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Aux armes citoyennes

TRIBUNE11/06/2013 à 11h04

« Aux armes citoyennes, sortez vos beaux nichons, et allaitons ! »

Gabrielle Girot | Etudiante

TRIBUNE

La première fois que je l’ai fait, j’avais 25 ans et c’était avec une fille. Ce fut un moment de plaisir mêlé d’angoisse, comme l’aboutissement d’un moment de ma vie et le début d’un autre, inconnu et plein de promesses. J’avais peur de ne pas savoir m’y prendre, d’avoir mal. Mais ce fut à la fois charnel, sensuel et fusionnel, tout en étant pragmatique et vital.

C’était le début d’une grande aventure, car ensuite je l’ai fait partout et tout le temps ! Je l’ai fait couchée, assise, debout. Je l’ai fait le jour et la nuit. Bien sûr, je l’ai fait au lit, mais aussi sur le canapé, sur une chaise...

Le plus souvent, je l’ai fait chez moi, mais parfois je l’ai aussi fait chez ma mère, chez ma sœur, chez mon frère et même chez des amis. Il m’est arrivé de le faire dans le cabinet de mon dentiste ou au restaurant. Je dois l’avouer, je l’ai aussi fait dans la rue ou dans la voiture, le train et même dans l’avion. Je l’ai fait en vacances à Rome et à Paris, sur une plage de Normandie et dans les champs de l’Aveyron.

Pourquoi louper la moitié de la fête ?

MAKING OF

Le mois dernier, une cliente d’un magasin Celio de Montpellier qui allaitait sa fille s’est vu intimer l’ordre de se cacher dans une cabine ou de sortir de la boutique. Choquées, plusieurs femmes ont ouvert une page Facebook, « Téter où je veux quand je veux ». Une riveraine, Gabrielle Girot, étudiante en dernière année à l’Ecole normale supérieure de Lyon et mère depuis quatre mois, nous a envoyé ce texte.

M.D.

Oui, j’ai allaité ma fille dans tous ces endroits. Car quand elle a faim, ma réponse est de lui donner le sein. Certaines de mes amies dégainent bien leur biberon. Alors, moi, je dégrafe mon corsage pour donner la gougoutte à ma fille. Mais à l’inverse de la chanson de Brassens, tous les gars du village ne sont pas là !

Parce qu’allaiter en public n’est ni sexuel ni obscène, et vraiment pas exhibitionniste. Parce qu’allaiter en public n’est pas un « attentat à la pudeur » – terme juridique qui n’existe plus depuis 1994.

Parce que mon sein vaut autant que celui de Madonna ou de Lady Gaga, et n’allez pas me dire qu’on en voit moins chez elles que chez moi ! Parce qu’allaiter est sain et naturel, il faut pouvoir le faire partout et tout le temps.

Non, on ne peut pas demander aux mères de se cacher – pourquoi devraient-elles transmettre à leur enfant que manger est quelque chose de tabou ? Ni de cacher leur enfant sous un châle – avez-vous déjà vu une vache ou une chatte se cacher sous un drap pour allaiter ? Ni de s’isoler dans un coin – pourquoi devrions-nous louper la moitié de la conversation ou de la fête ?

Je ne cacherai pas ce sein...


Détail de « La Liberté guidant le peuple », d’Eugène Delacroix (Olivier Bacquet/Flickr/CC)

Je me souviens de mon amie Laëtitia, dont le beau-frère ne voulait pas qu’elle allaite en sa présence. Je me souviens de mon amie Justine, qui n’a pas voulu allaiter parce que c’est compliqué, surtout à l’extérieur.

Je me souviens de cette maman qui a été expulsée d’un magasin. Je me souviens de cette maman qui, après avoir essuyé des remarques désagréables, a peu à peu arrêté d’allaiter son enfant.

Alors oui, il faut défendre l’allaitement comme un choix et un droit pour chaque enfant et chaque mère face à la pression sociale du qu’en-dira-t-on, du glamour, des préjugés ou encore de la pudeur mal placée ! Ce n’est pas aux enfants de changer leur comportement sain, naturel et millénaire, c’est à la société de changer son regard, et non, je ne cacherai pas ce sein que vous ne sauriez voir.

Et plus vous en verrez, plus vous trouverez cela normal ; alors...

Aux armes citoyennes !

Sortez vos beaux nichons !

Allaitons, allaitons,

Qu’un lait bien bon,

Abreuve not’ belle nation !

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