — celles avec lesquelles on est le plus ardemment d’accord, et celles que l’on trouve les plus détestables et tout le reste — ont le droit d’être exprimées et défendues sans punition. Les défenses de la liberté d’expression les plus importantes et courageuses [20] sont généralement venues de ceux qui ont exprimé simultanément du mépris pour une idée tout en défendant le droit des autres personnes à exprimer librement la même idée [21]. Tel est le principe qui a longtemps défini l’activisme authentique de la liberté d’expression : ces idées sont viles à exprimer, mais je vais travailler pour défendre le droit des autres à les exprimer.

    Ceux qui ont exploité les meurtres de l’Hebdo ont cherché à abolir cette distinction essentielle. Ils ont insisté pour que dénoncer ou condamner ceux qui avaient assassiné les caricaturistes de l’Hebdo. ne suffît pas. A la place, ils ont essayé d’imposer une nouvelle obligation : il faut célébrer et embrasser les idées des caricaturistes de l’Hebdo, soutenir qu’il leur soit octroyé des récompenses, applaudir la substance de leurs vues. Le refus de partager les idées de Charlie Hebdo (plutôt que simplement leur droit à la liberté d’expression) soumettait aux accusations — par la foi des moindres artistes de dénigrement du monde — que l’on manquât à devoir respecter leur droits de s’exprimer librement, ou pire, qu’on sympathisât avec leurs tueurs.

    Cette tactique d’intimidation à peu de frais — essayer de forcer les gens non seulement à défendre le droit de l’Hebdo à la liberté d’expression, mais encore à embrasser les idées y étant exprimées (mais seulement en matière critique des Musulmans) a perduré depuis. Un an plus tard, il est encore fréquent d’entendre des partisans du militarisme occidental accuser faussement les fractions de "la gauche" d’avoir justifié ou permis l’attaque de Charlie Hebdo, au seul motif qu’elles aient refusé d’acclamer la teneur des idées de l’Hebdo.

    Cette accusation est un mensonge absolu, démontrable, une calomnie évidente. Je n’ai jamais entendu une seule personne de gauche exprimer quoi que ce soit d’autre que de la répulsion envers l’assassinat de masse des caricaturistes de l’Hebdo, je n’ai jamais entendu davantage quiconque de la gauche suggérer que les meurtres aient été « mérités » ou que les caricaturistes « l’aient cherché ». J’ai certainement entendu, et ai exprimé moi-même, une opposition au ciblage implacable d’une minorité marginalisée en France par les caricaturistes de l’Hebdo (juste à propos de cette critique, elle a été exprimée avec plus d’éloquence par un journaliste ancien employé de l’Hebdo, Olivier Cyran : « Le pilonnage obsessionnel des Musulmans auquel votre hebdomadaire se livre depuis une grosse dizaine d’années a des effets tout à fait concrets. Il a puissamment contribué à répandre dans l’opinion « de gauche » l’idée que l’islam est un « problème » majeur de la société française. » [22]). Mais les objections sur la teneur d’une idée bien évidemment ne dénotent pas ni même ne suggèrent, à l’égard de ceux qui expriment cette idée, une défaillance dans la défense des droits à la liberté d’expression : à moins que vous n’approuviez le concept entièrement nouveau, nocif et trompeur, que l’on puisse ne défendre le droit à la liberté d’expression que pour ceux avec lesquels on est d’accord.

    Mais tout cela souligne que la liberté d’expression n’était pas le principe soutenu dans ce cas ; la liberté d’expression c’était juste une arme utilisée par quelques occidentaux tribaux pour essayer de contraindre les gens à applaudir l’islamophobie et les caricatures anti-musulmanes (pas simplement d’acclamer le droit de publier sans punition les caricatures ou la violence, mais d’acclamer les caricatures elles-mêmes).

    Et ce qui manifeste encore plus la supercherie, au cœur de ce spectacle post-Hebdo, est qu’avant la marche de Paris, et particulièrement depuis, il y a eu un assaut systématique contre les droits à la liberté d’expression d’un nombre énorme de la population en France et partout en Occident, laquelle est Musulmane et/ou critique de l’Occident ou d’Israël, et sur quoi les croisés de fraîche date de la liberté d’expression de l’Hebdo n’ont manifesté quasiment aucune opposition, et même de temps en temps ont apporté leur soutien tacite ou explicite. C’était que la liberté d’expression était leur arme cynique, pas leur croyance réelle.

    G. G.

     

    Source : traduction en français par L. D. pour La RdR d’après l’article original en anglais de Glenn Greenwald, “Where Were the Post-Hebdo Free Speech Crusaders as France Spent the Last Year Crushing Free Speech ?” — © The Intercept, 8 janvier 2015.

    P.-S.

    En logo : citation iconographique extraite de l’article « "Un dimanche de janvier" : l’hommage place de la République aux victimes des attentats », © La Provence avec l’AFP, 10 janvier 2015. La statue de la République en contre-jour au crépuscule, place de la République à Paris, le 10 janvier 2015.

     
     

    Notes

    [1] Gilles Kepel, Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, avec la collaboration d’Antoine Jardin, coll. Hors série Connaissane, Gallimard, 15 décembre 2015.

    [2] AFP Genève, « Le droit à s’exprimer librement sur internet reconnu par l’ONU » lapresse.ca, 5 juillet 2012.

    [3] "Paris unity march : which world leaders are really committed to press freedom ?", The Guardian, 1 janvier 2015.

    [4] « Charlie Hebdo : revivez le grand rassemblement à Paris et les autres marches républicaines », Le HuffPost, 11 janvier 2015. "Millions gather in Paris for free speech demonstration", CBS News, 11 janvier 2015.

    [5] Glenn Greenwald,"In Solidarity With a Free Press : Some More Blasphemous Cartoons", The Intercept, 9 janvier 2015.

    [6] N.d.T. L’article lié par l’auteur, intitulé « Dieudonné arrested over Facebook post on Paris gunman » dans le Guardian, du 14 janvier 2015, a été supprimé bien qu’on le trouve également cité dans les réponses aux requêtes sur Google.

    [7] L’auteur lie un article du Jerusalem Post, "Dieudonne convicted of condoning terrorism", du 19 mars 2015.

    [8] N.d.T. Dans fr.wikipedia à l’article éponyme de l’artiste on peut lire : "Après les manifestations des 10 et 11 janvier, Dieudonné poste sur Facebook et Twitter des statuts commentant avec ironie les défilés, auxquels il indique avoir participé, et concluant « Sachez que ce soir, en ce qui me concerne, Je me sens Charlie Coulibaly », faisant allusion à la fois à l’attentat contre Charlie Hebdo et au terroriste Amedy Coulibaly, auteur de l’attentat antisémite Porte de Vincennes. [...] Le 14 janvier 2015, Dieudonné est interpellé dans sa résidence du Mesnil-Simon par la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP), puis placé en garde à vue. Il est ensuite renvoyé en correctionnelle. [...] En mars 2015, Dieudonné est condamné à deux reprises en l’espace de 48 heures : tout d’abord à deux mois de prison avec sursis pour son commentaire sur les attentats de janvier, puis à une amende pour les propos tenus dans Le Mur [c. a-d son spectacle].

    [9] "Comic Dieudonné given jail sentence for anti-Semitism", BBC News, 25 novembre 2015.

    [10] A.P. Elaine Ganley and Jamey Keaten, "New issue of Charlie Hebdo sells out quickly", news.yahoo.com, 14 janvier 2015.

    [11] JTA, "France Court Upholds ’BDS Is Discrimination’ Ruling", forward.com, 23 octobre 2015.

    [12] Glenn Greenwald, "Anti-Israel Activism Criminalized in the Land of Charlie Hebdo and ’Free Speech’", The Intercept, 27 octobre 2015.

    [13] Martin Untersinger, “Emergency Measures May Be Written Into the French Constitution”, 14] William Horobin, "French Authorities Close Three Mosques During State of Emergency", The Wall Street Journal, 2 décembre 2015.

    [15] Alleen Brown, "Under House Arrest, a Climate Activist Waits Out the Paris Conference", The Intercept, 30 novembre 2015.

    [16] Glenn Greenwald, "With Power of Social Media Growing, Police Now Monitoring and Criminalizing Online Speech", The Intercept, 6 janvier 2015.

    [17] N.d.T. Il s’agit d’une périphrase dans la version française pour exprimer une phrase anglophone concise qui dans sa traduction littérale aurait prêté à contresens.

    [18] Cette analyse conforte celle de Philippe Marlière qui qualifie le basculement actuel de la laïcité primitive (pour l’égalité du service républicain à l’égard de la diversité sociale), dans une demande de laïcité à ceux auxquels ces services sont destinés, par l’expression "laïcité communautarienne" : Le Yéti, "Droit au blasphème : les ravages de la laïcité « communautarienne »", Politis, (interview sur un entretien paru dans la revue Ballast), 8 juin 2015, également reproduit dans La RdR.

    [19] Glenn Greenwald, "France’s censorship demands to Twitter are more dangerous than ’hate speech’ ", The Guardian, 2 janvier 2013.

    [20] "ACLU History : Taking a Stand for Free Speech in Skokie", ACLU, septembre 2010.

    [21] "ACLU-EM Defends KKK’s Right to Free Speech"
    ACLU, 7 septembre 2012.

    [22] Référence française : Olivier Cyran, « Charlie Hebdo », pas raciste ? Si vous le dites… », lettre à Charb et à Fabrice Nicolino,Article 11, 5 décembre 2013 ; suivie de l’avertissement du 11 janvier 2015 dans le même support par le même auteur : « Aux fossoyeurs de tous bords ». The letter translated into english by Daphne Lawless : " “Charlie Hebdo”, not racist ? If you say so…",posthypnotic.randomstatic.net, 2015.

  • La pleurniche israélienne...et la Suède

    La pleurniche israélienne fera-t-elle taire Margot Wallström ?

    Le ministre suédois veut une enquête sur les meurtres extrajudiciaires

    L’État hébreu n’a pas apprécié que la ministre suédoise demande une enquête sur d’éventuels meurtres extrajudiciaires par Israël. Ce n’est pas la première fois que les relations sont tendues entre les deux pays.

    Elle soutient le terrorisme, et incite à la violence. Voilà ni plus ni moins l’opinion de l’Etat d’Israël sur la ministre des Affaires étrangères de la Suède, Margot Wallström. C’est en tout cas ce qu’a estimé ce mardi l’État hébreu dans un communiqué pour le moins acerbe.

    Benjamin Netanyahu et son gouvernement n’ont en effet pas apprécié que Margot Wallström plaide, devant le parlement suédois, pour l’ouverture d’une enquête afin de déterminer si Israël s’était rendu coupable de meurtres extrajudiciaires de Palestiniens lors des récentes violences. « Il est essentiel qu’il y ait une enquête sur ces décès afin de clarifier la situation et que chacun rende des comptes », a-t-elle exigé.

    Pour l’État hébreu, de telles déclarations sont « irresponsables et délirantes », mais surtout, « apportent leur soutien au terrorisme et incitent à la violence », explique un communiqué incendiaire.

    Un ministre israélien cité par le Jerusalem Post va encore plus loin et considère que l’enquête demandée par Wallström devrait être orientée pour comprendre « comment une femme qui déteste Israël a pu être nommée, et tenir toujours, le rôle de ministre des Affaires étrangères de la Suède ».

    « La seule chose que la ministre des Affaires étrangères suédoise n’ait pas faite est de rejoindre physiquement les terroristes palestiniens et de poignarder des juifs » a déclaré l’ancien ministre de Benjamin Netanyahou Avigdor Liberman. « À la lumière de son attitude, il faut espérer que cela n’arrivera pas » a-t-il ajouté.

    Il faut dire que Margot Wallström n’en est pas à son premier coup d’éclat contre Israël et a considérablement rafraichi les relations entre les deux pays. Des accusations similaires d’exécutions extrajudiciaires avaient poussé le Premier ministre Netanyahou à téléphoner à son homologue Stefan Löfven pour protester.

    Suite aux attentats de Paris, Margot Wallström avait aussi affirmé que les tueries étaient liées au conflit israélo-palestinien. Les relations entre les deux pays sont de toute manière très compliquées depuis la reconnaissance par la Suède d’un État palestinien en 2014 et l’ouverture de la première ambassade de Palestine en Europe occidentale en février dernier.

  • Les Socialistes veulent sanctionner le buzz mensonger

    Les députés socialistes défendront ce mercredi un amendement pour alourdir les sanctions pénales contre la diffusion de fausses informations lorsqu'elles génèrent du buzz sur Internet, en particulier lorsqu'il s'agit de hoax à caractère politique.

    Mise à jour : l’amendement a été retiré.

    Dans le cadre de l’examen du projet de loi pour une République numérique d’Axelle Lemaire, l’ensemble des députés du groupe socialiste à l’Assemblée nationale ont signé un amendement n°CL387, qui vise à sanctionner plus durement les « hoax » (canulars) lorsqu’ils sont suffisamment bien élaborés pour avoir connu du succès sur les réseaux sociaux. Il sera examiné ce mercredi en commission des lois.

    La loi sur la liberté de la presse de 1881 contient déjà un article 27, rarement mis en œuvre, qui condamne la diffusion de fausses informations, « lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix publique, ou aura été susceptible de la troubler ». La peine de 45 000 euros est portée à 135 000 euros lorsque cette publication, diffusion ou reproduction est « de nature à ébranler la discipline ou le moral des armées ou à entraver l’effort de guerre de la Nation ».

    Condamner les fausses informations sur l’action politique

    L’amendement des députés socialistes vise à compléter cette disposition pour préciser que seront aussi sanctionnées de 135 000 euros d’amende les diffusions de fausses nouvelles « lorsque la publication, la diffusion ou la reproduction faite de mauvaise foi aura pris une dimension virale telle qu’elle en aggrave l’ampleur ».

    On pourrait croire qu’il s’agit d’une réaction à la diffusion de fausses rumeurs lors des attentats du 13 novembre, qui avaient participé à alimenter la panique et à troubler le travail des policiers, mais l’exposé des motifs dévoile une autre ambition, plus politique à l’approche des élections présidentielle et législatives de 2017.

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    changementmaintenant

    Une menace pour le bon fonctionnement de notre démocratie

    « Nombreux sont les internautes qui sont victimes, qu’ils en soient conscients ou non, de canulars informatiques ou « hoax », sous la forme de courriels ou de lettres-chaînes. Ces canulars informatiques revêtent un caractère de particulière gravité lorsqu’ils visent à diffuser, à grande échelle, une information erronée sur le contenu d’une politique publique », dénoncent ainsi les députés Socialistes, sans livre d’exemple précis.

    « L’internaute qui ne prend pas conscience de leur caractère mensonger est trompé dans son jugement là où, en tant que citoyen, il devrait toujours disposer d’une information fiable sur l’action de ses représentants. De plus, il peut également contribuer à diffuser – à son insu – des informations erronées, ce qui à grande échelle constitue une véritable menace pour le bon fonctionnement de notre démocratie ».

    Aucune sanction n’est en revanche proposée pour la diffusion de fausses promesses électorales, qui ne sont pas perçues comme une menace pour la démocratie.



  • Dieudonné en Suisse ?

    Dieudonné en Suisse : le lobby israélien fidèle au rendez-vous pour interdire l’humour

     

    Malgré le titre sans équivoque du nouveau spectacle de Dieudonné (En paix), la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation [1] ne déroge pas à ce qui est devenu pour elle une tradition, voire un rituel, et va venir militer devant la salle de spectacle, le Théâtre de Marens à Nyon, où l’humoriste à succès va présenter son dernier spectacle en date du 13 au 17 janvier.

    Afin d’informer le public, la presse et les autorités de sa démarche de salubrité publique, la très respectable association a publié un communiqué de presse où elle explique notamment, en parlant de Dieudonné, que « son crédo ne fait plus de doute : la communauté juive, bouc émissaire de tous les complots et de tous les maux. »

    Etant donné que lors de la représentation de son spectacle « En paix » auquel j’ai pu assister en novembre dernier à Paris, l’artiste n’a évoqué le mot « Juif » qu’une seule fois, j’ai peur que les membres de l’association communautaire ne souffrent d’un délire de persécution.

    La CICAD nous prouve pour terminer, une fois de plus, qu’elle non-plus ne manque pas d’humour, lorsque qu’elle nous prévient du fait que « Dieudonné sera en campagne mi-janvier au Théâtre de Marens à Nyon ». Mais ce trait d’humour sera-t-il suffisant pour prétendre à une Quenelle d’or ?

    Joseph Navratil

     

     

    Le communiqué de la CICAD :

    Celui qui a fait de l’antisémitisme son fonds de commerce se produira sur scène une nouvelle fois en Suisse. Dieudonné sera en campagne mi-janvier au Théâtre de Marens à Nyon.

    Condamné plusieurs fois pour « injures à caractère raciste », « provocation à la haine raciale », « négationnisme », son crédo ne fait plus de doute : la communauté juive, bouc émissaire de tous les complots et de tous les maux.

    Tentant de justifier l’injustifiable, Dieudonné a saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour faire valoir son droit de faire applaudir sur scène un négationniste, Robert Faurisson. Les juges européens ont en novembre dernier tranché :

    « La soirée avait perdu son caractère de spectacle de divertissement pour devenir un meeting ». Il s’agit, « dans les circonstances de l’espèce, d’une démonstration de haine et d’antisémitisme, ainsi que d’une remise en cause de l’holocauste. Travestie sous l’apparence d’une production artistique, elle est aussi dangereuse qu’une attaque frontale et abrupte ».

    Jugement CEDH 25239/13, 10 novembre 2015

    La liberté d’expression est un principe essentiel mais qui ne peut en aucun cas être invoquée pour justifier un « droit à la discrimination ». C’est pourquoi, la CICAD entend poursuivre son travail d’information et de sensibilisation sur l’antisémitisme, en allant à la rencontre de nos concitoyens et de ses fans.

  • Délinquance sur les chantiers à Marseille

     
     
     
    Si tu ne nous embauches pas, le chantier s'arrête": c'est ce qu'entendent de nombreux responsables de chantiers du BTP dans les quartiers sensibles à Marseille. Rackets, pressions à l'embauche, menaces, extorsions à la sous-traitance font désormais l'objet de toute l'attention des autorités.

    Longtemps ces infractions sont passées sous les radars de la police et de la justice car les entreprises préféraient souvent acheter leur tranquillité. Ce n'est plus le cas.

    Lorsqu'il avait rencontré des représentants de la police et de la justice, le responsable d'une grosse entreprise de BTP l'avait prédit: le chantier de la "L2", grand contournement autoroutier de Marseille de l'Est au Nord, dont le chantier a redémarré il y a un an et demi, allait traverser "des quartiers à problèmes" et "gêner" un certain nombre de gens. "On sera rackettés".

    La suite lui donne raison: le 26 janvier 2015, trois engins de chantiers - parmi eux, une foreuse quasi-unique en Europe - sont incendiés pour un préjudice supérieur à 1 million d'euros.

    Trois jours plus tard, la société reçoit un devis de la société de gardiennage Télésurveillance, Gardiennage, Intervention (TGI). Il s'accompagne d'une promesse, celle qu'il n'y aura pas de problème avec les cités voisines si l'entreprise est retenue, raconte le procureur de la République Brice Robin, lors d'une conférence de presse.

    Des émissaires de TGI se font plus explicites auprès de l'entreprise de BTP: oui, ce sont bien eux qui ont incendié les engins. Et si la police est prévenue, ils promettent "de mettre le feu aux cités".

    De fait, lorsque le contrat de gardiennage est conclu, le calme revient, malgré les absences régulières des employés de TGI.

    - Rodéo dans un coffre -

    Autre cadre, procédé semblable: un conducteur de travaux de Campenon Bernard Provence se retrouve dans le sous-sol d'un logement social en construction, front contre front avec l'un de ses employés originaire du quartier. Si son contrat n'est pas prolongé, le responsable finira "dans un coffre ou dans un cave", lui promet-on.

    Des menaces qui ne sont pas forcément en l'air: lors d'une audience, un magistrat a raconté comment un chef de chantier s'était retrouvé enfermé pendant plusieurs heures dans le coffre d'une voiture partie "faire un rodéo dans la ville".

    Et lorsque les entreprises cèdent - ce qu'elles font souvent -, leurs ennuis ne sont pas terminés. Les pièces d'enquête consultées par l'AFP dressent un portrait peu flatteur des salariés ainsi recrutés: refus du port du casque car "ça fait tomber les cheveux", chute à scooter qu'on tente de faire passer en accident du travail, heures de travail passées à laver les voitures du quartier, vol des clefs des engins, absences répétées puis pressions pour se faire noter présent...

    "Sur un chantier, un employé s'est battu avec un contremaître parce que les autres ouvriers faisaient du bruit et l'empêchaient de dormir!" raconte une source proche du dossier.

    Certains noms apparaissent dans plusieurs dossiers distincts. Comme celui de Karim Ziani, mis en examen et détenu dans l'affaire de la L2, il apparaît aussi dans celle de la construction de HLM.

    S'agit-il d'organisations de type mafias italiennes ? "Non, on n'en est pas là", répond clairement le procureur adjoint de Marseille André Ribes, qui ne minore pas pour autant cette délinquance dont "le chiffre d'affaires est important, notamment sur la sécurité".

    Depuis quelques mois en tout cas, les arrestations se multiplient et les condamnations tombent au tribunal correctionnel de Marseille.

    Mi-2015, après cinq mois d'enquête, une douzaine de personnes sont arrêtées dans le dossier de la L2, quatre sont mises en examen et aujourd'hui encore en détention provisoire. Début décembre, trois hommes, qui avaient extorqué leur embauche, ont été condamnés à des peines d'entre 18 et 30 mois de prison. En tout, cinq dossiers ont été ouverts en 2015.

    Pour en arriver là, la justice et la police ont dû changer leurs méthodes. D'abord, il a fallu regagner la confiance des acteurs du BTP, qui portaient rarement plainte.

    "Il faut se mettre à la place d'un chef de chantier qui a été menacé: il a en face de lui un voyou. (En cas de plainte), c'est la parole de l'un contre la parole de l'autre. Ensuite il se retrouve seul sur le terrain face au voyou, et nous, on n'est plus là", explique le directeur départemental de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône Pierre-Marie Bourniquel. "Ca n'est pas facile pour un employé", confirme Philippe Deveau, le patron de la fédération BTP du département.

    - Chiffres noirs de la délinquance -

    Une petite dizaine de policiers ont été choisis pour faire partie du Groupe voie publique "chantiers" sous l'égide du commissaire Jean-Baptiste Corti. Ce groupe, doté d'équipements spécialisés et de moyens humains, "traite ces affaires de chantage de chantiers comme de la grande criminalité", explique M. Bourniquel.

    Bailleurs, donneurs d'ordres, fédération du BTP, police se sont par ailleurs regroupés sous l'autorité du parquet au sein d'un Groupe local de traitement de la délinquance (GLTD).

    Deux magistrats ont été nommés pour suivre ces dossiers. "Des stratégies d'enquête sont déterminées, des stratégies de qualifications juridiques qui permettent de faire aboutir" les procédures, explique le procureur adjoint Ribes, qui cite l'exemple de l'extorsion par menaces "déguisées", toujours difficile à caractériser.

    Après les premières peines de prison, les professionnels de la construction affichent leur satisfaction. "Ca nous a permis de nous rapprocher de la police et de la justice", explique Philippe Deveau.

    Cette criminalité faisait partie jusque-là des "chiffres noirs" de la délinquance, selon M. Ribes: des faits non portés à la connaissance de la police et de la justice, et qui n'existent donc pas officiellement.
    Avant la mise en place du dispositif, le parquet n'était saisi d'aucun dossier de ce type.

    Cette criminalité avait pourtant un coût: autour de 50 millions d'euros par an pour les seules Bouches-du-Rhône comprenant les vols, les dégradations ou incendies de matériel et les pertes d'exploitation liées à des chantiers arrêtés ou ralentis, selon M. Deveau.

    Ces problèmes sur les chantiers "existent partout" en France, précise-t-il. "Je ne pense pas qu'il y ait plus de racket ici dans le BTP qu'ailleurs", abonde M. Ribes.

    La justice compte également surveiller le comportement du secteur. Le magistrat affirme: "Le discours du procureur a toujours été très clair: un acte de délinquance est un acte de délinquance. S'il s'agit de travail dissimulé, l'action publique sera aussi exercée".
     
     


    avec l'AFP