Piratage Israelien de France 2
La propagande israélienne pirate les ondes de France 2
Ce lundi 31 mai, quelques heures seulement après l'abordage de la flottille humanitaire en
route pour Gaza, les autorités israéliennes ont procédé à un nouvel acte de piraterie, celui des
ondes de France Télévisions. Parti pris, mensonges grossiers, désinformation... Le journal
télévisé de France 2 naviguait en eaux troubles ce soir-là.
- Tu as vu chérie ? Ils recommencent à diffuser des publicités après 20h sur France Télévisions. - Mais non mon
amour, c'est le JT de Pujadas !
Etonnant ! Comme beaucoup d'autres chaînes de télévision à travers le monde, France 2 a ouvert le grand bal de
l'actualité de ce 31 mai sur l'attaque israélienne menée contre la flottille humanitaire à destination de Gaza. Mais la
couverture médiatique de cet événement a vite donné au journal télévisé des allures de spot gouvernemental
israélien.
David Pujadas nous rapporte le récit du raid sur la flottille « pro-palestinienne », évitant systématiquement l'emploi
de l'adjectif « humanitaire » pourtant utilisé partout ailleurs pour qualifier le convoi. Selon l'homme-tronc de France 2,
l'opération a fait neuf morts. D'autres médias, y compris israéliens, font pourtant état d'un plus grand nombre de
victimes. La plupart en tout cas, emploient prudemment le conditionnel ou précédent leur chiffre d'un « au moins »
professionnel, tant il est difficile dans pareille situation d'obtenir des informations précises. Mais David Pujadas, lui,
confirme son nombre de victimes à plusieurs reprises durant l'émission avec tout l'aplomb du journaliste s�r de
ses sources. Mais de quelles sources s'agit-il exactement ? Durant la journée du 31 mai, seule l'armée israélienne a
communiqué le chiffre de neufs morts.
En fait, toute l'émission était axée sur la version de Tel-Aviv : les soldats ont gentiment prié le convoi de les suivre
jusqu'au port israélien d'Ashdod ; les « pro-palestiniens » ont refusé d'obtempérer ; un commando israélien est
monté à bord d'un bateau où il a été attaqué à coups de bâtons, de couteaux et de billes ; les soldats ont été
contraints d'ouvrir le feu. Le récit est appuyé par des images gracieusement fournies par l'armée israélienne qui,
selon M. Pujadas, « veut ainsi prouver que ses soldats ont été agressés ». Des propos confirmés par les
interventions de la porte-parole de l'armée israélienne, du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, ainsi
que par une interview du porte-parole du ministère israélien des Affaires Etrangères, Daniel Saada. Nous
reviendrons plus loin sur cette interview.
De la version « pro-palestinienne » des événements, nous saurons juste que les activistes ont qualifié l'attaque de «
délibérée ». C'est tout ? Oui ! Pas un mot sur les témoignages concordants établissant qu'un bateau grec avait
essuyé des tirs à balles réelles depuis un hélicoptère durant la nuit. Ces informations apportent pourtant un éclairage
pertinent aux images diffusées par France 2 mais doivent avoir le fâcheux inconvénient de contredire la version
israélienne.
Pas un mot non plus sur l'aspect illégal du raid israélien. Le reportage de France Télévisions rapporte que l'attaque
s'est déroulée dans les eaux internationales, au-delà des eaux territoriales israéliennes. Mais la chaîne du service
public se garde bien de préciser que l'opération viole donc le droit international et qu'elle constitue un acte de
piraterie. Par conséquent, non seulement France 2 ne précise pas que l'équipage de la flottille humanitaire était en
état de légitime défense. Mais de plus, la chaîne publique surexpose la version israélienne, inversant la victime et
l'agresseur.
Auteur(s) : Grégoire Lalieu Page 2/4La propagande israélienne pirate les ondes de France 2
La présentation offerte par France 2 du convoi « pro-palestinien » cadre elle aussi parfaitement avec la propagande
israélienne. Il fallait zapper si vous désiriez découvrir, comme c'est le cas généralement pour la couverture
d'événements humanitaires, le portrait de courageux pacifistes s'embarquant dans une aventure solidaire. Il fallait
zapper également si vous désiriez en apprendre d'avantage sur la présence de députés européens, d'un rescapé de
la Shoah ou d'un prix Nobel de la paix. Le reportage de France 2 nous expliquait plutôt comment la flottille
humanitaire avait été essentiellement préparée par une ONG turque, proche du Hamas « qui contrôle Gaza ».
L'UMP contrôle-t-elle la France ? Etrange vocabulaire… Le reportage vise en fait à ternir l'image de la mission
humanitaire qui aurait caché un objectif politique : briser le blocus pour renforcer le Hamas. Des députés européens,
un rescapé de la Shoah et un prix Nobel œuvrant pour une « organisation terroriste » sous couvert d'actions
humanitaires : joli scoop ! Quelques erreurs déontologiques plus tard, M. Pujadas nous annonce l'interview
imminente de Daniel Saada, porte-parole du ministère des Affaires Etrangères, et envoie un reportage sur le blocus
israélien, « pour bien comprendre » et mettre à l'aise l'officiel israélien. Le reportage de France Télévisions nous
apprend en effet qu'Israël a imposé un blocus politique et économique sur Gaza depuis que le Hamas y a pris le
pouvoir « par la force » en 2007. Il s'agit d'un mensonge grossier répété inlassablement depuis plusieurs années. Le
25 janvier 2006, le Hamas a remporté haut la main des élections législatives dans la bande de Gaza. Ces élections
avaient mobilisé plus de trois-quarts des électeurs sous le regard de 900 observateurs internationaux ayant validé la
parfaite régularité du scrutin. Le reportage revient ensuite sur la guerre de Gaza : « après des tirs de roquette par le
Hamas sur le Sud d'Israël, l'armée de Tsahal lance une offensive majeure sur Gaza ».
Le journaliste laisse ainsi entendre que le Hamas aurait rompu la trêve avec Israël et que ce dernier aurait agi en
état de légitime défense. Il s'agit d'un vulgaire mensonge sur lequel s'est basée la propagande israélienne et que
France Télévision propage, une fois de plus, complaisamment. La trêve conclue entre le Hamas et Israël impliquait
comme condition le desserrement du blocus sur Gaza. Non seulement le gouvernement israélien n'a pas respecté
cette condition mais il avait même lancé, en novembre 2008, un raid meurtrier sur l'enclave palestinienne, déclarant
par la suite que la trêve n'était pas pour autant rompue !
Dans son rapport sur la guerre de Gaza, le juge Richard Goldstone, mandaté par les Nations Unies, a établi que
c'est bien Israël qui avait rompu la trêve. Visiblement, l'avis d'une commission indépendante de l'ONU a moins de
valeur pour France Télévisions que la propagande d'un pays en guerre.
Après avoir déroulé son tapis rouge de mensonges, M. Pujadas passe donc à l'interview du porte-parole du
ministère israélien des Affaires Etrangères. Introduit par un reportage légitimant à demi-mot le blocus et la guerre
contre Gaza, M. Saada joue sur du velours. La haute pugnacité M. Pujadas va-t-elle le faire vaciller ?
Première question : « Finalement il y a eu neuf morts, pouvez-vous reconnaître que l'opération était
disproportionnée ? ». Pas très mordant : en droit, une opération disproportionnée est une opération de légitime
défense qui exagère dans ses proportions. Par le choix de ce vocabulaire insidieux, David Pujadas prend donc déjà
la défense du crime israélien. Réponse de l'officiel : « Lorsqu'on voit la violence inouïe déployée par les activistes à
bord du bateau (…) on est amené à dire que les soldats israéliens ont fait preuve d'une retenue et d'une
maîtrise de soi absolument exceptionnelle ». Peut-être M. Pujadas aurait-il pu rebondir sur les propos pour le moins
surprenants de son interlocuteur. Mais le journaliste enchaîne aussi tôt : « N'avez-vous pas renforcé ceux que vous
voulez combattre, le Hamas et ses alliés ? ». Réponse de Daniel Saada, imperturbable : « C'est le contraire qui s'est
passé. L'objectif de cette mission n'était pas humanitaire (…) mais consistait à briser le blocus pour renforcer le
Hamas ». Une idée déjà évoquée précédemment dans un reportage du journal télévisé : la boucle est bouclée.
David Pujadas conclura l'entretien par une troisième et dernière question sur le crédit d'Israël. Le porte-parole
rétorquera que les actions de son gouvernement sont souvent mal interprétées. Au regard de l'étonnant reportage
ayant introduit l'interview, de la torpeur journalistique de M. Pujadas et des réponses psalmodiées par M. Saada, le
téléspectateur sera en droit de se poser des questions sur la spontanéité de l'entretien. Et au regard de l'ensemble
des reportages consacrés à l'attaque de la flottille pour Gaza, n'importe quel esprit critique se posera des questions
Auteur(s) : Grégoire Lalieu Page 3/4La propagande israélienne pirate les ondes de France 2
sur l'indépendance de France Télévisions face à la propagande israélienne.
Le Journal Télévisé de David Pujadas est-il une exception dans le paysage médiatique ? La couverture de l'attaque
de la flottille pour Gaza est-elle une anomalie dans le traitement quotidien du conflit israélo-palestinien ?
Malheureusement, non. Dès qu'il s'agit de ce conflit, la propagande israélienne s'invite dans les médias occidentaux
suivant ces cinq règles de la « propagande de guerre », telles qu'elles sont décrites par Michel Collon dans le livre
Israël, parlons-en ! :
1. Cacher l'Histoire. Avant d'interviewer M. Saada, David Pujadas nous a proposé un reportage sur les raisons du
blocus israélien, « pour bien comprendre ». Pour bien comprendre, il aurait fallu rappeler les causes profondes du
conflit et comment Israël, Etat colonial, occupe des territoires palestiniens en violation du droit international.
2. Cacher les intérêts économiques. Pourquoi un pays se croit-il autorisé à assassiner des membres d'un
équipage humanitaire dans les eaux internationales ? Jusqu'ici, Israël a toujours jouit d'une impunité car il est
soutenu par les plus grandes puissances occidentales, principalement les Etats-Unis. Sa mission ? Jouer le rôle du
gendarme du pétrole dans la région stratégique du Moyen-Orient.
3. Diaboliser l'adversaire. Par la magie de France 2, un convoi humanitaire regroupant diverses ONG, des députés
européens et même un prix Nobel de la Paix s'est transformé en action de déstabilisation politique au service du
Hamas. Le mouvement de résistance palestinien démocratiquement élu étant présenté comme une organisation
islamiste ayant pris le contrôle de Gaza par la force et étant la principale source de conflits.
4. Inverser la victime et l'agresseur. La propagande essaie de nous faire croire que le commando israélien a
perdu le contrôle de la situation, attaqué par une bande d'activistes surexcités. Difficile de savoir ce qui s'est
réellement passé sur les bateaux. Ce qui est clair par contre, c'est qu'Israël a abordé le convoi dans les eaux
internationales. Il s'agit d'un acte de piraterie illégal qui place les activistes pro-palestiniens en situation de légitime
défense.
5. Monopoliser l'info, exclure le vrai débat. La version israélienne a occupé la majeure partie du temps d'antenne
consacré à l'attaque de la flottille. La rédaction de France 2 a tenté de comprendre ce qui s'était passé : les activistes
étaient-ils armés ? Qui a attaqué en premier ? La flottille avait-elle un objectif caché ? Ces questions restent
secondaires et il serait difficile d'y apporter des réponses précises pour l'instant car l'armée israélienne exerce un
contrôle sur l'information. L'élément principal de ces événements, c'est le blocus illégal et inhumain qu'impose Israël
à la population de Gaza. Ne l'oublions pas, des personnes ont payé de leur vie pour essayer de briser cette situation
injustifiable.
Source : michelcollon.info [http://www.michelcollon.info/La-propagande-israelienne-pirate.html]
Auteur(s) : Grégoire Lalieu Page 4/4