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Grande-Bretagne : le contrat zéro-heure

Grande-Bretagne : le contrat zéro-heure ou la précarité institutionnalisée

08/08/2013 | 16h45
Un MacDo à Londres (Finbarr O'Reilly/Reuters)

Ni temps de travail garanti, ni salaire minimum, les « zero-hours contracts » (contrats zéro-heure) concernent plus d’un million de Britanniques. Et c’est McDonald’s qui en comptabilise le plus, avec 82 800 employés sous ce type de contrat très spécifique.

 

A la base du concept du contrat zéro-heure, une liberté quasi-totale : l’employeur n’est pas obligé d’offrir un travail régulier à son employé, l’employé n’est pas obligé d’accepter les heures que son employeur lui propose. Un retraité qui cherche à arrondir ses fins de mois s’en accommoderait parfaitement, et pourrait décliner poliment une proposition de travail le vendredi soir car un film qu’il adore passe à la télé. Un étudiant pourrait également se satisfaire de ce travail à la carte, et accepter toutes les heures qu’on lui propose en soirée comme en week-end, car il prévoit de s’offrir une place pour un festival de musique avec ses potes le mois prochain (festival pendant lequel il refusera légalement les heures de travail proposées).

Sauf que le contrat zéro-heure concerne aujourd’hui plus d’un million de Britanniques, dont des hommes et des femmes devant subvenir aux besoins de leur famille. Ceux-ci se retrouvent, de par la nature aléatoire de leur contrat, dans une situation de précarité.

Triste record pour MacDo

Le nombre de contrat à zéro-heure en Grande Bretagne a dépassé le seuil record du million, et ne cesse d’augmenter. Ce chiffre alarmant a été révélé par le Chartered Institute of Personnel Development, contredisant le rapport officiel commandé par le gouvernement. En effet, si le Bureau national des statistiques a reconnu une hausse considérable des contrats zéro-heure, il ne les a chiffré qu’à 250 000 en 2012 – en admettant tout de même que ce chiffre était sans doute inférieur à la réalité. Pourtant présent depuis longtemps sur le pays (une porte-parole du groupe McDonald’s confie au journal anglais The Guardian que la chaîne emploie ce type de contrats depuis son implantation en 1974) c’est seulement sous le gouvernement Cameron que cette pratique a commencé à être quantifiée et à faire polémique.

L’impact d’un tel type de contrat sur les conditions de travail et le niveau de vie des Britanniques a été ignoré. Aujourd’hui, les employés en contrat à zéro-heure n’ont aucune marge, aucune souplesse. Il leur est impossible de se projeter à moyen et long terme ou de rembourser leurs dettes. Ils peuvent travailler 12 heures ce mois-ci, 45 celui d’après : aucun salaire minimal garanti. Les syndicats travaillistes veulent interdire ce contrat d’un nouveau genre, et déplorent son expansion qui accentue selon eux la précarité. Militant pour cette abolition, le syndicaliste Andy Sawford ironise dans le journal anglais The Guardian en prenant pour cible les chaînes de fast-food comme McDonald, Subway ou KFC :

« Dans la gestion de leurs produits, il savent précisément estimer les besoins de leurs clients pour leur donner la parfaite quantité de nourriture et éviter le gaspillage. Ils pourraient utiliser le même processus pour estimer les besoins de leurs employés et leur offrir la stabilité nécessaire. »

McDonald’s n’avait pas besoin de l’émergence de ce type de contrats pour faire polémique autour des conditions de travail de ses employés. Le 5 août dernier, la plus grande chaîne alimentaire du Royaume-Uni a remporté le triste record de l’entreprise ayant signé le plus de contrats à zéro-heure. Avec 82 800 employés sous ce type de contrats, elle devance de loin la chaîne de pubs/bars JD Wetherspoon (24 000) et Sports Direct (20 000), la plus grosse chaîne de magasins de vente d’articles de sports du pays.

Si Karl Marx voyait ça

D’après le site du Guardian, un contrat type zéro-heure stipule à l’adresse de l’employé que :

« L’entreprise n’a pas le devoir de vous proposer du travail. Vos heures de travail ne sont pas prédéterminées et vous seront notifiées sur une base hebdomadaire dès que le responsable du magasin sera en mesure de vous les fournir. L’entreprise a le droit de vous demander de travailler pour des heures variées, et prolongées. »

Et si en contrepartie, l’employé peut refuser les heures qu’on lui propose, il s’expose à des représailles. L’employeur qui a besoin que son employé soit à son poste tel jour pendant tant d’heures, sera tenté, après un refus, de ne plus lui proposer de travail pendant une période donnée. Comme l’écrit le service économie du Guardian sur son blog, « dommage que Karl Marx ne soit plus là pour voir ça ».

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