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La consommation militante

 

La consommation militante, grande ambition de l’économie solidaire


 

Des entreprises que rien en apparence ne distingue des autres : elles présentent des bilans, se dessinent des objectifs de rentabilité et se battent chaque jour pour décrocher des marchés et affermir leurs positions. Des PME pour la plupart, parfaitement intégrées dans le paysage économique que rien dans le fonctionnement apparent ne distingue des autres. Pourtant, les entreprises qui se réclament des valeurs de l’économie sociale et solidaire sont gouvernées au quotidien par une doctrine aussi solide que particulière.

 

Matthias Munks
Mardi 21 Août 2012

La consommation militante, grande ambition de l’économie solidaire

Lorsqu’un consommateur fait son ravitaillement hebdomadaire chez Super U ou chez Leclerc, veut faire renouveler ses lunettes chez Optic 2000, ou lorsqu’il souscrit une assurance à la MAIF, il devient sans le savoir un acteur de l’économie sociale, un espace où l’enjeu est d’appliquer aux activités entrepreneuriales les principes participatifs de la gouvernance démocratique, et d’évaluer l’utilité sociale avec autant de précision que les résultats financiers. L’idée est née très tôt au 19ème siècle, alors que le développement industriel, porté par des progrès exponentiels des techniques de production, s’envole et installe la France et les principales puissances mondiales dans l’ère moderne. Très vite, il semble urgent à quelques uns, peut-être plus clairvoyants, de mettre le facteur humain au cœur de la réflexion : certes il faut produire, vite et beaucoup pour répondre à une demande croissante. Certes, il convient de favoriser la croissance. Mais sans jamais perdre de vue que cet essor a un coût social et humain que les lois sociales –fruit d’un long combat- ne peuvent suffire à corriger. Pour les tenants de l’économie sociale et solidaire, farouches partisans d’un produire mieux, il convient de se poser les bonnes questions en amont, de développer une réflexion citoyenne qui aille au delà des critères de la seule rentabilité et place l’utilité sociale au rang des critères essentiels, au même titre que le profit. Au cœur de cette démarche, les structures coopératives vont rapidement prendre une ampleur particulière. Avec la loi de 1947, elles acquièrent enfin un véritable statut. Et la crise qui bouleverse le paysage économique mondial et génère une nouvelle réflexion sur la croissance et l’entreprenariat, leur donne aujourd’hui un nouvel essor. En 2010, Coop FR qui représente en France l’Alliance coopérative internationale a formalisé autour de sept principes et de sept valeurs (la démocratie, la solidarité, la responsabilité, la pérennité, la transparence, la proximité et le service) un véritable modèle coopératif hexagonal. Aujourd’hui, la France compte 21 000 entreprises coopératives qui emploient près d’un million de salariés. Parfaitement intégrées au paysage économique, elles sont particulièrement présentes dans le secteur du commerce de proximité puisqu’elles représentent 28% de son chiffre d’affaire, avec près de 400 000 points de vente répartis dans 75 enseignes et assurant plus de 300 000 emplois. Lorsqu’il achète un survêtement chez Intersport ou du carrelage chez BigMat, lorsqu’il hésite entre un collier et un bracelet chez Julien d’Orcel, lorsqu’il s’offre une seconde monture en titane pour un euro de plus chez Optic 2000, ou lorsqu’il choisit pour ses enfants un puzzle chez Joué Club, le consommateur a le sentiment d’avoir trouvé au plus juste de son budget les produits dont il a besoin, auprès de professionnels fiables, installés en cœur de villes ou dans les grands centres commerciaux péri-urbains. Le plus souvent sans le savoir, il a été du même coup l'acteur éphémère d’une coopérative de commerçants détaillants. Sous l’égide d’une enseigne unique, chaque magasin est absolument autonome et maître de son évolution. Le système coopératif des magasins de détail fournit un cadre, une dynamique de croissance, mutualise les actions et propose un soutien logistique dans le développement notamment à la faveur d’un travail sur la marque. Mais surtout –et c’est sans doute ce qui fait son succès croissant- il instille un état d’esprit tant auprès de ses adhérents qu’auprès des consommateurs. Quand Optic 2000 lance sur l’ensemble du territoire une campagne, en 2008, « Faites vérifier votre vue pour conduire en toute sécurité », il y a un soubassement citoyen à sa démarche, lié à sa préoccupation d’être une force de proposition en matière de santé publique. Un sens citoyen corroboré par les actions de l'enseigne en France - Optic 2000 soutient l'AMF Téléthon -, où à l'étranger en menant des actions humanitaires au Burkina Faso et en Tunisie par exemple. Lorsque la marque propose aux consommateurs des montures « Mode in France » elle soutient l’emploi avec des lunettes réalisées et produites à 100% en France. Un euro sur chaque vente est aussi reversé au Téléthon. L’association AFM Téléthon, dans un récent communiqué, se félicitait ainsi du fait que «Optic 2000 participera notamment au financement des programmes qui concernent la recherche sur les maladies génétiques oculaires et le Réseau thérapie génique oculaire (R-TGO) lancé par l’AFM, Généthon et l’Institut de la vision. (...) L’opticien table sur une collecte de plus d’un million d’euros, tout au long de l’année. » Dans le même esprit, à la faveur des fêtes de fin d’année, JouéClub développe des partenariats avec des associations humanitaires pour qu’aucun enfant ne soit laissé pour compte. Et la remarque vaut tout autant pour les grandes enseignes coopératives du secteur de l’alimentation, toujours très proactives en matière de solidarité et impliquées dans les banques alimentaires. L’approche sociale et solidaire de l’économie a fait ses preuves. Elle démontre au quotidien qu’il est non seulement possible mais surtout nécessaire, aujourd'hui, d’allier la pertinence économique et les facteurs humains. Elle revient aux sources de l’entreprenariat en mettant en commun des talents et des techniques pour participer au bien être individuel et collectif, sans sacrifier l’un à l’autre. Mettre l’humain au cœur d’une démarche économique n’est pas un facteur de fragilisation pour les entreprises, bien au contraire. : Leur taux de défaillance, en l'occurrence, est particulièrement faible (0,5%). A l’image des magasins Leclerc ou des centres de lunetterie Optic 2000, l’ensemble des coopératives de commerçants détaillants est porté par une croissance forte et continue. Selon l’organisation Internationale du Travail (OIT), les institutions coopératives ont traversé la crise récente mieux que les entreprises traditionnelles. Dans leur étude « Resilience of the cooperative business model in times of crisis », publiée en 2009, deux chercheurs du Bureau International du travail, Johnston Birchalle et Lou Hammond Ketilson avancent une explication : les structures coopératives sont libérées de la pression que constitue le versement de dividendes aux actionnaires. Elles peuvent de ce fait se concentrer sur leur cœur de métier et opérer de meilleurs choix stratégiques. A méditer en cette année déclarée par l’ONU, « Année Internationale du mouvement coopératif ».




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